c) Les régimes spéciaux doivent être réformés
Il
apparaît indispensable, pour trois raisons principales, de
procéder à une réforme des régimes
spéciaux :
- la dégradation attendue du rapport démographique entre les
cotisants et les retraités aura pour effet de porter les
déséquilibres financiers à un niveau insupportable ;
- les avantages spécifiques des régimes spéciaux,
largement financés par la solidarité nationale, apparaissent
supérieurs à ceux des autres assurés sociaux ;
- les régimes spéciaux ont été volontairement
placés en dehors des champs de la loi portant réforme des
retraites. Ils ne peuvent demeurer indéfiniment à l'écart
de l'effort de l'ensemble des assurés sociaux pour sauver la retraite
par répartition.
L'accentuation prévisible des déséquilibres
financiers des régimes spéciaux à l'avenir risque
d'atteindre un niveau insupportable
Evolution
des soldes par régime
en milliards d'euros 2000
Solde
technique (cotisations-prestations)
|
2000 |
2010 |
2020 |
2040 |
SNCF |
- 2,7 |
- 2,7 |
- 2,7 |
- 3,0 |
IEG |
0,0 |
- 0,7 |
- 1,7 |
- 1,1 |
RATP |
- 0,4 |
- 0,4 |
- 0,6 |
- 0,7 |
Source : COR juin 2001
Les avantages spécifiques des régimes
spéciaux apparaissent de moins en moins justifiés
Plusieurs règles qui différencient le régime
général et les régimes spéciaux sont susceptibles
de procurer un avantage relatif appréciable à ces derniers :
-
les régimes spéciaux permettent des départs
anticipés
- la répartition des départs au
régime général se concentre aujourd'hui autour de deux
âges : à 60 ans, âge minimum légal de la
retraite, et à 65 ans, où le taux plein est acquis quelle
que soit la durée d'assurance ; dans les régimes
d'entreprises, l'âge moyen de départ en retraite est de
53,5 ans à la RATP, de 54,1 ans à la SNCF et de
55,6 ans à EDF-GDF ;
-
l'importance des bonifications d'annuité
- le taux de
liquidation dans les régimes d'entreprises est proche de 70 %
malgré une durée de cotisation limitée :
120 trimestres à la RATP, 130 trimestres à la SNCF et
au régime des industries électriques et gazières
(IEG) ; ceci est dû à l'attribution de bonifications de
durée d'assurance, qui atteignent en moyenne, pour les personnels
masculins, 3,3 ans à la SNCF, 4 ans aux IEG et 5,4 ans à la
RATP ; il en résulte que, dans ces régimes, les
retraités de moins de 60 ans représentent entre 15 et
25 % du total des pensions de droit direct.
Les avantages spécifiques des régimes de
retraite de la SNCF, d'EDF-GDF
|
SNCF |
EDF-GDF |
Calcul de la retraite |
2 %
du salaire moyen (hors primes) sur les six derniers mois d'activité
|
2 %
du dernier salaire (y compris certaines primes)
|
Age minimal de départ en retraite |
55
ans
|
60
ans
|
Nombre d'années de cotisation pour bénéficier d'une retraite à taux plein |
37,5 ans
|
37,5 ans
|
SNCF -
Le départ à la retraite se fait à 55 ans pour les
cheminots et à 50 ans pour les agents de conduite. Les premiers,
ceux qui ont pu commencer à cotiser dès 18 ans, totalisent
alors 37 années de cotisation, et touchent une pension
équivalente à 74 % de leur salaire. Les agents de conduite
(qui ne peuvent cotiser que durant 32 ans) bénéficient d'une
bonification, de sorte que cinq années de cotisation à la
traction comptent pour six. La pension moyenne des retraites de la SNCF est de
1.382 euros mensuels.
RATP - Le calcul est calqué sur celui des fonctionnaires. L'âge de
départ est fixé à 60 ans pour les
« tertiaires », à 55 ans pour les personnels de
maintenance, et à partir de 50 ans pour les roulants s'ils
totalisent 25 ans de service. Le montant moyen des pensions est de
1.642 euros par mois.
Comment réformer les régimes spéciaux ?
La solution ayant les faveurs des organisations syndicales consiste à
augmenter les taux de cotisation. Compte tenu des niveaux très
élevés des avantages spécifiques et des besoins de
financement à venir, nous ne considérons pas ce schéma
comme étant réaliste.
Il nous semble possible, en revanche, de développer une réflexion
sur les axes suivants :
Moderniser la gestion et améliorer la transparence
- créer des organismes de sécurité sociale
spécifiques pour gérer les régimes spéciaux comme
le proposait le plan Juppé. Une telle réforme permettrait
d'associer les représentants du personnel à la gestion du
régime et d'améliorer la lisibilité de la transparence des
comptes ;
- transformer les subventions d'équilibre de l'État en
cotisations de sécurité sociale.
Assurer l'égalité de traitement avec les assurés
du régime général
- transposer l'allongement de la durée d'assurance requise pour
bénéficier d'une pension à taux maximal en faisant baisser
les droits acquis chaque année de 2 % à 1,875 % ;
- revaloriser les pensions sur l'inflation, comme dans le régime
général et - depuis la loi du 21 août 2003 -
dans les trois fonctions publiques.
Maîtriser les dépenses
- agir sur les départs intervenant avant l'âge de 60 ans,
hors cas spécifiques ;
- réexaminer les départs anticipés des
catégories dites actives.
Intégrer progressivement ces régimes dans le cadre du
régime général
.
Il s'agirait ici de fermer aux nouveaux entrants l'accès à ces
régimes spéciaux pour les réserver aux seuls
salariés et retraités actuels de ces entreprises.
*
* *
Le
projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2004 ne
comprend qu'un seul article, l'article 53, consacré à l'assurance
vieillesse et qui fixe l'objectif de dépenses de la branche vieillesse
et veuvage pour 2004 à 146,6 milliards d'euros.
Sous réserve des observations qui précèdent et de
l'amendement qu'elle propose dans le tome IV du présent rapport, votre
commission vous demande d'adopter le projet de loi de financement de la
sécurité sociale pour ses dispositions relatives à
l'assurance vieillesse.