EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le mardi 4 novembre 2003, sous la
présidence de
M. Jean Arthuis
, la commission a procédé
à l'examen des crédits de la jeunesse, de l'éducation
nationale et de la recherche : II - Enseignement supérieur sur le
rapport de
M. Jean-Philippe Lachenaud
,
rapporteur spécial
.
A titre liminaire,
M. Jean-Philippe Lachenaud
, rapporteur
spécial, a souligné les incertitudes attachées aux
statistiques relatives à l'enseignement supérieur, puis il a
rappelé trois éléments de contexte : le rebond des
effectifs d'étudiants, en raison notamment de l'augmentation du nombre
d'étudiants étrangers ; le bon déroulement de la
rentrée universitaire 2003, caractérisé toutefois par
l'accentuation des problèmes de logement pour les
étudiants ; enfin le fait que trois textes législatifs
devaient « remodeler » l'environnement du budget de
l'enseignement supérieur, à savoir la loi organique du
1
er
août 2001 relative aux lois de finances (LOLF),
le projet de loi relatif aux responsabilités locales en cours d'examen
par le Sénat et le projet de loi de modernisation des universités
annoncé pour juin 2004.
Il a ensuite exposé les observations suivantes portant sur le projet de
budget de l'enseignement supérieur pour 2004.
En premier lieu, il s'est félicité des mesures nouvelles de ce
projet de budget, en particulier la progression soutenue des subventions de
fonctionnement aux établissements, l'augmentation du nombre de bourses
de mobilité, la poursuite de la modernisation des bibliothèques
universitaires, l'accélération du désamiantage du campus
de Jussieu et la revalorisation des subventions à l'enseignement
supérieur privé dans le cadre de la politique contractuelle.
En deuxième lieu, il s'est félicité de ce que le projet de
loi de finances pour 2004, conformément aux préconisations
formulées depuis plusieurs années par la commission, se
caractérisait par un transfert de moyens de l'enseignement scolaire vers
l'enseignement supérieur, à hauteur de 100 millions d'euros
selon le ministère de la jeunesse, de l'éducation nationale et de
la recherche.
Il a ensuite indiqué que ce transfert s'effectuait, toutefois, dans un
contexte caractérisé par trois problèmes majeurs :
- la situation « catastrophique » du logement
universitaire, malgré l'accélération de la
rénovation des résidences universitaires, et ce, au moment
où le projet de loi relatif aux responsabilités locales
prévoyait d'en décentraliser la responsabilité ;
- les effets conjugués de divers facteurs tendant à
accroître le coût unitaire de formation des étudiants sans
être toujours bien appréhendés, à savoir
l'augmentation de moitié en cinq ans du nombre d'étudiants
étrangers, qui, répartie, de manière très
inégale, invitait à se demander si certains établissements
n'avaient pas cherché à « gonfler à toute
force » leurs effectifs ; l'allongement de la durée
moyenne des études alors que celle-ci était d'ores et
déjà relativement longue en France ; enfin le
problème persistant de la maintenance du patrimoine universitaire, dont
on n'évoquait plus d'ailleurs la décentralisation, mais seulement
la déconcentration aux universités ;
- l'absence de refonte des critères de répartition des moyens, au
détriment notamment des universités nouvelles, malgré les
observations réitérées de la Cour des Comptes.
Puis il a exprimé la nécessité absolue d'une
amélioration de la gouvernance et d'une autonomie accrues des
universités, tout en soulignant que cette autonomie devait s'accompagner
d'un contrôle de légalité et d'une évaluation
renforcés, et en s'inquiétant du calendrier d'examen du projet de
loi de modernisation des universités.
Enfin, il a détaillé deux leviers de changement :
l'impulsion nouvelle donnée à la construction de l'espace
européen de l'enseignement supérieur au travers notamment de la
diffusion du système dit LMD (Licence-master-doctorat), d'une
part, la mise en oeuvre de loi organique du 1
er
août 2001
relative aux lois de finances, qui devait notamment se traduire par la
création d'une mission interministérielle regroupant
l'enseignement supérieur et la recherche, ce dont il s'est
félicité, d'autre part.
En conclusion, il s'est réjoui de ce que le projet de budget de
l'enseignement supérieur pour 2004 prenne en compte plusieurs
observations formulées l'an passé par la commission, au travers
notamment du transfert de moyens de l'enseignement scolaire vers l'enseignement
supérieur, du redressement du taux de consommation des crédits
d'investissement à la suite de la réforme des procédures
administratives, et de l'introduction d'objectifs et d'indicateurs de
qualité du service et d'amélioration de la gestion dans
le « bleu budgétaire ».
Un débat s'est ensuite ouvert.
En réponse à
M. Jean Arthuis
, président, qui
demandait des précisions quant aux modalités envisagées
pour la mise en oeuvre de la loi organique du
1
er
août 2001 relative aux lois de finances,
M.
Jean-Philippe Lachenaud
, rapporteur spécial, a exposé que le
ministère s'orientait vers l'attribution, aux établissements,
d'une subvention globale, y compris pour la recherche, cette globalisation
devant s'accompagner, selon le ministère, du renforcement des
procédures de contractualisation, dont il convenait toutefois de
rappeler qu'elle présentait toujours des retards importants et que la
Cour des Comptes en avait souligné les limites dans le cadre de son
rapport particulier d'avril 2003 relatif à la gestion du système
éducatif. Il a, d'ailleurs, renouvelé le souhait que cette
globalisation soit « contrebalancée » par le
renforcement du contrôle de légalité et du contrôle
budgétaire effectués par les recteurs, ce qui supposait que
ceux-ci soient « politiquement soutenus » et disposent
enfin d'un personnel qualifié à cet effet.
M. Jean Arthuis
, président, a de même souligné la
nécessité de recruter de vrais gestionnaires pour les
universités, et suggéré que l'enseignement
supérieur bénéficie de transferts de compétences en
provenance de la direction générale de la comptabilité
publique.
En réponse, M
. Jean-Philippe Lachenaud
a approuvé ces
orientations et rappelé que les efforts d'ores et déjà
entrepris devaient être prolongés, pour améliorer la
qualification des personnels administratifs des établissements
d'enseignement supérieur.
Répondant à
M. Jean Arthuis
, président,
M.
Jean-Philippe Lachenaud
, rapporteur spécial, a rappelé les
préoccupations récurrentes de la commission relatives aux
réserves excessives de certaines universités, en déplorant
que la mesure adoptée dans le cadre du projet de loi de finances pour
2003 à l'initiative de la commission des finances du Sénat
tendant à minorer de 2 millions d'euros la progression des subventions
de fonctionnement des établissements disposant de réserves
excessives, ait, en fait, affecté l'ensemble des établissements,
le ministère ayant expliqué qu'il ne disposait pas de
données fiables sur la situation financière de ceux-ci. Il a
ajouté que M. Luc Ferry, ministre de la jeunesse, de
l'éducation nationale et de la recherche, et M. Francis Mer,
ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, avaient
d'ailleurs commandité à l'inspection générale des
finances et à l'inspection générale de l'administration de
l'éducation nationale et de la recherche un rapport conjoint sur la
situation financière des établissements d'enseignement
supérieur.
M. Jean Arthuis
, président, a alors exprimé le souhait que
ce dernier rapport soit transmis « au plus tôt »
à la commission, et il a déploré que le ministère
ne soit pas en mesure de répartir ses subventions de fonctionnement en
fonction de la situation financière réelle de chaque
établissement
M. Roland du Luart
et
M. Jean-Philippe Lachenaud
, rapporteur
spécial, se sont ensuite accordés sur la nécessité
de relever les seuils d'attribution des bourses nationales, en observant
notamment que ceux-ci étaient aujourd'hui fixés à un
niveau relativement bas pour les familles comprenant plusieurs enfants
étudiant dans l'enseignement supérieur.
A cet égard,
M. Jean-Philippe Lachenaud
a par ailleurs
rappelé que M. Luc Ferry avait récemment
évoqué la perspective d'une refonte des dispositifs d'aides aux
étudiants.
M. Roland du Luart
a ensuite observé qu'il avait
été, s'agissant des crédits de l'outre-mer,
confronté aux mêmes difficultés que M. Jean-Philippe
Lachenaud, rapporteur spécial, c'est-à-dire le retard et la
désinvolture de certaines réponses apportées aux
« questionnaires budgétaires », situation que M.
Jean Arthuis, président, a déplorée.
Enfin, confirmant les observations du rapporteur spécial,
M. Jean
Arthuis
, président, et
M. Roland du Luart
, se sont
successivement étonnés de la multiplication, dans certaines
universités, du nombre d'étudiants étrangers inscrits,
dont il semble qu'ils n'aient, en fait, aucune ressource et ne soient, de ce
fait, pas en mesure de poursuivre leurs études dans des conditions
raisonnables.
A l'issue de ce débat, la commission a alors décidé de
proposer au Sénat
d'adopter
les crédits de la jeunesse, de
l'éducation nationale et de la recherche : II - Enseignement
supérieur.
Elle a confirmé cette position lors de sa réunion du jeudi
20 novembre 2003, après avoir pris acte des modifications
apportées par l'Assemblée nationale.