TITRE II
-
INSTRUMENTS D'INTERVENTION
CHAPITRE PREMIER
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Institutions et organismes

Article 4
(art. L. 1417-1 à L. 1417-3, L. 1417-5 et L. 3411-4
du code de la santé publique)
Institut national de prévention et d'éducation pour la santé (INPES)

Objet : Cet article vise à adapter les missions de l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé (INPES) à la nouvelle organisation du système de santé publique proposée par le présent projet de loi.

I - Le dispositif proposé

L'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé a été créé par l'article 79 de la loi du 4 mars 2002 précitée. L'INPES est venu se substituer au Comité français d'éducation pour la santé et s'est vu doté d'une mission d'expertise et de conseil en matière de prévention et de promotion de la santé, ainsi que d'accréditation des organismes de prévention et de promotion de la santé, publics et privés.

Cette évolution avait permis de structurer l'action de l'INPES autour de programmes articulés avec les plans de santé publique que le ministère met en place, alors qu'il n'était auparavant associé qu'à des actions ponctuelles.

Le présent projet de loi propose de conforter l'existence de l'INPES et de recentrer son action sur ses missions principales.

Le paragraphe I de cet article remplace l'intitulé du chapitre VII du titre premier du livre IV de la première partie du code de la santé publique « Politique de prévention » par celui de « Prévention et éducation pour la santé ». Cette modification tient compte de l'extension des responsabilités de l'INPES au domaine de l'éducation pour la santé, introduites par la nouvelle rédaction de l'article L. 1417-4.

Le paragraphe II précise les missions dévolues à l'INPES et qui consistent à :

- mettre en oeuvre, pour le compte de l'État, les programmes de santé publique prévus à l'article L. 1411-6 ;

- exercer une fonction d'expertise et de conseil en matière de prévention et de promotion de la santé ;

- promouvoir le développement de l'éducation pour la santé, sur l'ensemble du territoire.

Ce troisième point est en retrait par rapport aux compétences antérieurement attribuées à l'INPES puisque l'éducation pour la santé n'est plus assimilée à une mission de service public, le Gouvernement ayant considéré qu'il n'était pas opportun d'accorder une autonomie particulière à cette mission qui est déjà une composante de la politique de santé publique. En effet, en application du 5° de l'article L. 1411-1 du code de la santé publique, cette compétence relève de l'État qui, en l'occurrence, en délègue l'exécution à l'INPES mais ne semble pas souhaiter faire de cet Institut son délégataire unique.

Le paragraphe III abroge le pouvoir d'accréditation reconnu à l'INPES. Il paraissait en effet difficile que l'INPES cumule sa fonction d'expertise et de conseil en matière de prévention et de promotion de la santé avec celle d'accréditer les organismes chargés de ces secteurs, car de cette confusion des rôles pouvaient résulter des conflits d'intérêts.

Si sa mission d'accréditation des organismes de prévention publics et privés est ici supprimée, l'INPES demeure chargé d'élaborer des référentiels de qualité dans ce champ. Il convient d'ailleurs de rappeler que cette disposition, dont la suppression est proposée par le présent texte, n'avait pas reçu l'aval du Gouvernement, lors de son adoption à l'Assemblée nationale.

Le paragraphe IV prévoit l'abrogation de l'article L. 3411-4 du code de la santé publique. Comme l'indique l'exposé des motifs du projet de loi, cet article prévoyait la création d'un Institut national de l'enseignement, de la recherche, de l'information et de la prévention sur les toxicomanies. Cet établissement n'ayant jamais été créé et ses missions étant assurées soit par l'Observatoire sur les drogues et les toxicomanies (OFDT) créé en 1993, soit par l'INPES, cet article est devenu sans objet.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté quatre amendements à cet article, dont deux cosignés par le rapporteur de la commission des Affaires culturelles, familiales et sociales et les commissaires membres du groupe socialiste et un présenté par le Gouvernement :

- le premier rétablit la mission de l'INPES en matière de développement de l'éducation pour la santé ;

- le deuxième, déposé par le Gouvernement, précise que l'INPES concourt à la politique de santé publique ;

- le troisième précise que l'INPES apporte son concours à la mise oeuvre des programmes régionaux de l'État ;

- le quatrième procède à des coordinations au sein du code de la santé publique et de la sécurité sociale.

III - La position de votre commission

Votre commission soutient l'effort de coordination accompli par le Gouvernement et l'Assemblée nationale afin de tenir compte des conséquences de la nouvelle rédaction de l'article L. 1411-1 du code de la santé publique qui définit le champ d'action et les conditions d'applications de la politique de santé publique.

Elle se félicite que la collaboration avec l'Education nationale reste un axe fort de l'action de l'INPES.

Elle se réjouit également, compte tenu de la qualité des travaux de l'INPES, que cet organisme participe à la mise en oeuvre des programmes régionaux de l'État, via les groupements régionaux de santé publique comme le prévoit la nouvelle rédaction de l'article L. 1411-5 du code de la santé publique. Chargé de mettre en oeuvre les programmes nationaux, cet Institut aura un rôle capital à jouer au sein des GRSP auxquels il devra apporter son expertise des programmes nationaux et sa compétence en matière de diffusion de l'information. Votre commission veut néanmoins attirer l'attention des pouvoirs publics sur les moyens financiers nécessaires à l'INPES pour faire face à cette mission stratégique et assurer sa présence au sein des GRSP.

Par ailleurs, votre commission vous propose un amendement qui vise à supprimer la référence à l'éducation thérapeutique dans les missions de développement de l'éducation pour la santé. Cette référence, qui tendait à préciser le contenu des missions d'éducation pour la santé confiées à l'INPES, est en effet source de confusion, l'éducation thérapeutique étant traditionnellement délivrée dans les facultés de médecine.

Elle vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 5
(art. L. 1411-14 à L. 1411-19 du code de la santé publique)
Groupement régional de santé publique

Objet : Cet article prévoit la création d'un groupement régional de santé publique (GRSP) chargé d'assurer la mise en oeuvre des plans régionaux de santé publique sous l'égide du représentant de l'État.

I - Le dispositif proposé

Les dispositions de cet article sont parmi les plus importantes et les plus innovantes du texte. Rappelant que la détermination de la politique de santé publique est une compétence de l'État, elles proposent une organisation dont l'objectif est de rassembler les compétences existantes et de les intégrer dans les actions menées dans le cadre des plans et objectifs nationaux. Elles affirment le caractère partenarial de l'exécution de ces plans en réunissant, au sein d'un même groupement, différents partenaires tels que l'Institut national de veille sanitaire, l'INPES, l'assurance maladie ou les collectivités locales.

Comme l'indique l'exposé des motifs : « à terme, ce groupement régional de santé publique a vocation à intégrer une future agence régionale de santé assurant à la fois les missions de santé publique et d'organisation des soins ».

Pour mettre en oeuvre ces dispositions, le paragraphe I du présent article insère au chapitre premier du titre premier du livre IV de la première partie du code de la santé publique six articles mettant en place cette nouvelle instance, constituée sous la forme d'un groupement d'intérêt public (GIP).

Pourtant, au-delà des objectifs annoncés, le périmètre des missions et la composition des groupements laissent craindre que la conciliation de plusieurs objectifs soit source de difficultés majeures.

a) la définition des missions des GRSP

Le projet de loi envisage de confier aux GRSP deux types de missions :

- « assurer la surveillance épidémiologique, l'observation de la santé et les investigations épidémiologiques » ;

- « mettre en oeuvre les programmes de santé contenus dans le plan régional de santé publique. »

Cette dichotomie entre des fonctions de surveillance et d'évaluation d'une part, et de mise en oeuvre des programmes de santé d'autre part, conduit à s'interroger sur la pertinence des missions confiées aux GRSP.

Tout d'abord, on peut trouver singulier que soient confiées des missions de surveillance épidémiologique aux GRSP, alors que cette responsabilité devrait relever à l'évidence des services de l'État, au titre de ses compétences en matière de sécurité sanitaire, et des agences sanitaires.

De la même manière, on peut s'étonner que le groupement se voit confier à la fois des tâches d'évaluation et de mise en oeuvre. Cette confusion des fonctions d'exécution et d'évaluation risque de le placer dans la position difficile d'être à la fois juge et partie.

Il serait sans doute plus pertinent de recentrer les fonctions des groupements régionaux de santé publique sur une mission de pilotage et de coordination, toute entière consacrée à la mise en oeuvre des programmes de santé contenus dans le plan régional de santé publique.

En revanche, on ne peut que se féliciter de l'opportunité offerte aux régions de confier la mise en oeuvre des actions particulières qu'elles souhaiteront promouvoir au groupement de santé publique de leur ressort.

b) la composition des GRSP

La composition du groupement, telle que prévue par le texte initial du projet de loi, rassemble l'État, des établissements publics (InVS, INPES), les unions régionales des caisses d'assurance maladie (URCAM) et les caisses régionales d'assurance maladie (CRAM), les ARH, les régions, les départements, ainsi que, le cas échéant, d'autres collectivités locales ou d'autres structures intervenant dans le domaine de la santé.

Les missions que l'on envisage d'attribuer au groupement ne sont pas sans effet sur la composition qu'il convient de lui accorder. Assurer à la fois des fonctions d'observation de la santé et de surveillance épidémiologique, tout en ayant la charge de la mise en oeuvre du plan régional de santé publique, nécessite de faire siéger au sein d'un même organisme des financeurs (État, collectivités territoriales, organismes d'assurance maladie) et des organismes opérateurs.

Ce rapprochement crée un risque de conflits d'intérêts puisque se retrouvent membres de la même instance des opérateurs appelés à jouer un rôle de maître d'ouvrage opérationnel (élaboration d'appel d'offres, sélection de projets, allocation de budget, passation de commandes), et d'autres, susceptibles d'être bénéficiaires des commandes et exécutants des plans régionaux.

Cette confusion ne constitue pas une garantie d'efficacité au regard des objectifs poursuivis par le présent projet de loi, d'autant que le rétablissement de la Conférence nationale de santé publique et de ses démembrements régionaux, voté à l'Assemblée nationale, a maintenu l'existence d'une instance susceptible de réunir, elle aussi, l'ensemble des acteurs.

D'autres difficultés sont prévisibles. On peut ainsi s'interroger sur le fait de savoir si l'InVS et l'INPES disposent des moyens humains indispensables pour assurer leur présence au sein de chaque groupement régional de santé publique.

Enfin, la rédaction initiale du texte proposait la participation, facultative, des observatoires régionaux de santé publique. Là encore, compte tenu de la qualité d'opérateurs et de prestataires de services des observatoires, on peut s'interroger sur la pertinence de leur participation aux instances décisionnaires du GRSP, alors que leur action pourrait être optimisée comme opérateur ou comme organisme d'évaluation.

c) la présidence des GRSP

Constitué sous la forme d'un groupement d'intérêt public, c'est-à-dire une personne morale dotée de l'autonomie financière qui permet d'associer des partenaires publics, parapublics et privés, le groupement régional de santé publique est administré par un conseil d'administration composé à parité de représentants de l'État et de représentants des autres membres du groupement et présidé par le représentant de l'État dans la région.

Compte tenu de cette situation, et même si aucun acteur ne conteste la légitimité de l'État en matière de santé publique, certains partenaires pourraient redouter d'être considérés comme de simples contributeurs sans possibilité de faire entendre leur voix dans le choix des opérateurs et dans les modalités d'exécution du plan.

Cette organisation, même si elle est induite pas la forme juridique du GIP, qui emporte une composition particulière du conseil d'administration, ne laisse que peu de place aux partenaires de l'État et gomme toute volonté de l'État de mettre en oeuvre, sur le terrain, une politique de partenariat qui structure les actions de santé publique. Ce faisant, elle prête le flan à un reproche d'« étatisation ».

d) les ressources des GRSP

Les ressources du groupement comprennent obligatoirement une subvention de l'État et une dotation de l'assurance maladie.

On touche là à l'un des objectifs majeurs du GRSP, qui a pour but de mutualiser les financements des différents décideurs, de l'État, de l'assurance maladie et des collectivités territoriales. En effet, la dispersion actuelle des financements publics constitue une limite sérieuse à l'efficacité des actions de santé publique. On peut néanmoins s'interroger sur les montants budgétaires qui seront mobilisés, notamment par l'État, et sur le niveau de la contribution financière qui sera versée par l'assurance maladie.

L'avant dernier alinéa de l'article rappelle que la prise en charge des personnes les plus fragiles est un objectif prioritaire de santé publique et que les plans mis en oeuvre au niveau régional ont vocation à contribuer à la lutte contre les inégalités de santé.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

Afin de clarifier les missions de chacun des intervenants au niveau régional et de réaffirmer le rôle du GRSP, qui doit avant tout être une instance exécutive, la commission des Affaires culturelles, familiales et sociales de l'Assemblée nationale a présenté un amendement de réécriture de l'article 5.

Cet amendement comporte plusieurs éléments importants :

- il modifie les missions du GRSP en les recentrant sur la mise en oeuvre des programmes de santé contenus dans le plan régional de santé publique ;

- il précise la composition du GIP ;

- il détermine les ressources du groupement ;

- il fait référence à la notion de personnes les plus démunies et les plus vulnérables.

Cet amendement a été modifié par trois sous-amendements présentés par le Gouvernement :

- le premier précise que le conseil d'administration du groupement régional de santé publique est présidé par le représentant de l'État dans la région ;

- le deuxième prévoit que le directeur du groupement est désigné par le représentant de l'État dans la région et que ce groupement peut, pour remplir les missions qui lui sont dévolues, employer des contractuels de droit privé ;

- le dernier indique que les modalités de fixation et de versement de la dotation de l'assurance maladie sont déterminées par voie réglementaire.

III - La position de votre commission

Votre commission considère que la philosophie retenue par l'Assemblée nationale, recentrant les missions du GRSP sur la mise en oeuvre des plans régionaux de santé publique, est une excellente mesure, tout comme les modifications relatives à la composition des groupements.

Cette logique, qui fait du GRSP un outil de rationalisation financière, ne met toutefois pas suffisamment en exergue la volonté du Gouvernement de développer une politique partenariale.

En effet, le GRSP est chargé de mettre en oeuvre les plans régionaux décidés par le représentant de l'État dans la région. La responsabilité de l'État dans la détermination de la politique de santé publique ne serait donc pas remise en cause par l'introduction d'une dose de partenariat au sein du GRSP qui pourrait, par exemple, se traduire par une liberté laissée au groupement d'élire son président.

Cet assouplissement pourrait être de nature à favoriser la participation des collectivités locales qui seraient sans doute ainsi plus enclines à confier au GRSP la mise en oeuvre des actions particulières décidées par les conseils régionaux.

Il reste que, du fait de la majorité dont l'État dispose au sein du conseil d'administration du GRSP, une telle liberté serait, en réalité, largement théorique.

C'est la raison pour laquelle votre commission vous propose simplement de préciser, par amendement, que les plans régionaux ne sont pas décidés uniquement en se fondant sur l'observation de la santé en région, mais également en prenant en compte les problèmes de santé publique émergents et signalés comme tels par les objectifs nationaux.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

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