Article 39
(art. L. 313-16 à L. 313-18 et
L. 331-5
du code de l'action sociale et des familles)
Fermeture des
établissements médico-sociaux
Objet : Cet article propose d'étendre au président du conseil général le droit de fermer les établissements accueillant des personnes handicapées et accorde, en cas de carence, un pouvoir de substitution d'action au bénéfice du préfet.
I - Le dispositif proposé
En l'état actuel du droit, seul le préfet a le droit de procéder à la fermeture d'un établissement accueillant des personnes handicapées. Cet article propose d'introduire dans le code de l'action sociale et des familles deux changements majeurs : étendre au président du conseil général ce pouvoir de fermeture et créer en contrepartie, en cas de carence de celui-ci, un pouvoir de substitution d'action confié au préfet.
Le paragraphe I propose de modifier l'article L 313-16 qui définit les conditions dans lesquelles intervient la fermeture des établissements accueillant des personnes handicapées. L'actuelle rédaction serait ainsi modifiée sur deux points.
Il s'agit tout d'abord, dans le cadre du 1° de ce paragraphe, de changer la définition de l'autorité prononçant la fermeture : alors qu'aujourd'hui seul le « représentant de l'Etat dans le département » dispose de cette compétence, celle-ci serait attribuée à l'avenir à « l'autorité qui a délivré l'autorisation » d'ouvrir ou d'exploiter un établissement. Cette rédaction désigne en fait à la fois le préfet, dans le cas où l'Etat est seul responsable de l'établissement, le président du conseil général, lorsque l'établissement relève du département, ou ces deux autorités quand il s'agit d'un établissement faisant l'objet d'une double tarification. Le tableau ci-dessous illustre les différents cas de figure possibles.
Tableau récapitulatif de la répartition
des compétences
entre l'État, le conseil général
et l'assurance maladie,
en fonction du type d'établissement
accueillant des personnes handicapées
Type d'établissement |
Financement |
Tarification |
Autorisation |
Contrôle |
Établissements pour enfants handicapés |
Assurance maladie |
Préfet |
Préfet |
Préfet |
Centres d'aide par le travail et Établissements de rééducation professionnelle |
État |
Préfet |
Préfet |
Préfet |
Foyers d'hébergement et foyers occupationnels |
Département |
Département |
Président du conseil général |
Président du conseil général |
Foyers d'accueil médicalisés |
Département pour l'hébergement Assurance maladie pour les soins |
Département pour l'hébergement Assurance maladie pour les soins |
Conjointe du préfet et du président du conseil général |
Conjointe du préfet et du président du conseil général |
Maisons d'accueil spécialisé |
Assurance maladie |
Préfet |
Préfet |
Préfet |
Le 2° de ce paragraphe a pour objet d'ajouter deux alinéas à l'article L 313-16, afin de créer un pouvoir de substitution d'action du préfet, en cas de carence du président du conseil général dans l'exercice de ce nouveau pouvoir. Deux types de situation sont envisagés.
Dans le cas, en premier lieu, où le président du conseil général est seul compétent pour attribuer l'autorisation d'ouvrir et de gérer un établissement accueillant des personnes handicapées, le préfet se voit accorder un pouvoir de substitution d'action :
- en cas de carence, dans les conditions qui seront déterminées par un décret en Conseil d'État ;
- après mise en demeure restée infructueuse ;
- pour fermer un établissement ou un service ;
- lorsque « la santé, la sécurité ou le bien être physique ou moral des personnes bénéficiaires se trouvent compromis » par l'organisation ou le fonctionnement de ce dernier (3° de l'article L. 313-16).
Toutefois, le texte du projet de loi ne prévoit pas de donner ce pouvoir de substitution d'action au préfet dans les deux autres hypothèses recensées et développées à l'article L. 313-16 : lorsque les « conditions techniques minimales d'organisation et de fonctionnement » de l'établissement ne sont pas respectées (1° de l'article L. 313-16) ou si des infractions susceptibles d'engager la responsabilité civile ou pénale des dirigeants ou de la personne morale gestionnaire de l'établissement sont constatées (3° de l'article L. 313-16).
Le second type de situation envisagé est plus simple. Dans le cas où le président du conseil général et le préfet sont tous deux compétents pour délivrer une autorisation d'ouvrir et de gérer un établissement accueillant des personnes handicapées, la décision de fermeture est conjointe, avec, en cas de désaccord entre les deux, la possibilité pour le préfet d'agir seul.
Le paragraphe II propose, comme au I-1° ci-dessus, de remplacer le « représentant de l'État dans le département » par « l'autorité qui a délivré l'autorisation », c'est à dire, selon les cas de figure, aussi bien le préfet que le président du conseil général ou les deux, dans le cadre :
- de l'article L. 313-17, qui définit, en cas de fermeture d'un établissement, l'autorité en charge de prendre « les mesures nécessaires » pour placer les personnes qui y étaient accueillies ;
- et de l'article L 313-18, qui prévoit les modalités suivant lesquelles une autorisation peut être transférée à un autre établissement.
Le paragraphe III apporte une modification à l'article L. 331-5 qui expose les conditions dans lesquelles le préfet dispose, à l'encontre des responsables d'un établissement accueillant des personnes handicapées, d'un pouvoir d'injonction ou, en cas d'urgence, de fermeture à titre provisoire et qui précise qu'il exécute les décisions de fermeture prises par le président du conseil général. Le projet de loi propose de préciser que l'ensemble de ces dispositions ne jouent que « sans préjudice de l'application (de celles) prévues à l'article L. 313-16 » tel que modifié au I ci-dessus. Par conséquent, l'article L. 331-5 continuerait à s'appliquer, mais uniquement dans la mesure où il ne contreviendrait pas à la nouvelle rédaction de l'article L. 313-16.
II - La position de votre commission
Dans le cadre de cet article, le projet de loi propose des changements importants qui s'inscrivent dans la volonté de décentraliser la politique du handicap.
Votre commission souscrit également à l'objectif consistant à renforcer l'efficacité des contrôles sur les établissements accueillant les personnes handicapées, en renforçant les pouvoirs du président du conseil général. Elle observe, à ce titre, que le dispositif proposé rejoint en cela l'une des recommandations formulées l'an dernier par la commission d'enquête du Sénat sur « la maltraitance envers les personnes handicapées accueillies en établissements et services sociaux et médico-sociaux et les moyens de la prévenir » 28 ( * ) .
Elle constate toutefois que le pouvoir de substitution d'action octroyé au préfet, en matière de fermeture en cas de carence du président du conseil général ne joue que dans un seul cas de figure, celui où « la santé, la sécurité ou le bien être physique ou moral des personnes bénéficiaires se trouvent compromis » par l'organisation ou le fonctionnement de l'établissement.
Votre commission considère pour sa part qu'il convient de généraliser ce pouvoir de substitution du préfet et d'instaurer un complet parallélisme avec le pouvoir de fermeture « restitué » par le présent projet de loi au président du conseil général. Aussi vous proposera-t-elle d'adopter un amendement en ce sens.
Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.
* 28 Rapport n° 339 (2002-2003) « Maltraitance envers les personnes handicapées : briser la loi du silence » de M. Paul Blanc, président, et de M. Jean-Marc Juilhard, rapporteur, tome I, p. 112