TITRE II
-
DISPOSITIONS RELATIVES
À LA JOURNÉE DE SOLIDARITÉ

Article 2
(art. L. 212-16, L. 212-17, L. 212-4-2, L. 212-8, L. 212-9
et L. 212-15-3 du code du travail)
Création d'une journée dite « de solidarité »

Objet : Cet article insère dans le code du travail les dispositions relatives à la journée de solidarité pour l'autonomie des personnes âgées et handicapées.

I - Le dispositif proposé

Innovation juridique principale du projet de loi, la création d'une journée de solidarité pour la dépendance constitue le moyen de financer l'extension du champ de la protection sociale sans alourdir les prélèvements obligatoires. Les produits collectés dans le cadre de cette journée sont versés à la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie que le titre III du présent projet propose d'instaurer.

Les dispositions du inscrivent, dans le code du travail, une nouvelle section composée d'un article unique - l'article L. 212-16 - qui décrit les principes et les modalités de cette journée.

Le premier alinéa de cet article répartit les contributions : en contrepartie d'une journée supplémentaire de travail par les salariés, l'employeur acquittera une cotisation de 0,3 % assise sur la masse salariale selon des modalités précisées à l'article 8 du présent projet de loi.

L'équilibre économique de cette disposition tient à ce que cette journée ne donne en principe pas lieu pour l'employeur au versement d'une rémunération supplémentaire . En effet, la plupart des salariés mensualisés, qui bénéficient généralement du paiement du jour chômé auquel s'appliquera la journée de solidarité, ne subiront pas de diminution de leur rémunération. Cette journée ne revêt donc pas, contrairement à ce que certains ont affirmé, le caractère d'une corvée ou d'une taxation en nature, sauf peut-être dans le cas des salariés non mensualisés.

Le deuxième alinéa de l'article L. 212-16 fixe par principe cette journée de solidarité au lundi de Pentecôte , mais il est proposé également, par le troisième alinéa, que les partenaires sociaux puissent choisir un autre jour au moyen d'une convention ou d'un accord collectif.

Cet accord - ou cette convention - pourra ainsi prévoir d'affecter à la journée de solidarité soit un autre jour précédemment chômé, hormis le 1 er mai qui l'est obligatoirement en vertu de la loi, soit un jour de réduction du temps de travail, soit « toute autre modalité » permettant le travail d'un jour précédemment non travaillé.

Les règles régissant les conditions dans lesquelles cette journée ne donne pas lieu à rémunération supplémentaire sont précisées par le quatrième alinéa. Cette absence de rémunération est normalement fixée pour une durée de sept heures, avec les nuances suivantes :

- soit la journée concernée n'était jusqu'alors ni travaillée, ni rémunérée. Dans ce cas, seules d'éventuelles heures de travail excédant les sept premières donnent lieu à rémunération. Il s'agit notamment des salariés non mensualisés ;

- soit la journée était précédemment chômée mais rémunérée. Dans cette hypothèse, majoritaire, le fait de travailler ne donnera pas lieu à rémunération supplémentaire dans la limite des sept premières heures. Au-delà, la rémunération supplémentaire est prévue.

Le cinquième alinéa autorise le chef d'entreprise à fixer la date de la journée de solidarité « par défaut ». Cette éventualité se produit lorsque aucun accord n'a pu aboutir et dans l'hypothèse où le lundi de Pentecôte est déjà travaillé dans l'entreprise. Cette décision n'intervient toutefois qu'après consultation des représentants du personnel.

Le sixième alinéa prévoit le régime applicable aux salariés à temps partiel, pour lesquels la durée de la journée de solidarité est proratisée en fonction de leur durée de travail. Ainsi, un salarié travaillant à mi-temps effectuera une moitié de journée de solidarité.

Le septième alinéa précise le statut des heures de travail effectuées dans le cadre de la journée de solidarité . Celles-ci ne s'imputent ni sur le contingent annuel d'heures supplémentaires, ni sur les heures complémentaires prévues par le contrat de travail. Elles ne sont pas davantage prises en compte pour le calcul du temps de repos compensateur accordé.

Les deux derniers alinéas du projet d'article L. 212-16 précisent :

- que les contrats de travail ne sont pas remis en cause du fait des dispositions du projet de loi . Une précision identique avait été prévue par l'article 30 de la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 relative à la réduction négociée du temps de travail, afin d'appliquer la réduction du temps de travail aux salariés sans renégociation des contrats. Il s'agit ici d'une précision tendant à sécuriser le dispositif : la journée de solidarité est pleinement applicable aux parties sans que celles-ci aient à renégocier d'autres aspects des contrats qui les lient ;

- que les dispositions qu'ils prévoient sont aussi applicables en Alsace-Moselle, alors que les jours fériés prévus par le code professionnel y sont, sauf exception, obligatoirement chômés.

Le paragraphe II supprime le lundi de Pentecôte de la liste des jours fériés. Cette disposition, qui apparaît comme le corollaire de la fixation de principe à cette date de la journée de solidarité, pourrait poser certaines difficultés dans les cas où une autre journée était retenue : en effet, si le lundi de Pentecôte est retiré des jours fériés sans pour autant constituer une journée de solidarité, son chômage pourrait ne plus donner lieu à rémunération, dans l'hypothèse où une convention collective ne la prévoirait pas expressément.

Les paragraphes III et IV tirent les conséquences de l'instauration de cette journée en majorant les durées légales horaires et journalières de travail respectivement de sept heures et d'une journée.

II - Les modifications adoptées à l'Assemblée nationale

En dehors de quelques précisions rédactionnelles, l'Assemblée nationale a adopté au présent article une série de modifications qui, sans porter atteinte à l'économie générale du dispositif, lui apporte quatre correctifs.

Faire du lundi de Pentecôte la journée de solidarité par défaut.

Le dispositif souhaité par le Gouvernement impliquait - dans une optique pédagogique - l'identification d'une journée de solidarité à la suppression d'un jour férié.

La formule initiale du projet fixait donc cette date au lundi de Pentecôte mais elle ouvrait aux partenaires sociaux, eu égard aux impératifs économiques des entreprises, la faculté d'opter pour une date alternative. Cette faculté pouvait être mise en oeuvre par un accord de branche ou d'entreprise ; on considérera, par extension, que cette négociation peut se tenir à l'échelon de l'établissement.

A l'initiative de sa commission des Affaires culturelles, familiales et sociales, l'Assemblée nationale a souhaité faire prévaloir un impératif de souplesse en inversant la logique initiale : désormais, le lundi de Pentecôte n'est déclaré journée de solidarité qu'en cas d'échec des partenaires sociaux à fixer une autre date .

En conséquence, elle a supprimé la référence prévue par le deuxième alinéa de l'article L. 212-16 au lundi de Pentecôte, cette mention n'étant réintégrée qu'à titre supplétif, après la disposition prévoyant que la fixation du jour résulte d'un accord intervenant entre les partenaires sociaux.

Bonnet blanc ou blanc bonnet ? Non. L'approche n'est pas la même car ce changement de posture affiche désormais le souhait de concilier franchement la démarche pédagogique de la mesure (financer la solidarité en travaillant davantage) et son effet utile (prévoir une mesure efficace dans une économie de marché décentralisée).

Distinguer le cas des salariés mensualisés et celui des salariés non mensualisés

Une des difficultés de l'institution d'une journée de solidarité tient à la grande diversité de situation des salariés français.

Or si le premier alinéa de l'article L. 212-16 pose comme principe que la journée de solidarité prend la forme « d'une journée supplémentaire de travail non rémunérée » , il est apparu au Gouvernement qu'elle s'appliquerait différemment aux salariés mensualisés et non mensualisés. En effet, les premiers bénéficient de la rémunération des jours fériés chômés, mais pas les seconds. En conséquence, l'application stricte des dispositions du projet de loi aurait conduit à les faire travailler davantage sans leur octroyer de rémunération correspondante.

Or, l'institution d'une journée de solidarité ne doit pas se traduire par l'absence de toute rémunération - ce qui constituerait alors une « corvée » - mais par l'absence de rémunération supplémentaire.

Dès lors, l'Assemblée nationale a précisé, à l'initiative du Gouvernement, que cette journée de solidarité ne donne pas lieu à rémunération « lorsque le salarié est rémunéré en application de la loi n° 78-49 du 19 janvier 1978 relative à la mensualisation ».

Cette nouvelle rédaction laisse entendre, a contrario , que les salariés non mensualisés sont, en revanche, rémunérés pour cette journée supplémentaire de travail et que, en l'absence de modifications apportées à l'article 8 qui fixent les règles d'assujettissement à la « contribution de solidarité » , leurs employeurs sont contraints d'acquitter deux fois la rémunération correspondante : la première sous forme de salaire, la seconde sous forme d'une taxe. Cette interprétation, qui est celle de votre commission, est à balancer du fait de l'absence de modification du premier alinéa de l'article L. 212-16, qui dispose toujours, par principe, que la journée « prend la forme d'une journée supplémentaire de travail non rémunéré ».

Adapter la fixation de la date de la journée de solidarité au cas des salariés travaillant à temps partiel

Le dispositif initial du projet de loi prévoit l'assujettissement des salariés à temps partiel à l'obligation générale de solidarité mais ne précise pas les conditions dans lesquelles est fixée la date de leur journée.

Prévoir systématiquement une date identique à celle retenue pour l'ensemble du personnel de l'entreprise ne constituait pas une solution satisfaisante, ne serait-ce que parce que celle-ci pouvait être fixée un jour où, habituellement, le salarié ne travaille pas et qu'il consacre à la garde ses enfants, à la poursuite d'études ou à un emploi dans une autre entreprise.

Aussi l'Assemblée nationale a-t-elle proposé d'établir une procédure particulière de détermination de la journée de solidarité pour ces salariés : dans le cas où la journée choisie pour l'ensemble de l'entreprise est fixée un jour où le salarié ne travaille ordinairement pas et que travailler ce jour-là n'est pas compatible avec ses obligations familiales, le suivi d'un enseignement ou la poursuite d'une autre activité professionnelle, alors le chef d'entreprise déterminera, après avis des représentants du personnel, une autre date pour l'exécution de cette journée.

Fixer des règles évitant qu'un salarié ne se trouve contraint d'effectuer deux journées de solidarité dans l'année

A l'évidence, l'institution d'une journée annuelle de solidarité, dont la date sera fixée de manière décentralisée, suscitera le cas où certains salariés se trouveront amenés à effectuer une deuxième contribution au cours de la même année parce qu'ils ont changé d'employeur.

Aussi l'Assemblée nationale a-t-elle prévue que ces salariés pourront choisir soit de refuser d'effectuer la seconde journée, soit de l'effectuer. Dans cette dernière hypothèse, ladite journée donnera lieu au paiement d'un salaire et à l'imputation des heures sur le contingent annuel d'heures supplémentaires.

III - La position de votre commission

Outre les considérations générales précédemment exposées, votre commission se propose de formuler trois observations et une préoccupation à l'occasion de l'examen de cet article pour :

Trouver un équilibre dans les assouplissements

Le lundi de Pentecôte, férié depuis la loi du 8 mars 1886 à la demande du secteur bancaire, est l'occasion de nombreuses activités publiques ou privées : féria, manifestations religieuses ou d'éducation populaire. Il serait regrettable qu'une disposition trop rigide conduise à leur disparition et votre commission souhaite que, suivant les secteurs d'activité, une date adéquate puisse être trouvée.

Les modifications apportées par l'Assemblée nationale ne modifient pas fondamentalement l'économie du dispositif sur ce point. Choisir le lundi de Pentecôte par défaut traduit à l'évidence un souci de souplesse bienvenu mais n'offre pas d'options supplémentaires aux partenaires sociaux.

Pour autant, il serait hautement préjudiciable qu'une autre voie soit envisagée par le biais d'une disposition, prévue par le texte initial, et dont la rédaction demeure obscure : celle qui dispose que l'accord pourra prévoir que la journée de solidarité sera effectuée par « toute autre modalité » . Sur son fondement, des propositions ont été formulées à l'Assemblée nationale pour autoriser les partenaires sociaux à prévoir, par accord, que la journée puisse être exécutée de manière fractionnée , sous forme d'heures.

Une telle faculté aurait abouti à retirer toute portée symbolique à la journée de solidarité : les salariés l'exécutant par tranches horaires n'avaient plus véritablement conscience que le temps travaillé est uniquement consacré au financement de la dépendance.

Cette disposition doit dès lors être entendue dans son sens strict comme « toute autre modalité » permettant d'exécuter une journée dans son entier et en une seule fois. Cette interprétation restrictive exclut également que l'équivalent de sept heures puisse être déduit du compte épargne temps du salarié en guise d'acquittement de son obligation.

Tenir compte du statut des travailleurs mineurs

Les dispositions initiales du projet de loi supprimaient la mention faite au lundi de Pentecôte dans la liste des jours fériés. Or, cette suppression permettait d'assujettir à la journée de solidarité les plus jeunes des salariés et les apprentis, puisque l'article L. 222-2 du code du travail dispose que « les jeunes travailleurs et les apprentis âgés de moins de dix-huit ans ne peuvent être employés les jours de fête reconnus par la loi » .

En rétablissant le caractère férié du lundi de Pentecôte, l'Assemblée nationale a-t-elle souhaité les exonérer ipso facto de l'exécution de cette journée ? La réponse à cette question dépendra des choix qui seront faits dans les entreprises. En toute hypothèse, les jeunes travailleurs pourront effectuer cette journée de solidarité lorsqu'un accord collectif fixera sa date à un jour non férié.

Organiser l'articulation de la journée de solidarité et du droit de grève

Votre commission s'est interrogée sur l'éventualité d'une action de grève conduite le jour de la journée de solidarité. Cette journée ne donnant pas lieu à rémunération supplémentaire, l'employeur serait-il fondé à procéder à une retenue sur salaire en cas d'inexécution par le salarié de ses obligations professionnelles ? Dans la négative, la grève pourrait permettre de faire obstacle au dispositif.

En l'état, elle conclut par la négative pour deux raisons. La première tient au fait que seule est légale et protégée une grève fondée sur des revendications professionnelles qui n'aboutit pas à l'autosatisfaction des revendications des grévistes. Si la contestation est fondée sur le principe même de la journée ou sur l'absence de rémunération qu'elle entraîne, le fait par le salarié de faire grève ce jour-là aboutit de facto à l'autosatisfaction de sa revendication. Il faudra donc que cette grève soit fondée sur un autre motif.

Le second motif se fonde sur la règle suivant laquelle la retenue des heures non travaillées est calculée sur une base horaire rapportée au nombre d'heures effectuées dans le mois considéré. La mensualisation des salaires empêche toute analogie entre la journée elle-même et la retenue qui serait pratiquée si elle faisait l'objet d'une grève.

Améliorer le régime applicable aux salariés à temps partiel

Votre commission vous propose d'adapter et de simplifier la procédure prévue pour la fixation de la journée de solidarité des salariés à temps partiel. Si la journée fixée dans le cadre de l'entreprise n'est pas compatible avec la situation particulière du salarié, il lui semble opportun que l'employeur détermine un autre jour après consultation du salarié lui-même, plutôt qu'après l'avis des représentants du personnel.

Votre commission vous propose d'adopter cet amendement et l'article ainsi modifié.

Article 3
(art. L. 713-14, L. 713-15 et L. 713-19 du code rural)
Application de la journée de solidarité au secteur agricole

Objet : Cet article précise les conditions d'application de la journée de solidarité dans le secteur agricole.

I - Le dispositif proposé

Adopté sans modification par l'Assemblée nationale, le présent article insère au sein du code rural la mention de l'article L. 212-16 du code du travail, afin d'étendre l'application de la journée de solidarité aux salariés relevant de ce code (1°).

Il porte en conséquence à 1.607 heures la durée légale annuelle du travail prévue par le code rural (2°).

II - La position de votre commission

Si votre commission trouve parfaitement justifiée l'application du dispositif de solidarité au secteur agricole, elle s'interroge sur les raisons qui pourraient s'opposer à une extension similaire aux salariés relevant du code du travail maritime, ainsi qu'aux salariés des territoires d'outre-mer.

Sous cette réserve, votre commission vous propose d'apporter à cet article une amélioration rédactionnelle, puis de l'adopter ainsi amendé.

Article 4
Adaptation des stipulations conventionnelles relatives
au lundi de Pentecôte

Objet : Cet article précise la valeur juridique future des stipulations conventionnelles relatives au lundi de Pentecôte

I - Le dispositif proposé

Les dispositions proposées par cet article s'inscrivent dans la continuité de celles prévues à l'article 2. Son objet est de rendre nulles, à l'entrée en vigueur de la présente loi, les dispositions figurant actuellement dans des accords collectifs et prévoyant le chômage et la rémunération du lundi de Pentecôte.

En effet, si ces dispositions conservaient leur valeur juridique, elles pourraient s'opposer à l'institution d'une journée de solidarité, en stipulant que le lundi de Pentecôte demeure chômé et rémunéré.

Le dispositif prévoit toutefois l'exception retenue par l'article L. 212-16 du code du travail lui-même, pour le cas où, par un accord collectif, les partenaires sociaux fixeraient la journée de solidarité à une autre date que le lundi de Pentecôte.

II - Les modifications adoptées à l'Assemblée nationale

Dans la logique de la position adoptée à ce sujet, l'Assemblée nationale a procédé à la réécriture de cet article afin que la nullité des accords collectifs prévoyant le chômage du lundi Pentecôte n'intervienne qu'à défaut de la fixation d'une date alternative par les partenaires sociaux dans le cadre d'une nouvelle convention.

Son rapporteur observait ainsi que « l'objectif de cet article est double : il est d'abord de permettre que le lundi de Pentecôte puisse être travaillé et ne donne pas lieu à rémunération supplémentaire, y compris en l'absence de renégociation des clauses conventionnelles contraires ; il est ensuite d'éviter que les nouveaux accords conclus sur le fondement de l'article L. 212-16 ne tournent pas la loi en prévoyant le statu quo s'agissant du lundi de Pentecôte sans prévoir de jour de substitution pour la journée de solidarité. La journée de solidarité doit en tout état de cause être prévue. Cet article permet donc la mise en oeuvre, nonobstant les dispositions conventionnelles contraires, de la journée de solidarité dans des conditions garantissant qu'une journée de travail supplémentaire sera réalisée et que les entreprises seront ainsi en mesure de s'acquitter de leur contribution destinée au financement des actions en faveur des personnes en perte d'autonomie ».

III - La position de votre commission

Souscrivant en tout point à cette analyse, votre commission s'interroge néanmoins sur la portée d'un article qui pourrait priver les entreprises de la faculté qui leur est offerte de dispenser leurs salariés d'accomplir, le cas échéant, la journée de solidarité.

En l'état, on ne peut présumer des résultats des négociations qui seront menées dans les différents secteurs, ni sous-estimer les obstacles s'opposant à leur réussite. Des discussions interviendront probablement dans le cadre de négociations plus globales et il est vraisemblable que certaines entreprises trouveront intérêt, moyennant contrepartie, à conclure une telle dispense.

Bien que contraire à l'objectif pédagogique assigné à la journée de solidarité, cette hypothèse n'aurait en revanche pas pour effet d'exonérer lesdites entreprises du paiement de la contribution afférente prévue par l'article 8. En effet, ses dispositions ne subordonnent pas le versement de la taxe à la réalisation effective d'une journée de solidarité.

Par ailleurs, votre commission estime utile de mieux préciser la portée de cet article.

En effet, il convient de préciser que les stipulations des conventions et accords collectifs prévoyant le chômage du lundi de Pentecôte ne sont pas rendues de « nul effet » mais simplement « inopposables », dans l'hypothèse où les partenaires sociaux parviendraient ultérieurement à fixer la journée de solidarité à une autre date que le lundi de Pentecôte.

En outre, il est également nécessaire de prévoir des dispositions similaires dans le cas où une convention ou un accord collectif prévoirait le travail d'une journée en application d'une disposition conventionnelle antérieure.

Sous le bénéfice de ces observations, votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

Article 5
Adaptation des stipulations conventionnelles et des clauses contractuelles à la modification de la durée du travail liée à la création
de la journée de solidarité

Objet : Cet article majore les durées conventionnelles et contractuelles relatives à la durée légale annuelle de travail.

I - Le dispositif proposé

Comme l'article précédent, le présent article vise à adapter les stipulations conventionnelles ou contractuelles régissant la durée du travail dans les entreprises.

Ainsi le paragraphe I prévoit la majoration de sept heures par an :

- des durées maximales de travail en cas de recours à la modulation (articles L. 212-8 du code du travail et L. 713-14 du code rural) ;

- des durées maximales au-delà desquelles les heures effectuées relèvent du contingent d'heures supplémentaires (article L. 212-9 du code du travail) ;

- les durées maximales de la durée de travail des cadres régis par une convention de forfaits en heures (article L. 212-15-3, II du code du travail).

Il prévoit en outre une majoration d'un jour du nombre maximal de journées de travail effectuées par les cadres régis par une convention de forfait annuel en jours.

Le paragraphe II prévoit une majoration de la durée annuelle du travail, si celle-ci relève de dispositions conventionnelles ou contractuelles pour les salariés affiliés à un régime de temps partiel annualisé. Cette majoration est proportionnelle à ladite durée contractuelle.

II - Les modifications adoptées à l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté trois amendements précisant que la modification apportée par cet article aux stipulations susmentionnées ne s'applique qu'à celles figurant dans des conventions, accords ou contrats antérieurs à l'entrée en vigueur de la présente loi. Cette nouvelle rédaction tient compte du fait que les dispositions conventionnelles et contractuelles relatives à la durée du travail qui seraient postérieures à cette entrée en vigueur intégreront l'augmentation de la durée du travail qu'implique la mise en place de la journée de solidarité.

III - La position de votre commission

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 6
Application de la journée de solidarité dans les fonctions publiques

Objet : Cet article précise les modalités d'application de la journée de solidarité dans les trois fonctions publiques.

I - Le dispositif proposé

Le présent article prévoit les conditions d'application de la journée de solidarité aux trois fonctions publiques : fonction publique de l'État, fonction publique territoriale et fonction publique hospitalière ainsi que, par extension, les conditions dans lesquelles les professionnels de santé travaillant dans les établissements publics y sont également soumis.

Par un simple renvoi à l'article L. 212-16 du code du travail et sans dérogation possible, la journée de solidarité est fixée au lundi de Pentecôte dans l'ensemble du secteur public.

II - Les modifications adoptées à l'Assemblée nationale

A l'initiative de sa commission des Affaires culturelles, familiales et sociale, l'Assemblée nationale a adopté un amendement offrant une plus grande latitude d'action aux gestionnaires publics.

Cette nouvelle rédaction donne le pouvoir de fixation de la journée de solidarité au directeur de la structure ou à l'élu de la collectivité concernée. Ainsi, dans la fonction publique territoriale, cette journée sera choisie par une délibération de l'organe exécutif, par les directeurs des établissements de santé dans la fonction publique hospitalière et par un arrêté du ministre compétent dans la fonction publique d'État.

La date retenue aura fait l'objet d'une consultation pour avis des comités techniques paritaires concernés. Ce n'est qu'en cas de carence de l'autorité compétente, lorsque celle-ci n'aura pas déterminé la date de la journée de solidarité avant le 31 décembre de l'année précédente, que le choix se portera automatiquement sur le lundi de Pentecôte.

La commission des Affaires culturelles, familiales et sociales avait initialement prévu une disposition dérogatoire pour l'éducation nationale, proposant que la journée de solidarité puisse être effectuée de manière fractionnée, à concurrence de sept heures réparties sur l'année scolaire. Ces heures auraient ainsi pu consister en des séances d'éducation civique ou des actions de soutien scolaire.

Toutefois, l'Assemblée nationale a préféré retenir une rédaction d'origine gouvernementale, prévoyant que, dans les écoles et établissements de l'éducation nationale, la journée de solidarité est arrêtée par les recteurs après avis du CTP académique.

III - La position de votre commission

La philosophie ayant inspiré la création d'une journée solidarité pour financer l'autonomie des personnes âgées et handicapées commande à l'évidence que le secteur public, malgré ses spécificités, soit assujetti à la mesure. En outre, son exonération aurait réduit l'assiette du prélèvement dans de telles proportions que la ressource finalement disponible se serait révélée insuffisante pour financer l'intégralité du plan.

Même si les modalités de négociations avec les organisations représentatives du personnel dans la fonction publique excluent la mise en oeuvre d'un dispositif comparable à celui ouvert dans le secteur privé, votre commission estime qu'un assouplissement minimal du texte initial était nécessaire.

En effet, le succès de la journée de solidarité reste subordonné à son effet utile : sa vertu pourrait être attaquée, sa crédibilité contestée, voire son apport mis en doute si elle aboutissait à maintenir des agents publics sur leur lieu de travail sans que leur présence réponde à une véritable demande. Aussi, afin d'intégrer cette journée dans le projet des établissements et des collectivités concernées, l'Assemblée nationale a opportunément prévu qu'il revienne à l'autorité en charge de la gestion de ces personnels de fixer la date de ladite journée.

Finalement, le dispositif proposé pourrait se révéler avantageux pour l'organisation du service public. En cas d'échec de la négociation dans le secteur privé, la journée est fixée au lundi de Pentecôte. Dans le secteur public, il appartient à l'autorité compétente de décider de ce jour dans les délais fixés par la loi sans que ce choix soit subordonné à la conclusion d'un accord contractuel. A cet égard, les dispositions désormais prévues pour la fonction publique ne sont-elles pas plus souples que pour le secteur privé ?

Votre commission formulera enfin deux remarques relatives à l'éducation nationale, à l'appui des deux amendements qu'elle présente à cet article.

La rédaction adoptée en l'espèce par l'Assemblée nationale ne fait pas référence aux établissements et écoles relevant d'autres ministères que l'éducation nationale, qu'il s'agisse de l'agriculture, de la santé, de l'industrie, de la défense, etc.). Sans doute, leurs spécificités justifient que la journée solidarité les concernant soit fixée directement par les ministres de tutelle.

Votre commission s'interroge, en outre, sur la pertinence qu'il y aurait à organiser la tenue d'enseignements durant la journée de solidarité. D'une part, la présence des élèves entraîne des coûts significatifs en matière de transport scolaire pour les départements ou de cantines, qu'il importe de limiter. D'autre part, si les résultats de la négociation collective font que le lundi Pentecôte demeure chômé pour la majorité des salariés, il serait préférable que les enfants continuent de bénéficier d'un congé en même temps que leurs parents. Elle vous propose donc d'ajouter la journée de solidarité aux jours de travail du personnel enseignant se déroulant en dehors de la présence des élèves.

Votre commission vous demande d'adopter cet article ainsi amendé.

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