ANNEXE
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LES DÉTERMINANTS MACRO-ÉCONOMIQUES
DES DÉPENSES DE SANTÉ

Les déterminants macro-économiques des dépenses de santé :

comparaison entre quelques pays développés

Catherine BAC

CEPII

Version 6 juillet 2004

Table des matières

1. Les dÉpenses de santÉ en Europe et aux États-Unis 216

1.1. LES ÉVOLUTIONS RÉCENTES 216

1.2. LE FINANCEMENT DES DÉPENSES 221

1.3. LES RÉFORMES DES SYSTÈMES DE SANTÉ 223

a. Le recours à la concurrence 223

b. La décentralisation 224

1.4. LES SYSTÈMES DE SANTÉ AUJOURD'HUI 227

1.5. LE « PARCOURS-TYPE » DES MALADES 230

a. La France 230

b. Les Pays-Bas 230

c. Le Royaume-Uni 231

d. La Suède 232

2. Les facteurs de croissance des dépenses de santé 232

2.1. UN EXAMEN RÉTROSPECTIF DES DÉPENSES DE SANTÉ 232

a. Les facteurs explicatifs 233

b. Quelques évaluations empiriques 239

2.2. PROJECTIONS DE DÉPENSES DE SANTÉ 245

a. L'effet du vieillissement de la population 246

b. Projection des tendances des dépenses à moyen terme 257

3. CONCLUSION 268

BIBLIOGRAPHIE 270

Dans les pays européens, la majeure partie du financement des dépenses de santé est publique. Dans un contexte de ralentissement de la croissance et de limite du déficit public, le rythme soutenu de la croissance des dépenses de santé pose un problème de financement. Des réformes ont été engagées pour essayer de réguler ces dépenses.

Les politiques de régulation ont généralement trois objectifs : la maîtrise des coûts, l'efficience et l'équité du système de santé. Dans cette étude, on s'intéresse à l'effet des réformes sur les coûts. La comparaison internationale effectuée ici a donc uniquement un caractère positif (un pays dépense plus qu'un autre) et non normatif (le système de santé d'un pays est-il meilleur que celui d'un autre ?). Elle permettra de situer le niveau et le taux de croissance des dépenses de santé de la France par rapport à ses voisins européens, et de voir quels enseignements on peut tirer des expériences étrangères. En particulier, si l'organisation du système a un réel impact sur les dépenses.

Dans une première partie descriptive, les tendances récentes d'évolution des dépenses de santé sont présentées. Ces tendances sont complétées par une présentation des systèmes de santé et des principales caractéristiques des réformes mises en oeuvre. Dans une seconde partie, un exercice de projection des dépenses à moyen terme est effectué en accordant une attention particulière aux évolutions démographiques.

I. 1. Les dÉpenses de santÉ en Europe et aux États-Unis

A. 1.1. LES ÉVOLUTIONS RÉCENTES

L'évolution des dépenses est analysée à partir des données de l'OCDE 29 ( * ) . Elles concernent sept pays européens (Allemagne, Espagne, France, Italie, Pays-Bas, Royaume-Uni et Suède) ainsi que les Etats-Unis sur la période 1970 à 2001. Les pays européens sont retenus sur la base de leur représentativité (en termes de réforme et d'organisation) mais aussi en raison de la disponibilité des données.

Il s'agit des dépenses totales de santé au sens de l'OCDE, qui regroupent les dépenses hospitalières, les dépenses de médecine ambulatoire ainsi que les dépenses en biens médicaux et en pharmacie. Ces dépenses peuvent avoir différents modes de financement (financement public, assurances privées ou bien encore paiement direct par les ménages). Même si des efforts concernant l'homogénéité des séries ont été réalisés par les comptables nationaux des pays de l'OCDE, les résultats de ce type de comparaison doivent toujours être considérés avec prudence en raison des différences de méthodologie entre les pays et au cours du temps.

Comme le montrent les tableaux 1 et 2 ci-dessous, les dépenses de santé ont, dans les années soixante-dix, augmenté en volume à un rythme plus rapide que le PIB, et leur part dans le PIB a augmenté dans tous les pays de l'échantillon. Dans les années 1980, les dépenses ont ralenti partout sauf aux Etats-Unis, suite en particulier à une première vague de réformes en Europe dans la seconde moitié des années 1980. Mais cela n'a pas suffi à stopper la progression des dépenses en pourcentage du PIB, car la croissance économique elle-même ralentissait. Ce mouvement s'est poursuivi dans les années 1990. Les dernières données publiées montrent pour plusieurs pays une croissance plus forte des dépenses en volume en 2000 et 2001, que l'on peut relier à la bonne conjoncture de l'année 2000. Au total, les dépenses de santé ont suivi les inflexions de la croissance économique, mais avec un rythme moyen plus élevé, et les dépenses de santé en % du PIB ont augmenté de 2 à 6 points entre 1970 et 2000, la meilleure performance (2 points) ayant été obtenue par les Pays-Bas et la Suède, la moins bonne (6 points) par les Etats-Unis.

Tableau 1 : Taux de croissance annuels moyens des dépenses de santé en volume, en %*

Allemagne

Espagne

France

Pays-Bas

Royaume-Uni

Suède

Italie

Etats-Unis

1970-1979

6,6

8,6

6,3

3,9

4,2

4,7

5,6

1980-1989

2,1

4,6

4,1

2,8

3,6

1,9

6,2

1990-1999

2,4

4,5

2,6

3,9

4,1

2,0

1,7

4,5

2000-2001

2,1

3,5

4,2

3,7

5,3

4,4

6,1

5,5

dépenses nominales déflatées par le prix du PIB

Tableau 2 : Part des dépenses de santé dans le PIB, en %

Allemagne

Espagne

France

Pays-Bas

Royaume-Uni

Suède

Italie

Etats-Unis

1970

6,2

3,6

5,6

6,9

4,5

6,7

6,9

1980

8,7

5,4

7,3

7,5

5,6

8,8

8,7

1990

8,5

6,7

8,6

8

6

8,2

8,0

11,9

2000

10,6

7,5

9,3

8,6

7,3

8,4

8,2

13,1

Notes : Allemagne de l'ouest jusqu'en 1990 ; pour la France les données antérieures à 1990 ont été approximées à partir de la rétropolation des Comptes de la Santé (2003) ; pour les Pays -Bas 1972 au lieu de 1970.

Source : Eco-Santé 2003.

La hausse de la part des dépenses de santé dans le PIB peut résulter d'une augmentation en volume plus rapide que celle du PIB ou de l'évolution des prix relatifs de la santé par rapport à ceux du PIB. Les gains de productivité étant limités dans le secteur de la santé, on s'attend à une hausse tendancielle du prix relatif des biens du secteur de la santé par rapport au prix du PIB, qui renforce les évolutions en volume. Cependant certaines réformes telles que la mise en concurrence des offreurs de soins peut aussi faire évoluer vers le bas les prix dans ce secteur. Le graphique 1 décompose l'évolution du rapport des dépenses de santé au PIB entre un effet volume et un effet prix relatif. La méthode est décrite dans l'encadré 1.

Selon les pays, l'un des deux facteurs - volumes ou prix relatifs - joue un rôle prépondérant. En France, la croissance du volume explique l'augmentation de la part des dépenses de santé dans le PIB tandis qu'au Etats-Unis, en Italie et au Royaume-Uni sur la fin de la période, la dérive des prix de la santé par rapport au prix du PIB est le facteur prépondérant.

Encadré 1 : décomposition de l'augmentation du rapport entre dépenses de santé et PIB

On note S les dépenses de santé en volume, P s l'indice de prix du secteur santé, Y le PIB en volume et P l'indice de prix du PIB. La part des dépenses de santé dans le PIB s'écrit :

p désigne le prix relatif d la santé ( p=P s /P ) et s est la part des dépenses en volume dans le PIB en volume ( s=S/Y ). L'évolution du rapport des dépenses en valeur sur le PIB en valeur s'écrit alors :

où est l'opérateur de variation d'une date à l'autre. Le graphique 1 retrace l'évolution du ratio des dépenses de santé sur le PIB ( q ) ainsi que de ses deux composantes : l'effet volume ( ps cumulé) et l'effet prix relatifs ( sp cumulé).

1. Graphique 1 : Contribution des prix et des volumes à l'évolution de la part des dépenses de santé dans le PIB

_______ Effets prix relatifs

_ _ _ _ _ Dépenses de santé en part de PIB

----------- Effet du volume

Ces mouvements volume-prix peuvent résulter des méthodes statistiques du partage « prix-volume » (par exemple, le renchérissement d'un acte peut être attribué à une augmentation du volume alors qu'il s'agit d'une amélioration de la qualité). Mais ce mouvement peut aussi s'interpréter économiquement (une baisse du prix des médicaments stimule leurs ventes ou bien, en cas de baisse du prix de la consultation, les médecins augmentent leur nombre afin de s'assurer un revenu constant).

Tant que le traitement statistique du partage prix-volume n'est pas transparent, on peut juste conclure que dans les pays où la hausse du prix relatif est forte, la croissance des volumes est plus faible que dans les pays où l'indice des prix relatifs est plus stable. Dans tous les cas, il faut tenir compte des deux facteurs dans un modèle explicatif des dépenses de santé.

* 29 Base Eco-Santé 2003.

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