SECONDE PARTIE : LE PROJET DE BUDGET DES COMMUNAU TÉS EUROPÉENNES POUR 2005

I. LE NOUVEAU CADRE JURIDIQUE ET FINANCIER DU BUDGET : UN ENJEU AU CENTRE DE L'AVENIR DE L'UNION EUROPÉENNE

A. LES PROGRÈS INSUFFISANTS DU TRAITÉ CONSTITUTIONNEL

Le projet de Constitution européenne, révisé après l'échec de la réunion de décembre 2003 sous présidence italienne, a finalement été approuvé à l'unanimité le 18 juin 2004 par les chefs d'Etat et de gouvernement de l'Union à 25. La plupart des acquis de la Convention sont préservés (personnalité juridique de l'Union, fin de la structure en piliers, distinction entre compétences exclusives, compétences partagées et compétences d'appui, etc.), et sur le plan budgétaire, le traité constitutionnel permet de mettre fin à une pratique institutionnelle pérennisée (tels les accords interinstitutionnels), mais qui ne reposait sur aucun fondement juridique. Ses dispositions, qui en l'attente d'une ratification préalable par tous les membres de l'Union n'entreront probablement pas en vigueur avant 2007, demeurent peu nombreuses quoiqu'importantes :

- les perspectives financières sont consacrées et rebaptisées « cadre financier pluriannuel » (article 54 du traité), mais sa périodicité demeure d'ordre législatif. Les discussions se sont concentrées sur la procédure d'adoption - le Parlement européen craignant d'être écarté du processus - et ont finalement abouti au choix d'une adoption à l'unanimité du Conseil, après approbation par le Parlement européen qui se prononce à la majorité de ses membres. Il y a néanmoins là un facteur de blocage, en deçà des attentes françaises, car on peut douter qu'une Europe élargie à 25 puis 27 membres en 2007 puisse sans risque de paralysie ou de dysfonctionnement majeur continuer durablement de recourir à l'unanimité pour les principales décisions relatives à son financement. Le point 4 de l'article 54 prévoit cependant que l'adoption du cadre financier pluriannuel pourra passer à la majorité qualifiée si le Conseil en décide ainsi préalablement, à l'unanimité ;

- la recherche d'une plus grande efficacité et simplicité de la procédure budgétaire annuelle , tout en préservant le principe de la codécision entre le Conseil et le Parlement. Le nombre de lectures est ainsi réduit de deux à une, et la distinction entre dépenses obligatoires et non obligatoires 34 ( * ) est supprimée. Le projet de la Convention prévoyait initialement un mécanisme de majorité renforcée des 3/5 e au Parlement européen, permettant à ce dernier d'avoir le dernier mot contre l'avis du Conseil. Cette disposition, combattue par la France, a été abandonnée au profit d'un comité de conciliation réunissant les représentants des deux autorités en cas de désaccord, afin de ne pas marginaliser le Conseil dans la procédure.

Outre l'adoption à l'unanimité du cadre pluriannuel, le traité constitutionnel apparaît insuffisamment ambitieux s'agissant du financement de l'Union . Si le traité s'inspire opportunément de la proposition française de séparation en deux étapes de la « décision ressources propres » 35 ( * ) , l'unanimité, qui aurait légitimement dû être circonscrite aux décisions engageant durablement les finances nationales, demeure la procédure de droit commun pour les décisions relatives au financement de l'Union , notamment sous la pression du Royaume-Uni soucieux de conserver un droit de veto sur l'avenir de son « chèque », la majorité qualifiée n'intervenant plus que par délégation.

La question de la création d'un impôt européen demeure ouverte, faute de fondement juridique explicite : le point 3 de l'article 53 dispose qu' « une loi européenne du Conseil fixe les dispositions applicables au système de ressources propres de l'Union ; il est possible dans ce cadre d'établir de nouvelles catégories de ressources propres ou d'abroger une catégorie existante », ce qui permet potentiellement la création d'un tel impôt mais ne statue pas sur son opportunité.

* 34 Les dépenses non obligatoires, qui représentent environ 60 % du budget, sont celles pour lesquelles le Parlement européen détient le dernier mot.

* 35 Un premier « étage » décidé à l'unanimité des Etats membres avec ratification par les parlements nationaux, un second étage relatif aux modalités de financement, décidé à la majorité qualifiée des Etats membres avec approbation du Parlement européen.

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