Article 83
(art. L. 626-15 du code
de commerce)
Délais et remises acceptés par les
créanciers ou imposés par le tribunal
Cet article tend à modifier l'article L. 626-15 du code de commerce, qui reprendrait les dispositions figurant actuellement à l'article L. 621-76 du même code, afin de préciser les conditions dans lesquelles le tribunal peut imposer des délais de paiement uniformes aux créanciers n'ayant pas accepté de consentir des délais ou des remises au débiteur .
1. Le droit en vigueur
L'article L. 621-76 prévoit que le tribunal donne acte, dans le jugement arrêtant le plan, des délais de paiement ou des remises de dettes consentis par les créanciers du débiteur au cours de la phase d'élaboration du plan de redressement. Dans le souci de protéger, le cas échéant, ces créanciers, le tribunal peut d'ailleurs décider de réduire les remises ou délais ainsi consentis.
Les créanciers n'ayant pas accordé de remises ou de délais se voient imposer par le tribunal des délais de paiement uniformes, cette prérogative ne s'appliquant pas aux délais d'une durée supérieure à celle fixée par le tribunal et qui auraient été consentis, avant l'ouverture de la procédure de redressement, à l'égard de créances à terme.
En vertu de l'article L. 621-78, cette mesure ne peut en revanche s'appliquer aux salariés titulaires de créances garanties par le super-privilège des salaires ou de créances résultant d'un contrat de travail non avancées par l'AGS. En outre, elles ne concernent pas, sous certaines conditions, les créances les plus faibles, prises dans un ordre décroissant, dans la limite de 5 % du passif estimé, et à la condition que le montant des créances détenues par une même personne n'excède pas 0,5 % du passif estimé ou n'ait pas donné lieu à subrogation ou paiement pour autrui.
Le texte prévoit que les délais de paiement imposés peuvent excéder la durée du plan, le premier paiement ne pouvant cependant intervenir au-delà d'un délai d'un an à compter du jugement arrêtant le plan. En conséquence, ces délais peuvent donc être supérieurs à dix ans. Les délais de paiement dans le cadre de l'exécution de contrats de crédit-bail prennent fin si, avant leur expiration, le crédit-preneur lève l'option d'achat, celle-ci ne pouvant toutefois être levée si l'intégralité des sommes dues en vertu du contrat n'a pas été réglée, une fois les remises acceptées réduites.
2. Les modifications proposées par le projet de loi
Le 1° du présent article apporterait une modification destinée à prendre en compte l'abrogation, opérée par le tableau annexé à l'article 1 er du présent projet de loi, de l'article L. 621-60 du code de commerce, auquel l'article L. 621-76 fait actuellement référence. Le renvoi aux deuxième et troisième alinéas de cet article serait donc remplacé par un renvoi au deuxième alinéa de l'article L. 626-4 ainsi qu'à l'article L. 626-4-1, dans leur rédaction issue de l'article 72 du projet de loi, qui définiraient désormais les modalités selon lesquelles les créanciers peuvent accorder des remises et des délais au débiteur lors de l'élaboration du plan de redressement.
Le 2° de cet article prévoirait que les délais de paiement qui auraient été accordés au débiteur par les créanciers avant l'ouverture de la procédure de sauvegarde pourraient excéder la durée du plan . Une ambiguïté figurant actuellement à l'article L. 621-76 serait donc levée sur ce point.
Le 3° de cet article introduirait deux innovations importantes par rapport au droit en vigueur.
D'une part, il supprimerait la possibilité pour le tribunal d'imposer aux créanciers des délais de paiement supérieurs à la durée du plan . En effet, il n'apparaît guère logique d'instituer une durée limitée au plan de sauvegarde tout en prévoyant, comme à l'heure actuelle, que certaines mesures d'apurement du passif peuvent s'appliquer sans aucune condition de durée.
D'autre part, tout en conservant la règle selon laquelle le premier paiement ne peut intervenir au-delà d'un délai d'un an, le paragraphe préciserait qu' au-delà de la deuxième année, le montant de chacune des annuités prévues par le plan ne pourrait être inférieur à 5 % du passif admis . Cet encadrement des modalités de règlement du passif est destiné à éviter que le règlement de l'essentiel d'une créance n'intervienne qu'à l'extrême fin du plan, situation qui est évidemment préjudiciable aux intérêts des créanciers. Comme l'a souligné le rapporteur de l'Assemblée nationale, « dans le cas où le premier paiement annuel sera purement symbolique, le total du remboursement sur dix ans ne pourrait donc pas être inférieur à 45 % du passif dû. On observera que, dans le cas de paiements des intérêts supérieurs à un an, inclus dans l'annuité de remboursement, et capitalisés en application du droit commun de l'article 1154 du code civil, l'amortissement lui-même ne représentera qu'une proportion plus faible du passif admis, au demeurant faible au départ et croissant dans le temps si les annuités sont fixes . » 156 ( * )
En revanche, cet encadrement ne s'appliquerait pas lorsque le débiteur exerce une exploitation agricole, compte tenu de la spécificité de l'activité agricole.
Les dispositions de l'article L. 626-15, dans la rédaction résultant du présent article, seraient applicables à la procédure de redressement judiciaire en vertu de l'article L. 631-15 du code du commerce, dans sa rédaction issue de l'article 102 du présent projet de loi.
Votre commission vous propose d'adopter l'article 83 sans modification.
* 156 Rapport n° 2095 de M. Xavier de Roux au nom de la commission des lois, p. 301.