Article 117
(art. L. 641-10 nouveau du
code de commerce)
Maintien provisoire de l'activité
Cet article a pour objet de modifier l'article L. 641-10 du code de commerce qui reprend les dispositions de l'actuel article L. 622-10 du même code relatives au maintien provisoire de l'activité .
1. Le droit en vigueur
En vertu de l'actuel article L. 622-10 du code de commerce, le tribunal peut autoriser le maintien de l'activité de l'entreprise au cours de la procédure de liquidation judiciaire. Interprétée a contrario , cette possibilité met en évidence la règle selon laquelle le jugement ouvrant ou prononçant la liquidation judiciaire met en principe fin à l'activité de l'entreprise . En effet, il est généralement nécessaire de faire cesser au plus vite l'exploitation.
Autorisé exceptionnellement, le maintien de l'activité de l'entreprise peut uniquement être décidé si l'intérêt public ou celui des créanciers l'exige . L'intérêt public peut notamment être justifié par la volonté de procéder au licenciement progressif de l'ensemble du personnel, le maintien d'une activité économique dans un secteur géographique fragile ou encore la nécessité de trouver des solutions de reprise pour une activité industrielle stratégique.
En outre, le maintien de l'activité ne peut excéder une durée fixée par décret en Conseil d'Etat, à savoir trois mois en vertu de l'article 119-2 du décret précité du 27 décembre 1985. Elle peut toutefois, selon la même disposition, être prolongée à la demande du procureur de la République, pour une durée maximale de deux mois et être directement fixée par le tribunal, lorsqu'il s'agit d'une exploitation agricole, en fonction de l'année culturale en cours et des usages spécifiques aux productions concernées.
Le privilège accordé par l'article L. 621-32 du code de commerce à certaines créances postérieures au jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire bénéficie également aux créances nées pendant la période de maintien de l'activité.
Il est prévu que l'administrateur reste en fonction et assure l'administration de l'entreprise. Il procède également aux licenciements pour motif économique des salariés dans le respect des dispositions prévues aux articles L. 321-8 et L. 321-9 du code du travail 248 ( * ) .
Enfin, l'administrateur peut, sur autorisation du juge-commissaire, se faire remettre par le liquidateur les sommes nécessaires à la poursuite de l'activité lorsqu'il n'en dispose pas.
2. Les modifications proposées par le projet de loi
• S'agissant des cas dans lesquels l'activité de l'entreprise peut être maintenue , le présent article propose tout d'abord d'en prévoir un troisième, à savoir « lorsque la cession totale ou partielle de l'entreprise est envisageable » .
Cette mesure paraît en effet indispensable dès lors que le projet de loi propose, à l'article 124, de permettre une cession, globale ou partielle, de l'entreprise au cours de la liquidation judiciaire, possibilité qui n'est jusqu'à présent offerte que dans le cadre d'une procédure de redressement judiciaire 249 ( * ) .
L'entreprise pouvant être cédée au cours de sa liquidation, il convient de maintenir son activité, par dérogation aux principes selon lesquels, l'entreprise cesse son activité (article 641-10 du code de commerce) et prend fin « par l'effet d'un jugement ordonnant la liquidation judiciaire ou la cession totale des actifs de la société . » (article 1844-7 du code civil).
En outre, le présent article propose, par coordination avec le reste du texte, de remplacer :
- l'expression « procureur de la République » par celle de « ministère public » ;
- la référence à l'article « L. 621-32 » par la référence à l'article « L. 641-13 ». En effet, alors que l'actuel article L. 621-32 du code de commerce intéresse le sort des créances postérieures au jugement qui ouvre ou prononce le redressement ou la liquidation judiciaires, le présent projet de loi prévoit deux articles distincts pour les créances nées postérieurement à l'ouverture ou au prononcé de chacune de ces deux procédures : l'article L. 622-15 pour le redressement judiciaire et l'article L. 641-13 s'agissant de la liquidation judiciaire.
• D'importantes modifications sont également proposées par le présent article s'agissant des conditions dans lesquelles l'entreprise est gérée lorsque son activité est maintenue au cours de la liquidation .
Il est prévu que ce soit désormais le liquidateur qui administre en principe l'entreprise et non plus l'administrateur. Le présent article détaille les compétences qui lui seraient dès lors confiées pour accomplir cette mission.
Le liquidateur disposerait de la possibilité :
- d'exiger l'exécution des contrats en cours. Lui seraient en conséquence conférées les mêmes prérogatives que l'administrateur dans le cadre d'un redressement judiciaire pour permettre l'exécution de ces contrats (article L. 622-11 du code de commerce) 250 ( * ) ;
- de procéder à des licenciements dans les mêmes conditions que celles prévues en cas de redressement judiciaire au III de l'article L. 631-14 du code de commerce, créé par l'article 102 du projet de loi 251 ( * ) . Il pourrait ainsi mettre en oeuvre un régime de licenciement pour motif économique simplifié lorsque les licenciements présentent un caractère « urgent, inévitable et indispensable » ;
- de préparer le plan de cession, passer les actes nécessaires à cette cession et d'en recevoir et distribuer le prix entre les créanciers.
Toutefois, lorsque le nombre de salariés ou le chiffre d'affaires est supérieur à des seuils fixés par décret en Conseil d'Etat ou que cela apparaît nécessaire, un administrateur judiciaire serait désigné par le tribunal pour administrer l'entreprise. Selon les informations recueillies par votre rapporteur, les seuils choisis devraient demeurer ceux du régime général actuel : cinquante salariés ou 3,1 millions d'euros (qui pourraient être arrondis à 3 millions d'euros).
Comme le liquidateur, l'administrateur pourrait alors exiger l'exécution des contrats en cours dans les conditions fixées par l'article L. 622-1 du code de commerce, préparerait le plan de cession et passerait les actes nécessaires à sa réalisation, et serait habilité à licencier des salariés de l'entreprise selon les règles du licenciement pour motif économique simplifié. En revanche, le liquidateur demeurerait compétent, dans cette hypothèse, pour recevoir le prix de la cession et le distribuer entre les créanciers.
Reprenant une disposition déjà prévue dans l'actuel article L. 622-10 du code de commerce, l'administrateur pourrait également, sur autorisation du juge-commissaire, se faire remettre par le liquidateur les sommes nécessaires à la poursuite de l'activité lorsqu'il n'en dispose pas.
Enfin, le présent article prévoit que le liquidateur ou, le cas échéant, l'administrateur serait tenu d'accomplir un certain nombre de missions confiées à l'administrateur ou au mandataire judiciaire au cours d'une période de redressement judiciaire.
Ainsi, le liquidateur ou l'administrateur devrait requérir du chef d'entreprise ou, à défaut, effectuer de lui-même « les actes nécessaires à la conservation des droits de l'entreprise contre les débiteurs de celle-ci et à la préservation des capacités de production » (article L. 622-4 du code de commerce). Il aurait également qualité pour inscrire au nom de l'entreprise les hypothèques, nantissements, gages ou privilèges qui n'auraient pas été pris ou renouvelés par le chef d'entreprise.
Il pourrait enfin demander la réunion à l'actif du débiteur des biens qui auraient été acquis par son conjoint avec des valeurs fournies par ce dernier (article L. 624-6).
En première lecture, l'Assemblée nationale a adopté deux amendements rédactionnels.
Sous réserve d'un amendement rédactionnel , votre commission vous propose d'adopter l'article 117 ainsi modifié .
* 248 Voir le commentaire de l'article 113 du présent projet de loi.
* 249 Voir le commentaire de l'article 124 du présent projet de loi.
* 250 Voir le commentaire de l'article 30 du présent projet de loi modifiant l'article L. 622-11 du code de commerce.
* 251 Voir le commentaire de l'article 102 du présent projet de loi.