Art. 815-2 du code civil : Mesures conservatoires

L'actuel article 815-2 du code civil permet à un seul indivisaire de prendre les mesures nécessaires à la conservation des biens indivis .

La jurisprudence a précisé que ces mesures devaient être nécessaires et urgentes, et en particulier justifiées par un péril imminent, et ne pas compromettre sérieusement le droit des indivisaires.

L'Assemblée nationale a, à l'initiative de sa commission des lois, adopté un amendement tendant à modifier l'article 815-2 afin de préciser que ces mesures conservatoires peuvent être prises même si elles ne présentent pas un caractère d'urgence, cette exigence risquant de nuire à l'objectif de conservation des biens. En effet, un entretien régulier des biens indivis est préférable à la réparation de dommages causés par l'inaction.

Art. 815-3 du code civil : Gestion des biens indivis

En revanche, l'actuel article 815-3 impose le consentement unanime des indivisaires pour les actes d'administration 69 ( * ) et de disposition 70 ( * ) .

Il impose également l'unanimité pour donner à l'un ou à plusieurs d'entre eux un mandat général d'administration. Un mandat spécial est requis pour tout acte qui ne ressortit pas à l'exploitation normale des biens indivis ainsi que pour la conclusion et le renouvellement des baux.

Afin d'atténuer cette rigidité, la loi du 31 décembre 1976 a prévu un certain nombre de palliatifs, qui présentent cependant l'inconvénient de nécessiter un recours au juge. L'actuel article 515-5 prévoit ainsi qu'un indivisaire peut être autorisé en justice à passer seul un acte pour lequel le consentement d'un coindivisaire serait nécessaire si le refus de celui-ci met en péril l'intérêt commun. De même, l'actuel article 815-6 prévoit que le président du tribunal de grande instance peut prescrire ou autoriser toutes les mesures urgentes que requiert l'intérêt commun

Le projet de loi tend à assouplir la règle de l'unanimité , très protectrice du droit de chaque indivisaire, mais qui conduit souvent à une mauvaise gestion des biens ou à un recours fréquent au juge pour surmonter la paralysie, en prévoyant que certains actes pourront être accomplis à la majorité des deux tiers .

Cette majorité qualifiée permettra désormais en l'absence de convention d'indivision :

- d'effectuer les actes d'administration relatifs aux biens indivis ;

- de donner un mandat général d'administration à l'un ou plusieurs des indivisaires ou à un tiers ;

- de vendre les meubles indivis pour payer les dettes et charges de l'indivision . Contrairement à l'actuel article 826 qui ouvre déjà à la majorité des cohéritiers cette faculté, la vente pourra être faite de gré à gré et non publiquement, ce qui constitue une mesure de simplification appréciable.

Le projet de loi maintient en revanche la règle de l'unanimité pour tout acte qui ne ressortit pas à l'exploitation normale des biens indivis, pour conclure et renouveler les baux ainsi que pour effectuer tout acte de disposition autre que la vente des meubles indivis pour payer les dettes et charges de l'indivision.

L'Assemblée nationale a, à l'initiative de sa commission des lois et avec l'avis favorable du Gouvernement, considéré que le maintien de l'exigence d'unanimité s'agissant des baux était contradictoire avec l'objectif d'assouplissement du projet de loi.

Elle a considéré que la conclusion ou le renouvellement d'un bail d'habitation était un acte de gestion courante qui ne présentait pas de risques tels qu'il justifierait de conserver l'unanimité. En effet, le bail est conclu pour une durée de trois ans et le bailleur peut donner un congé pour vente sans acquitter d'indemnité. L'Assemblée nationale a en outre observé que l'article 1425 du code civil autorisait un seul époux à conclure des baux d'habitation sur des biens communs des époux.

L'Assemblée nationale a donc complété la liste des actes pouvant être accomplis à la majorité des deux tiers en ajoutant la conclusion et le renouvellement des baux autres que ceux portant sur un immeuble à usage agricole, commercial, industriel ou artisanal .

Afin de sauvegarder le sort des indivisaires minoritaires qui ne participent pas à la décision, l'Assemblée nationale a en outre, dans les mêmes conditions, prévu une obligation d'information à leur égard.

Votre commission est bien consciente que cette réforme, très attendue, peut paraître encore trop timorée à certains, qui estiment que le maintien de l'exigence d'unanimité pour la vente d'un immeuble indivis ne répondra pas aux principales difficultés rencontrées en pratique.

Cependant, il paraît très difficile d'aller au-delà en raison du risque d'atteinte à la propriété et donc d'inconstitutionnalité. En effet, la vente contre l'avis d'un indivisaire pourrait être assimilée à une expropriation pour cause d'utilité privée, encore jamais admise dans notre droit.

En vertu de l'article 27 du projet de loi, ces dispositions s'appliqueront aux indivisions dès l'entrée en vigueur de la loi.

* 69 Rappelons que les actes d'administration sont des actes de gestion normale qui tendent à faire fructifier un bien ou à l'améliorer sans en compromettre la valeur.

* 70 Les actes de disposition sont les actes les plus graves pouvant faire sortir un bien du patrimoine indivis ou en diminuer la valeur (cession, constitution d'hypothèque...).

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