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Rapport n° 59 (2006-2007) de M. Gérard DÉRIOT , fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 8 novembre 2006

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N° 59

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2006-2007

Annexe au procès-verbal de la séance du 8 novembre 2006

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Affaires sociales (1) sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

Par M. Gérard DÉRIOT,

Sénateur.

Tome V :

Accidents du travail et maladies professionnelles

(1) Cette commission est composée de : M. Nicolas About, président ; MM. Alain Gournac, Louis Souvet, Gérard Dériot, Jean-Pierre Godefroy, Mmes Claire-Lise Campion, Valérie Létard, MM. Roland Muzeau, Bernard Seillier, vice-présidents ; MM. François Autain, Paul Blanc, Jean-Marc Juilhard, Mmes Anne-Marie Payet, Gisèle Printz, secrétaires ; Mme Jacqueline Alquier, MM. Jean-Paul Amoudry, Gilbert Barbier, Daniel Bernardet, Mme Brigitte Bout, MM. Jean-Pierre Cantegrit, Bernard Cazeau, Mmes Isabelle Debré, Christiane Demontès, Sylvie Desmarescaux, M. Claude Domeizel, Mme Bernadette Dupont, MM. Michel Esneu, Jean-Claude Etienne, Guy Fischer, Jacques Gillot, Francis Giraud, Mmes Françoise Henneron, Marie-Thérèse Hermange, Gélita Hoarau, Annie Jarraud-Vergnolle, Christiane Kammermann, MM. Serge Larcher, André Lardeux, Dominique Leclerc, Marcel Lesbros, Mme Raymonde Le Texier, MM. Roger Madec, Jean-Pierre Michel, Alain Milon, Georges Mouly, Mmes Catherine Procaccia, Janine Rozier, Michèle San Vicente-Baudrin, Patricia Schillinger, Esther Sittler, MM. Jean-Marie Vanlerenberghe, Alain Vasselle, François Vendasi, André Vézinhet.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 12 e législ . ) : 3362 , 3384, 3388 et T.A. 613

Sénat : 51 et 60 (2006-2007)

Sécurité sociale.


Les propositions de la commission des affaires sociales
pour la branche accidents du travail et maladies professionnelles en 2007

En 2007, la branche accidents du travail et maladies professionnelles devrait dégager un léger excédent de 85 millions d'euros . Cette amélioration s'explique, en grande partie, par l'augmentation de 0,1 point de la contribution AT-MP décidée l'an passé. La situation plus favorable des comptes permet d'accroître le remboursement que la branche verse à l'assurance maladie, au titre des dépenses indûment mises à sa charge, et de relever la dotation servie aux deux fonds destinés à indemniser les victimes de l'amiante, le Fiva et le Fcaata.

La commission n'a pas souhaité modifier les dispositions régissant la branche, afin de laisser le champ libre à la négociation en cours entre les partenaires sociaux qui devrait s'achever en juillet 2007 .

Toutefois, inspirée par les recommandations de la mission d'information sénatoriale sur les conséquences de la contamination par l'amiante, elle formule, à l'initiative de son rapporteur Gérard Dériot, deux propositions qui se rapportent aux fonds de l'amiante :

porter la dotation de l'Etat au Fiva à 30 % du total des recettes de ce fonds d'ici à 2009 ;

accroître le rendement de la contribution créée en 2005 pour alimenter le Fcaata et mise à la charge des entreprises ayant exposé leurs salariés à l'amiante. Celui-ci est en effet très inférieur aux prévisions , en raison des plafonds prévus par la loi : le montant de la contribution ne peut dépasser ni 2 millions d'euros, ni 2,5 % de la masse salariale de l'entreprise. Compte tenu de la dégradation de la situation financière du Fcaata, la commission propose de porter le premier de ces plafonds de 2 à 4 millions d'euros.

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Le présent projet de loi de financement de la sécurité sociale propose de fixer l'objectif de dépenses de la branche accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP) à 11,4 milliards d'euros en 2007, soit une progression de 3,6 % par rapport à celui de 2006. Les dépenses effectivement réalisées en 2006 sont d'un montant très proche de celui prévu dans la loi de financement.

Depuis deux ans, conformément à la loi organique relative aux lois de financement de la sécurité sociale du 2 août 2005, le champ de l'objectif intègre désormais l'ensemble des régimes obligatoires, et non plus les seuls régimes comptant plus de 20.000 cotisants. Il prend en compte également le transfert financier qu'effectue la branche AT-MP du régime général au profit de la branche maladie pour compenser les dépenses indues résultant de la sous-déclaration des accidents du travail et des maladies professionnelles, alors que ce transfert était jusqu'ici déduit de l'objectif de la branche.

Objectif de dépenses et dépenses réalisées depuis 2002

(en milliards d'euros)

2002

2003

2004

2005 (p)

Objectif de dépenses (ancien champ LFSS)

9

9,4

9,7

10,5

Dépenses réalisées (ancien champ LFSS)

9,3

9,8

9,9

10,3

Écart

0,3

0,4

0,2

-0,2

(p) : prévision

2004

2005

2006 (p)

2007 (p)

Objectif de dépenses (nouveau périmètre)

-

10,7

11,1

Dépenses réalisées (nouveau périmètre)

10,2

- 10,8

-

11,4

(p) : prévision Source : Direction de la sécurité sociale

Les dépenses de la branche AT-MP représentent moins de 3 % des quelque 402 milliards d'euros de dépenses prévus pour la sécurité sociale en 2007. Elles relèvent pour près de 90 % du régime général : pour 2007, le montant prévisionnel des dépenses de la branche AT-MP de la Caisse nationale d'assurance maladie (Cnam) est fixé à 10,1 milliards d'euros.

L'année 2007 devrait être marquée par le retour, pour la première fois depuis cinq ans, à un solde excédentaire . L'an passé, le Gouvernement a pris la décision de relever, par décret, de 0,1 point le taux des cotisations AT-MP, apportant ainsi à la branche un surcroît de recettes qui, cumulé à l'embellie sur le front de l'emploi , devrait permettre de ramener le besoin de financement de la branche aux alentours de 40 millions d'euros en 2006.

En ce qui concerne les charges de la branche, ses versements aux deux « fonds de l'amiante » augmentent encore de manière significative : si la dotation au fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (Fiva) reste stable à 315 millions d'euros, celle versée au fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (Fcaata) est portée de 700 à 800 millions d'euros. La progression des dépenses de prestations de la branche AT-MP devrait être plus modérée : les dépenses consenties au titre des rentes AT-MP devraient augmenter, sous l'effet de la revalorisation du point de rente, à hauteur de 1,8 %, au 1 er janvier 2007 ; les prestations d'incapacité temporaire devraient croître de 2,1 %.

Les partenaires sociaux ont engagé, le 21 décembre 2005, des négociations en vue d'une réforme d'ensemble de la branche AT-MP. Elles ont abouti, en février dernier, à la conclusion d'un protocole d'accord sur la gouvernance de la branche et devraient se poursuivre jusqu'au milieu de l'année 2007. Le Gouvernement a fait le choix de ne pas procéder à des réformes de la branche avant l'achèvement de la négociation.

I. LES RISQUES PROFESSIONNELS : DES SITUATIONS CONTRASTÉES

Avant d'analyser la situation financière de la branche, il est nécessaire de retracer l'évolution des risques professionnels, dans la mesure où celle-ci pèse directement sur les dépenses de la branche et donc sur les conditions générales de son équilibre financier. Elle est aussi un indice de l'efficacité des mesures de prévention mises en oeuvre dans les entreprises.

Les statistiques, encore provisoires, disponibles pour 2005 confirment les tendances observées depuis 2000, à savoir une baisse du nombre d'accidents du travail, mais une progression du nombre de maladies professionnelles.

L'interprétation de ces données demeure cependant délicate en raison des incertitudes qui affectent encore notre connaissance des risques professionnels.

A. DES ACCIDENTS DU TRAVAIL MOINS NOMBREUX

Les dernières données disponibles relatives aux accidents du travail confirment l'évolution à la baisse observée depuis une trentaine d'années. Entre 1970 et 2000, le nombre d'accidents du travail ayant occasionné un arrêt de travail a diminué d'environ un tiers. Ce bon résultat s'explique, pour partie, par les progrès réalisés par les entreprises dans le domaine de la sécurité au travail, mais aussi par la transformation structurelle de la répartition de la population active française, moins présente dans les industries lourdes, qui sont aussi les plus dangereuses, et davantage employée dans les services. Il doit cependant être relativisé compte tenu de l'augmentation de l'indice de gravité des accidents du travail.

Les données relatives aux maladies professionnelles sont plus préoccupantes. Le nombre de maladies reconnues est en forte progression, notamment en raison du développement des pathologies liées à l'amiante et des troubles musculo-squelettiques (TMS).

1. La diminution du nombre global d'accidents du travail

Les données provisoires pour 2005 font ressortir une diminution de 0,8 % du nombre d'accidents du travail, mais une hausse du nombre d'accidents de trajet.

Evolution du nombre et de la fréquence des accidents du travail depuis 2002

2002

2003

2004*

2005*

Nombre d'accidents du travail

1.313.811

1.185.291

1.157.715

1.147.819

Nombre d'accidents de trajet

121.337

113.918

112.253

115.208

Indice de fréquence (1)

73,0

66,0

64,6

62,6

(1) L'indice de fréquence correspond au nombre d'accidents du travail reconnus par milliers de salariés

* Données provisoires Source : Cnam

La manipulation d'objet est la principale source d'accidents du travail ; elle est à l'origine du plus du quart des accidents de travail en 2004 et 2005. Si elle donne lieu dans les deux tiers des cas, à un arrêt de travail, elle est très rarement mortelle. Les chutes de hauteur sont également une cause importante d'accidents.

Les accidents de la route demeurent toujours la principale cause de décès. Cependant, on constate, depuis 2003, une baisse relative de la part représentative des accidents de la route dans les accidents du travail mortels (29,3 % en 2003, 27,8 % en 2004 et 25,5 % en 2005). La branche AT-MP de la Cnam a élaboré une charte avec la sécurité routière pour améliorer la sécurité sur les trajets, grâce à des actions de formation, des actions sur les véhicules ou encore sur les infrastructures.

Si les mesures de prévention permettent d'éviter les accidents les plus bénins, il reste cependant un « noyau dur » d'accidents graves difficiles à éradiquer.

2. Un indice de gravité en voie de stabilisation

L'indice de gravité des accidents du travail se définit comme la somme des taux d'incapacité permanente rapportée au nombre d'heures travaillées (en millions).

Seuls les accidents les plus graves donnent lieu, en effet, à une incapacité permanente. Le taux d'incapacité permanente est évalué par la caisse primaire et détermine le montant de la rente perçue par la victime.

Après avoir progressé nettement de 2001 à 2004, cet indice connaîtrait une légère baisse en 2005 :

Évolution de la gravité des accidents du travail depuis 2002

2002

2003

2004*

2005*

Nombre d'accidents du travail avec incapacité permanente

47.877

49.632

52.718

nd.

Indice de gravité

16,0

18,2

19,5

19,3

* données provisoires Source : Direction de la sécurité sociale

La fréquence des accidents du travail, et notamment des accidents graves, varie sensiblement d'un secteur d'activité à l'autre.

Les données figurant dans le programme de qualité et d'efficience de la branche montrent que le secteur du bâtiment et des travaux publics (BTP) est celui pour lequel la fréquence des accidents est la plus élevée : il concentre à lui seul 17 % des accidents du travail, alors qu'il ne représente que 8 % de l'effectif total salarié. A l'opposé, les secteurs de la banque et de l'assurance, de l'administration, du commerce non alimentaire sont ceux où le risque d'accident est le plus faible.

Il apparaît également que les salariés jeunes ou en contrat précaire déclarent plus d'accidents que la moyenne. Le manque d'expérience au poste de travail est un incontestable facteur supplémentaire de risque.

B. UNE AUGMENTATION RAPIDE DU NOMBRE DE CAS DE MALADIES PROFESSIONNELLES RECONNUES

La tendance la plus préoccupante est certainement la forte progression du nombre de victimes de maladies professionnelles.

1. Une vive progression depuis l'an 2000...

Le nombre de maladies professionnelles continue d'augmenter : il a crû de 16,7 % en 2002 par rapport au nombre de maladies professionnelles reconnues en 2001, puis de 7,1 % en 2003 par rapport à 2002. Les résultats provisoires de 2004 sont d'ores et déjà en hausse de 6,9 % sur ceux de 2003.

Alors que le nombre de maladies professionnelles reconnues était de seulement 3.834 en 1980, il devrait dépasser 47.700 en 2004 .

Évolution du nombre de cas de maladies professionnelles depuis 2002

2002

2003

2004*

2005*

Nombre de maladies professionnelles constatées et reconnues

41.673

44.653

47.723

39.817

Nombre de maladies professionnelles mortelles

410

517

468

n.d.

* données partielles et provisoires Source : Cnam

Cette tendance est inquiétante sur le plan sanitaire comme sur le plan économique. Elle n'est pas sans conséquences financières, en raison notamment de la forte proportion de maladies professionnelles qui occasionnent un arrêt de travail (78,1 % en 2003). De plus, le taux de maladies professionnelles qui s'accompagnent d'une incapacité permanente est de l'ordre de 40 %.

2. ... liée au développement de quelques affections

Trois grands types d'affections concentrent l'essentiel des cas de maladies professionnelles reconnues :

les affections périarticulaires : causées par certains gestes ou postures de travail,  elles représentent 73,5 % des maladies professionnelles reconnues en 2005, contre 69,1 % en 2004 ;

les affections dues à l'inhalation de poussières d'amiante (tableau 30 et 30 bis des maladies professionnelles) constituent 13,9 % des maladies professionnelles reconnues en 2003, 14,9 % en 2004 et 13,8 % en 2005 ;

les affections chroniques du rachis lombaire , enfin, occupent toujours une part importante, mais décroissante, des maladies professionnelles : 6,6 % en 2003, 5,9 % en 2004 et 5,2 % en 2005.

Les autres pathologies les plus fréquentes sont les allergies, les surdités, les affections respiratoires...

La répartition est un peu différente si l'on considère les maladies professionnelles qui occasionnent une incapacité permanente .

En raison de leur gravité, certaines pathologies s'accompagnent plus fréquemment que d'autres d'une incapacité permanente. C'est notamment le cas des maladies de l'amiante : en 2004, 89 % des maladies de l'amiante ayant donné lieu à un arrêt de travail se sont accompagnées de la reconnaissance d'une incapacité permanente, contre 52 % en moyenne pour l'ensemble des maladies professionnelles. A contrario , les maladies périarticulaires, moins graves, ne représentent que 50 % du total des maladies professionnelles avec incapacité permanente.

3. La répartition sectorielle des maladies professionnelles

L'analyse par secteur met en évidence une forte sinistralité dans les secteurs des services, commerce et industrie de l'alimentation, de la métallurgie et du BTP.

Répartition des maladies professionnelles avec arrêt
par secteur d'activité (CTN) en 2004

Les statistiques des accidents du travail et des maladies professionnelles distinguent neuf grandes branches d'activités (ou comités techniques nationaux - CTN) :

- industries de la métallurgie ;

- industries du bâtiment et travaux publics (BTP) ;

- industries du transport, eau, gaz, électricité (EGE), livre et communication ;

- services et commerces de l'alimentation ;

- industries de la chimie, du caoutchouc et de la plasturgie ;

- industries du bois, de l'ameublement, du papier carton, des textiles, du vêtement, des cuirs et peaux et des pierres et terres à feu ;

- commerce non alimentaire ;

- activités de services I (banques, assurances, administrations,...) ;

- activités de services II et travail temporaire (santé...).

On observe la part non négligeable (38 %) des maladies professionnelles imputées au compte spécial . Ce compte, visé à l'article D. 242-6-3 du code de la sécurité sociale, regroupe les dépenses afférentes à des maladies inscrites dans les tableaux de maladies professionnelles en 1993, en cas d'exposition au risque avant cette date, et à des maladies contractées dans une entreprise disparue ou susceptible d'avoir été contractées dans plusieurs entreprises, sans que l'on sache déterminer laquelle. L'inscription des dépenses sur ce compte a pour effet d'en répartir la charge sur l'ensemble des employeurs affiliés au régime général, qui supportent, à ce titre, une majoration de leur taux de cotisation. L'importance du compte spécial illustre la difficulté qu'il y a à faire peser sur les employeurs responsables le coût des maladies professionnelles.

Si l'on rapporte le nombre de maladies professionnelles aux effectifs de chaque secteur, on observe que les secteurs les plus pathogènes sont les industries du bois, ameublement, papier-carton, la chimie et le BTP.

4. Des données à interpréter avec précaution

Ces données issues des statistiques trimestrielles de la Cnam, correspondent au nombre de malades indemnisés .

Les cas ainsi recensés ont d'abord fait l'objet d'une déclaration par la victime puis ont été reconnus comme étant d'origine professionnelle par une caisse de sécurité sociale. L'amélioration des procédures administratives et la lutte contre la sous-déclaration des maladies professionnelles, avec notamment l'actualisation de nombreux tableaux de maladies professionnelles 1 ( * ) , expliquent sans doute pour partie l'augmentation constatée du nombre de maladies professionnelles reconnues.

Une commission, présidée par Noël Diricq, conseiller-maître à la Cour des comptes, a été chargée, en application de l'article L. 176-2 du code de la sécurité sociale, d'évaluer l'ampleur des phénomènes de sous-déclaration et de sous-reconnaissance des accidents du travail et des maladies professionnelles. Son rapport, publié en juin 2005, doit, en principe, servir de base à la fixation du montant du versement effectué chaque année par la branche AT-MP à l'assurance maladie afin de compenser les charges indues qu'elle supporte du fait de la sous-déclaration et de la sous-reconnaissance. Les données recueillies par cette commission, même si elles demeurent incomplètes, suggèrent qu'un nombre significatif de maladies professionnelles ne seraient pas recensées. Les statistiques relatives aux accidents du travail seraient en revanche plus proches de la réalité.

Une mission d'audit commune à l'Igas et à l'Insee, qui a rendu ses conclusions en septembre 2006, a par ailleurs estimé que les statistiques sur les accidents du travail et les maladies professionnelles étaient incomplètes, insuffisamment exploitées et peu valorisées. Si les données du régime général et du régime agricole sont relativement exhaustives, la mission a critiqué le manque de statistiques dans les trois fonctions publiques. Elle suggère, pour cette raison, de créer un système central des données des AT-MP, indépendant des différents régimes, qui rassemblerait les déclarations d'AT-MP de l'ensemble des secteurs d'activité. Elle propose également d'enrichir la réflexion sur la santé au travail en exploitant d'autres sources d'informations, telles que les rapports des médecins du travail, les données sur l'absentéisme ou les travaux des ergonomes.

II. LE RETOUR À L'ÉQUILIBRE DE LA BRANCHE

Après avoir connu une aggravation de son déficit pendant quatre ans, la branche AT-MP devrait être proche de l'équilibre en 2006 et même dégager un excédent l'année prochaine.

A. LA HAUSSE DU TAUX DE COTISATION ET LA CROISSANCE DE LA MASSE SALARIALE GARANTISSENT UNE FORTE PROGRESSION DES RECETTES

Les recettes de la Cnam AT-MP se composent, en 2005, de 78 % de cotisations patronales, de 16 % de cotisations prises en charge par l'Etat et de 6 % de produits divers (recours contre tiers, produits financiers, produits de gestion courante...). Les cotisations prises en charge par l'Etat correspondent aux cotisations dont sont exonérées les entreprises et qui donnent lieu à compensation à la sécurité sociale. Les cotisations patronales globales, c'est-à-dire les cotisations patronales nettes augmentées des remboursements d'exonérations de cotisations par l'Etat, représentent près de 94 % des recettes de la branche.

1. La croissance des recettes

Les recettes de la branche AT-MP devraient connaître une forte augmentation en 2006 (9 %), après plusieurs années de progression à un rythme plus modéré (3,2 % en 2004 et 2 % en 2005).

Produits de la branche AT-MP (Cnam)

(en millions d'euros)

2004

2005

%

2006

%

2007

%

PRODUITS (A + B)

8.811,5

8.991,5

2,0

9.798,6

9,0

10.260,9

4,7

A - PRODUITS DE GESTION TECHNIQUE

8.804,0

8.982,2

2,0

9.789,3

9,0

10.251,6

4,7

Agrégat cotisations effectives

8.403,7

8.446,6

0,5

7.787,3

-7,8

8.143,6

4,6

Cotisations patronales nettes

6.908,0

6.969,1

0,9

7.518,4

7,9

7.853,6

4,5

Cotisations patronales

6.895,3

7.059,5

2,4

7.597,8

7,6

7.928,0

4,3

Recettes nettes de provisions (créances sur cotisations)

90,6

-6,3

--

0,6

-

5,6

865,1

Pertes sur créances irrécouvrables (sur cotisations)

- 78,0

-84,1

-7,8

-80,0

4,9

-80,0

0,0

Cotisations prises en charge par l'Etat

1.495,7

1.477,5

-1,2

269,0

-81,8

290,0

7,8

Impôts et taxes affectés

0,0

157,8

-

1.623,0

++

1.720,0

4,0

Transferts entre organismes de sécurité sociale

14,6

0,9

--

0,9

0,0

0,9

0,0

Cotisations prises en charge par le Forec

13,1

0,0

--

0,0

-

0,0

-

Autres transferts

1,5

0,9

-40,3

0,9

0,0

0,9

0,0

Divers produits techniques

385,8

376,9

-2,3

378,1

0,3

387,1

2,4

Recours contre tiers

336,7

345,0

2,5

355,3

3,0

366,0

3,0

Produits financiers

26,2

11,4

-56,4

2,2

-80,7

0,1

--

Autres divers produits techniques

22,9

20,5

-10,2

20,5

0,0

21,0

0,0

B - PRODUITS DE GESTION COURANTE

7,4

9,3

24,9

9,3

0,0

9,3

0,0

Source : Direction de la sécurité sociale

Cette progression rapide résulte, pour partie, d'un plus grand dynamisme de la masse salariale, mais aussi de l'augmentation du taux de cotisation de 0,1 point décidée par le Gouvernement à la fin de l'année 2005.

Il est à noter que les cotisations patronales globales devraient pourtant baisser de 7,8 % cette année, en raison de la diminution, à hauteur de 82 %, des cotisations prises en charge par l'Etat. Cette chute est due à la réforme du financement des allégements généraux de cotisations sociales entrée en vigueur le 1 er janvier 2006 : la compensation à la sécurité sociale des allégements de cotisations est assurée par l'affectation d'un panier de recettes, et non plus par une dotation budgétaire.

En 2007, les recettes devraient progresser de 4,7 %, en lien avec l'hypothèse de croissance de la masse salariale.

2. Le relèvement du taux de cotisation

Sur longue période, le taux de cotisation a eu tendance à diminuer, en conséquence de la réduction du nombre d'accidents du travail et de maladies professionnelles constatés. Ce taux atteignait ainsi 3,93 % du salaire en 1970 mais n'était plus que de 2,185 % en 2005 . La dégradation de la situation financière de la branche a cependant conduit le Gouvernement à relever le taux de cotisation, qui a été porté à 2,285 % en 2006 . Cette décision devrait entraîner un surcroît de recettes de 415 millions d'euros . Il n'est pas prévu de diminuer le taux de cotisation l'an prochain, en dépit de l'amélioration de la situation financière de la branche.

Évolution du taux net moyen national de cotisation

(en pourcentage)

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2,185

2,185

2,185

2,185

2,285

2,285

Source : Cnam

Il convient de préciser que ce taux est une moyenne. Il peut différer de celui appliqué à une entreprise individuellement, qui varie selon la nature de son activité, de ses effectifs et du montant des prestations servies en réparation d'accidents du travail ou de maladies professionnelles qui lui sont imputables au cours des trois dernières années.


La détermination du taux de cotisation d'une entreprise

Les principes de tarification

Le système de tarification est fondé sur un triple principe :

- une prise en charge par le seul employeur,

- un souci de prévention, le montant de la cotisation étant fixé selon le risque survenu dans chaque entreprise,

- un principe de mutualisation, intrinsèquement lié à la nature assurantielle du système de sécurité sociale.

Le calcul du taux de cotisation

En application de ces principes, le taux de cotisation est actualisé chaque année et déterminé pour chaque entreprise selon la nature de son activité et selon ses effectifs.

Le taux net , qui est en fait le taux exigible, est la somme d'un taux brut et de trois majorations spécifiques.

Le taux brut est le rapport, pour les trois dernières années de référence, entre les prestations servies en réparation d'accidents ou de maladies imputables à l'entreprise et les salaires. Selon la taille de l'entreprise, ce taux brut est :

- celui calculé pour l'ensemble de l'activité dont relève l'établissement : c'est le taux collectif pour les entreprises de moins de dix salariés ;

- celui calculé à partir du report des dépenses au compte de l'employeur : c'est le taux réel pour les entreprises de deux cents salariés et plus ;

- pour les entreprises dont les effectifs sont situés entre 10 et 199 salariés, la tarification est dite mixte, le calcul se faisant en partie selon le taux collectif et en partie selon le taux réel, la part de ce dernier augmentant avec les effectifs.

Au taux brut sont ajoutées trois majorations forfaitaires identiques pour toutes les entreprises et activités, pour tenir compte :

- des accidents de trajet (M1) ;

- des charges générales, des dépenses de prévention et de rééducation professionnelle (M2) ;

- de la compensation entre régimes et des dépenses qu'il n'est pas possible d'affecter à un employeur, inscrites au compte spécial « maladies professionnelles » (M3).

Le rôle de la branche

La commission des AT-MP est chargée de fixer, avant le 31 janvier, les éléments de calcul des cotisations, conformément aux conditions générales de l'équilibre financier de la sécurité sociale déterminées par les lois de financement. A défaut, ils sont déterminés par arrêté interministériel.

Puis les caisses régionales d'assurance maladie déterminent le taux de cotisation de chaque entreprise, à partir des informations collectées régionalement et des éléments fixés par la commission. Elles disposent en outre d'une possibilité d'appliquer soit des cotisations supplémentaires, soit des ristournes, pour inciter les entreprises à mieux encadrer les risques professionnels.

Outre le niveau des cotisations, l'évolution des recettes de la branche AT-MP est également déterminée par le rythme de progression de la masse salariale. Après plusieurs années de progression modérée, l'hypothèse retenue pour 2006 est celle d'une augmentation plus rapide de la masse salariale (4,1 %), qui s'accélérerait encore l'an prochain (4,4 %).

Les paramètres de l'évolution des recettes de la Cnam AT-MP

2003

2004

2005

2006

2007

Masse salariale du secteur privé

1,9 %

2,9 %

3,2 %

4,1 %

4,4 %

- effectifs du secteur privé

- 0,1 %

0,1 %

0,4 %

0,7 %

1,0 %

- salaire moyen du secteur privé

1,9 %

2,5 %

2,8 %

3,4 %

3,4 %

Taux net de cotisations employeurs

2,185 %

2,185 %

2,185 %

2,285 %

2,285 %

Source : Direction de la sécurité sociale

Le projet de loi de financement est construit sur une hypothèse de croissance du PIB comprise entre 2 % et 2,5 % l'année prochaine, soit une croissance comparable à celle observée en 2006.

B. UNE PROGRESSION DES DÉPENSES ACCÉLÉRÉE PAR L'ÉVOLUTION DES TRANSFERTS FINANCIERS

Les charges de la branche AT-MP du régime général se composent d'environ trois quarts de dépenses de prestations (légales, extralégales et autres, augmentées des dotations nettes aux provisions pour prestations et des pertes sur créances irrécouvrables sur prestations) et d'un peu moins d'un cinquième de charges de transfert vers d'autres régimes et fonds : régime des mines, régime des salariés agricoles, fonds commun des accidents du travail non agricoles (Fcat), branche maladie du régime général, Fiva, Fcaata, etc. Le solde est constitué de charges de gestion courante et de diverses charges techniques.

Après une progression de 4,8 % en 2005, les dépenses devraient légèrement décélérer en 2006 et 2007 (+ 4,3 % et + 3,4 % respectivement). Elles atteindraient l'année prochaine un montant global de 10,2 milliards d'euros.

Les charges de la Cnam AT-MP

(en droits constatés et en millions d'euros)

2004

2005

%

2006

%

2007

%

8.995,3

9.429,7

4,8

9.838,1

4,3

10.175,8

3,4

Source : Direction de la sécurité sociale

1. Une progression modérée des dépenses de prestations

En 2005 , les dépenses de prestation ont augmenté de 2,2 %, sous l'effet de la croissance des prestations pour incapacités permanente et temporaire (respectivement + 3,5 % et + 2,1 %).

En 2006 , les prestations devraient progresser de 2,8 % ; la croissance des prestations pour incapacités permanente et temporaire est estimée, respectivement, à 3,5 % et 2,9 %.

En 2007 , les prestations pour incapacité temporaire et permanente, y compris les dotations pour provision, augmenteraient de 2,4 %. Le montant des rentes d'incapacité permanente devrait être revalorisé de 1,8 % au 1 er janvier 2007.

2. Une nouvelle augmentation des dépenses de transfert

Entre 2002 et 2005, les dépenses de transfert à la charge de la branche AT-MP du régime général ont crû de 28 %. Ces dépenses devraient encore progresser d'environ 12 % en 2006. En 2007, les transferts vers les autres régimes et fonds, notamment les fonds « amiante », progresseraient de 7 % , tandis que le transfert à la branche assurance maladie augmenterait de 24,2 % .

Le poids des transferts dans le total des dépenses de la branche s'est fortement alourdi depuis 2000. Il représentait, à cette date, 11,9 % de l'ensemble des cotisations ; ce taux est passé à 21 % en 2006 et devrait encore progresser d'un demi-point en 2007.

Les principaux transferts à la charge de la branche AT-MP

(en millions d'euros)

2002

2003

2004

2005

2006*

2007*

Mines

426,9

464,9

448,6

483,5

480,0

450,0

MSA

109,0

108,8

111,3

110,2

110,2

110,2

Branche maladie

300,0

330,0

330,0

330,0

330,0

410,0

Fcat

71,7

64,4

58,2

54,5

54,5

54,5

Fcaata

300,0

450,0

500,0

600,0

700,0

800,0

Fiva

180,0

190,0

100,0

200,0

315,0

315,0

Total des principaux transferts

1.387,6

1.608,1

1.548,1

1.778,2

1.989,7

2.139,7

* Les données concernant les années 2006 et 2007 sont des estimations. Source : Cnam

a) Un accroissement des transferts vers les organismes de sécurité sociale attendu en 2007

La branche AT-MP du régime général assure des transferts de compensation vers les régimes de sécurité sociale dont les effectifs diminuent, notamment les régimes des mines et des salariés agricoles, afin de les aider à faire face à leurs obligations financières. Ces dépenses sont stabilisées depuis quelques années. Si elles pèsent sur les comptes du régime général, elles ne se traduisent pas, en revanche, par une dégradation du solde net de la branche AT-MP de l'ensemble des régimes de base.

La situation est tout autre pour ce qui concerne le transfert de la branche AT-MP du régime général vers la branche maladie du même régime. Ce transfert vise à compenser les charges supportées de manière indue par l'assurance maladie, en raison des phénomènes de sous-déclaration et de sous-reconnaissance des accidents du travail et des maladies professionnelles.

Depuis 2004, son montant était fixé à 330 millions d'euros. Il est porté à 410 millions d'euros en 2007 . Cette augmentation permet d'amener le montant du transfert dans la fourchette préconisée par la commission Diricq, qui a évalué le coût de la sous-déclaration et de la sous-reconnaissance pour l'assurance maladie entre 356 et 749 millions d'euros .

Cette augmentation, après plusieurs années de stabilité, s'explique vraisemblablement par l'amélioration de la situation financière de la branche AT-MP, qui lui permet de faire face à cette dépense supplémentaire. Elle présente par ailleurs l'avantage d'améliorer, quoique de manière très limitée, le solde de la branche maladie.

b) Des transferts vers les « fonds de l'amiante » en forte progression

L'indemnisation des victimes de l'amiante repose sur deux dispositifs principaux : le fonds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (Fcaata), institué par la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999, et le fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (Fiva), créé par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001.

Le Fcaata verse aux salariés victimes de l'amiante une allocation de cessation anticipée d'activité et s'assimile donc à un régime de préretraite. Le Fiva complète l'indemnisation offerte par les régimes de sécurité sociale afin que les victimes de l'amiante obtiennent une réparation complète de leur préjudice.

Bien que les sommes versées par ces fonds n'entrent pas dans le champ des prestations du régime général, la branche AT-MP du régime général en est le principal financeur. En 2005, les dotations totales de la branche au Fiva et au Fcaata ont atteint 800 millions d'euros; elles s'élèveraient à 1,015 milliard d'euros en 2006 et à 1,115 milliard en 2007.

La rapide dégradation de la situation financière du Fcaata

Les dépenses de prestations du Fcaata pour l'exercice 2005 progressent de 21 % par rapport à l'exercice 2004 et s'établissent à 787 millions d'euros, pour environ 31.000 bénéficiaires. Les prévisions, encore fragiles, pour 2006 et 2007 font état d'une décélération progressive de la croissance des charges (11 % en 2006 et 8 % en 2007).

Cette évolution s'explique par l'augmentation du nombre de sorties du dispositif : les bénéficiaires de l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (Accata) qui atteignent l'âge de la retraite cessent en effet de percevoir leur allocation.

Évolution des dépenses du Fcaata de 2002 à 2007

(en millions d'euros)

2002

2003

%

2004

%

2005

%

2006

%

2007

%

Charges

324,6

515,7

59

650

28

787

21

875

11

948

8

Source : rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale

Le financement du fonds est assuré, pour l'essentiel, par la branche AT-MP du régime général, dont la contribution progresse encore de 100 millions d'euros en 2007 (soit une hausse de 14,2 %). S'y ajoutent le versement d'une partie des droits de consommation sur le tabac et les produits de la nouvelle contribution à la charge des entreprises ayant exposé leurs salariés à l'amiante pour environ 30 millions d'euros créée par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2005.

Ressources du Fcaata

(en millions d'euros)

2002

2003

2004

2005

2006*

2007*

Contributions de la branche AT-MP du régime général

300

450

500

600

700

800

Contribution des entreprises (mesure nouvelle LFSS pour 2005)

-

-

-

68

55

55

Droits sur les tabacs

34

32

28

29

29

30

Total

334

482

528

764

852

885

* prévisions Source : rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale

Le montant des recettes produites par la contribution à la charge des entreprises s'est cependant révélé très inférieur aux prévisions. Alors que le rendement attendu en 2005 était de 120 millions d'euros, la contribution n'a permis de prélever que 68 millions d'euros ; de plus, sur cette somme, 27 millions d'euros ont été seulement estimés par l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss), mais non réellement recouvrés, en raison des nombreux contentieux engagés par les entreprises qui leur ont permis de différer le versement de cette contribution.

Cette contribution est soumise à un mécanisme complexe de plafonnement, qui explique son faible rendement. Elle n'est pas due pour le premier salarié admis à bénéficier de l'Acaata, et ne peut excéder 2 millions d'euros pour chaque année civile, ni 2,5 % du total des salaires versés par l'entreprise au cours du dernier exercice connu. Afin d'augmenter son rendement, votre commission vous proposera de relever, par amendement, l'un des plafonds.

Par delà le problème posé par cette contribution, votre commission est préoccupée par la dégradation de la situation financière du fonds. Depuis plusieurs années, les charges du Fcaata excèdent ses recettes ; jusqu'en 2004, le fonds a pu faire face à cette situation en puisant dans les réserves qu'il avait constituées dans les premières années suivant sa création, au moment où les dotations qu'il percevait excédaient largement le montant de ses dépenses.

L'épuisement de ces réserves a cependant rendu les comptes du Fcaata déficitaires pour la première fois en 2005, à hauteur de 84 millions d'euros. En 2006 et 2007, les déficits cumulés devraient s'établir respectivement à 175 et 238 millions d'euros.

La situation financière du Fiva

La situation financière du Fiva est moins difficile dans la mesure où les dotations qu'il a obtenues ont excédé ses dépenses jusqu'en 2004, ce qui lui a permis d'accumuler d'importantes réserves qui sont encore loin d'être épuisées. Au 31 mai 2006, le Fiva avait présenté plus de 24.132 offres d'indemnisation à des personnes victimes de l'amiante, qui les ont acceptées dans 95 % des cas.

Evolution des ressources et des dépenses du Fiva

(en millions d'euros et en pourcentage)

2004

2005

2006

2007

CHARGES

462

431

424

531

Indemnisations

457

399

392

499

Provisions

26

26

26

Autres charges

6

6

6

6

PRODUITS

100

347

394

391

Contributions de la Cnam AT-MP

100

200

315

315

Contributions de l'Etat

52

48

50

Reprise sur provisions

75

26

26

Autres produits

21

5

Résultat net

- 362

- 84

- 30

- 140

Résultat net cumulé

333

249

219

79

* prévisions Source : Direction de la sécurité sociale

Les dépenses du Fiva tendent à se stabiliser, en raison de la part croissante, dans les dossiers reçus, des pathologies bénignes, dont le coût d'indemnisation est évidemment inférieur à celui des pathologies malignes. L'épuisement des réserves ne devrait pas intervenir avant la fin de l'exercice 2007.

C. LA BRANCHE DEVRAIT RENOUER AVEC LES EXCÉDENTS EN 2007

Déficitaire depuis 2002, la branche AT-MP du régime général devrait se rapprocher de l'équilibre en 2006 et retrouver un solde excédentaire en 2007.

1. Le régime général

Le tableau ci-dessous retrace, pour les années 2002 à 2007, le montant des résultats nets de la branche AT-MP de la Cnam, en droits constatés.

Solde net de la branche AT-MP (en droits constatés)

(en millions d'euros)

2002

2003

2004

2005

2006*

2007*

Résultat net

- 45,4

- 475,6

- 183,8

- 438

- 40

85

*prévisions Source : Direction de la sécurité sociale

? Le déficit enregistré en 2005 est moins élevé que celui qui avait été initialement envisagé : la prévision établie fin 2004 faisait état d'un déficit supérieur à 700 millions d'euros ; les charges constatées en 2005 se sont révélées inférieures de 36 millions d'euros aux prévisions et les recettes supérieures de 60 millions d'euros. Les montants des charges et des produits ont par ailleurs été rebasés en fonction des réalisations, meilleures que prévues, de l'exercice 2004.

? En conséquence, le déficit attendu en 2006 est limité à environ 40 millions d'euros, un niveau nettement inférieur à la prévision de 152 millions d'euros arrêtée l'an dernier. Les dépenses consenties au titre des rentes pour incapacités temporaire et permanente ont été plus dynamiques que prévu (3,5 % contre 2,4 % et 2,9 % contre 1,8 % respectivement), mais la progression de la masse salariale a, en contrepartie, été révisée à la hausse (4,3 % au lieu de 3,7 %).

? En 2007 , la branche serait excédentaire de 85 millions d'euros. Ce résultat diffère de celui figurant dans le rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale de septembre 2006 (157 millions d'euros), car il intègre l'augmentation du transfert à l'assurance maladie (80 millions d'euros), décidée après la publication du rapport, et la révision des prévisions de recettes des cotisations, impôts et taxes affectés à la sécurité sociale (+ 8 millions).

2. Les régimes de base

Compte tenu du poids de la branche AT-MP du régime général dans l'ensemble des régimes de base, il n'est guère surprenant que son résultat influe sur la situation financière de l'ensemble des branches.

Le résultat net global des régimes de base de la branche est déficitaire depuis 2003. Il s'est fortement dégradé en 2005 et devrait se rapprocher de l'équilibre (- 6 millions d'euros) en 2006, en ligne avec les évolutions constatées pour le régime général. Les excédents dégagés, notamment, par le fonds d'allocation temporaire d'invalidité des agents des collectivités locales (Fatiacl) expliquent que le déficit de l'ensemble des régimes de base soit inférieur à celui du seul régime général. L'excédent attendu l'an prochain dépasserait légèrement 100 millions d'euros.

Le tableau suivant présente les résultats nets des différents fonds et régimes de base de la branche AT-MP.

Situation financière des branches AT-MP des régimes de base

(en millions d'euros)

RÉSULTAT NET

Cnam AT-MP

Salariés agricoles

Exploitants agricoles

Fcata

Ensemble des régimes agricoles (RA)

Fonctionnaires

Fatiacl

CANSSM

EDF-GDF (Base)

SNCF

RATP

Enim

Banque de France

Petits régimes spéciaux

Ensemble des régimes spéciaux (RS)

Fcat

Autres régimes de base (ARB)

RA + RS + ARB

- 25 -

Tous régimes de base

2002

- 45

11

43

3

57

0

41

0

0

0

0

0

0

- 1

40

1

1

98

52

2003

- 476

37

57

0

94

0

55

- 8

0

0

0

- 31

1

2

18

1

1

113

- 362

2004

- 184

13

24

1

38

0

55

- 27

0

0

0

- 31

0

2

- 2

1

1

37

- 147

2005

- 438

2

- 8

0

- 6

0

57

8

0

0

0

- 30

0

0

34

0

0

29

- 410

2006

- 40

- 39

0

0

- 39

0

58

9

0

0

0

7

0

0

73

0

0

34

- 6

2007

84

- 30

7

0

- 23

0

62

- 17

0

0

0

0

0

0

45

0

0

22

107

Enim : Etablissement national des invalides de la marine Source : Direction de la sécurité sociale

Fcat : Fonds commun des accidents du travail

Fcata : Fonds commun des accidents du travail agricole

Fatiacl : Fonds d'allocation temporaire d'invalidité des agents des collectivités locales

CANSSM : Caisse nationale de sécurité sociale pour les mines

III. LA RÉFORME DE LA BRANCHE SUSPENDUE À UN ÉVENTUEL ACCORD ENTRE LES PARTENAIRES SOCIAUX

Les partenaires sociaux ont engagé, en décembre 2005, des négociations en vue d'une réforme globale de la branche. Un accord a été trouvé, en février 2006, sur sa gouvernance. Dans l'attente de la fin des négociations, le Gouvernement a décidé de n'inscrire aucune mesure nouvelle concernant la branche AT-MP dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale.

La réflexion se poursuit par ailleurs sur la réforme des fonds de l'amiante, à la lumière du rapport de la mission d'information de l'Assemblée nationale 2 ( * ) et des travaux commandés par le Gouvernement.

Il est possible, enfin, d'établir un premier bilan de l'application de la convention d'objectifs et de gestion (COG) passée entre l'Etat et la branche AT-MP.

A. UN PREMIER BILAN DE LA MISE EN oeUVRE DE LA CONVENTION D'OBJECTIFS ET DE GESTION

L'article 56 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 a permis à l'Etat et à la branche AT-MP de conclure une convention d'objectifs et de gestion (COG). La première convention couvre la période 2004-2006 et arrive donc bientôt à échéance.

1. De nombreuses réalisations

Une grande partie des objectifs assignés par la COG ont été atteints ou sont en passe de l'être. Les actions menées se sont organisées autour de quatre orientations principales :

donner un nouvel élan à la politique de prévention des risques professionnels

Le premier budget pluriannuel du fonds national de prévention des accidents du travail et maladies professionnelles a été mis en oeuvre dans les délais impartis;

renforcer la capacité de la branche à s'adapter à l'évolution de ses missions

Une discussion entre l'Etat et la branche, sur les hypothèses relatives à l'équilibre financier de celle-ci, a lieu à la fin du premier semestre de chaque année.

Afin d'améliorer les statistiques sur les accidents du travail et les maladies professionnelles, une discussion est engagée entre l'Etat et la branche pour une convention d'échanges réciproques d'informations.

Les nouveaux outils de gestion de la réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles sont en cours de mise en place et le site internet de la branche AT-MP a été ouvert, afin de renforcer l'information du public.

Élargir la gamme des services de la branche AT-MP

Un cycle de formation de l'ensemble des techniciens et enquêteurs s'est déroulé et les textes sur l'accompagnement médical des victimes d'accidents du travail et maladies professionnelles graves ont été publiés (ordonnance n° 2005-804 du 18 juillet 2005 et décret n° 2006-777 du 30 juin 2006). Les règles d'indemnisation des victimes bénéficiaires d'un stage de rééducation professionnelle ont été simplifiées. La déclaration d'accident du travail et la déclaration de salaires sont désormais possibles par voie électronique.

Renforcer la qualité de service

Plusieurs mesures de simplification des procédures ont été adoptées :

- la procédure de révision des tableaux de maladies professionnelles, a été modifiée : la consultation du Conseil d'Etat n'est plus nécessaire, depuis la publication de l'ordonnance du 18 juillet 2005 ;

- l'ordonnance n° 2004-329 du 15 avril 2004 a allégé certaines procédures relatives aux accidents du travail et aux maladies professionnelles ; en particulier, l'enquête légale prévue à l'article L. 442-1 du code de la sécurité sociale, obligatoire en cas d'accident entraînant le décès ou une incapacité totale de travail de la victime, a été supprimée parce qu'elle faisait double emploi avec l'enquête administrative engagée, en cas d'accident, par la caisse primaire d'assurance maladie, en application de l'article L. 441-3 du même code.

Par ailleurs, les indicateurs de performance prévus par la convention sont désormais en place, permettant un meilleur pilotage de la branche.

2. Les chantiers encore ouverts

Deux points sont encore en attente d'une mise en oeuvre effective :

- les textes relatifs au conseil de surveillance de la branche sont toujours en préparation ;

- les discussions se poursuivent en vue de la conclusion d'une convention pluriannuelle entre la branche AT-MP et l'Institut national de recherche et de sécurité (INRS).

La convention d'objectifs et de gestion devrait faire l'objet d'un avenant , la reconduisant pour deux ans. Le travail doit se poursuivre sur la réforme des comités techniques régionaux, qui ont pour mission d'assister les partenaires sociaux pour la définition des actions de prévention dans les différents secteurs d'activité, ainsi que pour la réforme de la tarification et les incitations tarifaires à la prévention, qui font actuellement partie du champ des négociations entre les partenaires sociaux.

B. LE POINT SUR LA NÉGOCIATION ENTRE LES PARTENAIRES SOCIAUX

En 2004, le Parlement a souhaité inciter les partenaires sociaux à négocier une réforme de la branche AT-MP. L'article 54 de la loi n° 2004-810 du 13 août 2004 relative à l'assurance maladie dispose en effet que « les organisations professionnelles d'employeurs et les organisations syndicales de salariés représentatives au plan national sont invitées, dans un délai d'un an après la publication de la présente loi, à soumettre au Gouvernement et au Parlement des propositions de réforme de la gouvernance de la branche accidents du travail et maladies professionnelles ainsi que, le cas échéant, d'évolution des conditions de prévention, de réparation et de tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles ».

Le délai d'un an prévu dans la loi n'a pas été respecté puisque les négociations entre les partenaires sociaux ont été ouvertes seulement en décembre 2005. Elles sont cependant aujourd'hui bien engagées : dix-neuf réunions paritaires se sont tenues à ce jour. Quatre groupes de travail ont été constitués :

? le premier doit déterminer les « chiffres-clés » de la branche AT-MP, afin de parvenir à un diagnostic partagé sur la situation de la branche et des risques professionnels en France ;

? le deuxième est consacré à la tarification , qui pourrait être rendue plus incitative à la prévention, grâce à un mécanisme de bonus/malus dont les contours restent encore à préciser ;

? le troisième se penche sur la réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles : si la demande, portée par les syndicats, d'une réparation intégrale du préjudice subi par les victimes a peu de chances de rencontrer l'approbation des organisations d'employeurs, en raison de son coût élevé, il n'est pas exclu que la réparation forfaitaire servie aux victimes soit améliorée ; la question du maintien dans l'emploi des salariés victimes d'accidents du travail ou de maladies professionnelles est également posée ;

? le dernier étudie les mesures à prendre pour améliorer la prévention des risques professionnels et porte une attention particulière aux PME et aux très petites entreprises (TPE).

Un accord a par ailleurs été obtenu, le 28 février 2006, sur la gouvernance de la branche. Les partenaires sociaux se sont prononcés en faveur du maintien d'un strict paritarisme - provoquant la déception des associations de victimes qui auraient souhaité être représentées au sein de la commission des AT-MP de la Cnam - et ont officialisé la pratique consistant à confier la présidence de la commission à un représentant des employeurs, ces derniers assumant la totalité du financement de la branche. L'accord précise les compétences de la commission, qui aura notamment pour attribution de désigner le directeur des risques professionnels de la Cnam. Il institue des commissions régionales AT-MP, strictement paritaires, chargées d'améliorer la coordination entre la direction des risques professionnels et les caisses régionales et locales (Cram et CPAM).

L'ouverture de la négociation entre les partenaires sociaux explique que le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 ne comporte aucune mesure nouvelle dans son volet accidents du travail et maladies professionnelles. Le Gouvernement avait envisagé, avant l'été, d'y faire figurer quelques mesures relatives à la tarification mais y a renoncé, face à l'opposition extrêmement ferme des partenaires sociaux. Le contexte actuel de promotion du dialogue social aurait, il est vrai, rendu peu compréhensible une initiative des pouvoirs publics en la matière.

C. LA RÉFORME DU DISPOSITIF D'INDEMNISATION DES VICTIMES DE L'AMIANTE

La mission d'information du Sénat sur le bilan et les conséquences de la contamination par l'amiante avait formulé, à la fin de l'année 2005, de nombreuses propositions relatives aux modalités de fonctionnement et de financement du Fiva et du Fcaata 3 ( * ) .

1. Une large convergence de vues entre les deux assemblées

Votre commission constate avec satisfaction que les cinquante et une propositions formulées par la mission d'information de l'Assemblée nationale rejoignent très largement les recommandations de la mission sénatoriale présentées quelque temps auparavant. Si la mission de l'Assemblée nationale a davantage insisté sur les mesures de prévention de nature à protéger les travailleurs et les particuliers contre l'amiante placée dans les locaux professionnels ou d'habitation, elle s'est en revanche relativement peu attardée sur la question des responsabilités dans le drame de l'amiante, sur laquelle la mission sénatoriale avait déjà, il est vrai, apporté d'importants éclaircissements.

en ce qui concerne le régime de « préretraite amiante », les deux missions s'accordent sur l'idée d'officialiser une voie d'accès au Fcaata sur une base individuelle, en complément du système de liste aujourd'hui en vigueur qui ne permet pas de prendre en compte toutes les personnes ayant été exposées à l'amiante, et de faire bénéficier l'ensemble des travailleurs de droits équivalents, quel que soit leur statut (fonctionnaires, militaires, ouvriers d'Etat, salariés du privé, etc.).

sur le Fiva , les deux missions ont constaté qu'il n'avait que partiellement atteint un de ses objectifs, qui était de désengorger les tribunaux en offrant aux victimes une indemnisation rapide. La reconnaissance par les tribunaux de la faute inexcusable de l'employeur fait en effet bénéficier les victimes d'une majoration de leur rente AT-MP, ce qui rend souvent la voie contentieuse plus avantageuse financièrement que le recours au Fiva. Permettre au Fiva d'accorder aux victimes cette majoration de rente, sans qu'elles aient besoin de saisir les tribunaux, permettrait de résoudre cette difficulté et assurerait une indemnisation égale de l'ensemble des personnes malades de l'amiante. Les deux missions ont également recommandé d'accroître les moyens du service contentieux du fonds afin qu'il puisse engager, à l'encontre des entreprises responsables de l'exposition à l'amiante, les recours en justice qui lui permettraient de récupérer tout ou partie des sommes versées aux victimes.

Pour le financement de ces fonds, les deux missions proposent de définir une clé de répartition, stable dans le temps, fixant les contributions respectives de l'Etat et de la sécurité sociale. Elles suggèrent que l'Etat double, au moins, sa contribution au financement des fonds de l'amiante.

Votre commission vous propose d'avancer sur cette voie et de prévoir, par amendement, que la part de l'Etat dans le financement du Fiva sera portée progressivement à 30 %, d'ici à 2009.

Plus largement, l'analyse des conditions d'indemnisation des victimes de l'amiante invite à une réflexion d'ensemble sur la réparation des accidents du travail et des maladies professionnelles, dont les principes ont été posés en 1898. Les deux missions parlementaires ont notamment jugé souhaitable de rendre la tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles plus incitative à la prévention. Elles ont aussi insisté sur la nécessité d'un renforcement des contrôles, afin de protéger les salariés contre toute nouvelle exposition à l'amiante, ce qui appelle un accroissement des moyens de l'inspection du travail.

Un point sépare les deux missions et mérite d'être mentionné, même s'il excède le champ de compétence de votre commission des affaires sociales : la question de l'éventuelle révision de la loi du 10 juillet 2000, dite loi « Fauchon », tendant à préciser la définition des délits non intentionnels. Alors que la mission sénatoriale avait estimé que cette loi ne faisait pas obstacle à la mise en cause pénale des responsables du drame de l'amiante, la mission de l'Assemblée nationale soutient au contraire l'idée d'une nécessaire réforme de ce texte.

2. Les suites données aux recommandations des missions parlementaires

Votre commission se réjouit que le Gouvernement ait déjà pris en compte plusieurs recommandations des missions parlementaires. Elle a auditionné, le 13 juin 2006, le ministre délégué à l'emploi, au travail et à l'insertion professionnelle des jeunes, Gérard Larcher, qui a donné des indications sur les avancées déjà obtenues et sur les projets du Gouvernement.

Au titre des avancées, on peut souligner que :

- les contrôles sur les chantiers de désamiantage ont été considérablement intensifiés : l'inspection du travail a contrôlé 780 chantiers de désamiantage en juillet et août 2005, contre seulement 74 en 2004 ; ces contrôles ont permis de repérer des infractions à la réglementation dans les deux tiers des cas ; le ministre a donné instruction aux services de l'inspection du travail de maintenir une vigilance constante sur ces chantiers ;

- le décret d'application de l'article 96 de la loi de finances rectificative du 30 décembre 2003, nécessaire pour que les fonctionnaires et contractuels du ministère de la défense bénéficient de la cessation anticipée d'activité, a été publié le 9 avril 2006 ;

- la réglementation pour la protection des travailleurs , ancienne de dix ans, a fait l'objet d'un réexamen au cours du deuxième semestre 2005, qui devrait déboucher sur la publication d'un nouveau décret, prenant mieux en compte l'évolution des connaissances scientifiques, notamment sur l'amiante non friable, et les exigences du droit communautaire ;

- la réforme du suivi post-professionnel des travailleurs de l'amiante, d'abord conduite à titre expérimental, est en passe d'être généralisée : l'expérimentation, au cours de laquelle 20.000 personnes ont demandé à bénéficier du suivi médical et 6.000 ont bénéficié d'un examen au scanner, a d'abord été conduite dans quatre régions ; le Gouvernement a ensuite décidé d'étendre cette expérimentation à l'ensemble du territoire à compter de la fin 2005, dans le respect de règles éthiques qui imposent que les salariés soient informés de leurs droits, puis effectuent une démarche volontaire. Le ministère travaille, de plus, avec l'Institut national de lutte contre le cancer, à l'élaboration d'une plaquette de sensibilisation aux dangers de l'amiante ;

- un effort sans précédent de recrutement d'inspecteurs et de contrôleurs du travail doit permettre d'accroître de sept cents personnes les effectifs de l'inspection du travail à l'horizon 2010 ; deux cents créations de postes sont prévues dans le projet de budget pour 2007 ; des cellules régionales pluridisciplinaires sont par ailleurs mises en place, afin d'apporter un appui scientifique et technique à l'inspection du travail. Elles sont présentes dans une quinzaine de régions et seront généralisées à l'ensemble du territoire en 2007 ;

- le dispositif de veille sanitaire a été renforcé, avec la création, en septembre 2005, de l'agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail (Afsset), qui s'est vu attribuer des moyens importants par le ministère du travail (5,6 millions d'euros en 2005 et 8,6 millions en 2006), avec l'ambition de devenir un pôle d'expertise sur les risques professionnels.

Si les avancées sont notables, la réforme du Fiva et du Fcaata est en revanche encore en suspens. Il semble cependant que la réflexion du Gouvernement sur ce sujet s'oriente dans le sens des préconisations des missions d'information parlementaires.

Le Gouvernement a en particulier commandé un rapport à l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) sur la réforme du Fcaata, dont les conclusions rejoignent celles des missions parlementaires. Remis en décembre 2005, ce rapport effectue d'abord un constat des défaillances de l'actuel dispositif de cessation anticipée d'activité : des salariés qui ont été exposés à l'amiante en sont exclus parce que l'établissement où ils ont travaillé n'est pas inscrit sur les listes définies au niveau national ; inversement, des salariés qui ont travaillé dans des établissements figurant sur ces listes, mais qui y ont exercé des métiers ne les ayant pas exposés à l'amiante, peuvent partir en préretraite ; la coordination entre le régime général de la sécurité sociale et les régimes de la fonction publique est, en outre, insuffisamment assurée.

Face à ce constat, l'Igas propose que le bénéfice de la cessation anticipée d'activité soit accordé sur une base individuelle, à partir d'un examen du parcours professionnel du salarié et en s'appuyant sur une liste des métiers et des secteurs caractérisés par un risque élevé d'exposition à l'amiante. Cette appréciation des situations individuelles pourrait s'inspirer des critères définis en Allemagne et en Belgique, ces deux pays s'étant déjà dotés de grilles d'évaluation. Les demandes seraient instruites par les caisses régionales d'assurance maladie (Cram). Le nouveau dispositif s'appliquerait sans distinction aux travailleurs relevant du régime général de la sécurité sociale et des régimes de la fonction publique. L'Igas pose également la question de l'âge d'entrée dans le dispositif et du niveau de l'allocation de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (Acaata) par rapport au salaire de référence.

Votre commission est consciente que la mise en oeuvre rapide de la réforme des fonds de l'amiante supposerait de dégager des moyens budgétaires supplémentaires, difficiles à réunir dans le contexte actuel de contrôle rigoureux de la dépense publique. Elle observe également qu'il est difficile d'engager cette réforme avant de connaître les résultats de la négociation sur la réforme de la branche AT-MP, en raison des liens qu'elle entretient avec ces fonds. Elle souhaite cependant que la réflexion aboutisse à une réforme des « fonds amiante » dans les meilleurs délais.

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Sous réserve des amendements qu'elle vous présente, votre commission vous demande d'adopter les dispositions relatives aux accidents du travail et aux maladies professionnelles du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2007.

* 1 En 2005, les tableaux 44, 91 et 94 ; en 2006 les tableaux 51 et 62.

* 2 Rapport d'information n° 2884 de l'Assemblée nationale, présenté par Jean Lemière au nom de la mission d'information sur les risques et les conséquences de l'exposition à l'amiante, déposé le 22 février 2006.

* 3 Cf. Rapport d'information n° 37 (session 2005-2006), présenté par Gérard Dériot et Jean-Pierre Godefroy au nom de la mission sénatoriale d'information sur les conséquences de la contamination par l'amiante : « Le drame de l'amiante en France. Comprendre, mieux réparer, en tirer des leçons pour l'avenir ».

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