Article 21 (articles 302 bis KH 1693 sexies du code général des impôts) - Institution d'une taxe sur les services fournis par les opérateurs de communications électroniques

Cet article vise à insérer un nouvel article 302 bis KH dans le code général des impôts afin d'instituer, au profit du budget général de l'État, une taxe sur les services fournis par les opérateurs de communications électroniques.

I - Le droit existant

A. Des redevances et taxes spécifiques

Les opérateurs de télécommunications et les fournisseurs d'accès à Internet sont aujourd'hui soumis à diverses redevances d'occupation du domaine public, parmi lesquelles :

- les redevances liées à l'utilisation des fréquences de faisceaux hertziens, GSM, UMTS (système de télécommunications mobiles personnelles), satellitaires, de réseaux indépendants ;

- et les redevances de droit de passage pour l'utilisation des réseaux filaires principalement payées aux collectivités territoriales.

Par ailleurs, en tant que distributeurs de service de télévision, les fournisseurs d'accès Internet et les opérateurs de téléphonie mobile sont redevables de la taxe sur les services de télévisions, prévue à l'article 302 bis KB du CGI.

B. Une puissance financière très importante

Selon le rapport d'activité 2007 de l'Autorité de régulation des communications électroniques (ARCEP), le revenu des opérateurs de communications électroniques sur le marché de détail s'élève à 42,5 milliards d'euros en 2007, qui se répartissent de la façon suivante :

- 11 milliards d'euros pour la téléphonie fixe ;

- 17,8 milliards d'euros pour la téléphonie mobile ;

- 4,6 milliards d'euros pour l'accès à Internet ;

- 3,2 milliards d'euros pour les services de capacité (liaisons louées et transport de données) ;

- 2,6 milliards d'euros pour les services à valeur ajoutée (renseignements, SMS).

Les masses financières en jeu dans ce secteur sont ainsi très impressionnantes, notamment par rapport à celles présentes dans celui de l'audiovisuel.

II - Le texte du projet de loi

Le présent article tend à créer une taxe sur les services fournis par les opérateurs de communications électroniques fonctionnant selon les mêmes modalités que la taxe sur la publicité diffusée par les chaînes de télévision instituée par l'article 20.

Elle serait prévue dans un nouvel article 302 bis KH du CGI, introduit dans un nouveau chapitre VII octies inséré dans le titre II de la première partie du livre premier du CGI.

A. Les redevables de la taxe

Le I de l'article 302 bis KH instituée par le présent article prévoit que sont concernés par la taxe tous les opérateurs de communications électroniques au sens de l'article L. 32 du code des postes et des communications électroniques, établis en France et déclarés auprès de l'Autorité de régulation des télécommunications en vertu de l'article L. 33-1 du code des postes et des communications électroniques.

Les opérateurs de communications électroniques sont « les personnes physiques ou morales exploitant un réseau de communications électroniques 89 ( * ) ouvert au public ou fournissant au public un service de communications électroniques 90 ( * ) ».

Il s'agit en pratique des opérateurs de téléphonie (SFR, Bouygues Télécom, Orange) et des fournisseurs d'accès à Internet (Free, France Télécom, Neuf Cegetel) qui fournissent en général des offres dites « triple play » (services de téléphonie, accès à Internet et service de télévision).

B. L'assiette et l'exigibilité de la taxe

Le premier alinéa du II de l'article 302 bis KH prévoit que l'assiette est en principe constituée du montant, hors TVA, des abonnements et autres sommes acquittés par les usagers aux opérateurs mentionnés au I en rémunération des services de communications électroniques qu'ils fournissent .

Il s'agit donc des services vendus sur le marché de la téléphonie et d'Internet. Toutefois, ce marché de détail doit être considéré de manière large, comme le précise l'avis de l'ARCEP sur le projet de loi, puisque peuvent être incluses dans l'assiette de la taxe, les sommes versées par les consommateurs finaux sur le marché résidentiel, par les entreprises sur le marché de détail professionnel et par les opérateurs tiers sur les marchés de gros.

Les alinéas 2 à 5 de ce paragraphe II précisent néanmoins les sommes exclues de l'assiette de la taxe, à savoir :

- les sommes acquittées au titre des prestations d'interconnexion et d'accès faisant l'objet des conventions définies au I de l'article L. 34-8 du code des postes et communications électroniques . Cette exception paraît logique dans la mesure où l'on ne saurait faire payer deux fois une même communication électronique, au moment où elle serait achetée sur le marché de gros par un opérateur de télécommunications (prestations d'interconnexion) et au moment où ce dernier la vendrait au consommateur final 91 ( * ) ;

- et les sommes acquittées au titre des prestations de diffusion ou le transport des services de communication audiovisuelle . Il s'agit ici de bien préciser que ne sont pas concernées, par exemple, les sommes versées pour la partie des offres ADSL liée à la télévision , qui ne relève pas d'un service de communications électroniques, mais d'un service de communication audiovisuelle.

On peut noter que tous les services qui ne relèvent pas de la communication électronique ne seront pas compris dans l'assiette de la taxe. Peuvent être cités en exemple la vente et la location de terminaux et équipements, la gestion des centres d'appels ou encore les revenus des annuaires papier.

Le III du I du présent article prévoir que l'exigibilité de la taxe est constituée par l'encaissement du produit des abonnements et autres sommes versées par les usagers et comprises dans l'assiette de la taxe.

C. Le taux de la taxe

Le IV du I du présent article précise que le taux applicable est de 0,9 % des encaissements concernés .

Un abattement de 5 millions d'euros est toutefois appliqué de manière systématique sur l'assiette afin, notamment, de ne pas taxer des opérateurs émergents ou disposant de chiffre d'affaires très faibles (fournisseurs d'accès à Internet locaux...).

D. Le produit attendu de la taxe

D'après les informations transmises à vos rapporteurs, le produit de cette taxe serait de 379 millions d'euros en 2009 . Cette somme affectée au budget général constitue une compensation intéressante pour l'Etat qui a pris en charge, dans le cadre de la loi de finances pour 2009, une dotation budgétaire de 450 millions d'euros pour France Télévisions, au titre de la suppression de la publicité après 20 heures à partir du 5 janvier.

E. Liquidation et recouvrement de la taxe

Le V et le VI du I du présent article déterminent les principes généraux de la liquidation et du recouvrement de la taxe due au titre de l'année civile précédente et le II du présent article le régime spécial des redevables de cette taxe.

Les règles applicables à ce nouvel article 302 bis KH sont strictement les mêmes que celles prévues à l'article 302 bis KG créé par l'article 20 du présent projet de loi (voir commentaire supra).

III - L'examen par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté un amendement de M. Benoist Apparu (UMP-Marne) visant à distinguer les opérateurs de renseignement téléphonique des opérateurs de télécommunications fixes et mobiles afin qu'ils ne soient pas soumis à la taxe. Cette disposition aurait un impact financier relativement marginal.

En raison de cet amendement et du retard dans l'entrée en vigueur de la taxe, son produit attendu serait en fait de 347 millions d'euros .

IV - La position de votre commission

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

* 89 Les réseaux de communications électroniques correspondent à toute installation ou tout ensemble d'installations de transport ou de diffusion ainsi que, le cas échéant, les autres moyens assurant l'acheminement de communications électroniques, notamment ceux de commutation et de routage.

* 90 Les communications électroniques sont « des émissions, des transmissions, ou réceptions de signes, de signaux, d'écrits ou de sons, par voie électromagnétique ».

* 91 En revanche, les sommes versées par une entreprise d'un autre secteur pour acheter un service de communications électroniques sur le marché de gros sont visées par la taxe.

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