II. LA PROPOSITION DE RÉSOLUTION : LA CRAINTE D'UNE REMISE EN CAUSE DE LA DIRECTIVE DU 16 DÉCEMBRE 1996 ET D'UNE SUBORDINATION DU DROIT DE GRÈVE AU MARCHÉ

La proposition de résolution est une réponse directe aux arrêts Viking, Laval et Rüffert de la Cour de justice des communautés européennes, dont elle conteste le raisonnement et les conclusions.

Le texte soumis à votre commission témoigne de nombreuses convergences de vue avec les positions adoptées par la Confédération européenne des syndicats (CES). Votre rapporteur a d'ailleurs entendu l'un de ses représentants.

A. UNE CRITIQUE DE LA JURISPRUDENCE DE LA COUR DE JUSTICE

La proposition de résolution dépasse le strict cadre de la directive « détachement de travailleurs ». Elle condamne l'esquisse par ces arrêts d'une hiérarchie entre les droits et libertés garanties par les traités.

Les grandes libertés économiques passeraient avant les droits sociaux, et plus particulièrement le droit à l'action collective. L'exercice de ces droits ne serait licite qu'à la condition de ne pas faire obstacle au marché intérieur.

Appliquée au détachement de travailleur, cette logique prohibe le recours à la grève en vue d'obtenir des conditions de travail et d'emploi supérieures au minimum légal ou conventionnel. Les syndicats ne peuvent pas demander plus que le simple respect de la loi.

Enfin, l'application du principe de proportionnalité aboutit à l'encadrement de l'action collective et contribue à la détacher de sa dimension politique ou contestataire.

B. UNE DEMANDE DE RÉVISION DE LA DIRECTIVE « DÉTACHEMENT DE TRAVAILLEURS »

La proposition de résolution réclame la révision de la directive du 16 décembre 1996 en consultation avec les partenaires sociaux.

Elle fait ainsi écho aux discussions entamées début 2009 entre la Confédération européenne des syndicats (CES) et BusinessEurope à la demande de la Commission européenne. Mme Séverine Picard, conseillère juridique de la CES, a toutefois précisé que ces discussions n'étaient pas assimilables à des négociations et qu'il n'était pas encore question de réviser la directive.

La Cour de justice aurait vidé de son sens la directive de 1996 en retenant une définition restrictive du noyau dur - de nombreuses conventions collectives n'entrent pas dans son champ - et en en faisant un plafond de droit au lieu d'un plancher. Pour revenir à l'esprit de la directive, une révision s'imposerait.

La proposition de résolution avance quelques pistes.

Les conditions nécessaires pour qu'un accord ou une convention collective produise des effets au regard de la directive devraient être clarifiées.

La notion de « dispositions d'ordre public » devrait être entendue plus largement pour laisser aux Etats membres la latitude d'étendre selon leurs souhaits le champ du noyau dur.

En outre, la proposition demande l'introduction d'une durée maximale dans la définition d'un détachement. La directive en vigueur ne fait mention que d'« une période limitée ». Le but est d'éviter des utilisations abusives du régime du détachement pour échapper à l'application de l'intégralité du droit du travail d'un Etat membre.

Il est aussi proposé de contraindre les Etats membres et les employeurs d'informer les travailleurs détachés de leurs droits. Enfin, les contrôles et les sanctions devraient être renforcés.

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