Article 7 (art. 3 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique) Accès à l'aide juridictionnelle des étrangers bénéficiant d'une ordonnance de protection
Cet article étend aux personnes étrangères bénéficiant d'une ordonnance de protection la possibilité d'accéder à l'aide juridictionnelle.
L'aide juridictionnelle n'est en principe ouverte qu'aux citoyens français et aux ressortissants des États membres de la communauté européenne, ou aux personnes de nationalité étrangère résidant habituellement et régulièrement en France. Par exception, l'article 3 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique prévoit que les étrangers puissent en bénéficier sans condition de résidence s'ils sont mineurs, engagés dans une procédure pénale, ou dans une procédure administrative d'éloignement du territoire, de maintien en zone d'attente ou de recours contre un refus de délivrance d'un titre de séjour.
En l'état actuel du droit, les personnes de nationalité étrangère en séjour irrégulier, auxquelles aura été délivrée une ordonnance de protection ne pourraient en conséquence pas bénéficier de l'aide juridictionnelle. Elles se trouveraient ainsi privées de la possibilité de recourir à la nouvelle voie de droit créée par la loi, faute de pouvoir supporter les frais de la procédure, ce qui constituerait une situation d'inégalité criante entre les victimes de violences conjugales.
L'article 7 de la proposition de loi entendait remédier à cette situation préjudiciable aux femmes étrangères victimes de violences. Cependant, la disposition correspondante a été déclarée irrecevable au titre de l'irrecevabilité financière. Le Gouvernement a en conséquence déposé devant l'Assemblée nationale un amendement visant à la rétablir.
L'article 5 de la proposition de loi de notre collègue Roland Courteau, qui visait le même objectif que le présent article et qui se heurtait à l'irrecevabilité de l'article 40 de la constitution, se trouve donc satisfait par la rédaction finalement retenue.
Votre commission a adopté l'article 7 sans modification .
Article 8 (art. 226-10 du code pénal) Modification de la rédaction du délit de dénonciation calomnieuse
Le présent article tend à modifier la rédaction du délit de dénonciation calomnieuse, afin de prévenir les poursuites qui pourraient être engagées à l'encontre d'une victime après que l'auteur des faits dénoncés a fait l'objet d'un acquittement, d'une relaxe ou d'un non-lieu pour insuffisance de charges.
A l'heure actuelle, l'article 226-10 du code pénal punit de cinq ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende « la dénonciation, effectuée par tout moyen et dirigée contre une personne déterminée, d'un fait qui est de nature à entraîner des sanctions judiciaires, administratives ou disciplinaires et que l'on sait totalement ou partiellement inexact, lorsqu'elle est adressée soit à un officier de justice ou de police administrative ou judiciaire, soit à une autorité ayant le pouvoir d'y donner suite ou de saisir l'autorité compétente, soit aux supérieurs hiérarchiques ou à l'employeur de la personne dénoncée ».
Cet article précise en outre que « la fausseté du fait dénoncé résulte nécessairement de la décision, devenue définitive, d'acquittement, de relaxe ou de non-lieu déclarant que la réalité du fait n'est pas établie ou que celui-ci n'est pas imputable à la personne dénoncée .
En tout autre cas, le tribunal saisi des poursuites contre le dénonciateur apprécie la pertinence des accusations portées par celui-ci ».
Si la mauvaise foi du dénonciateur doit en outre être démontrée 35 ( * ) , il n'en demeure pas moins que ces dispositions instaurent une présomption irréfragable de fausseté des faits en cas de décision juridictionnelle définitive de relaxe, d'acquittement ou de non-lieu pour insuffisance de charges, qui lie l'appréciation du tribunal : la personne qui a porté plainte est présumée avoir menti.
Or, comme l'observe la Cour de cassation dans son rapport annuel pour 2009, « dans les conflits d'ordre privé, la dénonciation de violences, notamment sexuelles, qui ne sont ensuite pas établies, faute de témoins ou d'autres éléments extérieurs, entraîne, pour celui qui a dénoncé, le risque d'une condamnation pénale, la loi postulant que la fausseté du fait est alors acquise et qu'elle ne pouvait qu'être connue de ce dénonciateur » 36 ( * ) .
Pour éviter d'exposer des victimes de violences conjugales au risque de se voir accusées de dénonciation calomnieuse lorsque l'auteur des faits a bénéficié d'un acquittement, d'une relaxe ou d'un non-lieu faute d'éléments permettant d'établir la réalité des faits, l'article 8 de la proposition de loi, reprenant une préconisation formulée par la Cour de cassation dans son rapport annuel pour 2009, tend à restreindre le champ des dispositions prévoyant la présomption irréfragable de fausseté des faits aux décisions constatant que « le fait n'a pas été commis », excluant de ce fait de son champ les décisions constatant que « la réalité du fait n'est pas établie ».
Ainsi, désormais, seules les décisions définitives d'acquittement, de relaxe et de non-lieu constatant expressément que le fait n'a pas été commis ou qu'il n'est pas imputable à la personne dénoncée permettraient de démontrer automatiquement la fausseté du fait dénoncé. Dans les autres cas, et notamment en cas de décision définitive d'acquittement, de relaxe ou de non-lieu rendue faute de charges suffisantes, le tribunal saisi des poursuites contre le dénonciateur apprécierait la pertinence des accusations portées par celui-ci, conformément aux dispositions du dernier alinéa de l'article 226-10 du code pénal.
Votre commission, qui relève que ces dispositions ont vocation à concerner l'ensemble des contentieux de dénonciation calomnieuse, et pas uniquement ceux de violences conjugales, approuve ces dispositions qui permettront de redonner au juge une marge d'appréciation pour caractériser le caractère calomnieux de la dénonciation.
Votre commission a adopté l'article 8 sans modification .
* 35 Les juges sont tenus de motiver leur décision au regard de la mauvaise foi du dénonciateur, même après une décision définitive d'acquittement, de relaxe ou de non-lieu de la personne concernée (Cass., Crim., 7 décembre 2004).
* 36 Cour de cassation, rapport annuel pour 2009, page 28.