LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

En seconde délibération, l'Assemblée nationale a adopté un amendement du Gouvernement minorant de 88 449 euros en AE et de 88 948 euros en CP les crédits de la mission .

I. MODIFICATION DES CRÉDITS À TITRE RECONDUCTIBLE

A titre reconductible , l'Assemblée nationale a procédé à une minoration des crédits de la mission, à hauteur de 279 449 euros en AE et de 279 948 euros en CP , afin de gager les ouvertures de crédits opérées lors de la seconde délibération. Cette minoration a été répartie de la façon suivante :

- 240 943 euros en AE et 249 166 euros en CP sur le programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » ;

- 38 506 euros en AE et 30 782 euros en CP sur le programme 162 « Interventions territoriales de l'Etat ».

II. MODIFICATION DES CRÉDITS À TITRE NON RECONDUCTIBLE

A titre non reconductible , l'Assemblé nationale a procédé à une majoration des crédits de la mission, à hauteur de 191 000 euros en AE et CP . Les crédits supplémentaires sont ainsi répartis :

- 130 000 euros sur le programme « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire », action 1 « Attractivité économique et compétitivité des territoires » ;

- 61 000 euros sur le programme « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire », action 2 « Développement solidaire et équilibré des territoires ».

C. SOLDE DE CES MODIFICATIONS DE CRÉDITS

Modification des autorisations d'engagement et des crédits de paiement

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire »

49 943

58 166

162 « Interventions territoriales de l'Etat »

0

38 506

0

30 782

TOTAL

88 449

88 948

SOLDE

- 88 449

- 88 948

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 9 novembre 2010, sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission a procédé à l'examen du rapport spécial de M. François Marc, rapporteur spécial, sur la mission « Politique des territoires ».

M. François Marc , rapporteur spécial . - Je m'en tiendrai à une présentation des faits marquants du présent projet de loi de finances concernant la mission « Politique des territoires », qui poursuit, pour mémoire, l'objectif de soutenir le développement durable des territoires nationaux. J'observe tout d'abord que cette mission s'inscrit, pour 2011, dans une grande continuité à l'égard de l'exercice 2010. Elle conserve ainsi un périmètre interministériel stable ainsi qu'une organisation inchangée pour ses deux programmes. Elle constitue dans le présent projet de loi de finances, par le volume de ses crédits, la plus petite mission du budget général dotée d'objectifs de performance : 356,3 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 327,68 millions d'euros en crédits de paiement (CP).

L'objet de la mission place celle-ci au coeur de la politique transversale d'aménagement du territoire. Cependant, les actions de l'Etat participant à cette politique, naturellement au carrefour de nombreuses interventions publiques, excèdent de loin son périmètre. Chaque année, en effet, 4 à 5 milliards d'euros sont engagés pour l'aménagement du territoire - 5,15 milliards d'euros d'AE en 2011, soit plus de dix fois les crédits de la mission, qui ne regroupe que 7 % de l'ensemble des moyens financiers de la politique nationale d'aménagement du territoire.

La mission « Politique des territoires » est placée en 2011 sous le signe de la continuité avec les actions menées antérieurement, en dépit d'une réduction de ses moyens par rapport à 2010 (baisse de 7,44 % pour les AE et de 13,44 % pour les CP). Cette contraction des moyens serait totalement soutenable d'après les informations que j'ai pu recueillir lors de l'audition de représentants du cabinet du ministre de l'Espace rural et de l'aménagement du territoire et des responsables de la Délégation à l'aménagement du territoire et à l'action régionale (DATAR). Cette mission est par ailleurs caractérisée par un niveau élevé de fonds de concours, 25,46 millions d'euros en AE et 35,46 millions d'euros en CP, qui bénéficient au programme d'investissements en faveur de la Corse. Elle se singularise de plus par des dépenses fiscales supérieures à ses crédits budgétaires, soit 408 millions d'euros, mais j'aurai l'occasion de revenir sur ce point. Enfin, elle retrace 146 emplois en équivalents temps plein travaillé, en baisse de 2 ETPT, qui correspondent aux effectifs de la DATAR.

J'en viens maintenant aux deux programmes de la mission :

- le premier, « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » (PICPAT), est désormais piloté par le ministère de l'espace rural et de l'aménagement du territoire (MERAT) ; il correspond aux moyens mis à la disposition de la DATAR, qui a abandonné sa dénomination de Délégation interministérielle à l'aménagement et à la compétitivité des territoires (DIACT) en 2010 pour retrouver son ancienne appellation, selon le voeu exprimé par le ministre, notre ancien collègue Michel Mercier ;

- le second programme, baptisé « Interventions territoriales de l'Etat » (PITE), relève du Premier ministre mais a été confié à la gestion du ministère chargé de l'intérieur. Dérogatoire aux règles du droit commun budgétaire, ce programme a été reconduit et recomposé en 2009 sous la forme de quatre actions, qui correspondent à quatre plans interministériels de portée régionale.

En 2011, le projet de loi de finances conserve la même organisation pour la mission, de même que le découpage de chaque programme en actions, trois pour le PICPAT et quatre pour le PITE. Sur le fond, les mesures prévues constitueront également la poursuite des politiques engagées en 2010.

Ainsi, le programme géré par la DATAR, le PICPAT, est doté de 308,63 millions d'euros en AE et de 292,78 millions d'euros en CP, soit une baisse de, respectivement, 10,7 % et 14,4 % par rapport à 2010. Il sera employé au financement des dispositifs suivants :

- les contrats Etat-régions, dont la « génération » 2007-2013 entrera en 2011 dans sa cinquième année d'exécution, avec 120 millions d'euros en AE et 155 millions d'euros en CP. Les taux d'avancement sont d'ailleurs assez satisfaisants, 51 % fin 2010 soit un taux prévisionnel légèrement inférieur à l'objectif théorique de 57,1 % pour quatre années d'exécution ;

- la prime d'aménagement du territoire, outil d'aide à la localisation d'activités et d'emplois dans certaines zones prioritaires du territoire, qui est prévue pour 2011 à hauteur de 38,2 millions d'euros en AE et 33 millions d'euros en CP et dont le bilan est assez positif en termes d'emplois aidés (5 267 à la fin du premier semestre 2010) ;

- le plan d'actions en faveur des territoires ruraux (15,2 millions d'euros en AE), issu des « Assises des territoires ruraux », et, surtout, les pôles d'excellence rurale, pour 40 millions d'euros en AE et 12 millions d'euros en CP ;

- les pôles de compétitivité, dotés de 7,5 millions d'euros en AE, et les « grappes d'entreprises », dotés de 8,7 millions d'euros, qui constituent une sorte de variante des pôles de compétitivité pour des réseaux d'entreprises de petite taille. Je constate qu'un premier appel à projets a permis de sélectionner 42 grappes d'entreprises au cours du premier semestre 2010 et que 60 nouvelles grappes devraient être soutenues à l'issue du second appel à projet en début d'année 2011, mais je mets en garde contre le risque de « saupoudrage » ;

- le plan d'accompagnement du redéploiement des armées, qui se met progressivement en place et qui sera financé, en 2011, exclusivement par la voie de reports de crédits de 2010, avec 30 millions d'euros en AE et 16 millions d'euros en CP. Pour les « contrats de redynamisation de site de défense » (CRSD), le bilan est de cinq signatures en 2009 et de trois en 2010. Pour les « plans locaux de redynamisation » (PLR), deux ont été signés en 2010 ;

- la subvention de 7,4 millions d'euros destinée à l'Agence française pour les investissements internationaux (AFII) et la subvention versée à la Société du Grand Paris, d'un montant de 5,95 millions d'euros, qui constitue une innovation du présent projet de loi de finances ;

- les contrats de site, les contrats de développement en faveur des Ardennes, de la Lorraine ou de Châtellerault, le rétablissement du caractère maritime du Mont-Saint-Michel, le financement de schémas directeurs d'aménagement numérique du territoire etc.

De son côté, le second programme, le PITE, est doté de 47,68 millions d'euros en AE et 34,9 millions d'euros en CP, soit une augmentation de 22 % pour les premiers et une baisse de 3 % pour les seconds par rapport à 2010. Il retrace quatre actions :

- il s'agit, tout d'abord, du financement de la « reconquête » de la qualité de l'eau en Bretagne, seule action du PITE dont le montant varie en 2011, avec des AE en hausse de 321 %. Cette action comporte notamment le « plan d'urgence nitrates » mis en place en 2007 pour cinq ans dans le cadre d'un contentieux européen, sujet sur lequel je réaliserai un contrôle budgétaire l'année prochaine. La forte hausse des AE de l'action « qualité de l'eau en Bretagne » résulte surtout de son enrichissement 2011 avec la création d'un nouvel axe relatif au « plan de lutte contre les algues vertes », doté de 8,7 millions d'euros en AE ;

- la deuxième action correspond au plan d'investissements en Corse, qui absorbe 60 % des AE et plus de la moitié des CP du programme. En outre, d'importants fonds de concours sont attendus pour cette action en provenance de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF), avec 35 millions d'euros en CP, ce qui constitue évidemment une forme de « débudgétisation » ;

- la troisième action du programme concerne les dépenses consacrées à l'écologie du marais poitevin ;

- enfin, on trouve le programme de santé mis en oeuvre à la Guadeloupe et à la Martinique en raison de la présence dans les sols de chlordécone, ce pesticide hautement toxique qui a été utilisé contre le charançon du bananier.

Dans ce contexte de continuité, il faut souligner les points positifs et ceux qui, en revanche, appellent une amélioration.

Du côté des aspects positifs, je retiendrai, à titre principal, le souci de soutenabilité des engagements pris sur les programmes de la mission. La loi de finances pour 2009 était ainsi revenue à un quasi-équilibre entre AE et CP du programme, tout en maintenant un niveau de CP légèrement moindre que celui des AE, ce qui a conduit à des ajustements en cours d'exercice, notamment dans le cadre du plan de relance, qui a doté le PICPAT du montant de CP supplémentaires requis. La loi de finances pour 2010 a confirmé cette évolution en faveur d'une couverture en paiement des engagements précédents. Cette sagesse a porté ses fruits puisque ce rattrapage a permis de résorber la dette exigible du FNADT. Fortement réduite en 2009 puis en 2010, cette dette devrait être nulle au 31 décembre 2010. Le niveau des CP alloués en 2011 ne devrait donc pas induire de tensions sur le financement du programme, d'autant que parallèlement, selon le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2011 à 2014, le montant total des CP prévu est égal à la somme des AE inscrites sur la même période. J'attirerai l'attention du Gouvernement sur la nécessité de ne pas relâcher cet effort de soutenabilité, pour éviter de renouer avec les tensions de financement connues avant 2007.

J'en viens aux sujets qui me paraissent appeler des améliorations et qui ont trait à des questions d'évaluation.

En premier lieu, une évaluation renforcée me paraît nécessaire pour la politique des « pôles », à commencer par les pôles de compétitivité et les « grappes d'entreprises », mais aussi les pôles d'excellence rurale et, demain, le plan d'action en faveur des territoires ruraux mis en place cette année.

En second lieu, l'évaluation que je préconise concerne les dépenses fiscales rattachées au programme que gère la DATAR. Il s'agit, pour 2011, de quelque trente catégories de dépenses fiscales, pour un total supérieur à 408 millions d'euros. La moitié d'entre elles concerne la Corse, pour un montant global d'au moins 250 millions d'euros, soit plus de 60 % du total. Il s'agit par exemple des taux de TVA particuliers applicables à divers produits sur l'île ou, encore du crédit d'impôt pour investissement en Corse. Ces dépenses, malgré des recommandations répétées, ne font toujours pas l'objet d'une évaluation de leurs performances, au motif que la DATAR n'en a pas la capacité, mais seulement les ministères financiers. En outre, les deux tiers de ces trente dépenses fiscales sont évaluées, chacune, à un montant égal ou inférieur à un million d'euros ou ne sont pas chiffrées. Je m'interroge sur la pertinence d'un tel saupoudrage et sur les effets qui peuvent en être attendus. Mes remarques sont d'ailleurs confirmées par le dernier rapport du Conseil des prélèvements obligatoires. Ce dernier a ainsi regretté en octobre 2010 que « les dispositifs fiscaux en faveur de l'aménagement du territoire soient d'une efficacité incertaine ».

C'est sous le bénéfice de ces observations que je vous propose néanmoins l'adoption, sans modification, des crédits de la mission « Politique des territoires » pour 2011.

M. Jean Arthuis , président . - Cette mission suscite toujours des interrogations. Pour ma part, je me pose en particulier des questions sur l'efficacité des dépenses fiscales, notamment en Corse. Pourquoi ne pas supprimer ces dispositifs ?

M. François Marc , rapporteur spécial . - Le Gouvernement semble s'interroger lui aussi. Je crois que l'on assiste à une prise de conscience du problème, mais le MERAT et la DATAR font part de leur incapacité à assurer le suivi de ces dépenses fiscales. Ils m'expliquent que ces dernières relèvent de la direction du budget et qu'elle est la seule à disposer d'informations en la matière.

M. Jean-Paul Alduy . - Je me demande s'il ne faudrait pas allouer plus de moyens aux pôles de compétitivité et, surtout, aux « grappes d'entreprises ». L'un des principaux points faibles de notre économie ce sont les petites et moyennes entreprises (PME). Elles ont besoin de développer des synergies et d'apprendre à travailler ensemble, or c'est à mon sens l'intérêt de la politique des « grappes », dont le montant qui nous a été indiqué, 8,7 millions d'euros, me semble trop faible.

M. François Marc , rapporteur spécial . - Cette préoccupation est parfaitement légitime. Le Gouvernement nous a toutefois expliqué que les candidatures à ce dispositif ne sont pas nombreuses et que les ressources qui lui sont consacrées sont donc suffisantes. Le premier appel à projets n'a ainsi permis de sélectionner que 42 grappes d'entreprises au cours du premier semestre 2010. J'observe que 60 nouvelles grappes devraient être soutenues à l'issue du second appel à projet en début d'année 2011. Une situation semblable est constatée s'agissant des pôles d'excellence rurale, dont le faible nombre de dossiers conduit à ralentir le versement des crédits.

M. Jean-Paul Alduy . - Les pôles d'excellence rurale ne sont pas comparables aux pôles de compétitivité et aux « grappes d'entreprises ». Ces derniers sont mis en place dans des zones urbaines, dans lesquelles l'innovation peut reposer sur le capital intellectuel requis. J'ai l'exemple à Perpignan d'un réseau de PME, mis en place dans le cadre de ce que la DATAR avait appelé les « systèmes productifs locaux » (SPL), et consacré à l'industrie nautique. En dix ans, les entreprises de ce SPL se sont développées pour représenter plus de 1 000 emplois et sont désormais reconnues à l'international.

M. François Marc , rapporteur spécial . - Je pense qu'il convient de rapprocher les 8,7 millions d'euros consacrés au financement des « grappes d'entreprises » des 4,15 milliards d'euros de coût du crédit d'impôt recherche en 2009. Un tel écart montre que des marges existent pour dégager des moyens supplémentaires en faveur des « grappes ».

M. Jean Arthuis , président . - Je juge utile d'interroger le Gouvernement en séance sur ce point.

Mme Nicole Bricq . - Je m'interroge sur les dépenses fiscales rattachées à la mission, dont le montant total est estimé à un minimum de 408 millions d'euros et se trouve donc plus important que le volume des crédits de la mission. Il n'est pas normal que nous ne disposions d'aucune évaluation de leur impact. Il s'agit d'ailleurs d'un problème général, qui vaut pour toutes les dépenses fiscales. Pourquoi une telle situation perdure-t-elle ?

M. François Marc , rapporteur spécial . - Je pense que les réponses du Gouvernement au questionnaire que je lui ai adressé dans le cadre de la préparation de l'examen du projet de loi de finances pour 2011 sont éclairantes. Je souhaite donc vous les restituer. Face à mon interrogation sur l'absence d'évaluation de ces dispositifs, il a fait valoir que les discussions intervenues entre le responsable du programme et la direction du budget n'ont pas permis de faire évoluer la performance du programme vers la mise en place d'objectifs et d'indicateurs liés aux dépenses fiscales rattachées, sachant que la maîtrise du rattachement de ces dépenses fiscales relèvent directement de la direction du budget. En réponse à la même question, le Gouvernement avait expliqué, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2010, que la DATAR n'a pas la maîtrise des dépenses fiscales rattachées au programme, et qu'elle n'est, dans ces conditions, pas en mesure de commenter leur évolution ni de mesurer leur performance.

La commission a alors décidé de proposer au Sénat l' adoption sans modification des crédits de la mission « Politique des territoires » .

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Réunie à nouveau le jeudi 18 novembre 2010, sous la présidence de M. Jean Arthuis, président, la commission a confirmé sa position, après avoir pris acte des modifications apportées par l'Assemblée nationale.

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