Rapport n° 129 (2010-2011) de M. François ZOCCHETTO , fait au nom de la commission des lois, déposé le 24 novembre 2010

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N° 129

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2010-2011

Enregistré à la Présidence du Sénat le 24 novembre 2010

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur la proposition de loi , MODIFIÉE PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE , relative à l' exécution des décisions de justice et aux conditions d' exercice de certaines professions réglementées ,

Par M. François ZOCCHETTO,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-Jacques Hyest , président ; M. Nicolas Alfonsi, Mme Nicole Borvo Cohen-Seat, MM. Patrice Gélard, Jean-René Lecerf, Jean-Claude Peyronnet, Jean-Pierre Sueur, Mme Catherine Troendle, M. François Zocchetto , vice-présidents ; MM. Laurent Béteille, Christian Cointat, Charles Gautier, Jacques Mahéas , secrétaires ; M. Alain Anziani, Mmes Éliane Assassi, Nicole Bonnefoy, Alima Boumediene-Thiery, MM. Elie Brun, François-Noël Buffet, Gérard Collomb, Pierre-Yves Collombat, Jean-Patrick Courtois, Yves Détraigne, Mme Anne-Marie Escoffier, MM. Pierre Fauchon, Louis-Constant Fleming, Gaston Flosse, Christophe-André Frassa, Bernard Frimat, René Garrec, Jean-Claude Gaudin, Mme Jacqueline Gourault, Mlle Sophie Joissains, Mme Virginie Klès, MM. Antoine Lefèvre, Dominique de Legge, Mme Josiane Mathon-Poinat, MM. Jacques Mézard, Jean-Pierre Michel, François Pillet, Hugues Portelli, Bernard Saugey, Simon Sutour, Richard Tuheiava, Alex Türk, Jean-Pierre Vial, Jean-Paul Virapoullé, Richard Yung.

Voir le(s) numéro(s) :

Première lecture : 31 , 161 et T.A. 50 (2008-2009)

Deuxième lecture : 601 (2009-2010), 130 (2010-2011)

Assemblée nationale ( 13 ème législ.) :

Première lecture : 1451 , 2622 et T.A. 506

LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOIS

Réunie le mercredi 24 novembre 2010 sous la présidence de M. Jean-Jacques Hyest, président , la commission des lois a examiné, en deuxième lecture, sur le rapport de M. François Zocchetto , la proposition de loi n° 601 (2008-2009), modifiée par l'Assemblée nationale, relative à l' exécution des décisions de justice et aux conditions d'exercice de certaines professions réglementées .

Le rapporteur a souligné que l'Assemblée nationale avait validé l'essentiel des dispositions adoptées par le Sénat, à quatre exceptions près, et qu'elle avait elle-même enrichi le texte, en respectant les principes qui l'animent, en simplifiant par exemple certaines procédures ou étendant à d'autres professions les obligations de formation professionnelle reconnues aux greffiers de tribunaux de commerce et aux commissaires-priseurs judiciaires.

Il a présenté les points restant en discussion, concernant :

- le rétablissement, à l'article 2, du renforcement de la valeur probante des constats d'huissiers, adopté en commission, mais rejeté par le Sénat ;

- l'extension des prérogatives d'accès aux parties communes d'un immeuble dont disposent les huissiers pour l'exercice de leur mission de signification, que le Sénat avait limité (article 3) ;

- l'extension du champ de la procédure participative au divorce, alors que le Sénat avait exclu qu'elle puisse concerner la matière familiale, et l'exclusion en revanche des litiges prud'homaux (article 31) ;

- la suppression du projet d'intégration des conseils en propriété industrielle au sein de la profession d'avocat (articles 32 à 50), que le Sénat avait adoptée. Le rapporteur a précisé que le projet de loi de modernisation des professions judiciaires et juridiques réglementées offrait cependant l'occasion d'emprunter une autre voie pour assurer la compétitivité des professionnels intervenant dans le domaine de la propriété industrielle.

En dépit des divergences constatées, il a invité la commission à adopter conforme la proposition de loi au motif d'une part que l'Assemblée nationale avait assorti les modifications qu'elle proposait de garanties importantes, qui les rendait tout à fait pertinentes, et, d'autre part, que le texte contenait de nombreuses dispositions attendues par les professionnels alors que son examen à l'Assemblée nationale avait été retardé.

S'agissant de l'extension de la procédure participative au divorce, votre commission a constaté que le dispositif retenu par l'Assemblée nationale préservait l'intégralité de la procédure judiciaire du divorce, puisque les parties qui concluaient une convention de procédure participative n'en seront en rien dispensées.

La commission des lois a adopté, en deuxième lecture, la proposition de loi sans modification.

EXPOSÉ GÉNÉRAL

Mesdames, Messieurs,

Le Sénat est saisi de deux textes visant à moderniser les professions du droit et à améliorer le fonctionnement de la justice.

Le législateur est en effet régulièrement conduit à reprendre les textes relatifs aux professions judiciaires et juridiques réglementées, afin de les adapter aux exigences du droit européen et de leur apporter les moyens d'affronter une concurrence internationale. Il se doit aussi de donner à la justice une organisation et des procédures lui permettant de faire face à l'évolution des contentieux.

Tel est l'objet de la présente proposition de loi, déposée au Sénat à l'initiative de notre collègue Laurent Béteille et du projet de loi de modernisation des professions judiciaires et juridiques réglementées, adoptés par l'Assemblée nationale en première lecture le 30 juin 2010.

La proposition de loi, objet du présent rapport, embrasse une triple ambition : améliorer l'exécution des décisions de justice, moderniser l'organisation et les compétences des juridictions et actualiser les conditions d'exercice de certaines professions judiciaires et juridiques.

En première lecture, à quatre exceptions près, l'Assemblée nationale a largement validé les dispositions adoptées par le Sénat, y apportant plusieurs fois d'utiles précisions.

Elle a elle-même enrichi le texte, en respectant les principes qui l'animent. Tel est notamment le cas de la simplification de certaines procédures ou de l'extension à d'autres professions des obligations de formation professionnelle reconnues aux greffiers de tribunaux de commerce et aux commissaires-priseurs judiciaires.

Les principaux points de divergence entre les positions des deux assemblées sont donc les suivants :

- le rétablissement, à l'article 2 , du renforcement de la valeur probante des constats d'huissiers, que votre commission avait adopté, mais que le Sénat a rejeté ;

- l'extension des prérogatives d'accès aux parties communes d'un immeuble dont disposent les huissiers pour l'exercice de leur mission de signification, que le Sénat avait précisé limité ( article 3 ) ;

- l'extension du champ de la procédure participative au divorce, alors que le Sénat avait exclu qu'elle puisse concerner la matière familiale, et l'exclusion en revanche des litiges prud'homaux ( article 31 ) ;

- la suppression du projet d'intégration des conseils en propriété industrielle au sein de la profession d'avocat ( articles 32 à 50 ), que le Sénat avait adoptée.

I. LES POINTS D'ACCORD ENTRE LES DEUX ASSEMBLÉES

L'Assemblée nationale a adopté conforme, ou sous réserve de précisions ou de modifications rédactionnelles, de nombreuses dispositions adoptées en première lecture par le Sénat.

Certaines concernent les compétences du juge de l'exécution , comme la reconnaissance de la compétence concurrente du président du tribunal de commerce et du juge de l'exécution pour les mesures conservatoires sur les créances relevant de la juridiction commerciale ( article 7 ), le transfert au juge de l'exécution des compétences du tribunal de grande instance en matière de saisie et de vente forcée de bateaux de navigation intérieure d'un tonnage égal ou supérieur à vingt tonnes ( article 8 ), ou la modification des règles relatives à l'assistance et à la représentation des parties devant le juge de l'exécution ( article 11 ).

D'autres dispositions sont communes à plusieurs professions : il s'agit de la création d'une obligation de formation professionnelle pour les huissiers, les notaires, les greffiers de tribunaux de commerce et les commissaires priseurs judiciaires, avec, pour les huissiers et les greffiers de tribunaux de commerce, l'ajout de la faculté d'exercer en tant que salarié ( articles 14, 15, 25, 26 et 27 ) ; ainsi que de la possibilité pour les huissiers, les notaires et les commissaires priseurs judiciaires de former entre eux des associations et des syndicats professionnels ( articles 17, 22 et 30 ).

Certaines sont spécifiques à une profession . Il en est ainsi du transfert, à l'article 12 , aux huissiers de justice de la compétence pour accomplir les mesures conservatoires à l'ouverture d'une succession ; de la possibilité reconnue aux sociétés d'exercice libéral d'huissiers de justice d'avoir deux clercs habilités à procéder aux constats ( article 13 ) ; de la création d'une compétence concurrente entre le conseil supérieur du notariat et les syndicats professionnels ou les groupements d'employeurs représentatifs en matière de négociation collective ( article 20 ) ; du transfert aux notaires et aux agents diplomatiques ou consulaires français de la compétence pour recueillir les consentements à l'adoption ( article 23 ) ; ou encore de la possibilité reconnue aux greffiers de tribunal de commerce, à l'article 24 , de créer des sociétés de participations financières de professions libérales.

Enfin d'autres dispositions diverses ou de coordination ont été adoptées conformes, sous quelques réserves rédactionnelles ou de précisions. Tel est le cas, à l'article premier , de la mise à la charge du professionnel condamné dans le cadre d'un contentieux de la consommation de l'intégralité des frais d'exécution forcée de la décision de justice ; à l'article 5 , de la ratification de l'ordonnance du 21 avril 2006 réformant la saisie immobilière ; du dispositif prévu à l'article 6 pour faciliter la lutte contre le déplacement international illicite d'enfants ; ou  des coordinations réalisées, dans le code du travail, au sujet de la saisie des rémunérations par l'article 10 .

II. L'APPROBATION DES MODIFICATIONS ADOPTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a apporté un certain nombre de modifications aux dispositions adoptées par le Sénat :

• Le renforcement des prérogatives reconnues aux huissiers

L'Assemblée nationale a tout d'abord rétabli l'article 2 , adopté par la commission des lois du Sénat, mais supprimé par le Sénat à l'initiative d'un amendement de notre collègue M. Jacques Mézard. Cet article vise à renforcer la valeur probante des constats établis par les huissiers de justice.

Elle a par ailleurs modifié l'article 3 , pour permettre aux huissiers d'accéder non seulement aux boîtes aux lettres et aux dispositifs d'appel, mais aussi aux parties communes des immeubles, dans le cadre de leur mission de signification comme d'exécution . En séance publique a été adopté un amendement levant la possibilité pour la copropriété de s'opposer à cet accès.

Elle a ajouté à la liste des informations qu'un huissier de justice, porteur d'un titre exécutoire, peut obtenir sur le débiteur, sans en faire la demande au parquet, celles relatives à l'état du patrimoine immobilier de la personne concernée ( article 4 ).

Enfin, elle a adopté un article 13 bis supprimant la formalité du double original auquel sont soumis les actes d'huissiers.

Votre commission a considéré que les ajouts réalisés étaient, compte tenu des garanties présentées, pertinents et elle les a confirmés.

• Les dispositions relatives aux professions réglementées et aux experts judiciaires

L'Assemblée nationale a adopté plusieurs amendements étendant l'obligation de formation professionnelle continue, prévue pour les greffiers des tribunaux de commerce ( article 25 ) et les commissaires-priseurs judiciaires ( article 27 ), aux avocats au Conseil d'État et à la cour de cassation ( article 30 bis ), ainsi que des amendements permettant aux huissiers de justice ( article 16 ) et aux commissaires-priseurs judiciaires ( article 29 ) d'adopter un règlement national concernant les usages de la profession.

Elle a complété l'article 15 relatif au régime disciplinaire applicable aux huissiers de justice pour limiter les attributions de la Chambre nationale des huissiers de justice siégeant en comité mixte - une disposition similaire a été adoptée à l'article 28 pour la chambre de discipline des commissaires- priseurs judiciaires lorsqu'elle siège en comité mixte, ainsi que l'article 16 pour lui reconnaître la possibilité d'élaborer un règlement national et de tenir la liste des personnes ayant accepté de recevoir un acte de signification électronique. Elle a adopté un article 15 bis transférant aux chambres régionales la compétence des chambres départementales pour lutter contre le blanchiment et le financement du terrorisme.

À l'initiative de son rapporteur, l'Assemblée nationale a précisé les conditions dans lesquelles a lieu la négociation collective au sein de la profession notariale ( article 21 ) et procédé aux coordinations rendues nécessaires par certaines dispositions du texte relatives aux compétences des chambres départementales des notaires ( article 19 bis ).

Par ailleurs, elle a introduit quatre nouveaux articles 50 bis à 50 quinquiès tendant à résoudre certaines difficultés pratiques sur l'inscription sur les listes d'experts judiciaires consécutives à la loi n° 2004-130 du 11 février 2004 et à éclaircir la situation juridique des experts admis à l'honorariat.

• L'extension de la procédure participative aux cas de divorce

La commission des lois de l'Assemblée nationale a adopté à l'article 31 un amendement étendant le champ d'application de la procédure participative aux questions de divorce , ce que le Sénat avait formellement exclu . La commission des lois de l'Assemblée nationale a par ailleurs exclu les matières prud'homales de la procédure participative.

Votre commission observe que l'Assemblée nationale a maintenu l'exigence que le divorce fasse l'objet d'une procédure de droit commun, ce qui constitue une garantie susceptible de lever les réserves qu'elle avait exprimées en première lecture.

• La suppression de la fusion avocats / conseillers en propriété industrielle

L'Assemblée nationale a supprimé la fusion entre les deux professions de conseil en propriété industrielle et d'avocat , au motif qu'elle n'est pas considérée comme la solution la plus adaptée pour rapprocher ces deux professions ( articles 32 à 50 ).

Votre commission considère que la réflexion doit être poursuivie sur les modalités de rapprochement entre ces deux professions, dans le cadre du projet de loi de modernisation des professions judiciaires et juridiques réglementées 1 ( * ) .

Votre rapporteur souligne que le Parlement ne doit pas en l'espèce se satisfaire d'un statu quo, qui pourrait à terme se révéler très préjudiciable pour la compétitivité de la France en matière de propriété industrielle.

• La simplification de certaines procédures

L'Assemblée nationale a adopté un certain nombre de dispositions facilitant certaines démarches judiciaires comme la reprise des locaux abandonnés par le locataire ( article 3 bis ), la signification des actes de procédure par voie électronique ( article 16 ), ou la possibilité donnée à un tiers (qui peut être un huissier de justice) de réaliser un état des lieux locatif dans un cadre amiable ( article 18 ).

Elle a par ailleurs limité au seul contentieux du surendettement des particuliers et à la procédure de rétablissement personnel, le transfert de compétences du tribunal de grande instance au tribunal d'instance, afin de tenir compte de la jurisprudence récente de la Cour de cassation ( article 9 ).

Elle a adopté un article 5 bis habilitant le Gouvernement à procéder à l'adoption de la partie législative du code des procédures civiles d'exécution.

Votre commission approuve l'équilibre ainsi défini.

*

* *

Votre commission a adopté la proposition de loi sans modification.

EXAMEN DES ARTICLES
CHAPITRE IER - FRAIS D'EXÉCUTION FORCÉE EN DROIT DE LA CONSOMMATION

Article premier
(art. L. 141-6 [nouveau] du code de la consommation)
Mise à la charge du débiteur professionnel en droit de la consommation de l'intégralité des frais de l'exécution forcée

Cet article offre la possibilité au juge de mettre à la charge du professionnel condamné dans le cadre d'un contentieux de consommation l'intégralité des frais d'exécution forcée de la décision de justice.

Il n'a fait l'objet, par rapport au texte adopté par le Sénat en première lecture, que de modifications rédactionnelles, la plus importante consistant en un changement de numérotation du nouvel article qu'il crée dans le code de la consommation, la loi n° 2009-526 de simplification et de clarification du droit et d'allègement des procédures ayant d'ores et déjà intégré un article L. 141-5 dans le code de la consommation.

Votre commission a adopté l'article 1 er sans modification .

CHAPITRE II - FORCE PROBANTE DES CONSTATS D'HUISSIER

Article 2
(art. 1er de l'ordonnance n° 45-2592 du 2 novembre 1945
relative au statut des huissiers)
Force probante des constats d'huissiers

Cet article prévoit que les constats réalisés par les huissiers, à la demande du juge ou d'un particulier, font foi à moins qu'ait été apportée la preuve contraire. En matière pénale cependant, ils ne comptent que comme simples renseignements.

En première lecture, votre commission avait supprimé l'interdiction faite à la partie qui n'avait pas fait d'observation lors de l'établissement du constat, d'en apporter ultérieurement la preuve contraire par témoin. Elle avait en effet jugé nécessaire de préserver les droits de la personne qui avait été empêchée par sa fragilité ou son émotivité, d'émettre, sur le moment, les réserves nécessaires.

Le Sénat a cependant supprimé l'intégralité de l'article 2. L'auteur de l'amendement de suppression, notre collègue Jacques Mézard a en effet souligné le risque de déséquilibre qu'une telle procédure pouvait créer entre les parties. Selon lui, « tout le monde n'a pas les mêmes compétences en matière juridique et certains ne font pas appel à un avocat pour être conseillé. Si le particulier en question est une compagnie d'assurance ou un établissement financier, le simple consommateur qui est en face peut se retrouver en situation de faiblesse. Nous le savons pertinemment, le procès-verbal de constat a pour objectif de fortifier une future action de justice. [...] En l'occurrence, je parle de la protection du citoyen ordinaire, qui risque d'avoir les plus grandes difficultés à apporter la preuve contraire face à un adversaire qui n'a pas forcément raison, mais qui aura été plus avisé ou mieux conseillé » 2 ( * ) . Entre outre, notre collègue s'est inquiété, compte tenu du fait qu'un certain nombre des territoires ne comptent qu'une étude d'huissiers, de la situation dans laquelle deux constats différents émaneraient de la même étude, les deux parties y ayant fait appel chacune de son côté.

Votre rapporteur a contesté la réalité du déséquilibre évoqué : la suppression, opérée en commission, de l'impossibilité pour une partie de s'opposer au procès-verbal de constat, si elle n'a pas fait valoir ses réserves au moment où il a été dressé, a justement été motivée par le souci de préserver les intérêts de la personne en situation de faiblesse. Par ailleurs, il est tout à fait logique de reconnaître au constat dressé par un officier public et ministériel une force probante supérieure. Enfin, la possibilité d'apporter la preuve contraire au constat constitue une garantie importante pour la partie auquel il est opposé.

L'Assemblée nationale, à l'initiative de son rapporteur, qui a partagé l'analyse défendue par le vôtre, a rétabli l'article 2 dans la rédaction adoptée par votre commission.

Votre commission a adopté l'article 2 sans modification .

CHAPITRE III - SIGNIFICATION DES ACTES ET PROCÉDURES D'EXÉCUTION

Article 3
(sous-section 5 [nouvelle] de la section 2 du chapitre 1er du titre Ier du livre Ier et art. L. 111-6-6 [nouveau] du code de la construction et de l'habitation)
Accès des huissiers de justice, pour leurs missions de signification, aux parties communes des immeubles collectifs à usage d'habitation

Le texte adopté par le Sénat en première lecture imposait aux propriétaires ou au syndicat des copropriétaires, représenté par le syndic, de permettre aux huissiers de justice, dans l'accomplissement de leur mission de signification, d'accéder aux boîtes aux lettres et aux dispositifs d'appel des immeubles collectifs.

La solution ainsi retenue visait à établir un équilibre entre le respect de la propriété et l'exigence de bon fonctionnement du service public de la justice auquel participent les huissiers dans l'accomplissement de leur mission de signification des décisions de justice. Elle rendait notamment compte de la position exprimée par la Commission relative à la copropriété dans son avis du 2 juillet 2007, approuvant, sous certaines conditions, cette possibilité d'accès reconnues aux huissiers de justice.

L'Assemblée nationale a doublement étendu le champ d'application du dispositif ainsi retenu.

D'une part, elle a prévu que les huissiers aient accès non seulement aux boîtes aux lettres et aux dispositifs d'appel, mais aussi à l'ensemble des parties communes de l'immeuble. Le souci du rapporteur de l'Assemblée nationale est ainsi de faciliter la remise en mains propres de la signification en permettant à l'huissier de sonner à la porte du domicile de l'intéressé. L'Assemblée nationale a supprimé, par la voie d'un amendement adopté en séance publique, la possibilité offerte aux copropriétaires de s'opposer à la majorité à cette demande d'accès, que sa commission des lois avait introduite.

D'autre part, l'Assemblée nationale a ajouté l'exécution d'une décision de justice comme condition autorisant les huissiers de justice à demander l'accès aux parties communes. Il ne s'agirait donc plus, comme dans la rédaction retenue par le Sénat, de faciliter l'accomplissement par l'huissier d'une notification, mais aussi de faciliter l'accomplissement de mesures d'exécution d'une décision de justice, comme par exemple l'immobilisation d'un véhicule automobile sur le fondement de l'article 58 de la loi du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d'exécution, si ce dernier est accessible dans le garage de l'immeuble.

Un amendement présenté, en séance publique, par M. Sébastien Huyghe, mais retiré par son auteur, visait, quant à lui à revenir sur cette double extension, en limitant la facilité d'accès offerte en matière de signification de décisions aux seules boîtes aux lettres et dispositifs d'appel, et en réservant l'accès aux parties communes à l'accomplissement d'une mission d'exécution.

Par ailleurs, à l'initiative de son rapporteur, l'Assemblée nationale a procédé à une rectification d'insertion de l'article L. 111-6-4 créé, par le présent article, dans le code de la construction et de l'habitation, par coordination avec les nouveaux articles L. 111-6-4 et L. 111-6-5 créés par ce qui est devenu l'article 57 de la loi n° 2010-788 portant engagement national pour l'environnement du 12 juillet 2010.

Votre rapporteur observe que l'extension du champ d'application du dispositif opérée par l'Assemblée nationale n'est pas neutre.

Étendant à la fois les motifs permettant aux huissiers d'adresser une demande d'accès aux copropriétaires, et les lieux auxquels l'accès devra leur être fourni, elle sera susceptible d'entraîner des frais pour le syndicat de copropriété qui sera tenu d'assurer l'accès aux parties communes d'habitation comme au garage. Cependant ces derniers ne pourront être, en tout état de cause, que modérés .

S'agissant des significations, l'extension à l'ensemble des parties communes plutôt qu'aux seules boîtes aux lettres et dispositifs d'appel permettra aux huissiers de se présenter à la porte de l'intéressé. Or, ce qui facilite la remise en mains propres est favorable à la personne destinatrice de la signification , dans la mesure où le défaut de remise à personne n'entraîne pas pour autant la nullité de la signification, qui demeure valable. Elle risque malheureusement de priver l'intéressé de l'opportunité d'agir pour contester la signification ou la décision qui lui a été signifiée, faute pour lui d'en avoir effectivement été averti.

S'agissant des mesures d'exécution, si les huissiers de justice tiennent déjà de la loi du 9 juillet 1991 précitée, le pouvoir d'accéder aux parties communes d'un immeuble pour faire procéder aux opérations nécessaires à l'accomplissement de l'exécution d'une décision de justice pour laquelle ils sont mandatés, la modification apportée par la nouvelle rédaction du présent article, les dispensera de certains coûts induits éventuels, comme la rétribution du serrurier pour une ouverture forcée. Cependant, ils resteront tenus au respect des règles et des délais propres aux mesures d'exécution qu'ils mettent en oeuvre . Par exemple, les opérations de saisie ne pourront intervenir qu'à l'expiration du délai de huit jours après la signification du commandement de payer prévu par l'article 20 de la loi du 9 juillet 1991.

Votre commission a ainsi considéré que l'ensemble de ces modifications tendent à garantir le bon fonctionnement du service public de la justice en améliorant l'efficacité de l'action des huissiers de justice dans l'accomplissement de leurs missions.

En outre, dans la mesure où le syndicat des copropriétaires pourra circonscrire l'accès des huissiers de justice aux seules parties communes et au temps nécessaires à l'accomplissement de la mission particulière qui leur a été confiée, les modifications précitées ne paraissent pas porter une atteinte disproportionnée à leur droit de propriété ni leur imposer une charge excessive au regard de l'intérêt général qui s'attache à la bonne conduite des opérations pour lesquelles les huissiers de justice ont été missionnés.

Votre commission a adopté l'article 3 sans modification .

Article 3 bis
(art. 14-1 [nouveau] et 24 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290
du 23 décembre 1986 et art. 21-1 de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991
portant réforme des procédures civiles d'exécution)
Constat d'abandon du logement et reprise des lieux par le propriétaire

Cet article, introduit dans le texte à l'initiative du rapporteur de la commission des lois de l'Assemblée nationale, crée une procédure de reprise d'un bien immobilier abandonné par le locataire.

En cas d'abandon par un locataire du logement qu'il occupe, sans remise de ce logement au propriétaire, deux situations peuvent se présenter 3 ( * ) :

- soit le contrat de bail continue au profit de son conjoint ou de son partenaire de pacte civil de solidarité, ou, à la condition qu'ils aient vécu avec lui dans le logement depuis au moins un an avant qu'il ne l'abandonne, au profit de son concubin notoire, de ses descendants ou ascendants ou des personnes à sa charge ;

- soit le contrat de bail est résilié de plein droit.

Cependant, dans ce dernier cas, le propriétaire est contraint, pour reprendre son bien, de recourir à la procédure d'expulsion prévue à l'article 62 de la loi du 9 juillet 1991 précitée, ce qui est paradoxal dans la mesure où le locataire a déjà quitté les lieux. Le recours à cette procédure d'expulsion se justifie néanmoins par la nécessité de faire reconnaître par le juge l'abandon du logement et la résiliation subséquente du bail, d'autoriser l'huissier à pénétrer dans les lieux et de garantir la conservation des meubles que le locataire aurait éventuellement pu laisser dans le logement. Lorsque la personne expulsée a volontairement quitté les lieux après la signification du commandant qui lui a été adressé à cette fin, l'huissier peut certes, selon une procédure simplifiée, constater ce départ (article 21 de la loi du 9 juillet 1991). Néanmoins, même dans ce dernier cas, le détour par la procédure générale d'expulsion, a pour conséquence un allongement des délais procéduraux, préjudiciable, comme l'a souligné le rapporteur de l'Assemblée nationale, tant aux intérêts du propriétaire, qui ne peut espérer récupérer son bien avant plusieurs mois, qu'à l'intérêt général, puisque des logements pourtant vacants tardent à être remis en location.

Le présent article vise en conséquence à créer, dans un nouvel article 14-1 de la loi précitée du 6 juillet 1989, une procédure plus rapide et efficace, qui apporte les mêmes garanties que la procédure d'expulsion, étant entendu que la question de la protection des intérêts du locataire ne se pose pas de la même manière, puisqu'il ne réside plus dans le logement.

Elle s'articulerait en trois phases :

- dans un premier temps, le propriétaire mettrait en demeure le locataire de justifier qu'il occupe le logement, cette mise en demeure intervenant par acte d'huissier, ou, en cas de défaut de paiement, dans un commandement de payer ;

- en l'absence de réponse un mois après la signification de la mise en demeure, l'huissier de justice mandaté par le propriétaire pourrait pénétrer dans le logement, dans les mêmes conditions qu'il est aujourd'hui autorisé à le faire pour constater que les occupants expulsés ont volontairement libéré les lieux, postérieurement à la signification du commandement de quitter les lieux qui leur a été adressé (article 21-1 de la loi du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d'exécution) 4 ( * ) . Une fois dans le logement, il établirait l'état d'abandon du logement et dresserait l'inventaire des biens laissés sur place ;

- enfin, sur la base du constat établi par l'huissier, le juge pourrait constater la résiliation du bail.

Votre rapporteur observe que cette procédure particulière ne se substituerait cependant pas à la procédure d'expulsion, qui demeurerait la règle . Elle s'y intègrerait et permettrait seulement d'écarter l'application des dispositions qui n'ont pas lieu d'être. Si la reprise des lieux ne pourrait intervenir qu'après la décision du juge rendue sur le constat d'abandon dressé par l'huissier de justice, les délais et les formalités d'information prévus à l'article 62 de la loi du 9 juillet 1991 pour protéger les intérêts des occupants des lieux ne devraient, eux, pas trouver à s'appliquer. En revanche, les obligations liées à la conservation des meubles éventuellement abandonnés par le locataire, définies aux articles 65 et 66, devraient être respectées par le propriétaire et l'huissier qu'il a mandaté.

En outre, l'application de la procédure définie au nouvel article 14-1 ne pourra préjudicier aux droits des personnes, visées à l'article 14, au profit desquelles le bail est susceptible d'être continué lorsque le locataire initial a abandonné le logement. De la même manière, le juge appelé à se prononcer devra examiner, au vu du constat dressé par l'huissier et des diligences qu'il a conduites pour tenter d'atteindre le locataire absent, si les droits de ce dernier sont suffisamment préservés et si on peut effectivement conclure à l'abandon du logement. Ceci évitera qu'une absence prolongée, par exemple pour des vacances ou un stage à l'étranger, et un incident de paiement de loyer puissent aboutir à la reprise des lieux par le propriétaire, sans que toutes les garanties offertes par la procédure standard d'expulsion aient pu bénéficier au locataire négligent, alors même qu'en réalité, il n'aura pas entendu abandonner son logement.

Sous ces réserves , votre rapporteur juge le dispositif tout à fait pertinent.

Votre commission a adopté l'article 3 bis sans modification .

Article 4
(art. 39, 40 et 51 de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 portant réforme
des procédures civiles d'exécution, art. 6 et 7 de la loi n° 73-5
du 2 janvier 1973 relative au paiement direct de la pension alimentaire,
art. 6 de la loi n° 84-1171 du 22 décembre 1984 relative à l'intervention
des organismes débiteurs des prestations familiales pour le recouvrement
des créances alimentaires impayées et art. L. 581-8
du code de la sécurité sociale)
Accès des huissiers de justice aux informations nécessaires
à l'exécution d'un titre exécutoire

Cet article tend à faciliter, pour l'accomplissement de leur mission, l'accès des huissiers de justice à certaines informations limitativement énumérées, en supprimant le filtre actuel du procureur de la République. Il s'inspire notamment du dispositif actuel de paiement direct des pensions alimentaires.

En dehors de modifications rédactionnelles, l'Assemblée nationale n'a apporté qu'une modification de fond au dispositif adopté par le Sénat : à l'initiative de son rapporteur, elle a ajouté à la liste limitative des renseignements 5 ( * ) que les huissiers pourront solliciter auprès des administrations ou des professionnels, les renseignements permettant de déterminer la composition de son patrimoine immobilier .

Puisque la mesure d'exécution conduite par l'huissier de justice peut concerner tant le patrimoine mobilier que le patrimoine immobilier du débiteur, l'ajout semble tout à fait justifié.

Votre rapporteur a attiré l'attention du Gouvernement sur une difficulté de coordination textuelle : en effet, la suppression de l'article 7 de la loi n° 73-5 du 2 janvier 1973 relative au paiement direct de la pension alimentaire, et des renvois qui y sont opérés à l'article 6 de la même loi, à l'article 6 de la loi n° 84-1171 du 22 décembre 1984 relative à l'intervention des organismes débiteurs des prestations familiales pour le recouvrement des créances alimentaires impayées et à l'article L. 581-8 du code de la sécurité sociale, a pour conséquence de priver les administrations sociales de la possibilité de recevoir communication directe des renseignements nécessaires à l'exécution des créances alimentaires qu'elles détiennent contre certains débiteurs d'aliments, notamment lorsque, ayant versé une prestation au créancier d'aliments, elles se trouvent subrogés à ses droits pour poursuivre le débiteur concerné. Ainsi, les caisses d'allocation familiales ont la possibilité de recourir à cette procédure lorsqu'elles sont amenées à verser l'allocation de soutien familial.

Certes, ces administrations peuvent recourir aux services d'un huissier pour recouvrer le montant de leur créance en cas de refus du débiteur d'acquitter sa dette, et, par ce truchement, elles bénéficieront du dispositif spécial d'information mis en place par le présent article. Cependant, votre rapporteur engage le Gouvernement à examiner si la suppression de la possibilité d'information directe offerte aux administrations sociales ne risque pas de léser les intérêts qu'elles défendent ou diminuer l'efficacité de leur action. Si tel était finalement le cas, il conviendrait d'y remédier dans un prochain texte.

Votre commission a adopté l'article 4 sans modification .

Article 5
(ordonnance n° 2006-461 du 21 avril 2006 réformant la saisie immobilière, art. 2202 et 2213 du code civil, art. 800 du code de procédure civile locale)
Ratification de l'ordonnance du 21 avril 2006
réformant la saisie immobilière

Cet article porte ratification de l'ordonnance réformant la saisie immobilière, sous réserve de deux modifications apportées par votre commission des lois et adoptées par le Sénat.

L'Assemblée nationale l'a adopté conforme, à l'exclusion de la suppression de la disposition interprétative relative à la nouvelle rédaction de l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire. Cette disposition, que votre rapporteur vous avait proposé d'adopter, visait à remédier à la difficulté liée à la refonte du code de l'organisation judiciaire opérée par l'ordonnance n° 2006-673 du 8 juin 2006, l'article L. 311-12-1 qui est devenu l'article L. 213-6, n'ayant pas formellement repris l'alinéa inséré par la réforme de la saisie immobilière le 21 avril 2006, faute pour cette dernière d'être entrée en vigueur lors de la promulgation de l'ordonnance du 8 juin 2006.

Cette disposition interprétative a pu être reprise, compte tenu de la nouvelle rédaction retenue par l'Assemblée nationale pour l'article 9 du présent texte.

Votre commission a adopté l'article 5 sans modification .

Article 5 bis
Habilitation du Gouvernement pour procéder à l'adoption de la partie législative du code des procédures civiles d'exécution

Cet article, qui résulte d'un amendement du Gouvernement adopté en séance publique à l'Assemblée nationale, vise à autoriser le Gouvernement à adopter par voie d'ordonnance la partie législative du code des procédures civiles d'exécution.

La codification des procédures civiles d'exécution est un chantier ancien, dont la légitimité et l'intérêt ne se contestent pas, qui trouve notamment son origine dans l'article 96 de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d'exécution, qui dispose  qu'il « sera procédé à la codification des textes de nature législative et réglementaire concernant les procédures civiles d'exécution, par des décrets en Conseil d'État, après avis de la commission supérieure de codification. Ces décrets apporteront aux textes de nature législative les adaptations de forme rendues nécessaires par le travail de codification, à l'exclusion de toute modification de fond ».

Les travaux engagés plus récemment devant la Commission supérieure de codification sont prêts d'aboutir. Le Gouvernement sollicite donc du Parlement l'autorisation d'achever cette codification en adoptant par voie d'ordonnance la partie législative du futur code de procédure civile d'exécution.

Il s'agira d'une codification à droit constant, sous réserve des modifications rendues nécessaires pour assurer la hiérarchie des normes et la cohérence rédactionnelle des textes ainsi rassemblés, harmoniser l'état du droit, notamment en matière de prescription, remédier aux éventuelles erreurs et abroger les dispositions devenues sans objet. Le Gouvernement sera en outre habilité à procéder aux seules modifications nécessaires pour garantir la cohérence des textes visant une des dispositions intégrées au code des procédures civiles d'exécution, avec les modifications apportées par la codification. Enfin, il pourra étendre, avec les adaptations nécessaires, l'application des dispositions codifiées à Mayotte, Saint-Martin, Saint-Barthélemy, Saint-Pierre-et-Miquelon, aux Terres australes et antarctiques française et à Wallis-et-Futuna.

Le délai d'adoption de l'ordonnance est fixé à un an après la promulgation du présent texte, le projet de loi de ratification devant être déposé dans les trois mois après la publication de l'ordonnance.

Votre commission a adopté l'article 5 bis sans modification .

Article 6
(art. 12-1 [nouveau] de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991
portant réforme des procédures civiles d'exécution)
Déplacement illicite international de mineurs

Cet article a pour objet d'autoriser le procureur de la République à requérir directement la force publique pour faire exécuter les décisions relatives au déplacement illicite international d'enfants, rendues sur le fondement des instruments internationaux et communautaires.

Il n'a fait l'objet que d'une modification rédactionnelle par l'Assemblée nationale.

Votre commission a adopté l'article 6 sans modification .

CHAPITRE IV - DISPOSITIONS RELATIVES AU JUGE DE L'EXÉCUTION

Article 8
(art. 120, 121, 122, 123, 124, 125, 127, 128, 130, 131 du code du domaine public fluvial et de la navigation intérieure)
Compétence du juge de l'exécution en matière de saisie des bateaux de navigation intérieure d'un tonnage égal ou supérieur à vingt tonnes

Cet article transfère au juge de l'exécution les compétences du tribunal de grande instance relatives à la saisie et à la vente forcée des bateaux de navigation intérieure d'un tonnage égal ou supérieur à vingt tonnes.

Il n'a fait l'objet que d'une modification rédactionnelle par l'Assemblée nationale.

Votre commission a adopté l'article 8 sans modification .

Article 9
(art. L. 213-6, L. 221-8, L. 221-8-1 [nouveau], L. 521-1 et L. 532-6 du code de l'organisation judiciaire et titre III du livre III du code de la consommation)
Répartition du contentieux de l'exécution

En première lecture au Sénat, cet article avait pour objet d'organiser une nouvelle répartition du contentieux de l'exécution entre le tribunal d'instance et le tribunal de grande instance, conformément à la recommandation n° 8 du rapport de la commission sur la répartition des contentieux présidée par le recteur Serge Guinchard 6 ( * ) .

Il s'agissait de regrouper le contentieux de l'exécution mobilière devant le juge de l'exécution du tribunal d'instance et le contentieux de l'exécution immobilière ou quasi-immobilière devant le juge de l'exécution du tribunal de grande instance. Le juge de l'exécution du tribunal d'instance était aussi déclaré compétent en matière de traitement des situations de surendettement des particuliers et de procédure de rétablissement personnel.

L'Assemblée nationale est largement revenue sur la réorganisation ainsi proposée. En effet, la constitution des blocs de compétence que permettait la proposition de loi a été fragilisée par un revirement de jurisprudence récent de la Cour de cassation.

Cette dernière a en effet jugé dans un arrêt du 18 juin 2009 7 ( * ) que l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire donnait compétence au juge de l'exécution pour connaître des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit , à moins qu'elles n'échappent à la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire.

Jusqu'alors, la jurisprudence refusait au juge de l'exécution la possibilité de se prononcer sur la validité du titre exécutoire qui faisait l'objet de la contestation, notamment s'il s'agissait d'un acte notarié, ce qui lui imposait de sursoir à statuer le temps que la juridiction compétente au fond puisse se prononcer.

La conséquence pratique du revirement jurisprudentiel intervenu est que le même juge devra connaître, à l'avenir, du contentieux des modalités de l'exécution et de celui du fond du droit s'agissant de la validité du titre exécutoire.

Or, comme l'a souligné le rapporteur de l'Assemblée nationale, « le tribunal de grande instance est traditionnellement compétent pour connaître de la validité des actes juridiques selon une procédure avec représentation obligatoire, adaptée à la complexité des questions soulevées » 8 ( * ) .

Dans ses conditions, confier au tribunal d'instance le contentieux de l'exécution mobilière, serait lui donner compétence pour se prononcer sur la validité d'actes dont devrait pourtant seul avoir à connaître le tribunal de grande instance, et paradoxalement remettre ainsi en cause un bloc de compétence identifié, dont la pertinence n'est pas contestée, en cherchant à en constituer un nouveau .

Pour cette raison, votre commission juge la modification proposée par l'Assemblée nationale opportune , en ce qu'elle conserve au seul juge de l'exécution du tribunal de grande instance le contentieux de l'exécution mobilière et immobilière.

Cependant, elle estime nécessaire, comme la commission des lois de l'Assemblée nationale de conserver, par exception à la compétence générale du tribunal de grande instance, le transfert du contentieux du surendettement des particuliers et de la procédure de rétablissement personnel au tribunal d'instance qu'elle avait adoptée en première lecture. En effet, ce transfert fait l'objet d'un consensus unanime, qui vise à conforter le juge d'instance dans sa compétence de juridiction chargée du traitement des difficultés économiques rencontrées par les particuliers, qu'il s'agisse du crédit à la consommation, des factures ou des loyers impayés ou des mesures d'expulsion etc . Une disposition d'ordre rédactionnel au deuxième paragraphe du présent article permettra le remplacement du terme « juge de l'exécution » par celui de « juge d'instance » au titre III du livre III du code de la consommation.

Cette première exception, que réalisent, au premier paragraphe de l'article, le 1° et le 3° ainsi que le 4° et le 5° pour Mayotte et Wallis-et-Futuna , en appelle, pour les mêmes raisons, une seconde, qui concerne le contentieux relatif à la saisie des rémunérations. Car, comme l'a observé le rapporteur de l'Assemblée nationale, « cette procédure présente en effet des particularités qui imposent de la voir confiée au tribunal d'instance, notamment le préliminaire obligatoire de conciliation, la protection particulière devant être apportée aux salaires et revenus assimilés et le rôle du tribunal dans la mise en oeuvre de ces saisies au long cours, qui justifient la compétence d'un juge disposant d'une forte culture de conciliation et une implantation judiciaire de proximité » 9 ( * ) . Tel est l'objet du 2° du premier paragraphe du présent article .

Votre rapporteur confirme par ailleurs la réserve d'interprétation formulée par le rapporteur de l'Assemblée nationale selon laquelle l'ordonnance n° 2006-461 du 21 avril 2006 réformant la saisie immobilière a bien inséré un alinéa dans l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire. En effet, même si, formellement, l'ordonnance précitée a opérée cette modification en visant l'ancien article L. 311-12-1 du code de l'organisation judiciaire, devenu entre temps, après l'adoption de l'ordonnance n°2006-673 du 8 juin 2006 portant refonte du code de l'organisation judiciaire et modifiant le code de commerce, le code rural et le code de procédure pénale, l'article L. 213-6 précité, il convient d'appliquer à ce dernier article la modification proposée.

Initialement, votre commission avait matérialisé cette réserve d'interprétation dans une disposition législative d'interprétation à l'article 3 du présent texte. Cependant, constatant que les textes établis, notamment par Légifrance, avaient procédé conformément à l'interprétation retenue, la commission des lois de l'Assemblée nationale l'a supprimé du texte du présent projet de loi, au profit d'une réserve d'interprétation mentionnée, dans son rapport à l'occasion de la modification apportée à l'article L. 213-6 du code de l'organisation judiciaire.

Votre commission a adopté l'article 9 sans modification .

CHAPITRE V - DISPOSITIONS RELATIVES À LA PROFESSION D'HUISSIER DE JUSTICE

Article 10
(art. L. 3252-6 du code du travail)
Coordination dans le code du travail

Cet article modifie l'article L. 3252-6 du code du travail, qui renvoie à un décret en Conseil d'Etat la détermination de la juridiction compétente pour connaître de la saisie des rémunérations.

Votre commission avait souhaité rappeler à cet article la compétence du juge de l'exécution du tribunal d'instance dans ce domaine. Compte tenu des modifications apportées à l'article 9 de la proposition de loi, il s'agit en fait d'une mesure de coordination, le nouvel article L. 211-11 du code de l'organisation judiciaire attribuant au juge du tribunal d'instance la compétence pour connaître de la saisie des rémunérations.

La commission des lois de l'Assemblée nationale a adopté à cet article des amendements de précision de son rapporteur.

Votre commission a adopté l'article 10 sans modification .

Article 13 bis
(art. 2 de l'ordonnance n° 45-2592
du 2 novembre 1945 relative au statut des huissiers)
Suppression du double original des huissiers de justice

Cet article, issu d'un amendement du rapporteur de la commission des lois de l'Assemblée nationale, supprime l'obligation pour les huissiers de créer deux originaux de leurs actes.

En effet, aux termes de l'article 2 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative au statut des huissiers, ces derniers sont tenus d'établir « leurs actes, exploits et procès-verbaux en double original », à l'exception des actes en matière pénale et des actes d'avoué à avoué. L'un des originaux est dispensé de timbre et de formalités fiscales. Il doit être remis à la partie ou à son représentant et peut être produit devant les juridictions. L'autre original est conservé par l'huissier, dans les conditions fixées par un décret en Conseil d'Etat.

L'article 866 du code général des impôts reprend des dispositions similaires aux deux premiers alinéas de l'article 2 de l'ordonnance du 2 novembre 1945.

La commission des lois de l'Assemblée nationale a souhaité supprimer cette double formalité, « pour permettre le déploiement des nouvelles technologies, en particulier le recours au minutier central », en accord avec la Chambre nationale des huissiers de justice 10 ( * ) . La possibilité d'établir les actes sur support électronique retire en effet son intérêt à la distinction entre l'original et la copie, et réduit fortement la pertinence du double original.

Le texte adopté par l'Assemblée nationale prévoit, par conséquent, que les huissiers de justice sont tenus d'établir leurs actes en un original et d'en établir des expéditions certifiées conformes. Les conditions de conservation de l'original et les modalités d'édition des expéditions, certifiées conformes seraient définies par décret en Conseil d'Etat.

A cette fin, le décret n° 56-222 du 29 février 1956 pris pour l'application de l'ordonnance du 2 novembre 1945 devra être modifié, notamment parce qu'il fait référence aux premier et second originaux des actes et procès-verbaux établis par les huissiers de justice.

Votre commission a adopté l'article 13 bis sans modification .

Article 14
(art. 3 bis et 3 ter nouveaux de l'ordonnance n° 45-2592
du 2 novembre 1945 relative au statut des huissiers)
Obligation de formation continue -
Exercice de la profession en qualité de salarié

Cet article définit, au sein de deux nouveaux articles 3 bis et 3 ter de l'ordonnance du 2 novembre 1945, l'obligation de formation professionnelle continue des huissiers de justice et la possibilité pour ces derniers d'exercer leur profession en qualité de salarié.

L'Assemblée nationale n'a apporté à cet article que des modifications rédactionnelles.

L'obligation de formation continue

Le nouvel article 3 bis de l'ordonnance établit le principe d'une formation professionnelle continue obligatoire, dont la nature et la durée seraient déterminées par décret en Conseil d'Etat. Il reviendrait en outre à la Chambre nationale des huissiers de justice de définir les modalités selon lesquelles cette formation continue doit s'accomplir.

La possibilité d'exercer la profession d'huissier de justice en qualité de salarié.

La possibilité pour les huissiers de justice d'exercer leur profession en qualité de salarié s'inspire du statut de notaire salarié, qui apparaît comme un élément de promotion interne, constituant une étape préalable à l'association.

Le nouvel article 3 ter de l'ordonnance prévoit qu'une personne physique titulaire d'un office d'huissier de justice ne peut pas employer plus d'un huissier de justice salarié. Une personne morale titulaire d'un tel office ne pourrait employer un nombre d'huissiers de justice salariés supérieur à celui des huissiers de justice associés qui y exercent la profession.

Les dispositions retenues reprennent celles qui figurent à l'article 1 er ter de l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative au statut du notariat.

Ainsi, l'huissier de justice salarié pourrait refuser à son employeur de délivrer un acte ou d'accomplir une mission lorsque cet acte ou cette mission lui paraissent contraires à sa conscience ou susceptibles de porter atteinte à son indépendance.

Les règles applicables aux litiges nés à l'occasion de l'exécution du contrat de travail, au licenciement de l'huissier de justice salarié et les conditions dans lesquelles il peut être mis fin aux fonctions d'officier public de l'huissier de justice salarié seraient définies par décret en Conseil d'Etat.

Votre commission a adopté l'article 14 sans modification.

Article 15
(art. 6, 7 et 7 ter nouveau de l'ordonnance n° 45-2592
du 2 novembre 1945 relative au statut des huissiers)
Régime disciplinaire

Cet article réforme le régime disciplinaire applicable aux huissiers de justice et définit les compétences de la chambre départementale des huissiers siégeant en comité mixte.

Le régime disciplinaire des huissiers de justice

Le régime disciplinaire des huissiers de justice, défini par l'ordonnance n° 45-1418 du 28 juin 1945 relative à la discipline des notaires et de certains officiers ministériels, est soumis au contrôle de la chambre départementale des huissiers, agissant comme chambre de discipline, et du tribunal de grande instance (article 6 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative au statut des huissiers).

Les modifications proposées s'inspirent de la réforme du régime disciplinaire des notaires, mise en oeuvre par la loi du 11 février 2004 réformant le statut de certaines professions judiciaires ou juridiques, des experts judiciaires, des conseils en propriété industrielle et experts en ventes aux enchères publiques.

Ainsi, la compétence disciplinaire des chambres départementales serait confiée aux chambres régionales, au sein desquelles seraient créées des chambres de discipline chargées de proposer ou de prononcer des sanctions (3°). Cette réorganisation permettra de réduire la proximité entre les instances disciplinaires et les huissiers de justice faisant l'objet de poursuites, dans un objectif d'impartialité.

Le 1° de l'article 15 attribue par ailleurs à la chambre départementale le rôle de dénoncer les infractions disciplinaires dont elle a connaissance (article 6 de l'ordonnance du 2 novembre 1945).

La chambre régionale devrait pour sa part vérifier la tenue de la comptabilité, ainsi que le fonctionnement et l'organisation des études d'huissier de justice du ressort (2° de l'article 15).

Enfin, l'article 7 bis, rétabli au sein de l'ordonnance du 2 novembre 1945, précise la composition de la formation disciplinaire de la chambre régionale, qui comprend donc au moins cinq membres, dont son président, les présidents des chambres départementales et, le cas échéant, les vice-présidents de chambres interdépartementales 11 ( * ) , tous membres de droit. Dans les DOM, la chambre de discipline comprendrait un effectif minimal de trois membres.

Les compétences des chambres départementales des huissiers de justice siégeant en comité mixte

La commission des lois de l'Assemblée nationale a adopté un amendement de son rapporteur, par coordination avec les dispositions de l'article 16 de la proposition de loi, prévoyant que la compétence de la Chambre nationale des huissiers de justice siégeant en comité mixte se limite au règlement des questions d'ordre général concernant la création, le fonctionnement et le budget des oeuvres sociales intéressant le personnel des études.

Cet amendement a par conséquent supprimé les attributions des comités mixtes des chambres départementales en matière de recrutement et de formation professionnelle des clercs et employés, de conditions de travail dans les études et de salaires. La seule mission des chambres départementales siégeant en comité mixte sera donc d'assurer l'exécution des décisions prises en matière d'oeuvres sociales par la chambre nationale et la chambre régionale.

Votre commission a adopté l'article 15 sans modification.

Article 15 bis
(art. L. 561-36 du code monétaire et financier,
art. 6 et 7 de l'ordonnance n° 45-2592 du 2 novembre 1945
relative au statut des huissiers)
Compétence de la chambre régionale des huissiers de justice
en matière de lutte contre le blanchiment

Cet article, issu d'un amendement du rapporteur de la commission des lois de l'Assemblée nationale, donne aux chambres régionales des huissiers de justice la compétence qui est aujourd'hui celle des chambres départementales pour assurer les pouvoirs de contrôle et de sanction en matière de respect des exigences définies par le code monétaire et financier, dans le cadre de la lutte contre le blanchiment et contre le financement du terrorisme.

Les chambres régionales seraient donc visées comme autorités compétentes en cette matière à l'article L. 561-36 du code monétaire et financier (I de l'article 15 bis ).

En conséquence, le contrôle du respect des obligations en matière de lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme serait retiré de la liste des attributions des chambres départementales (I° du II) et ajouté à la liste des attributions des chambres régionales, à l'article 7 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 (2° du II).

Ce transfert de compétence paraît justifié puisque l'article 15 de la proposition de loi donne aux chambres régionales la compétence pour vérifier la tenue de la comptabilité et le fonctionnement des études d'huissiers.

Votre commission a adopté l'article 15 bis sans modification.

Article 16
(art. 8 de l'ordonnance n° 45-2592 du 2 novembre 1945
relative au statut des huissiers)
Négociation collective -
Mise en oeuvre de la signification électronique -
Règlement national

Cet article institue une compétence concurrente, en matière de négociation collective, entre la Chambre nationale des huissiers de justice et les syndicats professionnels ou groupements d'employeurs représentatifs. La commission des lois de l'Assemblée nationale a adopté un amendement de son rapporteur complétant cet article, afin de permettre à la Chambre nationale de tenir la liste des personnes ayant accepté de recevoir un acte de signification électronique et d'élaborer un règlement national applicable aux usages de la profession.

1. La compétence de la Chambre nationale des huissiers de justice et des syndicats professionnels en matière de négociation collective

Aux termes de l'article 8 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative au statut des huissiers, la Chambre nationale des huissiers de justice :

- représente l'ensemble de la profession auprès des services publics ;

- prévient ou concilie tous différends d'ordre professionnel entre les chambres régionales, entre les chambres départementales, ou entre huissiers ne relevant pas de la même chambre régionale ;

- tranche, en cas de non-conciliation, ces litiges par des décisions qui sont immédiatement exécutoires ;

- organise et règle le budget de toutes les oeuvres sociales intéressant les huissiers ;

- donne son avis sur le règlement intérieur des chambres départementales et régionales ;

- dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, collecte, gère et répartit entre les huissiers de justice les indemnités pour frais de déplacement qui leur sont dues ;

- établit son budget et en répartit les charges entre les chambres régionales.

La Chambre nationale, siégeant en comité mixte 12 ( * ) , règle en outre les questions d'ordre général concernant le recrutement et la formation des clercs et employés, l'admission au stage des aspirants aux fonctions d'huissier, l'organisation des cours professionnels, la création, le fonctionnement et le budget des oeuvres sociales intéressant le personnel des études, les conditions de travail dans les études, et, sous réserve des dispositions légales ou réglementaires particulières, le salaire et les accessoires du salaire.

Enfin, il est prévu que la Chambre nationale siégeant, dans l'une ou l'autre de ses formations, donne son avis, chaque fois qu'elle en est requise par le ministre de la justice sur les questions professionnelles rentrant dans ses attributions.

Dans un arrêt d'assemblée du 16 décembre 2005 13 ( * ) , le Conseil d'Etat a considéré que ces dispositions, combinées avec celles de l'article 10 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 interdisant aux huissiers de justice de constituer des associations au sens de la loi de 1901 ayant pour objet des questions relevant des compétences de la Chambre nationale des huissiers de justice, conféraient à cette dernière une compétence exclusive pour l'exercice de droits normalement dévolus aux organisations syndicales , en particulier la négociation de conventions ou accords collectifs 14 ( * ) , compétence qu'il a jugé contraire au principe de liberté syndicale énoncé au sixième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946.

En conséquence, il a considéré que les dispositions de l'article 10 interdisant aux huissiers de justice de constituer des associations au sens de la loi de 1901 ayant pour objet des questions relevant des compétences de la Chambre nationale des huissiers de justice étaient implicitement abrogées.

Au demeurant, ce monopole s'avère également contraire à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi qu'à la convention n° 87 de l'organisation internationale du travail sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, comme l'a souligné le Bureau international du travail dans un avis du 2 novembre 2003.

Les modifications proposées consistent donc, en premier lieu, à prévoir dans un nouvel alinéa que la Chambre nationale et les syndicats professionnels ou groupements d'employeurs représentatifs négocient les conventions et accords collectifs de travail (1°).

Votre commission a jugé souhaitable de maintenir la compétence de la Chambre nationale des huissiers de justice, qui représente l'ensemble des membres de la profession, en matière de négociation collective. L'organisation de la profession demeure en effet spécifique, puisque seule l'Union nationale des huissiers de justice a été reconnue comme organisation représentative des employeurs, par une décision du ministre chargé du travail du 16 juillet 2007.

Toutefois, comme le relevait votre rapporteur en première lecture, il sera difficile à la Chambre nationale des huissiers de justice, lorsqu'il existera des huissiers salariés, de négocier les stipulations de la convention collective les concernant, puisqu'elle représentera à la fois les employeurs et les salariés.

En outre, le 2° de l'article 16 limite la compétence de la chambre nationale des huissiers de justice, siégeant en comité mixte, au règlement des questions d'ordre général concernant la création, le fonctionnement et le budget des oeuvres sociales intéressant le personnel des études.

En effet, les dispositions du dernier alinéa de l'article 8 de l'ordonnance du 2 novembre 1945, prévoyant que la chambre nationale, siégeant en comité mixte, règle les conditions de travail dans les études, et, sous réserve des dispositions légales ou réglementaires particulières, le salaire et les accessoires du salaire, devraient être considérées abrogées par l'article 19 de la loi n° 50-205 du 11 février 1950 relative aux conventions collectives et aux procédures de règlement des conflits collectifs de travail.

L'Assemblée nationale a adopté les 1° et 2° de l'article 16 sans modification.

2. La mise en oeuvre de la signification électronique

La commission des lois de l'Assemblée nationale a adopté un amendement de son rapporteur insérant à l'article 16 un 3° prévoyant que la Chambre nationale tient à jour, dans le respect de la loi du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés et dans les conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, la liste des personnes ayant consenti à recevoir un acte de signification par voie électronique. La chambre pourrait conclure à cette fin toute convention organisant le recours à la communication électronique.

Ce dispositif vise à assurer la modernisation des conditions d'exercice de la profession d'huissier de justice. Toutefois, la communication d'un acte ne peut être effectuée par voie électronique sans que le destinataire ait donné son accord à l'utilisation de cette procédure dématérialisée.

Aussi est-il indispensable que tout huissier de justice souhaitant recourir à cette procédure puisse vérifier que la personne à laquelle il doit signifier un acte a donné son consentement, qu'il en connaisse l'adresse électronique et le domicile. En effet, même si la signification peut être effectuée par voie électronique, le domicile du destinataire reste le critère déterminant pour définir la compétence territoriale de l'huissier.

La liste des personnes ayant consenti à recevoir un acte de signification par voie électronique, tenue par la chambre nationale, serait donc « assortie des renseignements utiles ».

3. L'adoption d'un règlement national

L'amendement adopté par la commission des lois de l'Assemblée nationale prévoit que la chambre nationale peut établir, en ce qui concerne les usages de la profession à l'échelon national, un règlement, soumis à l'approbation du ministre de la justice.

Ce règlement serait conçu comme un recueil des bonnes pratiques, sur le modèle du règlement national élaboré par le Conseil supérieur du notariat.

Votre commission a adopté l'article 16 sans modification .

Article 17
(art. 10 de l'ordonnance n° 45-2592 du 2 novembre 1945
relative au statut des huissiers)
Associations régies par la loi de 1901 et syndicats professionnels

Cet article réécrit l'article 10 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative au statut des huissiers, afin de permettre aux huissiers de justice de former entre eux des associations régies par la loi du 1 er juillet 1901 et des syndicats professionnels au sens de l'article L. 2131- du code du travail.

Cette nouvelle rédaction tire les conséquences de l'arrêt du Conseil d'Etat du 16 décembre 2005, qui avait constaté l'abrogation implicite de l'article 10 de l'ordonnance, au motif qu'il était contraire au principe de liberté syndicale défini par le sixième alinéa du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946.

La commission des lois de l'Assemblée nationale a apporté à cet article une modification rédactionnelle.

Votre commission a adopté l'article 17 sans modification.

Article 18
(art. 3 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986)
État des lieux d'un logement avant sa location

En premier lecture au Sénat, votre commission a adopté cet article résultant d'un amendement de votre rapporteur, qui visait à favoriser la réalisation d'états des lieux amiables entre les propriétaires et les locataires. Il prévoyait à cette fin que l'état des lieux serait, en principe, dressé par les parties, contradictoirement, amiablement et sans frais pour le locataire. En cas d'intervention d'un huissier de justice à la demande d'une seule des parties, sans l'accord de l'autre, le coût de l'état des lieux serait intégralement supporté par le demandeur de l'acte.

À l'initiative de son rapporteur, la commission des lois de l'Assemblée nationale a apporté plusieurs modifications au texte adopté par le Sénat.

Faisant état des réserves exprimées par les représentants de la chambre nationale des huissiers de justice, qui ont considéré que la rédaction retenue par le Sénat limitait l'intervention des huissiers aux seuls cas de conflit, le rapporteur de l'Assemblée nationale a proposé d'ouvrir plus largement aux tiers, ce qui inclut notamment les huissiers de justice, la possibilité d'intervenir pour faire établir un état des lieux amiable. En cas de conflit cependant, l'établissement de document ne pourrait être réalisé que par un huissier de justice.

Partageant les préoccupations formulées par votre rapporteur sur la nécessité de veiller à ce que les tarifs pratiqués par les huissiers ne puissent donner lieu à certaines dérives dénoncées tant par les associations de consommateurs que par la chambre nationale des huissiers de justice, qui avait adressé une circulaire aux chambre régionales et départementales appelant très clairement au strict respect de la réglementation tarifaire, le rapporteur de l'Assemblée nationale a déposé un amendement en commission prévoyant que le coût de l'état des lieux établi par huissier serait fixé par décret en Conseil d'État.

Cependant, par un second amendement déposé en séance publique et adopté, ainsi que deux amendements identiques, par l'Assemblée nationale, il a restreint le champ d'application du tarif au seuls cas de constats non amiables. En effet, dans cette situation, les parties n'ont d'autre choix que de recourir aux services d'un huissier, ce qui justifie l'application d'un tarif réglementé. Tel n'est en revanche pas le cas, lorsque le constat est établi amiablement, puisqu'alors les règles de la concurrence sont appelées à jouer librement, dans la mesure où les parties peuvent décider de s'adresser à un tiers autre qu'un huissier.

Enfin, la rédaction du présent article issue des travaux de l'Assemblée nationale prévoit qu'en cas de constat amiable dressé par un tiers, le coût ne peut en être, directement ou indirectement, supporté par le locataire, ce qui est conforme à la position adoptée par le Sénat. En revanche, en cas de conflit, l'Assemblée nationale a retenu l'état actuel du droit qui prévoit un partage des frais entre le locataire et le propriétaire, tandis que le Sénat a privilégié la solution selon laquelle la partie qui avait demandé l'acte en supportait intégralement la charge.

Les modifications ainsi apportées présentent le mérite de favoriser l'établissement amiable des constats, lorsque les parties souhaitent faire appel à un tiers, ce qui constituait la principale raison qui a motivé l'adoption de cet article en première lecture par votre commission.

S'agissant du partage des frais en cas de constat dressé à la demande exclusive d'une partie, votre rapporteur observe que cette solution préserve les intérêts du locataire, puisque, dans la mesure où, à défaut de constat, celui-ci est présumé avoir pris les lieux en bon état 15 ( * ) , il a, plus que le propriétaire, intérêt à faire établir un constat si le bien présente des malfaçons ou des imperfections. Or, étant le seul à le demander, la charge lui en incomberait si elle n'était partagée en deux.

Votre commission a adopté l'article 18 sans modification .

CHAPITRE VI - DISPOSITIONS DIVERSES RELATIVES À LA PROFESSION DE NOTAIRE

Article 19
(art. 1er quater nouveau de l'ordonnance n° 45-2590 du 2 novembre 1945
relative au statut du notariat)
Obligation de formation continue

Cet article définit une obligation déontologique de formation professionnelle continue pour les notaires. Il consacre une pratique déjà très répandue.

Sur le modèle des dispositions retenues à l'article 14 de la proposition de loi pour la formation professionnelle continue des huissiers de justice, le nouvel article 1 er quater de l'ordonnance du 2 novembre 1945 renvoie à un décret la détermination de la nature et de la durée des activités susceptibles d'être validées au titre de cette obligation. Il reviendrait au Conseil supérieur du notariat de définir les modalités selon lesquelles l'obligation de formation professionnelle continue s'accomplit.

L'Assemblée nationale a adopté à cet article un amendement rédactionnel de son rapporteur.

Votre commission a adopté l'article 19 sans modification.

Article 19 bis
(art. 4 de l'ordonnance n° 45-2590 du 2 novembre 1945
relative au statut du notariat)
Compétences de la chambre départementale des notaires

Cet article, issu d'un amendement du rapporteur de la commission des lois de l'Assemblée nationale, effectue des coordinations au sein de l'article 4 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative au statut du notariat, qui définit les attributions des chambres départementales des notaires.

En effet, les articles 20 et 21 de la proposition de loi modifient les compétences du conseil régional des notaires et du conseil supérieur du notariat.

Ainsi, l'article 20 supprime les attributions des conseils régionaux siégeant en comité mixte en matière de fonctionnement des écoles de notariat. L'article 21 limite la compétence du Conseil supérieur du notariat siégeant en comité mixte au règlement des questions générales relatives à la création, au fonctionnement et au budget des oeuvres sociales intéressant le personnel des études.

En conséquence, l'article 19 bis prévoit que :

- la chambre départementale des notaires, siégeant en comité mixte, est chargée d'assurer dans le département l'exécution des décisions prises en matière d'oeuvres sociales par le conseil supérieur et le conseil régional siégeant en comité mixte ;

- les autres compétences de la chambre départementale siégeant en comité mixte sont supprimées.

Votre commission a adopté l'article 19 bis sans modification .

Article 21
(art. 6 de l'ordonnance n° 45-2590 du 2 novembre 1945
relative au statut du notariat)
Négociation collective

Dans le même esprit que l'article 16 relatif aux huissiers de justice, cet article institue une compétence concurrente entre le Conseil supérieur du notariat et les syndicats professionnels ou groupements d'employeurs représentatifs, en matière de négociation collective.

En effet, l'avant-dernier alinéa de l'article 6 de l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative au statut du notariat donne au Conseil supérieur du notariat, en matière de négociation collective, une compétence exclusive qui paraît contraire au principe de liberté syndicale défini par le Préambule de la Constitution de 1946 et à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme.

Au 1° de l'article 21, instituant une compétence concurrente entre le Conseil supérieur du notariat et les syndicats ou groupements d'employeurs en matière de négociation collective, la commission des lois de l'Assemblée nationale a précisé, à l'initiative de son rapporteur, que ces partenaires pourraient non seulement négocier mais aussi conclure des conventions et accords.

Le 2°, non modifié, limite la compétence du Conseil supérieur du notariat au règlement des questions d'ordre général concernant la création, le fonctionnement et le budget des oeuvres sociales intéressant le personnel des études.

Votre commission a adopté l'article 21 sans modification.

Article 22
(art. 7 de l'ordonnance n° 45-2590 du 2 novembre 1945
relative au statut du notariat)
Associations de la loi de 1901 et syndicats professionnels

Sur le modèle de l'article 17 de la proposition de loi, cet article permet aux notaires de former entre eux des associations sous le régime de la loi du 1 er juillet 1901 et des syndicats au sens de l'article L. 2131-1 du code du travail.

Il existe actuellement deux syndicats de notaires : le syndicat des notaires de France et le syndicat national des notaires.

La commission des lois de l'Assemblée nationale a adopté à cet article un amendement rédactionnel de son rapporteur.

Votre commission a adopté l'article 22 sans modification.

Article 23
(art. 345, 348-3 et 361 du code civil)
Recueil du consentement à adoption

Cet article tend à confier le recueil du consentement à l'adoption aux seuls notaires, agents diplomatiques ou consulaires français et service de l'aide sociale à l'enfance. Il précise en outre que le consentement personnel de l'adopté de plus de treize ans est requis, quelle que soit la nature, simple ou plénière de l'adoption et que ce consentement peut être rétracté jusqu'au prononcé de l'adoption.

La modification apportée par l'Assemblée nationale est d'ordre rédactionnel.

Votre commission a adopté l'article 23 sans modification .

CHAPITRE VII - DISPOSITIONS DIVERSES RELATIVES À LA PROFESSION DE GREFFIER DE TRIBUNAL DE COMMERCE

Article 25
(section I bis nouvelle du chapitre III du titre quatrième du livre septième
et art. L. 743-11-1 nouveau du code de commerce)
Obligation de formation continue

Cet article définit une obligation de formation professionnelle continue pour les greffiers des tribunaux de commerce, sur le modèle des dispositions retenues pour les huissiers de justice (article 14) et pour les notaires (article 19).

La commission des lois de l'Assemblée nationale a adopté à cet article deux amendements rédactionnels de son rapporteur.

Votre commission a adopté l'article 25 sans modification.

Article 26
(art. L. 743-12 et L. 743-12-1 nouveau du code de commerce)
Exercice de la profession de greffier de tribunal de commerce
en qualité de salarié

Cet article permet aux greffiers de tribunal de commerce d'exercer leur profession en qualité de salarié, selon un dispositif similaire à celui retenu pour les huissiers de justice, à l'article 13 de la proposition de loi, établi sur le modèle de l'article premier de l'ordonnance du 2 novembre 1945 relative au statut du notoriat.

La commission des lois de l'Assemblée nationale a adopté à cet article trois amendements rédactionnels de son rapporteur.

Votre commission a adopté l'article 26 sans modification.

CHAPITRE VIII - DISPOSITIONS RELATIVES À LA PROFESSION DE COMMISSAIRE-PRISEUR JUDICIAIRE

Article 27
(art. 2 de l'ordonnance n° 45-2593 du 2 novembre 1945
relative au statut des commissaires-priseurs judiciaires)
Obligation de formation continue

Cet article définit une obligation de formation professionnelle continue pour les commissaires-priseurs judiciaires, sur le modèle des dispositions retenues pour les huissiers de justice (article 14), pour les notaires (article 19) et pour les greffiers des tribunaux de commerce (article 25).

La commission des lois de l'Assemblée nationale a adopté à cet article un amendement de précision de son rapporteur.

Votre commission a adopté l'article 27 sans modification.

Article 28
(art. 8 de l'ordonnance n° 45-2593 du 2 novembre 1945
relative au statut des commissaires-priseurs judiciaires)
Attributions de la chambre de discipline

Cet article, similaire aux articles 16 et 21 de la proposition de loi s'agissant des huissiers de justice et des notaires, limite les attributions de la chambre de discipline des commissaires-priseurs judiciaires siégeant en comité mixte à la vérification de l'exécution, dans le ressort de la compagnie 16 ( * ) , des décisions prises en matière d'oeuvres sociales par la chambre nationale siégeant en comité mixte.

Les questions relatives au recrutement, à la formation, aux conditions de travail et aux salaires relèvent en effet de la négociation collective (article 29).

La commission des lois de l'Assemblée nationale a adopté à cet article un amendement de coordination de son rapporteur.

Votre commission a adopté l'article 28 sans modification.

Article 29
(art. 9 et 10 de l'ordonnance n° 45-2593 du 2 novembre 1945
relative au statut des commissaires-priseurs judiciaires)
Négociation collective - Syndicats professionnels

Cet article prévoit, sur le modèle des articles 16 et 21 de la proposition de loi, relatifs aux huissiers de justice et aux notaires, l'attribution d'une compétence concurrente à la chambre nationale des commissaires-priseurs judiciaires et aux syndicats professionnels ou groupements d'employeurs représentatifs, en matière de négociation collective.

Outre un amendement rédactionnel, la commission des lois de l'Assemblée nationale a adopté à cet article un amendement de son rapporteur permettant à la chambre nationale des commissaires-priseurs judiciaires d'établir, en ce qui concerne les usages de la profession à l'échelon national, un règlement soumis à l'approbation du ministre de la justice. La profession pourra ainsi disposer, à l'exemple du notariat, d'un corpus de règles déontologiques.

Votre commission a adopté l'article 29 sans modification .

Article 30
(art. 10 de l'ordonnance n° 45-2593
du 2 novembre 1945 relative aux commissaires priseurs judiciaires)
Associations régies par la loi de 1901 et syndicats professionnels

Cet article, similaire aux articles 17 et 22 relatifs aux huissiers de justice et aux notaires, prévoit que les commissaires-priseurs judiciaires peuvent former entre eux des associations régies par la loi du 1 er juillet 1901 et des syndicats professionnels au sens de l'article L. 2131-1 du code du travail.

La commission des lois de l'Assemblée nationale a adopté à cet article un amendement rédactionnel de son rapporteur.

Votre commission a adopté l'article 30 sans modification .

CHAPITRE VIII BIS - DISPOSITIONS RELATIVES AUX AVOCATS AU CONSEIL D'ÉTAT ET À LA COUR DE CASSATION

Article 30 bis
(art. 13-2 de l'ordonnance du 10 septembre 1817 qui réunit,
sous la dénomination d'Ordre des avocats au Conseil d'Etat et à la Cour
de cassation, l'ordre des avocats aux conseils et le collège des avocats
à la Cour de cassation, fixe irrévocablement, le nombre des titulaires,
et contient des dispositions pour la discipline intérieure de l'Ordre)
Formation professionnelle continue des avocats
au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation

Cet article, issu d'un amendement du rapporteur de la commission des lois de l'Assemblée nationale, inscrit dans la loi l'obligation de formation professionnelle continue des avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation.

L'ordre des avocats aux conseils a rendu la formation professionnelle obligatoire par deux délibérations des 30 avril et 25 juin 2009, conformément à une préconisation du rapport de la commission sur les professions du droit.

L'amendement adopté par l'Assemblée nationale consacre cette obligation, selon des modalités similaires à celles retenues pour les notaires, les huissiers de justice, les greffiers des tribunaux de commerce et les commissaires-priseurs judiciaires.

L'obligation de formation professionnelle des avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation serait ainsi inscrite dans un nouvel article 13-2 de l'ordonnance du 10 septembre 1817. Il reviendrait au conseil de l'ordre de déterminer les modalités selon lesquelles cette obligation s'accomplit.

Votre commission a adopté l'article 30 bis sans modification .

CHAPITRE IX - DISPOSITIONS RELATIVES À LA PROFESSION D'AVOCAT

Article 31
(titre XVII du livre troisième, art. 2062 à 2068 [nouveaux] et art. 2238 du code civil, art. 4 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme
de certaines professions judiciaires et juridiques et art. 10 et 39
de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique)
Procédure participative de négociation assistée par avocat

Cet article crée une procédure de négociation entre les parties, conduite par leurs avocats , en vue de régler leur différend, ou, si elle échoue, de faciliter la tenue du procès et la mise en état du litige, grâce aux travaux préparatoires auxquels elle aura donné lieu. L'accord auquel parviennent les parties est soumis au juge pour homologation.

Cette procédure constitue la reprise d'une des recommandations formulées par la commission sur la répartition des contentieux présidé par le recteur Serge Guinchard. Elle a été introduite en première lecture au Sénat à l'initiative de votre rapporteur. Son champ a été limité aux seuls droits dont les parties ont la libre disposition, ce qui excluait les litiges relatifs à l'état ou à la capacité des personnes .

Initialement, votre rapporteur avait proposé que la résolution amiable des divorces ou des séparations de corps puisse, par exception à cette dernière règle, relever malgré tout d'une convention de procédure participative. Cependant, dans la mesure où la procédure de divorce par consentement mutuel prévoit d'ores et déjà une conciliation des parties sous le contrôle du juge, votre commission des lois n'a pas retenu cette proposition.

Les garanties présentées par la procédure participative sont nombreuses.

Tout d'abord, l'accord auquel aboutira le cas échéant la procédure participative de négociation correspondra à une transaction et obéira aux règles applicables en la matière et définies au titre quinzième du livre troisième du code civil. Il est d'ailleurs explicitement prévu au nouvel article 2066 que l'accord doit être homologué par le juge. Avant d'homologuer la transaction, le juge s'assurera, comme en matière de médiation, qu'elle préserve suffisamment les droits de chacune des parties 17 ( * ) . La convention de procédure participative, quant à elle, relèvera, en tant que convention, du régime général des contrats.

La définition de la convention de procédure participative, la conduite de la négociation et des échanges d'information, comme la conclusion éventuelle de l'accord s'effectueront sous le contrôle et avec l'assistance des avocats choisis par les parties.

La procédure participative sera par ailleurs régie par le code de procédure civile, ce qui garantira sa parfaite articulation avec les procédures judiciaires engagées ultérieurement par les parties.

Enfin, les droits des parties qui s'engageront dans une procédure participative seront préservés. L'interdiction qui leur est faite de saisir le juge tout le temps de la négociation cède en cas d'urgence s'agissant de l'adoption des mesures provisoires ou conservatoires qui pourraient apparaître nécessaires. En outre, elles bénéficieront de la suspension de la prescription à compter de la conclusion de la convention jusqu'à six mois au moins après le terme de cette dernière (article 2238 du code civil dans la nouvelle rédaction qui serait issue du présent article).

À l'initiative de son rapporteur, la commission des lois de l'Assemblée nationale a apporté , en dehors de rectifications ou de précisions d'ordre rédactionnel, deux modifications principales au texte adopté par le Sénat , qui portent chacune sur le champ d'application de la procédure participative.

? L'application de la procédure participative au divorce et à la séparation de corps

Le rapporteur de l'Assemblée nationale a fait valoir qu'il pouvait être opportun d'autoriser les parties à engager une procédure participative en matière de divorce et de séparation de corps dans la mesure où « la recherche de solution pacifiée à la rupture du mariage est un objectif majeur, notamment poursuivi par le législateur depuis la réforme du divorce intervenue en 2004 » 18 ( * ) .

Cette volonté de privilégier l'apaisement dans le contentieux du divorce se matérialise en particulier dans la place laissée, même dans les divorces autres que par consentement mutuel, à la médiation (article 255 du code civil) et à la conciliation (articles 252 à 252-4 du même code), pour permettre aux époux de s'entendre sur le principe du divorce comme sur ses conséquences. Il pourrait ainsi sembler paradoxal de refuser aux époux engagés dans une procédure de divorce le recours à une procédure de négociation conduite par leurs avocats, alors même que dans un premier temps, le juge cherchera à concilier leurs points de vue ou les invitera à se soumettre à une médiation.

Cependant, l'argument apparaît réversible. En effet, comme plusieurs de nos collègues l'ont rappelé au cours des débats qui ont eu lieu au sein de votre commission sur cette disposition, la procédure participative ne risque-t-elle pas de faire double emploi avec les autres procédures de conciliation conduites sous le contrôle du juge ?

En cas de divorce par consentement mutuel, le travail des avocats qui accompagnent les parties est déjà de rapprocher leurs points de vue, sans qu'une nouvelle procédure soit nécessaire à cela. Dans tous les autres cas, le juge a l'obligation de tenter de concilier les parties et il peut les inviter à se soumettre à une médiation.

Pour autant, votre commission a finalement considéré que, à la condition qu'elle soit correctement articulée avec la procédure judiciaire, la procédure participative pouvait présenter une véritable utilité dans le cadre d'un divorce ou d'une séparation de corps , pour plusieurs raisons.

En premier lieu, la convention de procédure participative présentera un cadre structuré de négociation susceptible de convaincre deux époux qui n'ont pu élaborer entre eux un accord sur les conditions de leur divorce, de s'engager dans une négociation parce qu'ils auront d'une part l'assurance que celle-ci ne pourra être interrompue par le dépôt d'une demande de divorce, d'autre part la garantie de recevoir le conseil de deux avocats chargés de veiller aux intérêts respectifs de l'un ou de l'autre.

En second lieu, les avantages présentés par la procédure participative se cumuleront avec les garanties apportées par la procédure judiciaire . L'accord des parties, partiel ou total, sera soumis à l'examen du juge qui vérifiera qu'il ne préjudicie pas aux droits de chacun des époux ni à celui des enfants.

Le dispositif retenu par l'Assemblée nationale prévoit en effet que, quelle que soit l'issue de la négociation préalable, la procédure de divorce s'applique intégralement . À cet égard, par exception avec la règle posée au nouvel article 2066 du code civil, les parties qui ne seraient pas parvenu à un accord et auront engagé une procédure de divorce autre que par consentement mutuel ne seront pas pour autant dispensées de la conciliation obligatoire prévue à l'article 252 du code civil. Les conventions de divorce par consentement mutuel seront quant à elles soumises à l'homologation du juge dans les conditions définies à l'article 232 du code civil, ce qui lui permettra de s'assurer qu'elles ne préjudicient pas aux intérêts de l'une des parties ou des enfants.

Ainsi, lorsqu'elles aboutiront positivement, les négociations assistées diminueront d'autant les divorces contentieux, au profit de divorces par consentement mutuel. L'accord partiel des parties limitera d'autant les points restant en discussion dans le cadre de la procédure de divorce. Même lorsque la négociation se sera soldée par un échec, un certain nombre d'échanges d'information auront eu lieu et les positions de chacun auront été clairement exprimées, ce qui sera susceptible de faire gagner du temps dans la procédure de divorce.

? L'exclusion du contentieux prud'homal du champ d'application de la procédure participative

Favorable à l'extension du champ de la procédure participative au divorce et à la séparation de corps, l'Assemblée nationale a en revanche souhaité en exclure la matière prud'homale.

Son rapporteur a en effet observé « [qu']il entre déjà dans la mission des conseils de prud'hommes de rechercher une solution amiable entre l'employeur et le salarié qu'un différend oppose, de sorte que la procédure participative pourrait faire doublon avec cette mission » 19 ( * ) .

L'article L. 1411-1 du code du travail dispose en effet que « le conseil de prud'hommes règle par voie de conciliation les différends qui peuvent s'élever à l'occasion de tout contrat de travail », le jugement n'intervenant que lorsque cette conciliation préalable n'a pas abouti. Ainsi, le contentieux prud'homal s'accompagne toujours d'une phase de conciliation judiciaire préalable, contrairement au divorce par consentement mutuel.

En outre, dans la mesure où la procédure participative est réservée aux avocats, elle ne correspond pas à l'esprit d'une procédure prud'homale qui autorise, en particulier lors de la conciliation préalable, la représentation des parties par d'autres personnes que des avocats, notamment les délégués des organisations d'employeurs ou de salariés. Exclure son application à la matière prud'homale apparaît donc justifié .

Votre commission a adopté l'article 31 sans modification .

Articles 32 à 50 (supprimés)
Intégration de la profession de conseil en propriété industrielle
au sein de la profession d'avocat

Les articles 32 à 50 organisaient la fusion des professions de conseil en propriété industrielle et d'avocat.

La commission des lois de l'Assemblée nationale, considérant que cette fusion ne constituait pas la solution la plus adaptée pour rapprocher ces deux professions, a supprimé ces articles, à l'initiative de son rapporteur.

Estimant que la question du rapprochement entre les professions de conseil en propriété industrielle et d'avocat devait être renvoyée au projet de loi de modernisation des professions judiciaires et juridiques réglementées, votre commission a confirmé cette suppression .

CHAPITRE IX BIS - DISPOSITIONS RELATIVES AUX EXPERTS JUDICIAIRES

Article 50 bis
(art. 2 de la loi n° 71-498 du 29 juin 1971 relative aux experts judiciaires)
Durée d'inscription des experts judiciaires
sur les listes établies par les cours d'appel

Cet article, issu d'un amendement du rapporteur de la commission des lois de l'Assemblée nationale, porte de deux à trois ans la durée d'inscription à titre probatoire des experts judiciaires sur les listes établies par les cours d'appel. Aussi augmente-t-il de trois à cinq ans la durée d'inscription sur une liste de cour d'appel nécessaire pour pouvoir solliciter leur inscription sur la liste nationale.

L'article 2 de la loi du 29 juin 1971 relative aux experts judiciaires, modifié par la loi du 11 février 2004, dispose que l'inscription initiale en qualité d'expert sur la liste dressée par la cour d'appel est faite, dans une rubrique particulière, à titre probatoire pour une durée de deux ans.

A l'issue de cette période probatoire, l'expert peut, sur présentation d'une nouvelle candidature, être réinscrit pour une durée de cinq ans, après avis motivé d'une commission associant des représentants des juridictions et des experts. Cette commission évalue alors l'expérience du candidat et sa connaissance des principes directeurs du procès et des règles de procédure applicables aux mesures d'instruction confiées à un technicien. Toute nouvelle inscription, pour une durée de cinq ans, est ensuite soumise à l'examen d'une nouvelle candidature, dans les mêmes conditions.

Par ailleurs, pour figurer sur la liste nationale des experts, établie par le bureau de la Cour de cassation, un expert doit justifier de son inscription sur une liste de cour d'appel pendant trois années consécutives.

Les modifications apportées par l'Assemblée nationale sont motivées par le fait que la période probatoire de deux ans est trop courte pour permettre une évaluation approfondie, a fortiori lorsque l'expert intervient dans une spécialité pour laquelle les missions d'expertise sont rares et longues à conduire.

En outre, l'augmentation de la durée requise pour être inscrit sur la liste nationale vise à assurer que l'expert ait déjà été évalué une fois au moins par la commission mixte.

En effet, il lui faudra, pour figurer sur la liste nationale, avoir été inscrit sur une liste de cour d'appel depuis au moins cinq ans, et non plus « pendant trois années consécutives », ce qui aurait correspondu à la nouvelle durée de la période probatoire.

Votre commission a adopté l'article 50 bis sans modification .

Article 50 ter
(art. 4 de la loi n° 71-498 du 29 juin 1971 relative aux experts judiciaires)
Sanction des experts honoraires
omettant de mentionner leur honorariat

Cet article, issu d'un amendement du rapporteur de la commission des lois de l'Assemblée nationale, prévoit qu'un expert honoraire qui aura omis de faire suivre son titre de la mention « honoraire » sera puni des peines prévues à l'article 259 du code pénal, comme toute personne qui aurait fait un usage infondé de la dénomination d'expert judiciaire.

Aux termes du décret n° 2004-1463 du 23 décembre 2004 relatif aux experts judiciaires, ces derniers peuvent, à leur demande, être admis à l'honorariat après avoir atteint l'âge de soixante-cinq ans et avoir figuré pendant quinze ans sur une liste de cour d'appel, ou pendant dix ans sur la liste nationale (article 33).

Il n'existe cependant pas de liste d'experts honoraires, ni de contrôle de ces derniers.

Votre commission a adopté l'article 50 ter sans modification .

Article 50 quater
(art. 5 de la loi n° 71-498 du 29 juin 1971 relative aux experts judiciaires)
Modalités de retrait d'un expert de la liste

Cet article, issu d'un amendement du rapporteur de la commission des lois de l'Assemblée nationale, définit les modalités de retrait d'un expert judiciaire de la liste d'une cour d'appel ou de la liste nationale.

Le I de l'article 5 de la loi du 29 juin 1971 relative aux experts judiciaires dispose que le retrait d'un expert figurant sur une liste peut être décidé par le premier président de la cour d'appel ou le premier président de la Cour de cassation, soit à la demande de l'expert, soit si le retrait est rendu nécessaire par des circonstances telles que l'éloignement prolongé, la maladie ou des infirmités graves et permanentes.

Le retrait se distingue donc clairement de la radiation, définie au II du même article, et qui sanctionne une incapacité ou une faute.

L'article additionnel adopté par l'Assemblée nationale prévoit que le premier président de la cour d'appel ou de la Cour de cassation procède au retrait de l'expert lorsque celui-ci accède à l'honorariat, lorsqu'il ne remplit plus les conditions de résidence ou de lieu d'exercice professionnel requises pour son inscription, ou lorsqu'il est frappé de faillite personnelle ou d'une sanction disciplinaire ou administrative faisant obstacle à son inscription.

En outre, si l'expert ne remplissait plus les conditions de résidence ou de lieu d'exercice professionnel, le premier président de la cour d'appel pourrait décider de maintenir l'inscription de l'expert jusqu'à ce qu'une autre cour d'appel ait, le cas échéant, statué sur sa demande d'inscription.

Ces dispositions apportent des compléments pertinents au régime du retrait des experts judiciaires.

Votre commission a adopté l'article 50 quater sans modification .

Article 50 quinquies
(art. 6-2 de la loi n° 71-498 du 29 juin 1971 relative aux experts judiciaires)
Durée de la période d'inscription applicable aux experts radiés
souhaitant figurer sur la liste nationale

Cet article, issu d'un amendement du rapporteur de la commission des lois de l'Assemblée nationale, porte de trois à cinq ans la durée de la période probatoire requise pour l'inscription sur la liste nationale d'un expert radié à titre temporaire.

En effet, l'article 6-2 de la loi du 29 Juin 1971 dispose que l'expert ayant commis une faute disciplinaire peut être radié temporairement pour une durée maximale de trois ans. Dans ce cas, il est de nouveau admis à la période probatoire s'il sollicite une nouvelle inscription sur une liste de cour d'appel.

Par coordination avec les dispositions de l'article 50 bis , il convient de porter de trois à cinq ans la durée d'inscription sur la liste de cour d'appel postérieure à la radiation pour que l'expert puisse à nouveau figurer sur la liste nationale.

Votre commission a adopté l'article 50 quinquies sans modification .

CHAPITRE X - DISPOSITIONS RELATIVES À L'OUTRE-MER

Article 51
Application outre-mer

Cet article, complété par un amendement du Gouvernement adopté par l'Assemblée nationale, habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance toute mesure visant à étendre et adapter les dispositions de la loi dans les collectivités d'outre-mer et en Nouvelle-Calédonie (I).

Le délai d'habilitation est de douze mois à compter de la promulgation de la loi. Les projets de loi de ratification devraient être déposés devant le Parlement au plus tard le dernier jour du sixième mois suivant la publication des ordonnances.

Par ailleurs, le II de l'article 51 modifie l'article 8 de la loi du 29 juin 1971 relative aux experts judiciaires afin de préciser que les compétences dévolues au premier président de la cour d'appel sont, à Saint-Pierre et Miquelon, exercées par le président du tribunal supérieur d'appel.

Votre commission a adopté l'article 51 sans modification .

CHAPITRE XI - ENTRÉE EN VIGUEUR

Article 52
Entrée en vigueur différée de certaines dispositions

Les premier et second alinéas du présent article diffèrent l'entrée en vigueur des dispositions relatives au juge de l'exécution, figurant aux articles 7 à 11 du présent texte, ainsi que celles relatives aux mesures conservatoires après l'ouverture d'une succession (article 12) et à la procédure participative (article 31) jusqu'à l'adoption du décret nécessaire à leur application ou, au plus tard au 1 er septembre 2011.

La nouvelle date retenue par l'Assemblée nationale à l'initiative de son rapporteur tient compte de la date d'adoption prévisible du présent texte.

L'amendement adopté par l'Assemblée nationale à cet article prévoit que l'article 50 bis ne s'applique qu'aux experts dont l'inscription sur une liste de cour d'appel est intervenue après son entrée en vigueur, conformément au principe de non rétroactivité.

Votre commission a adopté l'article 52 sans modification .

Article 53
(art. 44 de la loi n° 2007-308 du 5 mars 2007 portant réforme
de la protection juridique des majeurs)
Prorogation du délai ouvert aux personnes exerçant à titre habituel
des charges tutélaires, pour obtenir l'autorisation ou l'agrément de l'État

Cet article, adopté par l'Assemblée nationale à l'initiative du Gouvernement, corrige une erreur de coordination de l'article 44 de la loi n° 2007-308 du 5 mars 2007 portant réforme de la protection juridique des majeurs.

Une disposition identique a aussi été introduite par l'Assemblée nationale, à l'initiative du Gouvernement, dans la proposition de loi de simplification et d'amélioration de la qualité du droit, rapportée devant votre commission, par notre collègue Bernard Saugey le 6 octobre 2010.

À cette occasion, notre collègue a expliqué que, « comme en témoignent les travaux préparatoires, l'article 116 de la précédente loi de simplification et de clarification du droit et d'allègement des procédures du 12 mai 2009 a visé à reporter du 1 er janvier 2011 au 1 er janvier 2012 le délai accordé non seulement aux établissements de santé, sociaux ou médico-sociaux publics pour désigner un préposé chargé des mesures de protection juridique des majeurs, mais aussi aux personnes morales et aux personnes physiques exerçant à titre habituel des charges tutélaires, pour obtenir l'autorisation ou l'agrément de l'État nécessaire à la poursuite de leurs activités. Cependant la rédaction retenue n'a finalement permis ce report que pour les premiers et non pour les seconds » 20 ( * ) .

La présente disposition entend donc corriger cette erreur matérielle.

Votre commission a adopté l'article 53 sans modification .

*

* *

Votre commission a adopté la proposition de loi sans modification .

EXAMEN EN COMMISSION MERCREDI 24 NOVEMBRE 2010

La commission examine le rapport de M. François Zocchetto et le texte qu'elle propose pour le projet de loi n° 601 (2009-2010), modifiée par l'Assemblée nationale, relatif à l'exécution des décisions de justice, aux conditions d'exercice de certaines professions réglementées et aux experts judiciaires.

M. Jean-Jacques Hyest , président. - Nous allons examiner, en deuxième lecture, le rapport de M. François Zocchetto et le texte proposé par la commission pour la proposition de loi, modifiée par l'Assemblée Nationale, relative à l'exécution des décisions de justice, aux conditions d'exercice de certaines professions réglementées et aux experts judiciaires.

M. François Zocchetto , rapporteur. - La proposition de loi de notre collègue Laurent Béteille sur l'exécution des décisions de justice, qui nous revient après une première lecture à l'Assemblée nationale, vise à améliorer l'exécution des décisions de justice, à moderniser l'organisation et les compétences des juridictions, et à actualiser les conditions d'exercice de certaines professions judiciaires et juridiques.

En première lecture, l'Assemblée nationale a largement validé les dispositions adoptées par le Sénat, y apportant d'utiles précisions.

Plusieurs points de divergence demeurent cependant. A l'article 2, d'abord, nos collègues députés ont rétabli le renforcement de la valeur probante des constats d'huissiers; à l'article 3, ils ont étendu les prérogatives d'accès des huissiers aux parties communes d'un immeuble ; à l'article 31, ils ont étendu le champ de la procédure participative au divorce ; enfin, nos collègues ont supprimé notre projet d'intégration des conseils en propriété industrielle au sein de la profession d'avocat.

Cependant, en dépit de ces divergences, je vous invite à adopter le texte conforme. Les modifications limitées qui ont été apportées s'accompagnent des garanties nécessaires. Surtout, l'Assemblée nationale a déjà pris beaucoup de temps, alors que les mesures de ce texte sont très attendues par les professionnels : nous ne gagnerions rien à relancer la navette.

A l'article 2, l'Assemblée nationale a en fait rétabli le texte que nous avions adopté en commission, mais que le Sénat avait modifié après le vote d'un amendement de M. Mézard. Dans sa rédaction actuelle, le texte renforce la valeur probante des constats établis par les huissiers de justice : il opère un renversement de la charge de la preuve. C'est acceptable, dès lors qu'on reconnaît la probité des huissiers.

L'article 3 facilite l'accès des huissiers aux parties communes des immeubles dans le cadre de leur mission de signification comme d'exécution des décisions de justice. C'est utile compte tenu des nombreux dispositifs de sécurité et autres codes d'accès, qui sont venus compliquer leur tâche. L'Assemblée nationale a précisé qu'un huissier de justice peut, sans en faire la demande au parquet, obtenir sur le débiteur des informations relatives à l'état du patrimoine immobilier de la personne concernée : c'est pertinent. Elle a encore utilement supprimé la formalité du double original auquel sont soumis les actes d'huissiers.

L'Assemblée nationale a adopté plusieurs amendements étendant l'obligation de formation professionnelle continue, prévue pour les greffiers des tribunaux de commerce et les commissaires-priseurs judiciaires, aux avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, ainsi que des amendements permettant aux huissiers de justice et aux commissaires-priseurs judiciaires d'adopter un règlement national concernant les usages de la profession.

Nos collègues députés ont également prévu des dispositions facilitant certaines démarches judiciaires comme la reprise des locaux abandonnés par le locataire (article 3 bis), la signification des actes de procédure par voie électronique (article 16), ou la possibilité donnée à un tiers de réaliser un état des lieux locatif dans un cadre amiable (article 18).

Elle a par ailleurs limité au seul contentieux du surendettement des particuliers et à la procédure de rétablissement personnel, le transfert de compétences du tribunal de grande instance au tribunal d'instance, afin de tenir compte de la jurisprudence récente de la Cour de cassation (article 9).

Elle a adopté un article 5 bis habilitant le Gouvernement à procéder à l'adoption de la partie législative du code des procédures civiles d'exécution.

Ces dispositions ne me paraissent pas appeler de réserves particulières.

Les députés ont étendu le champ d'application de la procédure participative aux questions de divorce, ce que le Sénat avait formellement exclu. L'Assemblée nationale a cependant exclu les matières prud'homales de la procédure participative : cela nous semble judicieux, dès lors que la rupture négociée des contrats de travail fonctionne plutôt bien, sans qu'il soit besoin d'y ajouter la procédure participative. Sur le divorce, la position de nos collègues députés nous paraît acceptable, dès lors qu'ils ont pris le soin de préciser que l'engagement d'une procédure participative ne dispensait pas de suivre la procédure judiciaire du divorce.

La fusion des professions d'avocat et de conseillers en propriété industrielle, on s'en souvient, avait provoqué un très vif débat dans notre assemblée. Le Gouvernement souhaitait une telle évolution et il avait même proposé de légiférer par ordonnance, avant que notre commission indique clairement sa préférence pour une loi. Nous avions penché pour la fusion, mais nous n'avions été suivis que par une très faible majorité. L'Assemblée nationale n'en veut pas. Je crois que nous pouvons nous en accommoder, en continuant la réflexion pour trouver une solution plus adaptée, sachant que nous ne pourrions nous satisfaire d'un statu quo préjudiciable à la compétitivité de la France en matière de propriété industrielle. M. Laurent Béteille vous proposera des amendements en ce sens dans le projet de loi de modernisation des professions judiciaires et juridiques réglementées.

Pour toutes ces raisons, je vous propose d'adopter la proposition de loi sans modification.

M. Jacques Mézard . - Je maintiens ma position sur l'article 2. Changer la charge de la preuve pour un constat d'huissier peut être extrêmement préjudiciable aux justiciables. Car nous savons bien que les constats d'huissiers peuvent varier du tout au tout, quand ils sont faits sur demande d'un particulier. Notre collègue M. Michel avait cité des exemples édifiants en séance publique.

Je crois plutôt qu'en validant ce renforcement, le Gouvernement et sa majorité cherchent surtout à distribuer des compensations, en donnant satisfaction aux huissiers, mécontents de la réforme sur l'acte d'avocat. Que devient l'intérêt du justiciable ?

Je crois aussi qu'il est dangereux d'étendre au divorce la procédure dite participative. Ou bien on sort le divorce du cadre judiciaire, mais en le renvoyant par exemple devant les notaires, ou bien on le maintient dans ce cadre, mais il faut alors maintenir aussi le rôle du juge, sans quoi nous ne protègerons pas suffisamment la partie la plus faible.

M. Jean-Pierre Michel . - Je déplore aussi cette distribution d'avantages professionnels, l'acte aux avocats, le Pacs aux notaires, ce texte aux huissiers : ce mercato est indigne de l'intérêt des justiciables ! Nous n'acceptons pas l'article 2 tel qu'il nous revient de l'Assemblée nationale, non plus que de voir le divorce, procédure d'ordre public, entrer ainsi dans le champ de la procédure participative.

M. Laurent Béteille . - L'Assemblée nationale a pris beaucoup de temps pour examiner ce texte. Nous l'avions adopté en février 2009 et ce n'est que très récemment que nos collègues l'ont modifié, et il a fallu toute la force de conviction du président de notre commission pour parvenir à ce résultat.

M. Jean-Jacques Hyest , président. - J'ai clairement signifié que si l'Assemblée nationale n'examinait aucune proposition de loi d'origine sénatoriale, nous déciderions la réciproque !

M. Laurent Béteille . - Sur le fond, l'Assemblée nationale n'a pas déformé notre texte. J'avais déjà proposé de renforcer la force probante du constat d'huissier : ce sont des officiers publics et ministériels, leur constat vaut beaucoup plus que de simples renseignements et l'article 2 ne répond à aucun marchandage.

Ce n'est pas un sujet de marchandage. L'éventuelle divergence d'appréciation entre deux constats n'a rien de dirimant : deux magistrats aussi peuvent avoir des opinions différentes sur le même sujet. C'est pourquoi on a institué un appel. Il faut donc aller dans ce sens, qui ne changera d'ailleurs pas grand-chose, puisque les constats d'huissiers ont déjà une portée supérieure à celle d'une simple information.

À propos des conseils en propriété industrielle, l'importance de maintenir la compétitivité des professionnels français par rapport à leurs homologues européens me conduit à suggérer le maintien de deux professions distinctes, qui pourraient être simultanément exercées par une seule personne.

M. Pierre-Yves Collombat . - Que vient faire la compétitivité dans ce domaine ?

M. Laurent Béteille . - La procédure participative en matière de divorce est plus protectrice que le recours à un seul avocat dont le projet sera soumis à l'homologation du juge. En l'occurrence, deux avocats devront intervenir.

M. Jean-Jacques Hyest , président. - Il n'y a pas d'homologation dans ce cas, on revient aux règles habituelles.

M. Patrice Gélard . - Le texte de l'Assemblée nationale est si mal rédigé qu'il aboutit à une disposition dénuée de toute portée. Rien n'interdit aujourd'hui une démarche participative avant la saisine du juge. Le problème est que si l'on supprime ces dispositions, l'Assemblée nationale rétablira son dispositif, incompréhensible !

Par souci de simplification, je me rallie au point de vue du rapporteur, tout en regrettant que les députés adoptent de si mauvais amendements. Je retire le mien.

M. Jean-Jacques Hyest , président. - C'est une vraie question. Monsieur le rapporteur, l'accord entre les parties est soumis à l'homologation du juge, alors que la convention participative tente de tout régler d'avance, pour déboucher sur la procédure classique.

Il est heureux que de plus en plus de divorces soient prononcés par consentement mutuel, les époux ayant réglé d'avance l'essentiel.

M. François Zocchetto , rapporteur. - Il est vrai que je n'ai pas été suivi en première lecture par la commission et le Sénat, car nous n'avions pas assez réfléchi sur les conséquences de la nouvelle procédure pour le droit de la famille. Quoique mal rédigé, le texte de l'Assemblée nationale me semble intéressant, car il formalise une pratique existante. On sait que lorsqu'il n'y a qu'un seul avocat, cela se termine souvent mal.

M. Alain Anziani . - Pas dans la majorité des cas !

M. François Zocchetto , rapporteur. - Le nouvel article offre une nouvelle procédure avant l'intervention classique du juge.

À propos des huissiers, j'insiste sur le fait qu'ils se limitent aux constatations matérielles, en excluant tout avis. Et le texte ne s'applique pas en matière pénale. Si l'on pense qu'ils font bien leur travail, ce texte les met face à leurs responsabilités ; dans le cas contraire, il faut revoir leur statut. Il reste que les sommations interpellatives, consistant à poser des questions contenant la réponse, peuvent piéger l'interlocuteur. Je me méfie de cette procédure, en souhaitant que les magistrats fassent preuve de prudence à ce propos.

Examen des amendements au projet de loi

Le sort de l'ensemble des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :

Article 31

Procédure participative de négociation assistée par avocat

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

M. GÉLARD

1

Exclusion du divorce et de la séparation de corps du champ d'application de la procédure participative

Retiré

M. GÉLARD

2

Coordination avec l'amendement n° 1

Retiré

La proposition de loi est adoptée sans modification.

ANNEXE - LISTE DES PERSONNES ENTENDUES PAR LE RAPPORTEUR ET DES CONTRIBUTIONS ÉCRITES

_______

Ministère de la justice

- M. Laurent Vallée , directeur des affaires civiles et du sceau

- M. Christophe Tissot , sous-directeur des professions judiciaires et juridiques

- M. Edouard de Leiris , chef du bureau du droit processuel et du droit social

Conseil supérieur du notariat

- M. Benoît Renaud , président

- M. Jean-Marie Ohnet , président de l'institut des études juridiques

Chambre nationale des huissiers

- Me Patrick Sannino, trésorier

- M. Gabriel Mecarelli, juriste

Compagnie nationale des conseils en propriété industrielle

- M. Christian Derambure , président

- Mme Virgine Zancan , vice-présidente

Avocats

- M. Alain Pouchelon, président de la Conférence des Bâtonniers

- Mme Andréanne Sacaze, présidente de la commission Textes au Conseil national des Barreaux, ancien Bâtonnier de l'Ordre des avocats au Barreau d'Orléans

- Mme Hélène Poivey-Leclerc, vice-présidente de la commission Textes au Conseil National des Barreaux, membre du Conseil de l'Ordre des avocats au Barreau de Paris

Contributions écrites

? Chambre nationale des commissaires-priseurs judiciaires

? Chambre professionnelle de la médiation et de la négociation


* 1 Le rapport n° 131 fait au nom de la commission des lois par notre collègue Laurent Béteille, est consultable à l'adresse suivante : http://www.senat.fr/rap/l10-131/l10-131.html .

* 2 JO Sénat, 12 février 2009, p. 1753.

* 3 Article 14 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs et portant modification de la loi n° 86-1290 du 23 décembre 1986.

* 4 Par renvoi aux articles 20 et 21 de la loi du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d'exécution : l'huissier peut, sur justification du titre exécutoire, pénétrer dans les lieux et faire procéder à l'ouverture des meubles. En absence de l'occupant des lieux ou si ce dernier en refuse l'accès il doit être accompagné soit du maire, d'un conseiller municipal, d'un fonctionnaire municipal dûment délégué à cette fin ou d'une autorité de police ou de gendarmerie, ou, à défaut, de deux personnes majeures qui ne sont ni au service du créancier, ni à celui de l'huissier.

* 5 Les renseignements permettant de déterminer l'adresse du débiteur, l'identité ou l'adresse de son employeur ou de tout tiers débiteur ou dépositaire de sommes liquides ou exigibles.

* 6 « L'ambition raisonnée d'une justice apaisée » - Rapport de la commission sur la répartition des contentieux présidée par Serge Guinchard, La Documentation française, 2008, p. 215 à 217 et 241 et 242.

* 7 Deuxième chambre civile de la Cour de cassation, arrêt du 18 juin 2009, n° 08-10.843

* 8 Rapport n° 2622 (AN - XIII e législature), préc. , p. 67.

* 9 Op. cit. p. 68.

* 10 Voir le rapport fait au nom de la commission des lois de l'Assemblée nationale par M. Yves Nicolin, n° 2622, juin 2010, p. 74-75.

* 11 L'article 40-1 du décret n° 56-222 du 29 février 1956 permet en effet la création de chambres interdépartementales d'huissiers de justice remplissant le rôle de chambre départementale dans plusieurs départements et des chambres interrégionales remplissant le rôle de chambre régionale dans plusieurs ressorts de cour d'appel.

* 12 Aux termes de l'article 4 de l'ordonnance du 2 novembre 2004, abrogé en tant qu'il attribue obligatoirement aux chambres d'huissiers de justice un cadre départemental et aux chambres régionales d'huissiers de justice le cadre d'un ressort de cour d'appel, chaque chambre départementale, chaque chambre régionale et la chambre nationale, en adjoignant à leur bureau un nombre égal de clercs ou d'employés, siègent en comité mixte.

* 13 Conseil d'Etat, Ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité n° 259584, Syndicat national des huissiers de justice n° 2597535.

* 14 Il existe ainsi une convention collective nationale du personnel des huissiers de justice du 11 avril 1996, signée par la Chambre nationale des huissiers de justice avec plusieurs organisations syndicales de salariés, et étendue par un arrêté du 18 octobre 1996.

* 15 Article 1731 du code civil aux termes duquel, « s'il n'a pas été fait d'état des lieux, le preneur est présumé les avoir reçus en bon état de réparations locatives, et doit les rendre tels, sauf la preuve contraire ».

* 16 Chaque compagnie de commissaires-priseurs judiciaires, comprenant un ou plusieurs ressorts de cour d'appel de discipline est dotée d'une chambre de discipline.

* 17 Chambre sociale de la Cour de cassation, 18 juillet 2001, n° 99-45.534 et 99-45.535.

* 18 Rapport n° 2622 (AN - XIII e législature), préc. , p. 104.

* 19 Op. cit., p. 104.

* 20 Rapport n° 20, tome I (2010-2011) de M. Bernard SAUGEY, fait au nom de la commission des lois, sur la proposition de loi de simplification et d'amélioration de la qualité du droit, p. 53-54 ( http://www.senat.fr/rap/l10-020-1/l10-020-13.html#toc23 ).

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