II. L'ARTICULATION ENTRE DROIT À LA MORT ASSISTÉE ET SOINS PALLIATIFS
Les auteurs des propositions de loi font valoir que l'opposition de certaines équipes de soins palliatifs à la possibilité de la mort assistée repose, à leur sens, sur une incompréhension. Envisager d'autoriser, dans certaines conditions, la mort assistée ne doit pas être considéré comme un refus ou une remise en cause des soins palliatifs mais bien comme une issue spécifique qui lui est complémentaire.
1. Une complémentarité entre soins palliatifs et mort assistée
Comme l'a souligné Jean-Luc Romero, président de l'ADMD, lors de son audition par la commission des affaires sociales 7 ( * ) , ce sont les mouvements en faveur d'un droit à la mort assistée qui ont d'abord promu, et qui continuent à promouvoir, le développement des soins palliatifs et le traitement de la douleur. La finalité des propositions de loi est de permettre aux personnes en fin de vie la mort la plus apaisée possible. Celle-ci passe, pour la majorité, par le soulagement des douleurs et l'accompagnement qu'offrent les soins palliatifs. Mais il existe certains cas où la douleur elle-même ne peut être diminuée par ces soins et, surtout, où la souffrance ressentie, qu'elle soit physique ou psychique, ne peut être apaisée. Dans ces cas, la simple possibilité d'une aide à mourir peut permettre aux malades de savoir qu'ils conservent la maîtrise sur leur corps et sur leur vie même. Cette perspective est en elle-même apaisante et peut aider à continuer à vivre. Pour certains, la possibilité de l'aide conduira à sa demande, et pour une partie encore plus faible d'entre eux à sa mise en oeuvre.
L'aide à mourir offre donc une perspective pour ceux à qui les soins palliatifs n'en offrent plus. Elle ne prendra tout son sens que lorsque l'accès aux soins palliatifs sera devenu réellement universel.
2. Un nombre de cas réduits
La possibilité de demander la mort assistée est un droit important car elle touche le devenir de chacun d'entre nous. Mais ses applications pratiques ont vocation à rester peu nombreuses. Comme l'a expliqué au groupe de travail sur la fin de vie le professeur Luc Deliens 8 ( * ) , il existe vraisemblablement un seuil faible de demandes d'euthanasie propre à chaque société ; il le fixait à 2 % pour la Belgique et les Pays-Bas. La mort assistée ne tendra donc pas à se généraliser et à devenir la « norme ». Ces cas cependant seront ceux des personnes auxquelles la société aura reconnu que leur volonté clairement exprimée et pleinement réfléchie mérite d'être respectée, au nom de la liberté pour chacun de mener sa vie, jusqu'à son terme, y compris pour ses tout derniers instants.
* 7 Cf compte rendu infra.
* 8 Rapport d'information Sénat n° 579 (2009-2010) fait au nom de la commission des affaires sociales.