EXPOSÉ GÉNÉRAL

Mesdames, Messieurs,

La commission des lois du Sénat a décidé de créer en son sein, le 14 octobre 2009, une mission d'information sur les sondages en matière électorale et de désigner deux co-rapporteurs issus de la majorité et de l'opposition : M. Hugues Portelli et M. Jean-Pierre Sueur.

Après une présentation, le 20 octobre 2010, de leurs conclusions devant la commission des lois, cette dernière a autorisé leur publication sous la forme d'un rapport d'information intitulé « Sondages et démocratie : pour une législation plus respectueuse de la sincérité du débat politique. » 1 ( * )

Ce rapport fait le constat que la législation actuellement applicable en matière de sondages n'est pas satisfaisante : d'une part, elle ne garantit pas suffisamment la sincérité des sondages à caractère électoral, et plus généralement, politique, d'autre part, les obligations d'information sur les conditions d'élaboration de ces sondages sont trop limitées. Enfin, il apparaît que la commission des sondages dispose aujourd'hui de moyens d'action limités pour imposer le respect de cette législation.

Afin d'aboutir à une meilleure conciliation entre la sincérité du débat politique et le respect de la liberté d'expression , le rapport d'information formule quinze recommandations visant à :

- rendre les sondages à caractère politique ou électoral plus sincères et plus transparents ;

- rendre la loi sur les sondages plus cohérente ;

- renforcer la légitimité et l'efficacité de la commission des sondages.

La présente proposition de loi n° 61 (2010-2011), présentée par M. Hugues Portelli, constitue la traduction législative de ces recommandations. Elle procède ainsi à une réécriture complète de la loi n° 77-808 du 19 juillet 1977 relative à la publication et à la diffusion de certains sondages d'opinion et à certaines modifications - de portée moindre - portant sur le code électoral.

I. LA PROPOSITION DE LOI : LA TRADUCTION LÉGISLATIVE DU RAPPORT D'INFORMATION SUR LES SONDAGES POLITIQUES

A. DES SONDAGES PLUS SINCÈRES ET PLUS TRANSPARENTS

1. Définir le sondage

En premier lieu, la proposition de loi, en son article 1 er , définit ce qu'est un sondage . Il s'agit de réparer une omission du législateur de 1977, omission qui aboutit à un paradoxe : la législation sur les sondages ne définit pas ce qu'est un sondage. C'est pourtant un préalable indispensable puisque cette définition conditionne l'application de la loi. L'article 1 er propose de définir le sondage comme « une opération visant à donner une indication quantitative des opinions, attitudes et comportements d'une population par l'interrogation d'un échantillon représentatif de celle-ci ».

2. Interdire aux personnes interrogées de recevoir une gratification de quelque nature qu'elle soit

En deuxième lieu, la définition ci-dessus est complétée, au même article 1 er , par une exigence nouvelle : « les personnes interrogées sont choisies par l'organisme réalisant le sondage et ne peuvent recevoir aucune gratification de quelque nature que ce soit. ».

Cette exigence résulte du constat, effectué dans le rapport d'information précité sur les sondages politiques, de la multiplication de sondages en ligne qui reposent sur un « panel d'internautes » se déclarant volontaires pour répondre régulièrement à des sondages, notamment politiques, attirés par des gratifications diverses, qui constituent des « biais » méthodologiques.

3. Étendre le champ de la loi aux sondages politiques

En troisième lieu, toujours à l'article 1 er , la proposition de loi étend le champ de la loi du 19 juillet 1977 à l'ensemble des sondages politiques alors qu'il est aujourd'hui limité aux seuls sondages présentant un lien direct ou indirect avec un scrutin .

Il s'agit de préserver la sincérité et la qualité du débat politique dans son ensemble , et pas seulement celle du débat électoral.

4. Mieux informer la population et les médias au moment de la publication du sondage

Enfin, la proposition de loi vise à mieux informer la population et les médias au moment de la publication du sondage.

En premier lieu, l'article 3 permet une meilleure connaissance de tous les maillons de la chaîne du sondage .

D'une part, cet article prévoit que la publication ou la diffusion de tout sondage doit être accompagnée du nom et de la qualité de l'acheteur du sondage s'il est différent du commanditaire. Il a pu en effet arriver que la personne qui achète le sondage ne soit pas celle qui l'a commandé, cette dernière souhaitant rester « discrète » et s'abriter derrière, par exemple, une association.

D'autre part, l'article 3 fait connaître l'acheteur de la « partie du sondage » : en effet, dans le cadre des enquêtes à clients multiples, encore appelées « enquêtes omnibus », le client n'achète qu'une partie du sondage, c'est-à-dire quelques questions.

En second lieu, la proposition de loi prévoit une meilleure connaissance des méthodes d'élaboration des sondages dans un souci de transparence propre à tous les travaux scientifiques.

D'une part, elle prévoit la publicité des marges d'erreur des résultats des sondages publiés (article 3).

D'autre part, elle permet la consultation auprès de la commission des sondages des méthodes précises de redressement des sondages électoraux (article 4).


* 1 Rapport d'information n° 54 (2010-2011) de MM. Hugues PORTELLI et Jean-Pierre SUEUR, fait au nom de la commission des lois, déposé le 20 octobre 2010. Rapport disponible sur Internet http://www.senat.fr/rap/r10-054/r10-054.html

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