Rapport n° 281 (2010-2011) de M. Jacques BERTHOU , fait au nom de la commission des affaires étrangères, déposé le 2 février 2011

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N° 281

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2010-2011

Enregistré à la Présidence du Sénat le 2 février 2011

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi autorisant l' adhésion au protocole sur les privilèges et immunités de l' Autorité internationale des fonds marins ,

Par M. Jacques BERTHOU,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Josselin de Rohan , président ; MM. Jacques Blanc, Didier Boulaud, Jean-Louis Carrère, Jean-Pierre Chevènement, Robert del Picchia, Jean François-Poncet, Robert Hue, Joseph Kergueris , vice-présidents ; Mmes Monique Cerisier-ben Guiga, Joëlle Garriaud-Maylam, MM. André Trillard, André Vantomme, Mme Dominique Voynet , secrétaires ; MM. Jean-Étienne Antoinette, Robert Badinter, Jean-Michel Baylet, René Beaumont, Jean-Pierre Bel, Jacques Berthou, Jean Besson, Michel Billout, Didier Borotra, Michel Boutant, Christian Cambon, Marcel-Pierre Cléach, Raymond Couderc, Mme Michelle Demessine, M. André Dulait, Mmes Bernadette Dupont, Josette Durrieu, MM. Jean Faure, Jean-Paul Fournier, Mme Gisèle Gautier, M. Jacques Gautier, Mme Nathalie Goulet, MM. Jean-Noël Guérini, Michel Guerry, Robert Laufoaulu, Simon Loueckhote, Philippe Madrelle, Pierre Mauroy, Rachel Mazuir, Louis Mermaz, Mme Lucette Michaux-Chevry, MM. Jean Milhau, Charles Pasqua, Philippe Paul, Xavier Pintat, Bernard Piras, Christian Poncelet, Yves Pozzo di Borgo, Jean-Pierre Raffarin, Daniel Reiner, Roger Romani, Mme Catherine Tasca.

Voir le(s) numéro(s) :

Sénat :

357 (2009-2010) et 282 (2010-2011)

Introduction

Mesdames, Messieurs,

L'Autorité internationale des Fonds Marins (AIFM) a été créée en 1994 en application de la convention des Nations unies sur le droit de la mer de 1982, dite « convention de Montego Bay », ville jamaïcaine où elle a été signée. La mise en vigueur de la partie IX de cette convention portant sur « les mers fermées ou semi-fermées » a fait l'objet d'un accord spécifique conclu en 1994.

L'AIFM est spécifiquement chargée d'administrer les ressources minérales contenues dans les zones océaniques qui lui sont confiées : la zone centrale de l'Océan indien et la zone « Clarion-Clipperton », à l'ouest d'Hawaï.

La France a ratifié ces deux textes en 1996, mais a omis de le faire pour le protocole, conclu en 1998, organisant les privilèges et immunités accordées aux personnels travaillant au profit de l'AIFM, qui dispose d'un statut d'organisation internationale.

Le présent texte vise à combler cette lacune.

I. UNE RATIFICATION TARDIVE

Signé à Kingston, siège de l'AIFM, le 27 mars 1998, le protocole relatif aux privilèges et immunités de cette organisation n'a été soumis au Parlement qu'en mars 2010. Le ministère des affaires étrangères et européennes (MAEE) présente ainsi les motifs de ce délai :

« Ni l'intérêt de l'AIFM ni le potentiel de l'exploitation des ressources minérales des grands fonds marins ne semblent avoir été perçus dès la création de l'organisation. La France n'avait pas participé à la première session de l'Assemblée générale en 1994 puisqu'elle n'avait pas encore ratifié la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer (11 avril 1996), ni à la seconde en 1996. Par ailleurs, la France n'a pas eu d'Ambassadeur résidant à Kingston entre 1997 et 1999 (il avait été décidé de fermer l'Ambassade et l'Ambassadeur résidant à Port d'Espagne était compétent pour la Jamaïque) et ce n'est que le 5 février 2009 que l'Ambassadeur de France en Jamaïque a officiellement été nommé Représentant permanent de la France auprès de l'AIFM. Le fait que ce soit les diplomates de l'Ambassade de France à Kingston ou du Quai d'Orsay - qui bénéficient par ailleurs ès qualité des privilèges et immunités de la Convention de Vienne de 1961 - qui aient longtemps été chargés du dossier de l'AIFM a pu faire penser que ce Protocole n'était pas indispensable. »

Certes, le nombre de personnes de nationalité française travaillant au sein de l'Autorité est aujourd'hui très réduit (une juriste) ; s'y ajoutent deux experts siégeant au sein de chacune des deux commissions (commission des finances et commission juridique et technique), qui composent l'Autorité.

Le présent texte apporte, selon les termes du MAEE,

« - une protection et certains avantages pour les Français qui travaillent à Kingston au sein des services de l'AIFM ;

- une protection pour les Français qui ne sont pas diplomates et qui se rendent aux réunions de l'AIFM ou de certains de ses organises en tant qu'experts . »

Le protocole contient, après une définition des termes utilisés ( articles 1 à 3 ), des dispositions sur l'inviolabilité des locaux de l'autorité ( article 4 ), les facilités d'ordre financier qui lui sont accordées ( article 5 ), la définition de l'emblème de l'Autorité ( article 6 ), les immunités et privilèges concernant les représentants des membres de l'autorité, y compris les conseillers, experts techniques et secrétaires des délégations se rendant à Kingston aux réunions convoquées par l'AIFM ( article 7 ), les fonctionnaires de l'autorité ( article 8 ) et les experts en mission pour le compte de l'autorité ( article 9 ). L'article 7 est de nature à protéger les membres de la délégation française qui, chaque année, se rend au siège de l'AIFM pour la réunion des États Parties.

Ces dispositions reprennent les mesures généralement acceptées concernant les privilèges et immunités des organisations internationales.

Les articles 10 et 11 portent sur le respect des lois et règlements par les membres de l'Autorité, et les conditions de délivrance de leurs laissez-passer et visas.

L'article 12 formalise l'articulation entre ses propres dispositions et celles contenues dans l'accord de siège conclu entre l'AIFM et le Gouvernement de la Jamaïque relativement au même sujet.

Enfin, les articles 13 à 22 contiennent les dispositions procédurales relatives à la signature, à l'adhésion, aux modalités d'entrée en vigueur et aux possibilités de dénonciation du protocole.

L'Autorité emploie aujourd'hui 34 personnes, réparties selon les nationalités et les postes suivants :

Titre fonctionnel

Administrateurs

Agents des services généraux

Bureau du Secrétaire général

Secrétaire général (Ghana)

1 (SGA)

Éditeur (Royaume-Uni)

1 (P-3) b

Fonctionnaire du protocole adjoint (Canada)

1 (P-2)

Assistant exécutif (Jamaïque)

1

Assistant administratif (Jamaïque)

1

Assistant administratif (Bureau de New York)

1

Bureau des affaires juridiques

Conseiller juridique (Royaume-Uni)

1 (D-1)

Juriste hors classe (Chine)

1 (P-5)

Juriste (France)

1 (P-4)

Bibliothécaire (Jamaïque)

1 (P-3)

Assistant administratif (Jamaïque)

1

Bureau de la surveillance des ressources et de l'environnement

Chef du Bureau (Etats-Unis d'Amérique)

1 (D-1)

Spécialiste des questions scientifiques (géologie marine) (Inde)

1 (P-5)

Spécialiste des questions scientifiques (biologie marine) (Royaume-Uni)

1 (P-4)

Spécialiste des questions scientifiques (Système d'information géographique) (Allemagne)

1 (P-3)

Assistant (sciences marines) (Jamaïque)

1

Informaticien (Côte d'Ivoire)

1 (P-4)

Administrateur de site Web/fonctionnaire chargé des publications (Fidji)

1 (P-3)

Assistant (informatique/base de données) (Jamaïque)

1

Bureau de l'administration et de la gestion

Chef du service administratif (Allemagne)

1 (P-5)

Assistant administratif (Jamaïque)

1

Fonctionnaire chargé du budget et du contrôle interne (Nigéria)

1 (P-4)

Fonctionnaire des finances (Chili)

1 (P-4)

Spécialiste des ressources humaines (Guyana)

1 (P-3)

Assistant (ressources humaines) (Jamaïque)

1

Assistant (achats) (Jamaïque)

1

Assistant (budget et trésorerie) (Jamaïque)

1

Assistant (finances) (Jamaïque)

1

Agent de sécurité de 1 re classe (Etats-Unis d'Amérique)

1 (P-2)

Agent de sécurité (Jamaïque)

1

Agent de sécurité (Jamaïque)

1

Chauffeur (Jamaïque)

1

Chauffeur (Jamaïque)

1

Chauffeur (Jamaïque)

1

II. DONT LA NÉCESSITÉ ÉTAIT PRESSANTE DU FAIT DE LA PLACE DE NOTRE PAYS AU SEIN DE L'AIFM

Dès le début du fonctionnement de l'Autorité, la France s'est placée au 4ème rang de ses contributeurs financiers , place qui est restée stable jusqu'à ce jour, comme le décrivent les tableaux récapitulant les 10 premiers contributeurs par ordre décroissant :

Etat membre

1998

Etats-Unis d'Amérique

1 175 975

25%

Japon

752 467

16%

Allemagne

435 613

9%

France

308 680

7%

Royaume-Uni

255 791

5%

Italie

252 425

5%

Fédération de Russie

205 306

4%

Canada

149 532

3%

Espagne

114 433

2%

Brésil

77 891

2%

Etat membre

2010

Japon

1 259 335

22%

Allemagne

641 510

11%

Royaume-Uni

496 784

9%

France

471 280

8%

Italie

379 881

7%

Canada

222 663

4%

Espagne

221 990

4%

Chine

199 477

3%

Mexique

168 811

3%

République de Corée

162 528

3%

Il faut souligner que la contribution des Etats-Unis (qui ne sont pas partie à la Convention des Nations unies sur le droit de la mer et, en conséquence, ne sont pas membre de l'AIFM) et du Canada (qui n'a ratifié la Convention que le 7 Novembre 2003) au budget de 1998 s'explique de la manière suivante : l'accord du 28 juillet 1994 dans son article 7 prévoyait son application à titre provisoire. Les dispositions de son annexe entrainaient la participation provisoire à l'AIFM des Etats n'étant pas parties à l'Accord et à la Convention pendant 2 ans (16 novembre 1996) avec possibilité de prolongation jusqu'au 16 novembre 1998. C'est ainsi que des Etats comme les Etats-Unis et le Canada furent membres du Conseil, contribuèrent au budget et participèrent à titre provisoire jusqu'en 1998. Après avoir perdu leur qualité de membre provisoire, ils furent remplacés au Conseil par l'Italie et l'Australie.

Le budget de l'Autorité a progressé avec modération depuis sa création :

Année

Budget (en dollars des Etats-Unis)

1997

4.150.500

1998

4.703.900

1999

5.011.700

2000

5.275.200

2001

5.253.200

2002

5.253.200

2003

5.254.850

2004

5.254.850

2005

5.408.350

2006

5.408.350

2007

5.891.200

2008

5.891.200

2009

6.258.250

2010

6.258.250

Une des principales fonctions de l'Autorité est de réglementer l'exploitation des ressources minières des grands fonds marins et de s'assurer, en particulier, que l'environnement marin est protégé de tous effets nuisibles que les activités d'exploitation minière, dont l'exploration, pourraient avoir.

Une de ses premières priorités a été d'élaborer le Règlement relatif à la prospection et à l'exploration des nodules polymétalliques, lequel prévoit que les différentes entités responsables de l'exploration des fonds marins et l'Autorité collaboreront en vue de garantir la viabilité écologique de la mise en valeur des ressources minérales des fonds marins.

Dans le cadre de son programme d'activité de fond, le secrétariat de l'Autorité procède également à des évaluations détaillées des ressources situées dans les secteurs réservés à l'Autorité, gère une base de données spécialisée (POLYDAT) qui contient des données et informations sur les ressources de la zone internationale des fonds marins et suit l'évolution des connaissances scientifiques sur le milieu marin profond dans le cadre de l'enrichissement continue du dépôt de données central.

L'Autorité est également chargée de promouvoir et d'encourager la recherche scientifique marine dans la zone internationale des fonds marins et de diffuser les résultats des recherches.

Les entrepreneurs autorisés par l'AIFM à explorer les fonds marins ne sont pas nécessairement des Etats. Ce sont :

- Institut français de recherche pour l'exploration de la mer et Association française pour l'étude de la recherche des nodules (IFREMER/AFERNOD), enregistrés le 17 décembre 1987. Contrat signé le 20 juin 2001 ;

- Deep Ocean Resources Development Company (DORD), société japonaise enregistrée le 17 décembre 1987. Contrat signé le 20 juin 2001 ;

- Yuzmorgeologiya, entreprise publique russe enregistrée le 17 décembre 1987. Contrat signé le 29 mars 2001 ;

- Association chinoise de recherche-développement concernant les ressources minérales des fonds marins (COMRA) (République populaire de Chine), enregistrée le 5 mars 1991. Contrat signé le 22 mai 2001 ;

- Organisation mixte Interoceanmetal , consortium formé par la Bulgarie, Cuba, la Fédération de Russie, la Pologne, la République tchèque et la Slovaquie, enregistré le 21 août 1991. Contrat signé le 29 mars 2001 ;

- Gouvernement de la République de Corée , enregistré le 2 août 1994. Contrat signé le 27 avril 2001 ;

- Gouvernement indien , enregistré le 17 août 1987. Contrat signé le 25 mars 2002 ;

- Institut fédéral des géosciences et des ressources naturelles de la République fédérale d'Allemagne . Demande approuvée en 2005 au cours de la onzième session. Contrat signé le 19 juillet 2006.

Tous les domaines actuels d'exploration légale (chacun d'une surface de 75 000 km 2 ) sont situés dans la zone dite de « Clarion-Clipperton » dans le pacifique équatorial, au sud et sud-ouest d'Hawaï, et dans le bassin central de l'océan Indien.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le 2 février 2011, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a procédé à l'examen du présent projet de loi.

M. Josselin de Rohan, président, souligne que les nodules polymétalliques constitueront une source importante d'approvisionnement en métaux, notamment pour la France, qui dispose d'importants gisements, au large de la Nouvelle-Calédonie.

M. Joseph Kergueris, précise que l'IFREMER (Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer) joue un rôle majeur dans cette exploitation.

Puis la commission adopte le projet de loi et propose qu'il fasse l'objet d'une procédure d'examen simplifié en séance publique.

ANNEXE - LISTE DES ETATS PARTIES AU PROTOCOLE

28 Etats ont signé le Protocole et 31 y sont actuellement parties :

Etat Partie

Signature

Ratification Approbation(AA) Acceptation(A) Adhésion(a)

Allemagne

8 juin 2007 a

Arabie saoudite

11 oct 1999

Argentine

20 oct 2006 a

Autriche

25 sept 2003 a

Bahamas

26 août 1998

Brésil

27 août 1998

16 nov 2007

Bulgarie

10 fév 2009 a

Cameroun

28 août 2002 a

Chili

14 avr 1999

8 fév 2005

Côte d'Ivoire

25 sept 1998

Croatie

8 sept 2000 a

Cuba

11 juil 2008 a

Danemark

16 nov 2004 a

Egypte

26 avr 2000

20 juin 2001

Espagne

14 sept 1999

9 janv 2001

Estonie

1 fév 2008 a

Ex-République yougoslave de Macédoine

17 sept 1998

31 oct 2007 A

Finlande

31 mars 1999

Ghana

12 jan 1999

Grèce

14 oct 1998

Inde

14 nov 2005 a

Indonésie

26 août 1998

Italie

18 mai 2000

19 juil 2006

Jamaïque

26 août 1998

25 sept 2002

Kenya

26 août 1998

Malte

26 juil 2000

Maurice

22 déc 2004 a

Mozambique

12 jan 2009 a

Namibie

24 sept 1999

Nigéria

1 er mai 2003 a

Norvège

10 mai 2006 a

Oman

19 août 1999

12 mars 2004

Pakistan

9 sept 1999

Pays-Bas

26 août 1998

21 nov 2002 A

Pologne

2 oct 2007 a

Portugal

6 avr 2000

2 fév 2007

République tchèque

1 août 2000

26 oct 2001

Royaume-Uni de

Grande-Bretagne et

d'Irlande du Nord

19 août 1999

2 nov 2000

Sénégal

11 juin 1999

Slovaquie

22 juin 1999

20 avr 2000

Slovénie

1 avr 2008 a

Soudan

6 août 1999

Trinité-et-Tobago

26 août 1998

10 août 2005

Uruguay

21 oct 1998

6 juil 2006 a

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