TITRE IV - INTERRUPTION DE GROSSESSE PRATIQUÉE POUR MOTIF MÉDICAL

Article 13 (art. L. 2213-1 du code de la santé publique) - Interruption de grossesse pratiquée pour motif médical

Objet : Cet article a pour objet de renforcer la composition de l'équipe pluridisciplinaire délivrant les attestations d'interruption médicale de grossesse pour motif lié à la santé de la mère.

I - Les dispositions initiales du projet de loi

L'article L. 2213-1 du code de la santé publique définit les conditions dans lesquelles peut avoir lieu une interruption de grossesse pour motif médical (IMG).

Deux cas sont prévus :

- celui où la poursuite de la grossesse met en péril grave la santé de la femme ;

- celui où il existe une forte probabilité que l'enfant à naître soit atteint d'une affection d'une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic.

Dans les deux cas, l'interruption, qui reste « volontaire », ne peut être pratiquée que si deux médecins membres d'une équipe pluridisciplinaire attestent, après que cette équipe a rendu son avis consultatif, de l'existence de l'une ou de l'autre des deux circonstances précitées.

Cette équipe pluridisciplinaire n'est pas composée de la même manière, selon qu'il s'agit d'un motif lié à la mère ou à l'enfant :

- si l'interruption de grossesse est envisagée au titre de la mise en péril grave de la santé de la mère, l'équipe pluridisciplinaire comprend au moins trois personnes qui sont un médecin qualifié en gynécologie-obstétrique, un médecin choisi par la femme et une personne qualifiée, tenue au secret professionnel, qui peut être un assistant social ou un psychologue ; les deux médecins doivent exercer dans un établissement de santé ; ils sont les seuls à pouvoir délivrer l'attestation d'IMG ;

- si le motif est lié à l'enfant, l'équipe pluridisciplinaire chargée d'examiner la demande de la femme est celle d'un centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal (CPDPN). Aux termes de l'article R. 2131-12, celui-ci est constitué d'une équipe composée :

1° de praticiens exerçant une activité dans l'organisme ou l'établissement de santé au sein duquel le centre est créé, dont au moins un médecin qualifié en gynécologie-obstétrique, un praticien ayant une formation et une expérience en échographie du foetus, un médecin qualifié en pédiatrie ou en néonatologie et un médecin qualifié en génétique médicale ;

2° de personnes pouvant ne pas avoir d'activité dans l'organisme ou l'établissement de santé, dont au moins un médecin psychiatre ou un psychologue et un médecin qualifié en foetopathologie ou disposant de cette expérience ;

3° de praticiens agréés pour procéder aux analyses permettant de détecter in utero une affection de particulière gravité ;

4° d'un conseiller en génétique.

Par ailleurs, peut être associé à la concertation, un médecin choisi par la femme.

Dans tous les cas, que ce soit pour un motif lié à la santé de la mère ou à l'affection de l'enfant à naître, la femme ou le couple concerné peuvent demander, préalablement à la réunion de l'équipe pluridisciplinaire, à être entendus par tout ou partie des membres de celle-ci.

Le présent article prévoit un simple ajustement de ce dispositif , en modifiant la composition de l'équipe pluridisciplinaire appelée à se prononcer sur l'IMG en raison de la mise en péril de la santé de la femme.

Ainsi, le renforce l'équipe pluridisciplinaire qui passera de trois à quatre personnes : un praticien spécialiste de l'affection dont la femme est atteinte viendra s'ajouter au gynécologue-obstétricien, au médecin choisi par la femme et à l'assistant social ou au psychologue. Par ailleurs, le médecin qualifié en gynécologie-obstétrique devra être membre d'un centre pluridisciplinaire de diagnostic prénatal.

Le prévoit que les deux médecins membres de cette équipe qui doivent exercer leur activité dans un établissement de santé sont le gynécologue-obstétricien et le spécialiste de l'affection dont la femme est atteinte.

II - Le texte adopté par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale n'a pas modifié cet article.

III - Le texte adopté par la commission

Votre commission approuve pleinement cette mesure qui tend à renforcer le caractère pluridisciplinaire de l'équipe amenée à se prononcer sur une IMG liée à l'état de santé de la mère. L'adjonction d'un médecin spécialiste du problème de santé de la femme permettra de mieux définir la situation de celle-ci et les risques qu'elle encourt en cas de poursuite de la grossesse. Dans certains cas de pathologies à caractère psychique par exemple, l'avis d'un psychiatre pourra être d'une grande utilité.

Votre commission est également favorable au fait que le gynécologue-obstétricien, partie à cette équipe, devra être membre d'un CPDPN. Dans ses guides de bonnes pratiques, l'agence de la biomédecine encourage d'ailleurs l'instauration de tels liens. L'expertise et l'expérience acquises par les CPDPN pourront en effet être précieuses dans l'analyse des différents éléments pouvant conduire à la décision ou non de permettre une IMG.

Dans les faits, ces IMG sont peu nombreuses par rapport à celles qui sont liées au très fort risque pour l'enfant à naître d'être atteint d'une affection particulièrement grave et incurable.

Le tableau ci-après fournit les statistiques des CPDPN recueillies par l'agence de la biomédecine et publiées dans son dernier rapport annuel. La création d'un lien entre les CPDPN et l'équipe pluridisciplinaire amenée à délivrer les attestations d'IMG pour motif lié à la santé de la mère permettra d'améliorer le recueil des données en ce qui concerne cette dernière catégorie d'IMG.

Activités des CPDPN de 2005 à 2008

2005

2006

2007

2008

Nombre de dossiers examinés

25 022

24 389

28 292

29 779

Nombre d'attestations délivrées en vue d'une IMG

6 093

6 787

6 642

6 876

Nombre de refus d'autorisation d'IMG

106

122

112

125

Nombre de grossesses poursuivies malgré une pathologie qui aurait pu faire autoriser une IMG

406

402

475

494

Source : agence de la biomédecine

Evolution des indications des attestations délivrées en vue d'une IMG de 2006 à 2008

2006

2008

Indications foetales

N

%

N

%

N

%

Indications chromosomiques

2 433

35,8

2 546

38,3

2 706

39,4

Indications géniques

379

5,6

444

6,7

448

6,5

Indications infectieuses

77

1,1

72

1,1

67

1

Malformations ou syndromes malformatifs

2 924

43,1

2 789

42

2 990

43,5

Autres indications foetales

602

8,9

621

9,3

505

7,3

Indications maternelles

180

2,7

170

2,6

160

2,3

Non renseigné

192

2,8

0

0

0

0

Total

6 787

6 642

6 876

Source : agence de la biomédecine

Favorable aux évolutions proposées, votre commission a adopté cet article sans modification.

Article 13 bis (art. L. 2213-1 du code de la santé publique) - Délai de réflexion avant une décision d'interruption de grossesse pratiquée pour motif médical

Objet : Cet article, inséré par l'Assemblée nationale, a pour objet de prévoir que la femme enceinte dispose d'un délai de réflexion d'une semaine avant de décider ou non d'interrompre sa grossesse pour motif médical lié au risque d'une affection de particulière gravité atteignant l'enfant à naître.

I - Le texte adopté par l'Assemblée nationale

Le présent article prévoit qu'après l'annonce d'un risque avéré d'affection particulièrement grave atteignant le foetus, il est proposé à la femme enceinte, hors urgence médicale, un délai de réflexion d'une semaine avant de décider d'interrompre ou de poursuivre sa grossesse.

Selon les auteurs de l'amendement, « l'annonce d'une suspicion de maladie grave sur un foetus crée un choc important pour les femmes enceintes. Ces femmes sont alors fragilisées, désemparées et ont besoin de réfléchir sereinement. Leur accorder un délai de réflexion entre cette annonce et une interruption médicale de grossesse leur permettra de prendre le recul nécessaire pour se renseigner auprès de médecins, psychologues, associations de parents d'enfants handicapés et prendre ainsi la décision la plus éclairée possible. »

II - Le texte adopté par la commission

Votre commission approuve cette disposition. En effet, dans la pratique, ce délai existe déjà et peut même parfois être bien supérieur à une semaine. Par ailleurs, les cas d'urgence médicale qui pourraient justifier une réduction de ce délai sont prévus.

Toutefois, la rédaction de l'Assemblée nationale n'est pas entièrement satisfaisante, notamment du fait de l'absence de codification de la mesure.

C'est pourquoi, sur proposition de son rapporteur, votre commission a adopté un amendement tendant à :

- d'une part, inscrire la mesure dans le code de la santé publique , au sein de l'alinéa de l'article L. 2213-1 consacré aux IMG pour motif lié à la santé de l'enfant à naître ;

- d'autre part, apporter un peu de souplesse en prévoyant que le délai de réflexion proposé à la femme pour décider ou non d'interrompre sa grossesse soit d'au moins une semaine .

Les différentes auditions préparatoires à l'examen du présent projet de loi ont fait apparaître que ce délai - qui est simplement proposé et non imposé - est utile, voire nécessaire, et que, dans les faits, il est pratiquement toujours respecté.

Votre commission a adopté cet article ainsi modifié.

Page mise à jour le

Partager cette page