EXPOSÉ GÉNÉRAL

I. LE PHÉNOMÈNE DE VOLATILITÉ DES PRIX AGRICOLES : UN TRIPLE ENJEU POUR LE XXIÈME SIÈCLE

A. LA VOLATILITÉ DES PRIX, CARACTÉRISTIQUE STRUCTURELLE DES MARCHÉS AGRICOLES, EST AUJOURD'HUI AMPLIFIÉE

1. Qu'appelle-t-on « volatilité » des prix agricoles ?
a) Définition de la volatilité

Les marchés des matières premières en général, et les marchés des produits agricoles en particulier, sont caractérisés par une très grande volatilité des prix.

Il y a plusieurs façons de définir la volatilité. Selon une définition communément admise, elle correspond à des variations de prix brusques et de forte amplitude, en excluant les faibles variations autour d'un prix moyen. C'est la définition que retient le Centre d'analyse stratégique dans une récente note 2 ( * ) .

b) Les conséquences d'une volatilité excessive peuvent être dramatiques

Une trop grande instabilité sur les marchés de produits agricoles n'est pas sans conséquences. Elle pèse à la fois sur les agriculteurs producteurs et sur les consommateurs .

Les agriculteurs producteurs sont fragilisés dans la mesure où elle obère leurs perspectives et pèse sur leurs capacités d'investissements. Rappelons que le secteur de l'agriculture est aujourd'hui la première source d'emplois dans le monde avec 1,3 milliard d'emplois. En outre, 40 % de la population active mondiale dépend directement des marchés agricoles.

L'impact de cette volatilité sur les consommateurs dépend du mouvement des prix :

- si le mouvement est à la baisse, la répercussion sur les prix à la consommation est quasi-nulle ;

- si le mouvement est à la hausse, la répercussion est forte sur le consommateur, qui paye plus cher ses produits alimentaires.

En outre, les conséquences de la volatilité des prix agricoles peuvent même mettre en péril la couverture en besoins alimentaires des populations des pays les plus pauvres.

Une quarantaine de pays ont connu en 2007-2008, une crise alimentaire très grave, et des « émeutes de la faim », en raison de la flambée des prix de certains produits alimentaires de base.

Le dernier rapport d'information 3 ( * ) du Sénat sur la réforme de la PAC soulignait déjà l'importance de l'enjeu de la sécurité alimentaire : « Comment nourrir durablement neuf milliards de personnes d'ici à 2050, contre six aujourd'hui, dont les régimes alimentaires tendront vraisemblablement à se rapprocher de notre modèle ? Ce défi se pose dans un contexte d'incertitudes liées aux effets du changement climatique, à la volatilité des cours ou à la concurrence des produits agro-énergétiques. Enjeu dramatique et constant pour les pays en développement, la sécurité alimentaire est aussi au coeur des préoccupations de pays riches comme le Japon ou de puissances émergentes comme la Chine ou l'Inde » .

LA CRISE ALIMENTAIRE DE 2007-2008

En 2007-2008, le monde a connu une flambée des prix des matières premières en général et des produits agricoles en particulier, alors que le prix de ces derniers diminuait régulièrement depuis près de trente ans. Entre janvier 2006 et avril 2008, les cours du maïs, du soja, du blé et du riz ont augmenté respectivement de +175 %, +120 %, +159 % et +168 %, avant de retomber brusquement à leur valeur de long terme au cours du second semestre 2008. Cette hausse soudaine des prix s'est rapidement transformée en crise alimentaire aux répercussions importantes. Des « émeutes de la faim » ont secoué l'Egypte, Haïti, le Maroc, les Philippines et de nombreux pays d'Afrique sub-saharienne, rappelant ainsi qu'une forte instabilité des prix des denrées alimentaires de base avait des conséquences bien réelles sur les populations les plus vulnérables. En parallèle, la récession économique a amplifié ce phénomène de paupérisation : les programmes d'aide alimentaire ont alors eu des difficultés à approvisionner l'ensemble des personnes dans le dénuement compte tenu de leurs ressources financières.

Source : Centre d'analyse stratégique - Note d'analyse n° 207 (janvier 2011).

Ainsi, en 2007 et 2008, une grande partie de la population des pays en développement a réduit sa ration alimentaire, comme le note le rapport 4 ( * ) de la FAO d'octobre 2010.

Les hausses de prix des produits agricoles constatées depuis 2010 pourraient entraîner, comme en 2008, une crise alimentaire similaire touchant les populations les plus pauvres de la planète.


* 2 Note d'analyse n° 206 du Centre d'analyse stratégique (CAS) « Volatilité des prix des matières premières » (janvier 2011).

* 3 Rapport d'information « Redonner du sens à la PAC » présenté par MM. Jean Bizet, Jean-Paul Emorine, Mmes Bernadette Bourzai et Odette Herviaux au nom de la commission des affaires européennes et de la commission de l'économie (10 novembre 2010).

* 4 FAO, PAM, « L'état de l'insécurité alimentaire dans le monde », octobre 2010.

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