3. Un risque de crise autoréalisatrice pour tout Etat subissant une dette publique de l'ordre de 100 points de PIB

Le tableau suivant montre qu'il existe un risque de crise autoréalisatrice pour tout Etat dont la dette publique est de l'ordre de 100 points de PIB. Il indique plus particulièrement la situation des quatre Etats « périphériques » de la zone euro et de l'Italie.

La dette de la Grèce, de 150 points de PIB, est impossible à financer sur les marchés, que ses taux d'intérêt demeurent ou non à leur niveau actuel. Ainsi, la crise de la dette grecque ne résulte pas d'une augmentation autoréalisatrice des taux d'intérêt, mais bien de la politique des gouvernements grecs successifs. Si les taux d'intérêt se maintenaient à leur niveau actuel, la Grèce devrait dégager un excédent primaire de 16,5 points de PIB pour stabiliser sa dette en points de PIB, ce qui est manifestement impossible. S'ils diminuaient jusqu'à 9 %, elle devrait dégager un excédent de 7,5 points de PIB, ce qui serait légèrement supérieur au maximum historique atteint dans la zone euro, et n'est guère plus vraisemblable.

Contrairement à la Grèce, les autres Etats en difficulté le sont en raison des « anticipations autoréalisatrices » des marchés, qui, craignant un défaut, leur imposent des taux d'intérêt élevés, renforçant le risque de défaut.

L'Irlande et le Portugal se situent dans la « zone à risque ». Ils échapperaient à l'insolvabilité si leurs taux d'intérêt retrouvaient un niveau qui, bien que toujours élevé, serait plus « normal ».

La situation de l'Espagne et de l'Italie est, quant à elle, pour l'instant soutenable. Cela suppose bien entendu que les taux d'intérêt n'augmentent pas comme dans le cas des trois autres Etats. En particulier, le tableau suggère que l'Espagne, avec une dette publique de seulement 70 points de PIB en 2011, et qui emprunte à environ 6 %, ne devrait pas avoir besoin de recourir au Fonds européen de stabilité financière (FESF). Pour qu'elle se trouve dans la même situation que l'Irlande et le Portugal actuellement, il faudrait que ses taux d'intérêt atteignent près de 10 %.

Solde public primaire nécessaire pour stabiliser  le ratio dette/PIB (en supposant une croissance du PIB de 4 % par an en valeur)

(en points de PIB)

Taux d'intérêt  (en %)

4

5

6

7

8

9

10

11

12

13

14

15

Dette publique  (en points de PIB)

10

0

0,1

0,2

0,3

0,4

0,5

0,6

0,7

0,8

0,9

1

1,1

20

0

0,2

0,4

0,6

0,8

1

1,2

1,4

1,6

1,8

2

2,2

30

0

0,3

0,6

0,9

1,2

1,5

1,8

2,1

2,4

2,7

3

3,3

40

0

0,4

0,8

1,2

1,6

2

2,4

2,8

3,2

3,6

4

4,4

50

0

0,5

1

1,5

2

2,5

3

3,5

4

4,5

5

5,5

60

0

0,6

1,2

1,8

2,4

3

3,6

4,2

4,8

5,4

6

Espagne

Portugal

Irlande

Italie

Grèce

6,6

70

0

0,7

1,4

2,1

2,8

3,5

4,2

4,9

5,6

6,3

7

7,7

80

0

0,8

1,6

2,4

3,2

4

4,8

5,6

6,4

7,2

8

8,8

90

0

0,9

1,8

2,7

3,6

4,5

5,4

6,3

7,2

8,1

9

9,9

100

0

1

2

3

4

5

6

7

8

9

10

11

110

0

1,1

2,2

3,3

4,4

5,5

6,6

7,7

8,8

9,9

11

12,1

120

0

1,2

2,4

3,6

4,8

6

7,2

8,4

9,6

10,8

12

13,2

130

0

1,3

2,6

3,9

5,2

6,5

7,8

9,1

10,4

11,7

13

14,3

140

0

1,4

2,8

4,2

5,6

7

8,4

9,8

11,2

12,6

14

15,4

150

0

1,5

3

4,5

6

7,5

9

10,5

12

13,5

15

16,5

160

0

1,6

3,2

4,8

6,4

8

9,6

11,2

12,8

14,4

16

17,6

170

0

1,7

3,4

5,1

6,8

8,5

10,2

11,9

13,6

15,3

17

18,7

180

0

1,8

3,6

5,4

7,2

9

10,8

12,6

14,4

16,2

18

19,8

190

0

1,9

3,8

5,7

7,6

9,5

11,4

13,3

15,2

17,1

19

20,9

200

0

2

4

6

8

10

12

14

16

18

20

22

Les cases en gris clair et en gris foncé correspondent aux situations dans lesquelles les Etats doivent dégager un excédent primaire supérieur ou égal à respectivement 3 et 7 points de PIB pour stabiliser leur dette publique (ce dernier montant correspondant au maximum historique dans la zone euro).

Les cercles rouges correspondent à la situation si les taux d'intérêt se maintenaient durablement à leur niveau actuel, les cercles verts à celle s'ils retrouvaient des niveaux plus « normaux » (les ordres de grandeur pour les quatre Etats « périphériques » sont analogues à ceux retenus par Zsolt Darvas, Christophe Gouardo, Jean Pisani-Ferry et André Sapir, in « A Comprehensive Approach to the Euro-Area Debt Crisis », Bruegel, février 2011).

Lecture : plus un Etat se trouve proche du coin inférieur droit, moins sa dette est soutenable.

Source : calculs de la commission des finances

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