Article 5 (Article L. 33-9 du code des postes et des communications électroniques) Tarif social de l'accès à internet haut débit

Commentaire : cet article tend à créer un tarif social pour l'accès à internet haut débit.

I. Le droit en vigueur

Le poids des dépenses des ménages en services de télécommunications - téléphonie fixe et mobile, et accès à internet - ne cesse de s'accroître puisqu'il est passé de 45 euros par mois en 1998 à plus de 100 en 2008. Ces dépenses représentent désormais 2,4 % du budget des ménages. L'accès à ces technologies, qui conditionne désormais l'exercice de droits et libertés tels que le droit à l'information, à l'éducation ou à l'emploi, nécessite donc un « effort économique » de plus en plus important, ceci dans une conjoncture difficile.

Afin de permettre au plus grand nombre de bénéficier de ces services, a été incluse dans le cadre du service universel des communications électroniques la notion de « tarif social ». A l'échelle communautaire, la directive 56 ( * ) dite « directive service universel », autorise les États membres à instituer des tarifs sociaux conventionnels non compensés par une subvention publique.

Au niveau national, le seul dispositif de tarif social existant est prévu par l'article L. 35-1 du CPCE pour la téléphonie fixe traditionnelle . Celui-ci dispose que le service universel est fourni « dans des conditions tarifaires et techniques prenant en compte les difficultés particulières rencontrées dans l'accès au service téléphonique par certaines catégories de personnes, en raison notamment de leur niveau de revenu ». C'est sur cette base que la réduction sociale pour la téléphonie fixe a été fixée à 5,03 euros par un arrêté du 19 février 2010. L'opérateur historique, France Télécom, ayant ajouté une deuxième réduction, prise en charge sur son propre budget, de 4,48 euros TTC, la réduction globale opérée sur un abonnement téléphonique à 16 euros est de 9,51 euros, soit un tarif social de 6,49 euros.

S'agissant de la téléphonie mobile , l'article L. 33-9 du CPCE, tel qu'il résulte de la loi de modernisation de l'économie du 4 août 2008, a prévu qu'une convention entre l'État et les opérateurs de téléphonie mobile déterminerait les conditions dans lesquelles ces derniers fourniraient une offre tarifaire spécifique à destination des personnes rencontrant des difficultés particulières dans l'accès au service téléphonique en raison de leur niveau de revenus.

Sans attendre qu'elle ait lieu, certains opérateurs ont commencé à proposer des offres sociales. Puis, deux tables rondes ont été organisées par le ministre de l'Industrie et le secrétaire d'État chargé du Commerce les 27 janvier et 7 mars 2011, afin qu'une telle convention soit rapidement signée. A l'issue de la seconde, les opérateurs ont signé avec les pouvoirs publics une convention dans laquelle ils se sont engagés à proposer, dans les six prochains mois, une offre mobile labellisée par l'État « tarif social mobile ». Cette dernière devra respecter des conditions minimum d'éligibilité, des garanties minimum de prix et de services et un fort niveau de protection des consommateurs.

Au vu de ce qui existe aujourd'hui en matière de tarif social pour les services de communications électroniques, deux lacunes peuvent être identifiées :

- l'offre concernant la téléphonie fixe est devenue obsolète , du fait de la substitution à la technologie cuivre traditionnelle de la « voix sur IP », c'est-à-dire de la téléphonie sur internet. C'est pourquoi moins de 20 % des bénéficiaires potentiels de la réduction tarifaire (un peu plus de 400 000 personnes sur un total de 2,5 millions) l'utilisent et aucun opérateur ne commercialise une offre de réduction sociale alternative à celle de France Télécom. Sur ce point, et conformément à l'orientation fixée par le Premier ministre dans son discours du 18 janvier 2010, une mesure consistant à étendre aux prestations de téléphonie sur IP des offres multiservices le dispositif du service universel en vigueur pour le téléphone fixe traditionnelle est à l'étude , en concertation avec les services de la Commission européenne car une telle action est encadrée par des directives communautaires ;

- s'agissant de la téléphonie mobile , le Gouvernement estime souhaitable, dans son étude d'impact, « pour des raisons de sécurité juridique, de donner un fondement législatif à la convention qui prévoira les conditions de labellisation des offres sociales ». Cette procédure sera selon lui « un élément de sécurité juridique pour les opérateurs qui proposeront une offre dans le cadre de la convention ». Elle constituera également, d'après lui, « une garantie pour les consommateurs désireux de souscrire à ces offres ».

II. Le texte initial

Le présent article part de l'article L. 33-9 précité, qu'il complète par un alinéa.

Celui-ci prévoit explicitement la conclusion de conventions entre l'État et les fournisseurs d'accès à l'internet déterminant les conditions dans lesquelles ceux-ci fournissent un tarif social pour l'accès à l'internet à haut débit . Un avis préalable de l'Autorité de la concurrence est prévu pour, selon l'étude d'impact, « sécuriser le tarif social pour l'internet haut débit sous l'angle des règles de concurrence ».

III. Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

La commission des affaires économiques a, à l'initiative de Mme Corinne Erhel, modifié l'article afin de rendre obligatoire la conclusion de conventions visant à proposer une offre sociale d'accès à l'internet, là où le texte du projet de loi prévoyait qu'elle n'était que facultative.

IV. La position de votre commission

Votre commission ne peut qu' approuver une initiative prenant en compte la situation sociale des consommateurs pour adapter l'offre qui leur est faite en matière de services de communications électroniques. La part qu'ils prennent dans le budget des ménages, en tant que dépenses contraintes, devient très importante pour les ménages les plus défavorisés et « pèse » sur d'autres postes de consommation tout aussi essentiels (alimentation, transports, santé ...).

Votre commission relève que les offres sociales en matière de téléphonie mobile comme d'accès à internet à haut débit s'articuleront autour d'un système de conventionnement entre opérateurs et pouvoirs publics. Si cette prise en compte des capacités financières des abonnés va dans le bon sens, elle juge toutefois que les seuils retenus pour bénéficier de la labellisation - 40 minutes de communication et 40 SMS, pour un tarif plafonné à 10 euros TTC pour la téléphonie mobile, et un accès illimité à internet et à la téléphonie fixe pour moins de 23 euros TTC - auraient pu être encore abaissés pour rendre l'offre réellement intéressante pour les ménages concernés.

Votre commission estime qu' il existe également d'autres « portes de sortie » sur cette question de l'intégration du critère social dans l'offre de services de communications électroniques. A un horizon rapproché, l' arrivée d'un nouvel opérateur sur le réseau 3G devrait avoir sur les prix - y compris de l'accès internet, dès lors que l'on parle de quadruple play - un effet extrêmement favorable pour les consommateurs les plus modestes. Par ailleurs, et d'une façon générale, la question de l' inclusion de l'accès à internet à haut débit dans le service universel des communications électroniques est appelée à être rediscutée.

Votre commission a adopté cet article sans modification.


* 56 Directive 2002/22/CE du Parlement européen et du Conseil du 7 mars 2002 concernant le service universel et les droits des utilisateurs au regard des réseaux et services de communications électroniques.

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