ARTICLE 13 (Art. 150-0 B, 167 bis et 170 du code général des impôts, création d'un article 150-0 B ter dans le CGI) : Application aux plus-values d'apport de titres réalisées par les personnes physiques d'un report d'imposition optionnel en lieu et place du sursis d'imposition en cas d'apport à une société contrôlée par l'apporteur

Commentaire : le présent article vise à mettre un terme aux schémas d'apport-cessions abusifs, qui s'éloignent de l'intention du législateur consistant à faciliter les restructurations d'entreprises.

I. LE DROIT EXISTANT

A. LE SURSIS D'IMPOSITION SUR LES PLUS-VALUES EN CAS D'ÉCHANGE DE TITRES

1. Un régime de sursis d'imposition qui n'exonère pas définitivement les plus-values d'échange de titres

Aux termes de l'article 150-0 B du code général des impôts (CGI), les dispositions de l'article 150-0 A du même code, qui régissent la taxation des plus-values mobilières réalisées par les particuliers, notamment en cas de cession de titres, ne s'appliquent pas aux plus-values d'échange réalisées :

- dans le cadre d'une offre publique de fusion , de scission, d'absorption d'un fonds commun de placement par une société d'investissement à capital variable, de conversion, de division ou de regroupement, effectuée selon la réglementation en vigueur ;

- ou dans le cadre d'un apport de titres à une société soumis à l'impôt sur les sociétés , lorsque le montant de la soulte reçue par le contribuable n'excède pas 10 % de la valeur nominale des titres reçus.

L'article 150-0 B institue un régime de sursis d'imposition 121 ( * ) qui s'applique de plein droit, créé pour favoriser les restructurations d'entreprises. Dans ce cas, les opérations d'échange de titres précitées sont considérées comme une opération intercalaire 122 ( * ) qui, au titre de l'année d'échange, n'est pas prise en compte pour l'établissement de l'impôt sur le revenu. Autrement dit, lors de l'année de l'échange, la plus-value d'échange n'est pas constatée et ne fait l'objet d'aucune déclaration. Des dispositions similaires s'appliquent en cas d'échanges successifs dans le cadre de l'article 150-0 B du CGI.

Toutefois, ce sursis d'imposition n'exonère pas définitivement la plus-value d'échange . En effet, au moment de la cession à titre onéreux ultérieure des titres reçus en échange, le gain net est calculé sur le fondement du prix ou de la valeur d'acquisition des titres remis à l'échange, si nécessaire réduit de la soulte reçue, ou augmenté de la soulte versée. Une règle similaire s'applique lorsque les titres reçus en échange sont ultérieurement rachetés, remboursés ou annulés.

2. Une application qui fait l'objet d'abus dans le cadre de schémas d'optimisation fiscale : « l'apport-cession » de titres

L'application du sursis d'imposition donne lieu, dans la pratique, à des comportements abusifs de la part de contribuables . Le schéma d'optimisation fiscale « d'apport-cession » de titres consiste ainsi, pour un redevable, à apporter à une société soumise à l'impôt sur les sociétés des titres dont la plus-value d'échange bénéficie du sursis d'imposition automatique prévu par l'article 150-0 B du CGI . Ensuite, la société les cède dans un délai très bref à un tiers. Le contribuable contrôlant la société bénéficiaire de l'apport dispose au total des liquidités obtenues lors de la cession, l'imposition de la plus-value d'échange étant différée à la cession ultérieure des titres reçus par le contribuable lors de l'apport.

Au total, ce montage permet à des contribuables de céder des titres de sociétés en franchise d'imposition .

B. LA THÉORIE DE L'ABUS DE DROIT

Comme le relève l'évaluation préalable du présent article, « le sursis d'imposition de l'article 150-0 B du code général des impôts étant d'application automatique, les schémas dits « d'apport-cession » ne peuvent être aujourd'hui remis en cause que sur le fondement de l'abus de droit fiscal ».

Aux termes du premier alinéa de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales relatif à la procédure de l'abus de droit fiscal, « afin d'en restituer le véritable caractère, l'administration est en droit d'écarter, comme ne lui étant pas opposables, les actes constitutifs d'un abus de droit, soit que ces actes ont un caractère fictif, soit que, recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes ou de décisions à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n'ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, si ces actes n'avaient pas été passés ou réalisés, aurait normalement supportées eu égard à la situation ou à ses activités réelles ».

La procédure d'abus de droit permet donc à l'administration d'écarter les actes juridiques :

- soit qui ont un caractère fictif ;

- soit qui ont pour but exclusif d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales en s'appuyant sur une application littérale des textes, mais contraire à l'intention de leurs auteurs 123 ( * ) .

Dans la pratique, l'administration rencontre souvent des difficultés pour démontrer l'abus de droit.

C. LA JURISPRUDENCE RÉCENTE SUR « L'APPORT-CESSION »

Le comité de l'abus de droit fiscal comme le Conseil d'Etat statuant au contentieux se prononcent régulièrement sur la notion d'abus de droit. Ils ont récemment rendu des décisions qui éclairent leur position sur l'apport-cession dans le cadre du régime du sursis d'imposition.

S'agissant du Conseil d'Etat 124 ( * ) , celui-ci a admis que l'apport de titres à une société, suivi de leur cession, constitue un abus de droit, s'il s'agit d'un montage dont la seule finalité est de permettre au contribuable, en interposant une société, de disposer effectivement des liquidités acquises lors de la cession de ces titres, tout en restant détenteur des titres de la société reçus en échange de l'apport. En revanche, il a estimé que ne constitue pas un abus de droit l'apport de titres à une société, s'il apparaît, au regard de l'ensemble de l'opération, que celle-ci a, conformément à son objet, effectivement réinvesti le produit de ces cessions dans une activité économique et dans un délai raisonnable.

S'agissant du Comité de l'abus de droit fiscal , il a estimé que le caractère automatique du sursis d'imposition ne s'opposait pas à l'application de la procédure d'abus de droit.

II. LE DISPOSITIF INITIALEMENT PROPOSÉ : UN REPORT D'IMPOSITION OPTIONNEL À LA PLACE DU SURSIS D'IMPOSITION DANS LE SEUL CAS D'UN APPORT À UNE SOCIÉTÉ CONTRÔLÉE PAR L'APPORTEUR

A. LE PRINCIPE GÉNÉRAL

Le présent article vise à mettre un terme au détournement du dispositif de sursis d'imposition prévu par l'article 150-0 B du code général des impôts . Il entend traduire dans la loi la jurisprudence du Conseil d'Etat sur l'apport-cession, dans un but de sécurité juridique qui offrirait davantage de lisibilité et de visibilité aux contribuables.

Le présent article tend ainsi à créer un régime de report optionnel d'imposition au champ restreint , qui ne s'appliquerait qu'aux seules plus-values d'apport de titres effectuées à des sociétés contrôlées par l'apporteur. Ce régime fiscal spécifique serait régi par un nouvel article 150-0 B ter du code général des impôts ( B du I du présent article).

Aux termes du I de ce nouvel article 150-0 B ter , dans sa rédaction initiale, le report d'imposition concernerait l'imposition de la plus-value réalisée directement ou par personne interposée (par exemple via une holding), dans le cadre d'un apport, à une société soumise à l'impôt sur les sociétés ou à un impôt étranger équivalent, de valeurs mobilières, de droits sociaux, de titres ou de droits s'y rapportant tels que définis à l'article 150-0 A, sous réserve que le contribuable en fasse « expressément » la demande, mentionne le montant de la plus-value concernée dans la déclaration prévue à l'article 170 et respecte un certain nombre de conditions ( cf. infra ).

Dans le cas contraire, c'est-à-dire en l'absence d'option pour le report, la plus-value serait imposée dans les conditions prévues à l'article 150-0 A relatif à l'imposition des plus-values de cession, telle que résultant de la rédaction de l'article 6 du projet de loi de finances pour 2013.

Par ailleurs, les apports avec soulte demeureraient immédiatement imposables , et soumis aux dispositions de l'article 150-0 A précité, si le montant de la soulte reçue excédait 10 % de la valeur nominale des titres reçus. Cette disposition est logique puisque, dans ce cas, le contribuable disposerait de liquidités pour acquitter son impôt.

Enfin, aux termes du premier alinéa du III de l'article 150-0 B ter relatif à l'enchaînement des reports en cas d'apports de titres successifs, l'imposition de la plus-value réalisée à cette occasion pourrait elle-même être reportée dans des conditions identiques.

B. LES CONDITIONS D'APPLICATION DU REPORT

Le bénéfice du report optionnel d'imposition serait subordonné à plusieurs conditions, certaines concernant l'apport lui-même, d'autres l'apporteur de titres.

1. Les conditions relatives à l'apport

S'agissant des conditions relatives à l'apport des titres, ce dernier devrait être réalisé en France, dans un Etat membre de l'Union européenne ou un Etat territoire ayant conclu avec la France une convention fiscale d'assistance administrative (1° du II de l'article 150-0 B ter ).

De plus, dans la rédaction initiale, ne devaient pas être concernés par ce dispositif les titres apportés ayant fait l'objet d'un engagement de conservation dans le cadre d'un « pacte Dutreil », régi par les articles 787 B et 787 C du CGI 125 ( * ) . Ceux-ci devaient donc rester éligibles de droit au sursis d'imposition prévu par l'article 150-0 B du CGI ( 3° du II de l'article 150-0 B ter ).

2. Les conditions relatives à l'apporteur

Aux termes du 2° du II de l'article 150-0 B ter , le nouveau régime ne s'appliquerait que si la société bénéficiaire de l'apport est contrôlée par le contribuable. Dans le cas contraire, l'apport resterait soumis au régime du sursis. Cette condition serait appréciée à la date de l'apport, en tenant compte des droits détenus par le contribuable à l'issue de celui-ci .

Un contribuable serait considéré comme contrôlant une société :

- lorsqu'il possède, directement ou indirectement , ou par l'intermédiaire de son groupe familial (conjoint, ascendants ou descendants, frères et soeurs), la majorité des droits de vote ou des droits dans les bénéfices sociaux de la société ( a du 2° du II de l'article 150-0 B ter ) ;

- ou lorsqu'il dispose seul de la majorité des droits de vote ou des droits dans les bénéfices sociaux de cette société, en vertu d'un pacte d'actionnaires ou d'associés (b du 2° du II de l'article 150-0 B ter ) ;

- ou bien lorsqu'il y exerce effectivement le pouvoir de décision . Le contribuable est présumé exercer ce contrôle lorsqu'il dispose directement ou indirectement d'au moins 33,33 % des droits de vote ou des droits dans les bénéfices sociaux, et qu'aucun autre associé ou actionnaire ne détient directement ou indirectement une fraction supérieure à la sienne . De plus, le contribuable et une ou plusieurs personnes agissant de concert sont considérés comme contrôlant conjointement une société lorsqu'ils déterminent en fait les décisions prises en assemblée générale ( c du 2° du II de l'article 150-0 B ter ).

Ces conditions reprennent les critères de l'article L. 233-3 du code de commerce sur le contrôle d'une société par une autre, excepté le seuil des droits de vote. En effet, alors que le code de commerce retient un seuil de 40 %, le présent article propose un seuil de 33,33 %, qui correspond à la minorité de blocage 126 ( * ) .

C. LA FIN DU REPORT ET SES CONSÉQUENCES

Le présent article prévoit également les évènements susceptibles de rendre caduc le report d'imposition (I du nouvel article 150-0 B ter du CGI). Y mettraient ainsi fin la transmission, le rachat, le remboursement ou l'annulation :

- des titres reçus par le contribuable en rémunération de l'apport ;

- des titres apportés à la société bénéficiaire , à moins, dans la rédaction initiale, que cette dernière ne réinvestisse au moins 50 % 127 ( * ) du produit de leur cession , dans un délai de cinq ans à partir de la date de l'apport, dans le financement d'une activité commerciale, artisanale, libérale, agricole ou financière , à l'exception de la gestion d'un patrimoine mobilier ou immobilier. De surcroît, le réinvestissement pourrait passer par un apport à une société ( via la souscription en numéraire au capital initial ou à l'augmentation de capital) répondant aux conditions définies au b du 3° du II de l'article 150-0 D bis du CGI 128 ( * ) .

- des parts ou droits de vote dans les sociétés ou groupements interposés.

Par ailleurs, le transfert du domicile fiscal hors de France dans les conditions prévues à l'article 167 bis du CGI ( exit tax ) engendrerait également la fin du report d'imposition.

Enfin, par cohérence, lorsque les titres reçus en rémunération de l'apport ou les titres des groupements ou sociétés interposées feraient eux-mêmes l'objet d'un apport ultérieur, placé sous le régime du sursis d'imposition ou sous le nouveau régime de report optionnel, le report initial prendrait fin dans les mêmes conditions (deuxième alinéa du III du nouvel article 150-0 B ter du CGI).

Dans tous les cas, la fin du report d'imposition ne s'appliquerait qu'à proportion des titres cédés, transmis, rachetés, remboursés ou annulés (IV du nouvel article 150-0 B ter du CGI).

En conséquence de la fin du report, la plus-value d'échange deviendrait imposable dans les conditions prévues à l'article 150-0 A du CGI, au titre de l'année de réalisation de l'évènement impliquant la fin du report. Comme prévu par l'article 1727 du CGI, un intérêt de retard s'appliquerait, à partir de la date de l'apport des titres .

D. LES DISPOSITIONS DE COORDINATION ET L'ENTRÉE EN VIGUEUR DU DISPOSITIF

1. Les dispositions de coordination

Le présent article procède, en outre, à plusieurs coordinations :

- le A du I articule les deux dispositifs de sursis et de report d'imposition, en précisant, au premier alinéa de l'article 150-0 B, que le sursis ne s'applique que « sous réserve » de l'application du report ;

- le C du I adapte l'article 167 bis relatif à l'exit tax en tenant compte de ce nouveau régime fiscal spécifique ;

- le D du I complète l'article 170 du CGI relatif aux obligations déclaratives des contribuables en mentionnant le nouvel article 150-0 B ter .

2. Les nouvelles dispositions s'appliqueraient aux apports réalisés à compter du 14 novembre afin d'éviter les contournements

Il reviendrait à un décret en Conseil d'Etat de fixer les conditions d'application de ce dispositif, notamment les obligations déclaratives des contribuables.

Enfin, le II du présent article prévoit que le nouvel article 150-0 B ter s'appliquerait aux apports réalisés à compter du 14 novembre 2012 , qui correspond à la date d'adoption du texte par le Conseil des ministres. Si cette mesure n'a pas de caractère rétroactif, elle permettra d'éviter les contournements de la loi que l'on aurait inévitablement constatés en cas d'application du dispositif à compter du 1 er janvier 2013.

III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

L'Assemblée nationale a adopté quatorze amendements à ce dispositif, à l'initiative de notre collègue député Christian Eckert, avec l'accord du Gouvernement. Outre un amendement rédactionnel, quatre amendements sont essentiellement de précision :

- le premier vise à prévoir que le réinvestissement permettant d'échapper à la fin du report puisse également être effectué dans une activité industrielle . En effet, ce type d'activité fait partie intégrante de la notion « d'activité opérationnelle » visée par le Gouvernement dans son texte. Il s'agit ici de réparer un oubli ;

- le second vise à prévoir que le réinvestissement puisse se faire dans plusieurs sociétés le cas échéant, et pas seulement dans une société. Cet amendement assouplit donc le dispositif prévu par le Gouvernement 129 ( * ) ;

- le troisième amendement introduit une coordination de clarification avec l'article 150-0 D bis concernant la condition de remploi consistant à avoir organisé une activité opérationnelle ;

- le quatrième propose de compléter l'alinéa 24 de façon à prévoir que le décret en Conseil d'Etat qui fixera les conditions d'application de cet article précisera les obligations déclaratives des sociétés bénéficiaires de l'apport de titres, au même titre que celles des contribuables.

Huit autres amendements ont une portée plus substantielle :

- l'un rend automatique et non plus optionnel le report d'imposition en cas d'apport à une société contrôlée, dans un souci de simplification et de clarification du dispositif. Surtout, le caractère optionnel du nouveau dispositif présentait un risque de non-conformité à la directive 90/434/CEE du Conseil, du 23 juillet 1990 , concernant le régime fiscal commun applicable aux fusions, scissions, apports d'actifs et échanges d'actions intéressant des sociétés d'Etats membres différents (et plus précisément article 8). Cet amendement renforce donc la sécurité juridique du report ;

- un autre remplace le mot « transmission » par les mots « cession à titre onéreux » en ce qui concerne la fin du report d'imposition, afin de sortir les successions des événements susceptibles de mettre fin au report . En effet, cet évènement est indépendant de la volonté du contribuable. Ce même amendement a, par ailleurs, inséré de nouveaux alinéas destinés à préciser les conditions de fin du report en cas de donation . Ainsi, la société bénéficiaire de l'apport devrait respecter la condition de réinvestissement, et le donataire ne devra pas céder les titres dans un délai de dix-huit mois , sous peine de payer l'impôt sur la plus-value en report, selon des modalités similaires à celles prévues par l'article 14 du présent projet de loi de finances rectificative ( cf. infra ) ;

- quatre autres amendements visent à améliorer les dispositions relatives à la condition de réinvestissement :

* le premier propose de décomposer en deux périodes de délai de cinq ans prévu pour le réinvestissement : une première période de trois ans pendant laquelle , en cas de cession, le report prendrait fin en l'absence de réinvestissement, et une seconde période de deux ans pour réinvestir le produit de la cession. Cet amendement semble pertinent pour plusieurs raisons. D'une part, la durée de deux ans pour le remploi a été retenue par l'article 6 du projet de loi de finances pour 2013. D'autre part, la rédaction initiale du Gouvernement prévoit que le report d'imposition cesserait même si la cession intervient plus de cinq ans après l'apport, alors qu'il ne s'agit plus d'un montage abusif passé un tel délai. Enfin, il permet de mieux cibler les montages abusifs. Cet amendement permet donc de rendre le dispositif plus cohérent et efficace : si la cession intervient après trois ans, il n'y aura plus d'obligation de réinvestissement. A l'inverse, si elle intervient moins de trois ans après l'apport, et que le produit de la cession n'est pas réinvesti dans les deux ans suivants, il sera mis fin au report d'imposition ;

* le deuxième vise à renforcer le pouvoir de contrôle de l'administration, en instaurant un délai de reprise lorsque la condition de réinvestissement de 50 % n'a pas été respectée par la société bénéficiaire de l'apport. Dans ce cas, le report d'imposition prendrait fin à l'issue du délai de réinvestissement, soit deux ans à compter de la date de cession des titres par la société bénéficiaire de l'apport ;

* le troisième propose de fixer à une durée de trois ans, au lieu de cinq ans dans le texte initial, la durée minimale de détention pour continuer à bénéficier du report d'imposition après l'apport de titres . L'obligation de réinvestissement par la société bénéficiaire de l'apport ne vaudra donc que pour cette durée ;

* le quatrième tend à ce que le réinvestissement puisse concerner, outre la création d'une entreprise ou l'augmentation de capital, l'acquisition d'une société déjà existante. A cette fin, il vise, plutôt que l'acquisition d'une société complète, la prise de contrôle d'une société ;

- un autre amendement propose de restreindre l'application de l'intérêt de retard au seul cas où l'expiration du report d'imposition résulterait du non-respect par la société bénéficiaire de l'apport du remploi de 50 % au moins du produit de la cession dans une activité économique. En effet, dans ce cas, c'est bien l'action (ou plutôt l'absence d'action) du contribuable qui serait à l'origine du déclenchement de l'imposition avec retard, ce qui justifie l'application des intérêts correspondants ;

- un amendement relatif aux modalités déclaratives propose d'instaurer l'obligation, pour le contribuable, de mentionner sur la déclaration d'ensemble des revenus les plus-values antérieurement reportées lorsque les titres reçus en rémunération de l'apport font à leur tour l'objet d'un apport et que le contribuable demande le report d'imposition au titre de la plus-value d'apport correspondante.

Enfin, un dernier amendement a réintégré dans le dispositif les titres des sociétés sur lesquels porte un engagement de conservation dit « pacte Dutreil » . De fait, si ces pactes permettent de bénéficier d'avantages en matière d'ISF ou de droits de mutation à titre gratuit, il n'en est pas de même pour ce qui concerne les plus-values, qui font l'objet du présent article.

IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Cet article , qui s'inscrit dans le cadre du plan global de renforcement de lutte contre la fraude et l'optimisation fiscale, mérite d'être soutenu .

En effet, il précise, sur des bases claires, dans quelles conditions une opération d'apport-cession, qui peut parfois réellement servir dans le cadre de restructurations de groupes, doit être concernée par le report d'imposition qu'il est proposé de créer.

De plus, l'Assemblée nationale a fait oeuvre utile en adoptant des amendements substantiels, qui ont à la fois renforcé la solidité juridique de dispositif proposé (en particulier au regard du droit communautaire) et assuré que ce sont bien les actuels montages à finalité fiscale qui entreront dans le nouveau régime.

Il convient donc d'adopter le présent article tel que l'ont voté les députés .

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.


* 121 Ce dispositif de sursis d'imposition résulte de la réforme du régime des plus-values opérée par l'article 94 de la loi n° 99-1172 du 30 décembre 1999 de finances pour 2000, qui avait substitué au régime du report d'imposition alors en vigueur un régime de sursis d'imposition automatique.

* 122 Une opération intercalaire se traduit par l'absence de plus-value au moment de l'échange.

* 123 Sur cette notion juridique qui fait l'objet d'une abondante jurisprudence, votre rapporteur général vous renvoie au rapport d'information n° 673, 2011-2012 de la commission d'enquête sur l'évasion des capitaux et des actifs hors de France et ses incidences fiscales (p. 161 et suivantes).

* 124 CE 8 octobre 2010, n° 313139 Min c/ M. et Mme Bauchart, n° 301934 M. Bazire ; CE 3 février 2011, n° 329839 Min c/ Conseil ; CE 11 février 2011, n° 314950, M. et Mme Picoux ; CE 27 juillet 2012, n° 327295, Berjot.

* 125 Pour mémoire, ces articles prévoient une exonération de 75 % des droits de mutation à titre gratuit (DMTG) pour ces titres.

* 126 C'est également le seuil retenu dans la jurisprudence du Conseil d'Etat.

* 127 Ce seuil est cohérent avec celui qui figure dans l'article 150-0 D bis .

* 128 Société susceptible de bénéficier d'un apport dans le cadre du régime de report sous condition de remploi.

* 129 A noter qu'une disposition similaire a été adoptée à l'article 6 du projet de loi de finances pour 2013.

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