TITRE II L'AFFIRMATION DES MÉTROPOLES
CHAPITRE
IER LES DISPOSITIONS SPÉCIFIQUES À L'ÎLE-DE-FRANCE
Section 1
Achèvement de la carte intercommunale
Article 10 (art. L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales) Obligation de couverture intégrale des départements franciliens par des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre
L'article 10 du projet de loi modifie et complète l'article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales, issu de la loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 de réforme des collectivités territoriales, en vue d'organiser la couverture intégrale des départements franciliens par des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre. En effet, les schémas départementaux de coopération intercommunale des départements de la petite couronne ne sont pas tenus aujourd'hui de prévoir une couverture intégrale. Au regard du schéma retenu par le projet de loi pour l'organisation institutionnelle de la métropole de Paris - les membres de la métropole sont la ville de Paris et les EPCI à fiscalité propre de l'unité urbaine 57 ( * ) de Paris -, l'achèvement de la carte intercommunale apparaît comme un préalable à la constitution de la métropole.
Sous réserve d'en ajuster les modalités, votre commission approuve l'obligation d'achever la carte intercommunale en Ile-de-France, c'est-à-dire dans les départements de la petite couronne, objectif qui semble recueillir une large approbation parmi les élus franciliens entendus par votre commission lors de ses auditions, comme parmi ceux entendus par votre rapporteur.
Actuellement, le V de l'article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales dispose que, « sur le territoire des départements de Paris, des Hauts-de-Seine, de Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne, ainsi que dans les îles maritimes composées d'une seule commune, les schémas départementaux de coopération intercommunale ne sont pas dans l'obligation de prévoir la couverture intégrale du territoire par des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre ». Issu de la loi n° 2012-281 du 29 février 2012 visant à assouplir les règles relatives à la refonte de la carte intercommunale, le VI du même article prévoit que, « par dérogation au principe de continuité du territoire, pour les départements de Paris, du Val-de-Marne, des Hauts-de-Seine et de Seine-Saint-Denis, deux communes non contiguës parce qu'elles sont séparées par un bois appartenant à une commune tierce qui n'est pas comprise dans le périmètre d'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre peuvent constituer entre elles, et éventuellement avec d'autres communes, un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre » 58 ( * ) .
Le I de l'article 10 du projet de loi supprime la mention des trois départements de la petite couronne dans le V de l'article L. 5210-1-1, les excluant donc de l'exonération de couverture intégrale par des EPCI à fiscalité propre. Votre rapporteur s'est interrogé sur la signification du maintien de la mention de Paris, outre les îles maritimes composées d'une seule commune, dans ce dispositif d'exonération, dès lors que les trois départements de la petite couronne n'y figuraient plus, dans la mesure où le département de Paris n'est constitué que d'une seule commune : la notion d'EPCI à fiscalité propre n'a pas de sens sur le territoire du département de Paris. Aussi, à l'initiative de son rapporteur, votre commission a adopté un amendement destiné à clarifier la rédaction de ce dispositif d'exonération, en le restreignant explicitement aux seules îles maritimes composées d'une seule commune.
Le II de l'article 10 du projet de loi procède à une renumérotation du dernier paragraphe de l'article L. 5210-1-1, pour tenir compte des paragraphes nouveaux introduits par le III concernant la carte intercommunale francilienne.
Le III de l'article 10 du projet de loi établit de nouvelles règles pour la constitution des EPCI à fiscalité propre au sein de l'unité urbaine de Paris, en créant deux nouveaux paragraphes VI et VII au sein de l'article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales 59 ( * ) .
A ce jour, alors que les départements franciliens de la petite couronne sont exonérés de l'obligation de couverture intégrale, les départements de la grande couronne, c'est-à-dire la Seine-et-Marne, l'Essonne, les Yvelines et le Val d'Oise, sont soumis aux obligations de droit commun, telles qu'elles sont fixées par les I à IV de l'article L. 5210-1-1 du code : élaboration d'un schéma départemental de coopération intercommunale (SDCI), constitution d'EPCI à fiscalité propre regroupant au moins 5 000 habitants 60 ( * ) sur tout le territoire, avec une rationalisation des EPCI existants (création, transformation, suppression, fusion, redécoupage du périmètre...) 61 ( * ) . Les départements de la petite couronne seraient dorénavant soumis à ces obligations de droit commun, auxquelles sont ajoutées par le projet de loi des obligations spécifiques renforcées en matière de seuil de population pour la constitution des EPCI, en petite couronne comme en grande couronne, dans la perspective de la création de la métropole de Paris. Ces obligations conduiraient à devoir restructurer un certain nombre d'EPCI existants, pour les faire « grossir », en particulier en grande couronne.
D'une part, selon le nouveau VI de l'article L. 5210-1-1, dans les départements de la petite couronne, le projet de loi dispose que les EPCI à fiscalité propre « regroupent plusieurs communes d'un seul tenant et sans enclave formant un ensemble de plus de 300 000 habitants ». Il est ressorti des auditions conduites par votre commission que ce seuil de 300 000 habitants, s'il s'explique par la volonté de constituer des EPCI de taille importante pour peser face à la ville de Paris au sein de la future métropole de Paris, semble trop élevé pour prendre en compte la diversité des situations géographiques et démographiques ainsi que les EPCI à fiscalité propre existants. Aussi votre rapporteur avait-il envisagé, s'inspirant de la souplesse qui figure déjà au 1° du III de l'article L. 5210-1-1, d'accorder au préfet la faculté d'y déroger, en fonction de critères objectifs locaux, dans la limite de 50 000 habitants en moins. Votre commission a cependant considéré que, davantage qu'une faculté d'assouplissement confiée au préfet, un abaissement du seuil était nécessaire. Aussi a-t-elle adopté un amendement , sur la proposition de notre collègue Alain Richard, afin d'abaisser à 200 000 habitants le seuil de constitution des EPCI à fiscalité propre en petite couronne, tout en ajoutant un critère selon lequel ces EPCI devaient être composés d'au moins trois communes, de façon à donner une réelle consistance intercommunale à ces nouveaux ensembles.
D'autre part, selon le nouveau VII de l'article L. 5210-1-1, dans les départements de la grande couronne, pour les EPCI dont le siège se situe dans l'unité urbaine de Paris, c'est-à-dire dans le périmètre de la future métropole de Paris, le projet de loi dispose que ceux-ci « forment un ensemble d'un seul tenant et sans enclave de plus de 200 000 habitants », ce nombre étant porté à 300 000 habitants lorsque « tout ou partie » de leurs communes membres sont situées dans un département de la petite couronne, de façon à prendre en compte la situation des EPCI interdépartementaux. Par définition, si toutes les communes membres de l'EPCI sont situées dans la petite couronne, nous sommes dans la situation prévue par le VI, de sorte que la rédaction retenue par le projet de loi est en partie redondante.
Ainsi, les communes de la grande couronne situées hors de l'unité urbaine de Paris resteraient soumises aux obligations de droit commun de la carte intercommunale, en particulier au seuil de 5 000 habitants. A cet égard, votre rapporteur s'interroge, dans le cadre de la création de la métropole de Paris, sur la coexistence potentielle d'EPCI à fiscalité propre de tailles très différentes, selon qu'ils seront à l'intérieur ou en dehors de l'unité urbaine de Paris. Une analyse plus détaillée des EPCI existants ou en cours de création en grande couronne mériterait d'être effectuée pour clarifier ce point.
De même que pour le seuil dans la petite couronne, il est ressorti des auditions conduites par votre commission que le seuil de 200 000 habitants pour les EPCI à fiscalité propre de grande couronne situés dans l'unité urbaine de Paris, s'il s'explique aussi par la volonté de constituer des EPCI de taille importante pour peser face à la ville de Paris au sein de la future métropole de Paris, semble trop élevé pour prendre en compte la diversité des situations géographiques et démographiques ainsi que les EPCI existants. Aussi, comme pour la petite couronne, votre rapporteur avait envisagé de permettre au préfet de déroger au seuil de 200 000 habitants, dans la limite de 50 000 habitants en moins. Dans la mesure où les communes de la grande couronne, soumises à l'obligation de couverture intégrale du territoire départemental par des EPCI à fiscalité propre, connaissent actuellement la fin de la mise en oeuvre de leur SDCI, d'ici le 1 er juin 2013, votre commission a néanmoins considéré qu'il n'était pas pertinent, sous le prétexte de constituer des EPCI de taille plus importante pour peser face à la ville de Paris et aux EPCI de la petite couronne au sein de la future métropole de l'agglomération parisienne, de contraindre ces mêmes communes, lorsqu'elles sont situées dans le périmètre de l'unité urbaine de Paris, à reprendre le travail de constitution de nouveaux EPCI en remplacement d'EPCI venant à peine d'être créés, modifiés ou fusionnés et à restructurer les intercommunalités existantes. Aussi votre commission a-t-elle adopté, à l'initiative de notre collègue Alain Richard, un amendement en vue de supprimer les dispositions relatives au seuil de constitution des EPCI dans les secteurs de la grande couronne inclus dans le périmètre de l'unité urbaine. Dans ces conditions, toutes les communes de la grande couronne resteraient soumises au droit commun de la carte intercommunale.
Votre commission a adopté l'article 10 ainsi modifié .
* 57 L'unité urbaine est une notion statistique définie par l'INSEE : « On appelle unité urbaine une commune ou un ensemble de communes présentant une zone de bâti continu (pas de coupure de plus de 200 mètres entre deux constructions) qui compte au moins 2 000 habitants. » Parmi les critères à prendre en compte pour l'établissement des schémas départementaux de coopération intercommunale, l'article L. 5210-1-1 du code général des collectivités territoriales renvoie déjà à la notion d'unité urbaine « au sens de l'INSEE ». Du fait de leur définition, les unités urbaines sont redéfinies périodiquement par l'INSEE.
Voir la définition de l'unité urbaine sur le site de l'INSEE :
http://www.insee.fr/fr/methodes/default.asp?page=definitions/unite-urbaine.htm
* 58 Cette disposition visait à prendre en compte la situation des communes du Val-de-Marne limitrophes du bois de Vincennes, qui appartient à la ville de Paris. Elle figurait déjà dans la loi du 16 décembre 2010, sans toutefois être codifiée.
* 59 Selon l'étude d'impact annexée au projet de loi, l'unité urbaine de Paris compte 412 communes sur les 1281 de l'Ile-de-France, ainsi que 68 EPCI à fiscalité propre en tout ou partie.
* 60 Le seuil de constitution des communautés d'agglomération est fixé à 50 000 habitants de façon autonome par l'article L. 5216-1 du code général des collectivités territoriales.
* 61 L'article 60 de la loi du 16 décembre 2010 précitée prévoit la mise en oeuvre de la nouvelle carte intercommunale au plus tard au 1 er juin 2013, selon des procédures faisant intervenir le préfet et la commission départementale de la coopération intercommunale (CDCI).