C. LA LUTTE CONTRE LE DUMPING SOCIAL

La proposition de résolution adoptée par la commission des affaires européennes comporte plusieurs alinéas consacrés au dumping social, en réaction au rapport du groupe d'experts remis le 21 juin 2012 au commissaire européen chargé des transports, Siim Kallas, qui proposait de desserrer l'encadrement actuel du cabotage routier.

Comme l'expose notre collègue Fabienne Keller dans son rapport 16 ( * ) , le cabotage routier est aujourd'hui limité à trois opérations dans les sept jours suivant la livraison intégrale des marchandises ayant fait l'objet du transport international, dans l'État membre où cette dernière a eu lieu.

Le rapport du groupe d'experts proposait d'autoriser un nombre illimité d'opérations de cabotage, dans un délai de quatre jours après la livraison des marchandises. Il suggérait également d'instaurer la possibilité pour chaque véhicule de réaliser des opérations de cabotage non précédées d'un transport international, dans la limite de 30 ou 50 jours par an, selon le type de véhicule.

Face aux vives réactions qu'elles ont suscitées, ces propositions ne semblent plus d'actualité aujourd'hui. Une vigilance particulière s'impose toutefois, compte tenu de l'acuité de cette question pour nos entreprises de transport, mais aussi de son impact sur la répartition modale du transport de marchandises : plus les prix du transport routier seront tirés vers le bas, plus le fret routier gagnera en compétitivité par rapport au fret ferroviaire ou fluvial.

C'est la raison pour laquelle la proposition de résolution de la commission des affaires européennes énonce qu'il est « indispensable de maintenir le contingentement actuel des opérations de cabotage routier, voire d'en restreindre la pratique ».

Elle dénonce au préalable les effets néfastes de la réglementation européenne actuelle sur le cabotage routier, qui aboutit à une concurrence déséquilibrée dans les Etats membres importateurs, puisque trois opérations de cabotage peuvent être réalisées sur leur territoire.

Le problème posé par cette concurrence accrue résulte des disparités qui caractérisent aujourd'hui le coût du travail entre les États membres, et qu'a détaillées Fabienne Keller dans son rapport. C'est la raison pour laquelle la proposition de résolution inclut un paragraphe traduisant l'attachement du Sénat à une harmonisation accrue au sein de l'Union européenne, sur les plans fiscal et social.

Le contournement du régime européen des travailleurs détachés, au moyen de filiales implantées à l'étranger constitue une illustration des dysfonctionnements actuels du secteur. Comme l'explique Fabienne Keller dans son rapport, une entreprise française peut par exemple créer une filiale dans un pays d'Europe centrale, y recruter des chauffeurs locaux, et les mettre à disposition de la maison-mère pour des opérations de transport réalisées en France ou à partir de la France. Dans ce cas, le chauffeur, en principe rémunéré au salaire minimum français, est soumis au régime de cotisations sociales du pays d'origine, souvent moins coûteux et protecteur que le système français.

Ce contournement du droit est regrettable à deux égards au moins : premièrement, il contribue à « évincer » les conducteurs français du marché du travail ; deuxièmement, il constitue un manque à gagner pour l'État et la sécurité sociale, les impôts et cotisations sociales étant perçus par l'État dans lequel la filiale est implantée.


* 16 « La circulation des mégacamions et le fret routier européen », Rapport d'information présenté par Mme Fabienne Keller au nom de la commission des affaires européennes, n° 644, Sénat 2012/2013.

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