III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION : UNE CONSOLIDATION DU TEXTE ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Traditionnellement attachée à la prévention et à la répression des formes les plus inacceptables de la délinquance, votre commission souscrit sans réserve aux objectifs poursuivis par le projet de loi. Elle salue également l'important travail réalisé par nos collègues députés et approuve très largement les modifications qu'ils ont apportées au projet de loi organique et au projet de loi ordinaire.

Pour l'essentiel, votre commission a souhaité apporter trois séries de modifications au projet de loi ordinaire, tendant à renforcer la complémentarité de l'administration et de la justice en matière de lutte contre la fraude fiscale, à mieux inscrire le nouveau procureur de la République financier dans le paysage judiciaire français, et, enfin, à sécuriser juridiquement plusieurs dispositions du texte.

A. RENFORCER LA COMPLÉMENTARITÉ DE L'ADMINISTRATION ET DE LA JUSTICE EN MATIÈRE DE LUTTE CONTRE LA FRAUDE FISCALE

Comme nos collègues députés, votre commission s'est longuement interrogée sur l'opportunité de maintenir le « verrou de Bercy » s'agissant de l'engagement de poursuites pénales en matière de fraude fiscale.

Supprimer totalement ce système soulèverait sans doute de réelles difficultés : les juridictions pénales, dont les effectifs et les moyens sont limités, n'ont pas vocation à connaître de l'ensemble des faits de fraude fiscale, qui sont à l'heure actuelle réprimés avec efficacité par l'administration fiscale.

Toutefois, le système actuel n'est pas satisfaisant, à deux titres :

- d'une part, les faits de fraude fiscale peuvent apparaître au cours d'une enquête ou d'une instruction ouverte pour d'autres faits. Dans ce cas, faute de plainte de l'administration fiscale, l'autorité judiciaire est contrainte de « fermer les yeux » ;

- d'autre part, il est regrettable que l'autorité judiciaire ne puisse avoir connaissance des faits de fraude fiscale complexe, notamment lorsqu'elle est commise par le recours à des montages juridiques sophistiqués ou à des structures implantées à l'étranger. En effet, comme l'ont relevé l'ensemble des magistrats entendus par votre rapporteur, les faits de fraude fiscale commis dans de telles circonstances peuvent souvent révéler d'autres infractions qui ne peuvent être poursuivies que par la voie pénale (dispositifs de corruption, abus de biens sociaux, escroqueries, etc.).

En outre, votre commission observe qu'il serait paradoxal de créer un procureur financier à compétence nationale et de le priver de son entier pouvoir d'appréciation sur l'opportunité d'engager des poursuites en toute matière économique et financière présentant un certain degré de complexité.

Sur proposition de son rapporteur, votre commission a donc adopté un amendement proposant de lever partiellement ce « verrou », en prévoyant la possibilité pour l'autorité judiciaire d'engager des poursuites sans autorisation préalable de l'administration :

- d'une part, lorsque les faits sont apparus à l'occasion d'une enquête ou d'une instruction portant sur d'autres faits ;

- d'autre part, lorsque les faits ont été commis en bande organisée ou par le recours à diverses manoeuvres - sur ce point, l'amendement reprend les termes utilisés par l'article 15 du projet de loi pour la compétence du procureur financier.

Corrélativement, afin de ne pas interdire à l'administration d'avoir recours à un outil - la transaction - qui a fait ses preuves en termes d'efficacité et de rapidité de la sanction, le dispositif adopté par la commission ouvre une possibilité de transaction pénale , sous le contrôle du parquet, pour les faits de fraude fiscale complexe commis dans les circonstances précitées.

Votre commission rappelle que l'administration des douanes dispose d'ores et déjà, pour sa part, d'un pouvoir de transaction sous le contrôle du parquet, que l'ensemble des praticiens entendus par votre rapporteur ont jugé efficace et utile.

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