B. LES APPORTS DE VOTRE COMMISSION

Votre commission a adopté huit amendements à l'initiative de votre rapporteur, afin de préciser et de compléter la proposition de résolution de la commission des affaires européennes, tout en préservant son équilibre général.

Elle a d'abord adopté trois amendements pour reformuler les alinéas 8 à 20, sans en modifier l'esprit, afin de donner davantage de lisibilité au raisonnement.

Elle a ensuite adopté plusieurs aménagements techniques, qui visent autant à clarifier les modalités d'application des lignes directrices qu'à recentrer la PPRE sur son objet premier.

1. Préciser les coûts éligibles aux aides à l'investissement

Votre commission demande une clarification d'ordre général sur les coûts éligibles aux aides à l'investissement. La proposition de révision des lignes directrices n'est pas très claire sur ce point.

Il semble raisonnable que les coûts liés à la mise aux normes soient explicitement éligibles aux aides à l'investissement, a fortiori lorsque cette mise aux normes est imposée par les autorités européennes, à l'instar de la nouvelle norme RESA sur les aires de sécurité d'extrémité de pistes, édictée par l'Agence européenne de la sécurité aérienne.

Votre commission estime également que les coûts afférents à des opérations de maintenance ou de réparation nécessitant un amortissement sur plusieurs années doivent être explicitement éligibles aux aides à l'investissement. Autrement, le risque est que la Commission les comptabilise dans le régime d'aides au fonctionnement, nettement moins favorable.

2. Pérenniser les aides d'exploitation pour les petits aéroports

Votre commission propose que l'assouplissement relatif aux aides à l'exploitation pour les petits aéroports ne constitue pas simplement un prolongement du délai transitoire de dix ans, mais bien une pérennisation, sous réserve que l'aéroport n'utilise pas ces aides au profit d'un projet de développement de capacités nouvelles, ce qui constituerait une distorsion de concurrence.

La nouvelle rédaction de l'alinéa relatif aux aides au fonctionnement précise de façon plus explicite que le régime d'aides au fonctionnement sera mis en oeuvre de façon décentralisée par les États membres. La Commission européenne n'aura qu'à valider le régime proposé par chaque État membre, charge à eux de veiller ensuite à leur application sur le sol national.

3. Exempter les aides publiques aux très petits aéroports de la procédure d'examen au titre des aides d'Etat

Votre commission demande la création d'une exemption générale - et non uniquement une exemption de notification - de l'examen au titre des aides d'État des aides à l'investissement et au fonctionnement pour les aéroports de moins de 200 000 passagers .

Ces aéroports n'ont en effet pas une taille suffisante pour créer une distorsion de concurrence à l'échelle européenne, à condition qu'ils ne profitent pas de ce régime dérogatoire pour financer un développement capacitaire ou le démarrage d'une nouvelle ligne . Il s'agit concrètement d'un principe similaire à la règle de minimis adoptée par la Commission en matière de contrôle d'aides d'État.

Outre une simplification administrative et une sécurisation juridique bienvenues pour les plus petits aéroports, cette solution correspond également à un principe de réalité : dans les faits, la Commission n'a pas la capacité administrative d'instruire tous les dossiers d'aides publiques aux aéroports, comme en témoignent les nombreuses plaintes qu'elle peine à traiter dans des délais raisonnables.

4. Clarifier les coûts éligibles aux aides au démarrage

Votre rapporteur partage l'idée de préciser que les contrats de marketing et de publicité doivent être inclus dans le décompte des aides au démarrage. Votre commission a simplement précisé que les contrats de marketing et de publicité à inclure sont ceux financés totalement ou partiellement par des fonds publics . D'après la DGAC, leur traçabilité est aisée.

En revanche, votre commission a supprimé la référence à l'hypothèse d'une réduction ciblée des redevances aéroportuaires comme aide possible au démarrage d'une nouvelle ligne. Concrètement, c'est déjà le cas et il est inutile voire dangereux de le préciser .

En effet, la modulation des redevances aéroportuaires est réglementée à l'article R. 224-2-2 du code de l'aviation civile. Il ne s'agit pour le moment pas d'une aide d'État, mais le risque est grand que la Commission européenne en vienne à une telle requalification à l'occasion de l'examen d'une plainte. Il semble peu approprié d'attirer délibérément l'attention de la Commission européenne sur ce point . Quant à en faire l'unique modalité d'aide au démarrage, cela serait contradictoire avec la nécessité d'inclure les coûts de marketing et de publicité.

5. Supprimer la référence à une collectivité pilote dans la gestion des aéroports

Par souci de cohérence, votre commission a également supprimé l'alinéa demandant au Gouvernement de désigner la région comme collectivité pilote dans la gestion des aéroports.

Cette proposition vient de fait perturber l'équilibre défini, pour chaque aéroport décentralisé, à l'article 28 de la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et aux responsabilités locales. L'état actuel du droit laisse aux collectivités une possibilité souple, celle de s'entendre pour définir la collectivité pilote. Ce n'est qu'en l'absence d'accord que le préfet peut désigner un chef de file, sachant que, sous certaines conditions, la région est prioritaire si elle est candidate . Il est préférable de s'en tenir à cette solution équilibrée, qui paraît mieux adaptée à la prise en compte des contextes locaux.

Quant à établir un schéma cohérent de rationalisation de notre parc d'aéroports , la question mérite à l'évidence d'être posée. Dans son rapport de 2008 8 ( * ) , la Cour des comptes souligne déjà le caractère sous-optimal de l'infrastructure aéroportuaire française. Elle met en avant les défauts de synergie et la forte dispersion de l'offre aéroportuaire, le manque de concertation entre gestionnaires, le maintien en activité de plateformes à très faible trafic et un insuffisant report modal entre aérien et ferroviaire. La Cour des comptes insiste sur le besoin de planification du développement des capacités aéroportuaires, tout en soulignant les incertitudes sur l'horizon de saturation et l'absence de vision à long terme.

Votre rapporteur estime également qu'une telle planification s'imposera à terme. Néanmoins, celle-ci relève davantage d'une réflexion à l'échelle du territoire national et ne concerne pas la Commission européenne. Le sujet est par conséquent trop éloigné de l'objet de cette PPRE pour y figurer.

Une autre question se dessine en parallèle, qui ne concerne pas la gestion des aéroports, mais le transfert de la propriété du sol de ceux-ci de l'État aux collectivités territoriales . Il faudra sans doute se pencher sur un mécanisme similaire au compromis de la loi du 13 août 2004 pour définir la collectivité concédante, mais ce point dépasse également le cadre de cette PPRE et relève davantage des prochains projets de loi de décentralisation que le Sénat aura à examiner.

*

* *

Réunie le 24 octobre 2013, sous la présidence de Michel Teston, vice-président, la commission a adopté la proposition de résolution européenne dans la rédaction reproduite ci-après.


* 8 Cour des Comptes, rapport public thématique (juillet 2008) : « Les aéroports français face aux mutations du transport aérien ».

Page mise à jour le

Partager cette page