UN FILET DE SÉCURITÉ FINANCIER PUBLIC SOLIDE

Malgré l'ensemble des financements privés prévus par le texte (actionnaires, créanciers, fonds de résolution), une grande part de la crédibilité du MRU reposera sur l'existence et la solidité du filet de sécurité destiné à financer la résolution en cas d'insuffisance des instruments précédemment mentionnés, moins parce que ces instruments seraient en eux-mêmes insuffisants que parce qu'ils pourraient ne pas être encore en place.

Au-delà du montant du fonds de résolution, la proposition initiale de la Commission prévoyait deux moyens de financements alternatifs à la disposition du CRU, gestionnaire du fonds :

- des contributions ex post des établissements bancaires - fortement limitées par la nécessité de prendre garde à ne pas provoquer des difficultés financières en chaîne (article 67 de la proposition de règlement) ;

- une possibilité d'emprunt du fonds de résolution auprès de ses membres ou des marchés financiers (article 69).

Il ne s'agit que de solutions financières de nature privée , la Commission n'étant pas en mesure de proposer un filet de sécurité financier public.

L'accord du Conseil du 19 décembre 2013 prévoit quant à lui qu' « un filet de sécurité commun sera développé pendant la phase transitoire [de constitution du fonds], qui sera pleinement opérationnel au plus tard au bout de 10 ans. Ce filet de sécurité faciliterait les emprunts par le fonds . Il serait ultimement remboursé par le secteur bancaire via des contributions, y compris ex post ».

Les modalités de ce mécanisme de « facilitation de l'emprunt » du fonds sont au coeur des négociations actuellement en cours entre les Etats membres et entre le Conseil, le Parlement européen et la Commission européenne.

Deux solutions semblent a priori envisageables : une garantie du mécanisme européen de stabilité (MES) ou une garantie conjointe et solidaire de tous les Etats membres participants . La première présente l'inconvénient de nécessiter une modification du traité sur le MES du 2 février 2012. Votre rapporteur est donc plutôt favorable à la seconde, dont la crédibilité financière est, par définition, au moins aussi importante que celle du MES.

Dans la phase initiale de constitution du fonds , cet instrument ne sera, en tout état de cause, pas encore mis en oeuvre. Comme il a déjà été mentionné précédemment à propos des résultats de l'AQR, le principe défini par le Conseil Ecofin du 15 novembre 2013 est celui d'un financement national et, en cas d'incapacité budgétaire de l'Etat membre en question, d'un prêt du MES à cet Etat, fléché vers l'institution financière, conformément à l'article 15 du traité du MES 15 ( * ) .

Votre rapporteur estime que cette procédure, utile dans une phase de transition, demeure toutefois insuffisante pour permettre une véritable dissociation entre risque souverain et risque bancaire : sa mise en oeuvre est non seulement conditionnée à l'existence d'un risque souverain mais elle le renforce puisqu'elle conduit à alourdir la dette de l'Etat en question.

En conséquence, votre rapporteur se félicite que la proposition de résolution appelle de ses voeux la mise en place rapide d'un véritable instrument de recapitalisation directe par le MES des établissements en difficulté , tel que le Conseil européen l'a à plusieurs reprises affirmé (27 et 28 juin 2012 ; 24 et 25 octobre 2013).

La déclaration conjointe des gouvernements français et allemand à l'occasion du 16 ème conseil des ministres franco-allemand , le 19 février 2014, précise un calendrier possible pour la mise en place de cet instrument , puisqu'elle indique que « la France et l'Allemagne se donnent pour objectif d'achever l'union bancaire et considèrent prioritaires l'obtention d'un accord final avec le Parlement européen sur le mécanisme de résolution unique avant les élections européennes sur le fondement de l'orientation générale obtenue par le Conseil en décembre, ainsi que, de manière complémentaire, l'obtention d'un accord politique final sur l'instrument de recapitalisation directe par le MES en mars prochain ».

Ce calendrier a été confirmé par Corso Bavagnoli lors de l'audition conjointe, qui a par ailleurs indiqué que, selon la France « une modification du traité n'est pas nécessaire : l'article 19 du traité sur le MES permet déjà la création de nouveaux instruments » 16 ( * ) .

Ainsi, cet instrument essentiel permettra de parfaire le système mis en place depuis deux ans et de conforter le système bancaire de la zone euro et, partant, la monnaie unique, quelle que soit la nature des résultats de la revue de la qualité des actifs par la BCE en novembre 2014.


* 15 L'article 15 du traité du MES du 2 février 2012 prévoit que « Le conseil des gouverneurs peut décider d'octroyer une assistance financière sous forme de prêts à un membre du MES, dans le but spécifique de recapitaliser des institutions financières de ce membre ».

* 16 Cet article prévoit que « le conseil des gouverneurs peut réexaminer la liste des instruments d'assistance financière prévus aux articles 14 et 18 et décider de la modifier ».

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