III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION

Le texte examiné par votre commission spéciale a été présenté comme étant organisé autour de quatre « piliers » : la lutte contre la traite , la responsabilisation du client , l'accompagnement des personnes prostituées , qu'il soit social, sanitaire ou lors des procédures judiciaires, et la prévention .

Si votre commission spéciale a souhaité à la quasi-unanimité, adopter en les améliorant trois des volets du texte, elle s'est divisée sur le quatrième élément. Elle a considéré, dans sa majorité, que la pénalisation du client pourrait entraîner une précarisation accrue pour les personnes prostituées tout en ne permettant pas une lutte plus efficace contre les réseaux de traite et le proxénétisme.

Votre rapporteure, comme plusieurs membres de la commission, regrettent la suppression de cette disposition, estimant que les quatre « piliers » de la proposition forment un tout cohérent et sont par conséquent indissociables les uns des autres.

A. LA CONFIRMATION DE NOMBREUSES DISPOSITIONS

1. L'adoption des mesures visant à lutter contre la traite sur Internet et à abroger le délit de racolage

Votre commission spéciale a approuvé les dispositions relatives aux nouvelles obligations mises à la charge des fournisseurs d'accès à Internet en matière de lutte contre la traite et contre le proxénétisme (article 1 er ) et confirmé l'abrogation du délit de racolage public (articles 13 et 14). Hormis un amendement rédactionnel, elle n'a pas non plus modifié les dispositions relatives à l'hébergement des personnes victimes de la prostitution, du proxénétisme ou de la traite des êtres humains (articles 8 et 9).

2. L'amélioration du suivi de la mise en application de la loi

Votre commission spéciale a regroupé à l' article 18 les demandes de rapport formulées dans le texte transmis par l'Assemblée nationale. Un seul document, publié dans les deux ans suivant la promulgation de la loi, sera donc chargé de dresser le bilan de sa mise en oeuvre. Les informations devant être contenues dans ce rapport ont été complétées. Seront ainsi traitées les questions relatives à la prostitution sur Internet ainsi qu'à celle des étudiants.

B. LE RENFORCEMENT DE LA LUTTE CONTRE LA TRAITE DES ÊTRES HUMAINS ET L'AMÉLIORATION DE L'ACCOMPAGNEMENT DES PERSONNES PROSTITUÉES

1. Le renforcement de la lutte contre la traite

Votre commission spéciale a adopté, à l'article 1 er bis , un amendement visant à ce que les formations dispensées aux travailleurs sociaux portent également sur « l'identification des situations de prostitution, de proxénétisme et de traite des êtres humains ».

En outre, elle a adopté un article 1 er quinquies afin d'élargir le champ de compétence des inspecteurs du travail à la constatation des infractions de traite des êtres humains. Cette mesure traduit en droit la mesure n° 13 du plan d'action national contre la traite des êtres humains 2014-2016.

2. La transformation du « parcours de sortie » en « projet d'insertion sociale et professionnelle »

Votre commission spéciale a adopté un amendement qui réécrit en grande partie l' article 3 relatif au « parcours de sortie » , désormais dénommé « projet d'insertion sociale et professionnelle » et ouvert à l'ensemble des victimes de la traite des êtres humains. Ce changement s'inscrit dans la droite ligne des orientations fixées par le plan d'action national contre la traite des êtres humains du 14 mai dernier et permet d'indiquer clairement qu'il ne s'agira pas d'établir un parcours prédéfini, fait d'étapes obligatoires et identiques pour tous, mais de proposer, sur le long terme, un projet personnalisé pour une réinsertion durable.

Votre commission spéciale a également précisé la composition de l'instance départementale qui sera chargée d'organiser et d'assurer le suivi de ce projet d'insertion sociale et professionnelle. Celle-ci sera présidée par le préfet et composée de quatre collèges de taille équivalente représentant les services de l'État, la justice, les collectivités territoriales et les associations.

Elle a par ailleurs expressément indiqué que l'agrément dont devraient disposer les associations souhaitant participer au projet d'insertion sociale et professionnelle serait ouvert à l'ensemble des structures ayant pour objet l'aide et l'accompagnement des publics en difficulté . Toutes les associations seront a priori éligibles à l'agrément.

Les financements dédiés à la mise en oeuvre de ce projet d'insertion sociale et professionnelle ont par ailleurs été renforcés grâce à l'adoption de deux amendements qui devraient permettre d'augmenter substantiellement la taille du fonds créé à l' article 4 :

- toutes les recettes provenant de la confiscation des biens et produits des proxénètes lui seront affectées ;

- une nouvelle recette est créée, constituée des produits et biens prélevés sur les personnes reconnues coupables de traite des êtres humains .

Enfin, votre commission spéciale a introduit un article 3 bis visant à faciliter l'accès au logement des personnes engagées dans un projet d'insertion sociale et professionnelle et de celles victimes du proxénétisme ou de la traite des êtres humains en les incluant dans la catégorie des publics prioritaires pour l'obtention d'un logement social.

3. Un accès au séjour facilité

À l'article 6 , votre commission a d'abord adopté un amendement présenté conjointement par sa rapporteure et par son président ayant pour objet de supprimer la condition de sortie de la prostitutio n pour pouvoir bénéficier de l'autorisation provisoire de séjour prévue pour les personnes engagées dans le projet d'insertion. Elle a également adopté quatre amendements de son président et plusieurs de ses collègues visant à prévoir que :

- le préfet aura compétence liée pour la délivrance du titre de séjour octroyé aux victimes de la traite ou du proxénétisme qui dénoncent les auteurs de ces infractions ;

- il aura également compétence liée pour la délivrance de l'autorisation provisoire de séjour octroyée aux victimes de la traite ou du proxénétisme qui sont engagées dans le projet d'insertion sociale et professionnelle créé par l'article 3 du présent texte ;

- cette autorisation provisoire de séjour aura une durée d'un an ;

- le renouvellement de cette autorisation sera automatique dès lors que les conditions de délivrance restent remplies.

4. L'amélioration des dispositions relatives à la réduction des risques et aux mesures de prévention

Votre commission spéciale a adopté un amendement réécrivant en partie l' article 14 ter relatif à l'accompagnement sanitaire des personnes prostituées. Une telle politique ayant vocation à impliquer un grand nombre d'acteurs différents, la référence au fait qu'elle « relève de l'État » a été supprimée. Le terme « risques » a été préféré à celui de « dommages » , dont le périmètre est plus difficile à interpréter.

Par ailleurs, les modifications apportées par les articles 15 et 15 bis A à l'article L. 312-17-1 du code de l'éducation ayant rendu celui-ci quasiment illisible, votre commission spéciale a adopté deux amendements . Le premier réécrit l'article 15 afin de créer un nouvel article L. 312-17-1-1 du code de l'éducation prévoyant la délivrance d'une information sur les réalités de la prostitution, pour les seuls élèves de collège et de lycée et par groupes d'âge homogène. Le second amendement supprime l'article 15 bis A.

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