Rapport général n° 108 (2014-2015) de M. Serge DASSAULT , fait au nom de la commission des finances, déposé le 20 novembre 2014

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N° 108

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2014-2015

Enregistré à la Présidence du Sénat le 20 novembre 2014

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances pour 2015 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

Par M. Albéric de MONTGOLFIER,

Sénateur,

Rapporteur général.

TOME III

LES MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES

ET LES DISPOSITIONS SPÉCIALES

( Seconde partie de la loi de finances )

ANNEXE N° 13

ENGAGEMENTS FINANCIERS DE L'ÉTAT

COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS : ACCORDS MONÉTAIRES INTERNATIONAUX

COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS : AVANCES À DIVERS SERVICES DE L'ÀTAT OU ORGANISMES GÉRANT DES SERVICES PUBLICS

COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE : PARTICIPATION DE LA FRANCE AU DÉSENDETTEMENT DE LA GRÈCE

Rapporteur spécial : M. Serge DASSAULT

(1) Cette commission est composée de : Mme Michèle André , présidente ; M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général ; Mme Marie-France Beaufils, MM. Yvon Collin, Vincent Delahaye, Mmes Fabienne Keller, Marie-Hélène Des Esgaulx, MM. André Gattolin, Jean Germain, Charles Guené, Francis Delattre, Georges Patient , vice-présidents ; MM. Michel Berson, Philippe Dallier, Dominique de Legge, François Marc , secrétaires ; MM. Philippe Adnot, François Baroin, Éric Bocquet, Yannick Botrel, Jean-Claude Boulard, Michel Bouvard, Michel Canevet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Carcenac, Jacques Chiron, Serge Dassault, Éric Doligé, Philippe Dominati, Vincent Eblé, Thierry Foucaud, Jacques Genest, Alain Houpert, Jean-François Husson, Mme Teura Iriti, MM. Pierre Jarlier, Roger Karoutchi, Bernard Lalande, Marc Laménie, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Hervé Marseille, François Patriat, Daniel Raoul, Claude Raynal, Jean-Claude Requier, Maurice Vincent, Jean Pierre Vogel, Richard Yung .

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 14 ème législ.) : 2234, 2260 à 2267 et T.A. 420

Sénat : 107 et 108 à 114 (2014-2015)

PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEUR SPÉCIAL

I. La mission « Engagements financiers de l'État »

Un besoin de financement record, né de la dette accumulée et du déficit budgétaire de l'exercice 2015

1. Le besoin de financement de l'État devrait atteindre en 2015 le niveau record de 196,6 milliards d'euros , soit 10,3 % de plus que le besoin de financement pour 2014 prévu par la loi de finances rectificative du 8 août 2014. Ce montant correspond principalement au déficit budgétaire de l'année, soit 75,7 milliards d'euros, et au refinancement de 119,5 milliards d'euros de dette arrivant à échéance en 2015.

2. Le besoin de financement sera couvert à 95,6 % par l'émission de titres d'État à moyen et long terme, pour un montant de 188 milliards d'euros . Le solde sera financé par une variation positive des disponibilités du Trésor de 4,1 milliards d'euros et par 4 milliards d'euros de recettes de cessions de participations de l'État.

La spirale de la dette camouflée par le niveau exceptionnellement bas des taux d'intérêt

3. L'État est en déficit de 31,4 milliards d'euros avant même de payer les intérêts de sa dette : ceux-ci sont donc financés par emprunt . Cela conduit à une progression autoentretenue de la dette de l'État, alimentée chaque année par la charge des intérêts.

4. Les conséquences de cette dérive de la dette de l'État sont artificiellement camouflées par le niveau extrêmement faible des taux d'intérêt : alors que la dette devrait passer de 1 457,2 milliards d'euros fin 2013 à 1 531,8 milliards d'euros fin 2014, soit une hausse de 5,1 %, la charge de la dette reculerait dans le même temps de 3,9 %.

5. La charge de la dette devrait s'établir en 2015 à 44,3 milliards d'euros, soit une baisse de 2,3 milliards d'euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2014 mais une hausse de 1,1 milliard d'euros par rapport à l'estimation révisée pour cette même année.

Face au risque de refinancement, la nécessité de réaliser des économies importantes et immédiates sur les dépenses de l'État

6. Le projet de loi de finance prend comme hypothèse une remontée progressive des taux à moyen et long terme , le taux à 10 ans passant d'environ 1,25 % actuellement à 1,9 % fin 2014 puis 2,2 % fin 2015. Un choc plus violent ne peut être exclu tant les doutes des i nvestisseurs et des agences de notation sur la situation économique de la France et la politique de son Gouvernement semblent se renforcer. La défiance des marchés à l'égard de la dette française entraînerait, à travers une augmentation de la prime de risque exigée par les investisseurs, un alourdissement automatique et important de la charge de la dette et donc du déficit budgétaire : chaque point de taux d'intérêt supplémentaire représenterait un coût 2,4 milliards d'euros la première année et 5,3 milliards d'euros la suivante.

7. Le projet de loi de finances pour 2015 se fonde sur une remontée très progressive des taux d'intérêt de la dette française s'inscrivant dans un contexte de redressement du taux de croissance : dans ce cas de figure, un alourdissement du coût de la dette serait effectivement plus soutenable. Toutefois, les hypothèses de croissance du projet de loi de finances semblent excessivement optimistes . Sans mesures rapides destinées à assoir la crédibilité budgétaire de l'État, le scenario d'une crise de défiance à l'égard de la dette française conjuguée à un approfondissement de la crise économique est de plus en plus probable.

8. Le rétablissement d'un excédent primaire est indispensable pour enrayer la mécanique d'accumulation de la dette et réduire le risque de refinancement. Il faut pour cela que l'État se recentre sur ses missions premières et réduise drastiquement les transferts directs ou indirects aux ménages et aux entreprises , y compris lorsqu'ils prennent la forme de dépenses fiscales.

Les autres programmes de la mission

9. Les crédits du programme 114 « Appels en garantie de l'État » diminuent de 5,5 %, pour s'établir à 197 millions d'euros en AE et en CP, après un amendement du Gouvernement adopté en seconde délibération par l'Assemblée nationale pour assurer le respect de la norme de dépense. Les crédits baissaient de 1,6 % dans le projet initial du Gouvernement.

10. Le programme 145 « Épargne » voit ses crédits passer de 568,9 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 569,1 millions d'euros en crédits de paiement (CP) à 476,7 millions d'euros en AE et CP, soit une baisse de 16,2 %, essentiellement grâce à la réforme de l'épargne-logement, réalisée par la majorité précédente et entrée en vigueur le 1 er mars 2011, qui, à juste titre, a recentré le plan d'épargne-logement (PEL) sur l'accession à la propriété d'une résidence principale.

PREMIÈRE PARTIE : MISSION « ENGAGEMENTS FINANCIERS DE L'ÉTAT »

Le présent projet de loi de finances prévoit, pour la mission « Engagements financiers de l'État », 50,9 milliards d'euros d'autorisations d'engagement et 45,2 milliards d'euros de crédits de paiement dont l'évolution est détaillée dans le tableau ci-après, étant précisé que le programme 344 « Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers structurés à risque » a été créé au sein de la mission.

Évolution des crédits de paiement de la mission
(projet de loi de finances présenté par le Gouvernement)

(en euros)

Programmes et actions

Exécution 2013

LFI 2014

PLF 2015

Variation

PLF 2015 / LFI 2014

117 - Charge de la dette et trésorerie de l'État

44 885 787 998

46 654 000 000

44 337 000 000

-5%

1 - Dette négociable

44 885 787 998

45 740 000 000

43 401 000 000

-5%

2 - Dette non négociable

0

0

-

3 - Trésorerie

0

914 000 000

936 000 000

2%

114 - Appels en garantie de l'État

114 516 142

208 400 000

205 000 000

-2%

1 - Agriculture et environnement

0

1 500 000

1 000 000

-33%

2 - Soutien au domaine social, logement, santé

7 200 000

8 500 000

10 000 000

18%

3 - Financement des entreprises et industrie

379 049

10 000 000

10 000 000

-

4 - Développement international de l'économie française

106 800 000

138 200 000

149 300 000

8%

5 - Autres garanties

137 093

50 200 000

34 700 000

-31%

145 - Épargne

575 888 342

569 072 591

476 700 000

-16%

1 - Épargne logement

572 794 565

565 972 591

474 342 650

-16%

2 - Instruments de financement du logement

3 093 777

3 100 000

2 357 350

-24%

168 - Majoration de rentes

179 184 062

171 000 000

168 000 000

-2%

1 - Participation de l'État aux majorations de rentes viagères

179 184 062

171 000 000

168 000 000

-2%

336 - Dotation en capital du mécanisme européen de stabilité (MES)

6 523 488 000

3 261 744 000

0

1 - Dotation en capital du MES

6 523 488 000

3 261 744 000

0

338 - Augmentation du capital de la Banque européenne d'investissement

1 617 003 000

0

0

1 - Augmentation du capital de la Banque européenne d'investissement

1 617 003 000

0

0

Totaux pour la mission (périmètre LFI 2014)

53 895 867 544

50 864 216 591

45 186 700 000

-11%

344 - Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers structurés à risque (LFI 2014 retraitée)

50 000 000

50 000 000

0%

1- Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers structurés à risque (LFI 2014 retraitée)

50 000 000

50 000 000

0%

Totaux pour la mission

50 914 216 591

45 236 700 000

-11%

Source : commission des finances du Sénat, d'après le projet annuel de performances pour 2015

La loi de programmation des finances publiques (LPFP) pour les années 2012 à 2017 prévoyait un recul des crédits de la mission « Engagements financiers de l'État », hors charge de la dette (programme 117) de 1,044 milliard d'euros en 2014 à 0,980 milliard d'euros en 2015. Le montant prévu par le présent projet de loi de finances s'élève à 849 700 000 euros, soit 13,3 % de moins que la programmation.

Écarts à la programmation 2013-2015

Source : réponse au questionnaire budgétaire

Après les modifications apportées par l'Assemblée nationale (voir infra ), les crédits de la mission s'établissent à 841 700 000 euros en AE et CP, soit 19,4 % de moins que la programmation.

I. LE PROGRAMME 117 « CHARGE DE LA DETTE ET TRÉSORERIE DE L'ETAT »

A. UN BESOIN UN FINANCEMENT RECORD ESSENTIELLEMENT COUVERT PAR L'EMISSION DE DETTE

1. Un besoin de financement record

Le besoin de financement de l'État, qui devrait s'élever en 2015 à 196,6 milliards d'euros correspond principalement :

- au déficit budgétaire de l'année, soit 75,7 milliards d'euros ;

- à l'amortissement de titres émis au fil des ans pour financer les déficits des exercices précédents et arrivant à échéance en 2015, pour 119,5 milliards d'euros (dont 2,4 milliards d'euros de suppléments d'indexation versés aux détenteurs d'obligations dont le capital est indexé sur l'inflation).

Les autres besoins de trésorerie s'élèvent à 1,3 milliard d'euros et tiennent compte principalement des décaissements relatifs aux programmes d'investissements d'avenir.

Besoin de financement de l'État

(en milliards d'euros)

2012

2013

2014

2014

2014

2015

Exécution

Exécution

LFI

LFR

révisé

PLF

Besoin de financement

187

185,5

176,4

178,3

182,3

196,6

Amortissement de titres d'État à moyen et long terme

97,9

106,7

103,8

103,8

103,8

119,5

valeur nominale

95,3

103,8

103,8

103,8

103,8

117,1

suppléments d'indexation

2,7

2,8

-

-

-

2,4

Amortissement des autres dettes (dettes reprises, etc.)

1,3

6,1

0,2

0,2

0,2

0,1

Déficit à financer

87,2

74,9

70,6

71,9

75

75,7

déficit budgétaire

87,2

74,9

82,6

83,9

87

75,7

investissements d'avenir

-

-

-12

-12

-12

-

Autres besoins de trésorerie *

0,6

-2,2

1,8

2,4

3,3

1,3

* neutralisation des opérations budgétaires sans impact en trésorerie ; décaissements opérés à partir des comptes consacrés aux investissements d'avenir, nets des intérêts versés ; passage de l'exercice budgétaire à l'année civile.

Source : projet annuel de performances pour 2015

Votre rapporteur souligne le poids des déficits passés dans le besoin de financement de l'État. En effet, pour rembourser les obligations arrivant à échéance une année donnée, l'État est conduit à réemprunter sur les marchés les fonds nécessaires : il refinance sa dette (on dit également qu'il la fait « rouler »).

Vie d'une obligation de maturité 5 ans

Source : commission des finances du Sénat

Outre les insuffisances budgétaires de l'État, la nécessité de faire « rouler » la dette découle d'une stratégie de financement tirant profit du fait que le taux d'intérêt demandé par les prêteurs est une fonction croissante de la durée de l'obligation émise : il est moins risqué de prêter à court terme qu'à long terme, le prix réclamé est donc moins élevé. L'État fait ainsi le choix d'émettre une partie importante de sa dette sur des maturités de court ou moyen terme . Ce faisant, il accroît le rythme et le montant annuel du refinancement.

Il faut relever que le besoin en financement de l'année ne prend pas en compte le « roulement » de la dette négociable de l'État de maturité inférieure à un an, constituée de bons du Trésor à taux fixe et à intérêts précomptés (BTF), qui sert à couvrir les décalages de trésorerie infra-annuels. Seule la variation globale de cette dette d'une année sur l'autre est comptée comme ressource positive ou négative dans le tableau de financement (voir infra ). Il n'en demeure pas moins qu'en réalité, s'ajoutent aux émissions de titres de moyen et long terme, constitués d'obligations assimilables du Trésor (OAT) et de bons du Trésor à intérêt annuel (BTAN), les émissions de BTF qui ont lieu tout au long de l'année. À la fin de l'exercice 2014, le stock de BTF devrait s'établir à 178 milliards d'euros et rester stable en 2015.

Part des amortissements et du solde de gestion
dans le besoin de financement de l'État de 2000 à 2015

en milliards d'euros

en %

Amortissements

Solde

de la gestion

Autres besoins

Besoin de

financement

Amortissements

Solde

de la gestion

Autres besoins

Besoin de

financement

OAT BTAN

dettes reprises

OAT BTAN

dettes reprises

2000

57,1

-

28,5

-

85,6

67%

-

33%

100%

2001

51,3

-

39,3

-

90,6

57%

-

43%

-

100%

2002

59,4

-

50,2

-

109,6

54%

-

46%

-

100%

2003

62,5

-

57,0

-

119,5

52%

-

48%

-

100%

2004

66,5

-

46,4

-

112,9

59%

-

41%

-

100%

2005

65,6

-

47,3

-

112,9

58%

-

42%

-

100%

2006

77,6

2,8

35,4

-

115,8

67%

0

31%

-

100%

2007

69,0

0,6

34,6

-

104,9

66%

1%

33%

-

100%

2008

97,6

10,3

56,4

-

164,0

60%

0

34%

-

100%

2009

110,1

1,6

134,7

-

246,2

45%

1%

55%

-

100%

2010

82,9

4,1

149,6

-

236,9

35%

0

63%

-

100%

2011

94,9

0,6

93,1

-

188,6

50%

0

49%

-

100%

2012

97,9

1,3

83,6

-

182,8

54%

0

46%

-

100%

2013

106,7

6,1

71,9

1,1

185,8

57%

3%

39%

1%

100%

2014

103,8

0,2

75

3,3

182,3

57%

0

41%

2%

100%

2015

119,5

0,1

75,7

1,3

196,6

61%

0

39%

0%

100%

Source : Agence France Trésor

NB : Pour 2014 et pour 2015, le besoin de financement est composé non de l'impact en trésorerie du solde de la gestion (qui sera déterminé dans les lois de règlement respectives) mais de la prévision du déficit à financer.

Ce besoin de financement aurait pu être encore supérieur si l'Agence France Trésor (AFT) n'avait pas procédé, au cours de l'année 2014, à des rachats anticipés de titres à échéance 2015.

Ces rachats se sont établis, sur les sept premier mois de l'année, à 19,3 milliards d'euros et pourraient atteindre, selon les prévisions de Natixis 1 ( * ) , un total de 27 milliard d'euros pour 2014.

En 2013, l'AFT avait déjà racheté pour près de 10 milliards d'euros de titres à échéance 2015, en plus des 13,2 milliards d'euros consacrés à la reprise de titres à échéance 2014.

Ces opérations permettent de lisser les émissions de dette française et de profiter de conditions de taux actuellement très avantageuses (voir infra ). Sans elles, le besoin de financement de l'État pour 2015 s'élèverait donc à 233,6 milliards d'euros.

L'État détient environ 150 milliards d'euros de titres à échéance 2016. S'il souhaite éviter de financer l'intégralité de l'amortissement de ces titres au cours de l'exercice 2016, l'AFT sera très probablement amenée à poursuivre sa politique de rachat en 2015, pour un montant qui pourrait être du même ordre qu'en 2014, soit 27 milliards d'euros. Le montant des émissions de BTAN et d'OAT en 2015 pourrait ainsi atteindre 215 milliards d'euros.

2. Des ressources de financement provenant essentiellement de nouveaux emprunts

Les ressources de financement en 2015 proviennent pour l'essentiel des émissions nouvelles de dette à moyen et long terme nettes de rachats qui s'élèvent à 188 milliards d'euros.

Les titres composant la dette négociable de l'État

« La composition de la dette de l'État a été rationalisée par la création de trois catégories de titres standardisés, les valeurs du Trésor : les OAT, les BTAN et les BTF. Ces titres, dont la coupure nominale est de 1 euro, se distinguent par leur maturité à l'émission.
À compter du 1er janvier 2013 et dans un souci de simplification, les nouveaux titres de références créés sur le moyen terme (de maturité 2 ans et 5 ans) seront désormais émis sous la forme d'OAT (Obligation Assimilable du Trésor) , comme pour les titres de long terme (10 ans et plus). La dénomination spécifique de BTAN (Bon du Trésor à intérêts Annuels) pour les titres de moyen terme n'a en effet plus l'utilité qu'elle avait à l'origine. Les souches de BTAN existantes continueront à être abondées et leur liquidité sera ainsi assurée.

Les obligations assimilables du Trésor (OAT) sont le support de l'endettement à moyen et long terme de l'État. La maturité de ces titres est comprise entre deux et cinquante ans. La plupart des OAT sont à taux fixe et remboursables in fine. Mais le Trésor émet aussi des obligations à taux variable (OAT TEC 10 indexées sur le taux de l'échéance constante à 10 ans) et des obligations indexées sur l'inflation (OATi, OATei).

Les OAT long term e sont émises par adjudication le premier jeudi de chaque mois ; l'État adjuge à cette occasion une ligne à taux fixe d'échéance 10 ans, et si les conditions de marché s'y prêtent, d'autres lignes d'OAT à taux fixe. L'échéance des OAT et la date de paiement du coupon sont fixés au 25 du mois.

Les OAT moyen terme et indexées (TEC 10, OATi, OAT€i) sont émises par adjudication le troisième jeudi de chaque mois, dans la cadre d'un calendrier annuel publié à l'avance ; l'État émet à cette occasion au moins une ligne d'échéance 2 ou 5 ans.

Les bons du Trésor à intérêt annuel (BTAN) représentaient, jusqu'au 31 décembre 2012, l'endettement à moyen terme de l'État. Leur maturité à l'émission était de deux ou cinq ans. Le dernier BTAN arrivera à échéance le 25 juillet 2017.

Les bons du Trésor à taux fixe et à intérêts précomptés (BTF) sont l'instrument de gestion de trésorerie de l'État. Ils servent à couvrir les fluctuations infra-annuelles de la trésorerie de l'État, qui découlent pour l'essentiel du décalage entre le rythme d'encaissement des recettes et celui du paiement des dépenses, et de l'échéancier d'amortissement de la dette. La maturité des BTF à l'émission est de moins d'un an. Ils sont émis chaque lundi par voie d'adjudication, dans le cadre d'un calendrier trimestriel publié à l'avance et précisant les échéances des bons qui seront mis en adjudication. Un BTF à 3 mois est émis chaque semaine ; s'y ajoute, selon les cas, une émission de BTF semestriels ou annuels. Certains BTF peuvent être émis hors calendrier pour des durées de 4 à 7 semaines en fonction des besoins de trésorerie. »

Source : Agence France Trésor

Le détail du programme d'émission sera annoncé par l'AFT en décembre. Il est prévu que les émissions de dette de court terme (BTF) restent stables.

Les ressources de financement comprennent également :

- les ressources affectées à la Caisse de la dette publique et consacrées au désendettement , fixées à 4 milliards d'euros, issues du produit de cession de participations publiques ;

- une contribution des disponibilités du Trésor de 4,1 milliards d'euros ainsi que d'autres ressources de trésorerie (0,5 milliard d'euros) qui représentent le montant des suppléments d'indexation perçus à l'émission des titres indexés.

L'encours des dépôts des correspondants du Trésor 2 ( * ) est stabilisé, de même que l'encours des titres d'État à court terme.

Ressources de financement de l'État

(en milliards d'euros)

2012

2013

2014

2014

2014

2015

Exécution

Exécution

LFI

LFR (1)

révisé

PLF

Ressources de financement

187

185,5

176,4

178,3

182,3

196,6

Émissions de titres d'État à moyen et long terme, nettes des rachats

178

168,8

173

173

173

188

Ressources consacrées au désendettement

-

-

1,5

1,5

1,5

4

Variation de l'encours de titres d'État à court terme (+ si augmentation ; - sinon)

-11,2

7,2

-

1,9

4,2

-

Variation des dépôts des correspondants (+ si augmentation ; - sinon)

13,4

-4,2

-

-

-1

-

Variation des disponibilités du Trésor à la Banque de France et des placements de trésorerie de l'État (+ si diminution ; - sinon)

-2

7,9

1,4

1,4

1,6

4,1

Autres ressources de trésorerie

8,9

5,7

0,5

0,5

3

0,5

Source : projet annuel de performance 2015

Les « ressources consacrées au désendettement » et les ressources de trésorerie ne répondent en réalité que marginalement au besoin de financement, dont la couverture se traduit par une augmentation de la dette de l'État.

Couverture du besoin de financement et évolution de la dette
(hors suppléments d'indexation)

Situation fin année N-1

Évolution année N

Situation fin année N

Déficit à financer,
y compris charge de la dette

(A)

Besoin
de financement

(A+B)

Ressources de financement

(C+D+E)

Ressources consacrées au désendettement

(C)

Ressources de trésorerie

(D)

Nouveaux emprunts émis

(E)

Accroissement de la dette

Dette totale

Dette arrivant à échéance en N à refinancer

(B)

Dette totale

(E+F)

Dette continuant à courir
(échéances N+1, N+2,..., N+x)

(F)

Source : commission des finances du Sénat

B. UNE CHARGE DE LA DETTE ANORMALEMENT BASSE EN RAISON DE TAUX D'INTÉRÊT TRÈS FAIBLES

Les crédits du programme 117 s'élèvent à 44,34 milliards d'euros en 2015, soit 43,4 milliards d'euros au titre de la charge de la dette négociable et non négociable (action 1) et 0,94 milliard d'euros au titre des charges de trésorerie (action 3). L'ensemble des crédits sont situés en dehors du périmètre de la norme étroite d'évolution des dépenses (norme « zéro valeur »).

En tenant compte des excédents dégagés par les contrats d'échange de taux d'intérêt (swaps) retracés à la deuxième section du compte de commerce « Gestion de la dette et de la trésorerie de l'État », soit 0,14 milliard d'euros en 2015, la charge nette de la dette devrait s'établir à 44,2 milliards d'euros. Elle enregistrait ainsi une baisse de 536 millions d'euros, soit 1,2 %, par rapport au montant prévu pour 2014 par la loi 2014-891 du 8 août 2014 de finances rectificative pour 2014.

Charge de la dette

(en millions d'euros)

2011

2012

2013

2014

2014

2015

Exécution

Exécution

Exécution

LFI

LFR (1)

PLF

Charge de la dette (avant swaps)

46 256

46 303

44 886

46 654

44 854

44 337

Gain net des opérations de swaps

322

307

208

122

122

141

Charge nette de la dette (après swaps)

45 934

45 996

44 678

46 532

44 732

44 196

Source : projet annuel de performances pour 2015

L'évolution de la charge de la dette a ainsi été nettement moins dynamique que celle de l'encours de la dette négociable , comme le montre le graphique ci-après.

Évolution comparée 2008-2014
de la charge de la dette et de l'encours de la dette (valeur actualisée)

(en milliards d'euros)

Échelle de gauche : encours de la dette. Échelle de droite : charge de la dette

Source : commission des finances du Sénat

1. La charge de la dette négociable et non négociable

La baisse des taux d'intérêt permet à l'État de se refinancer à moindre coût : les titres remboursés, par anticipation ou à échéance, le sont par l'émission de nouveaux titres de dette à de meilleures conditions.

La faiblesse de l'inflation maintient les provisions pour indexation du capital des titres indexés à un niveau faible.

Charge de la dette (hors trésorerie)

(en millions d'euros)

2011

2012

2013

2014

2014

2015

Exécution

Exécution

Exécution

LFI

LFR

PLF

Charge de la dette (hors trésorerie)

45 782

45 423

43 977

45 740

43 940

43 401

OAT et BTAN

43 891

44 977

43 621

44 507

43 207

42 872

Charge nette d'intérêts *

39 924

41 339

41 849

41 666

41 366

40 997

Provision pour indexation du capital des titres indexés

3 967

3 638

1 772

2 841

1 841

1 875

BTF - Intérêts versés

1 611

206

158

1 127

627

427

Dettes reprises (charge nette)

265

231

180

85

85

82

Frais et commissions de gestion de la dette **

14

9

17

20

20

20

Dette non négociable

1

1

1

1

1

-

* intérêts versés moins recettes de coupons courus à l'émission

** montant global, y compris ceux afférents à la trésorerie

Source : projet annuel de performances pour 2015

Il faut toutefois souligner que l'on observe un écart important entre, d'une part, les prévisions de taux associées à la loi de finances pour 2014 , et, d'autre part, les taux effectivement constatés en 2013 et l'estimation pour 2014 mentionnés dans le projet de loi de finances pour 2015 .

Comparaison des hypothèses
de taux du PLF 2014 et du PLF 2015

Taux à l'émission des BTF à 3 mois (moyenne annuelle)

Taux à l'émission des OAT à 10 ans (moyenne annuelle)

PLF 2014

PLF 2015

PLF 2014

PLF 2015

2013

0,05 %

0,04 %

2,3 %

2,23 %

2014

0,3 %

0,08 %

3,3 %

2,0 %

2015

-

0,05 %

-

2,2 %

Source : commission des finances du Sénat

Le décalage entre les prévisions et l'évolution réelle des taux a conduit à la révision à la baisse de 1,8 milliard d'euros de la charge de la dette par la loi de finances rectificative pour 2014.

Selon les indications du projet annuel de performances pour 2015, il faut s'attendre à ce que la charge de la dette réellement constatée en 2014 se révèle encore inférieure (environ 42,3 milliards d'euros).

Par rapport à cette dernière estimation, la charge de la dette prévue par le projet de loi de finances pour 2015 s'inscrirait donc en hausse de 1,1 milliard d'euros, en raison des scénarios de taux et d'inflation retenus :

- pour les taux à court terme, « sous l'hypothèse d'un maintien jusqu'à la fin de 2015 des taux directeurs de la Banque Centrale Européenne à leur niveau actuel (0,05 % pour le taux de refinancement depuis la décision du 4 septembre 2014), il est supposé que le taux des BTF à 3 mois (ressorti à -5 points de base lors de l'adjudication du 8 septembre) resterait très bas tout au long de 2015, à un niveau proche du taux de refinancement. Au-delà, il est fait l'hypothèse que ces taux directeurs seraient progressivement relevés, en lien avec le retour de la croissance et avec une inflation se rapprochant de l'objectif de la Banque Centrale Européenne, ce qui tirerait à la hausse le taux des BTF à 6 mois et à 12 mois dès 2015 » ;

- pour les taux à moyen et long terme, « après le point bas atteint début septembre (le taux à l'émission de l'OAT de référence à 10 ans est ressorti à 1,32 % seulement lors de l'adjudication du 4 septembre), le scénario retenu pour la fin de l'année et l'an prochain table sur une remontée progressive des taux (le 10 ans français passerait à 1,9 % fin 2014 et progresserait de 50 points de base en 2015). Cette prévision tient notamment compte d'une possible remontée rapide des taux longs américains qui entraînerait dans leur sillage les taux européens, surtout si la zone euro apparaît moins attractive économiquement pour les investisseurs » ;

- s'agissant de l'inflation, « l'estimation, pour 2015, de la provision pour charge d'indexation du capital des titres indexés s'appuie sur les prévisions d'inflation retenues pour la construction du budget 2015 (+0,9 % en moyenne annuelle pour la France et + 1,1 % pour la zone euro). En pratique, du fait du mode de construction des références d'inflation utilisées pour le calcul de cette provision, la charge budgétaire prévue pour 2015 repose sur l'évolution anticipée des prix entre mai 2014 et mai 2015, soit + 0,8 % pour la France et + 1,0 % pour la zone euro ».

À l'heure où votre rapporteur spécial écrit ce rapport, le taux de l'échéance constante à 10 ans (TEC 10) 3 ( * ) s'établit à 1,25 %.

Taux d'intérêt à court et long terme
selon le projet annuel de performances 2015

Taux à l'émission des BTF à 3 mois (moyenne annuelle)

Taux à l'émission des OAT à 10 ans (moyenne annuelle)

2003

2,22 %

4,17 %

2004

2,00 %

4,20 %

2005

2,06 %

3,48 %

2006

2,84 %

3,73 %

2007

3,87 %

4,23 %

2008

3,59 %

4,37 %

2009

0,62 %

3,69 %

2010

0,37 %

3,17 %

2011

0,70 %

3,38 %

2012

0,04 %

2,70 %

2013

0,04 %

2,23 %

2014 (estimation)

0,08 %

2,0 %

2015 (prévision)

0,05%

2,2 %

Source : projet annuel de performances pour 2015

2. La charge de trésorerie

Les crédits de l'action 3 « Trésorerie de l'État » du programme 117 enregistrent une faible hausse, passant de 914 millions d'euros en 2014 à 936 millions d'euros en 2015 (+ 22 millions d'euros) 4 ( * ) .

Cette charge nette de trésorerie correspond au solde, en recettes, du produit des placements de trésorerie et, en dépenses, de la rémunération des comptes des correspondants (qui ne sont pas tous rémunérés, comme les comptes « courants » des collectivités territoriales), des charges diverses, ainsi que de la rémunération des fonds non consommables destinés au financement des investissements d'avenir prévus par la loi n° 2010-237 de finances rectificative du 9 mars 2010.

Trésorerie de l'État et compte du Trésor

« La trésorerie de l'État est centralisée sur un compte unique qui retrace le solde de l'ensemble des mouvements financiers exécutés par environ 5 000 comptables publics dotés chacun d'un ou plusieurs comptes d'opérations. Au 31 décembre 2013, on dénombrait 6 942 comptes d'opération. Les mouvements afférents à ces comptes d'opérations sont centralisés en temps réel par la Banque de France, dans sa fonction de teneur du compte de l'État, sur un compte unique, dit «compte du Trésor».

En pratique, les mouvements financiers qui affectent le compte du Trésor correspondent aux opérations :

- du budget de l'État, qu'il s'agisse des recettes fiscales et parafiscales ou des dépenses de fonctionnement et d'investissement ;

- des correspondants du Trésor, c'est-à-dire des organismes qui sont tenus de déposer leurs fonds auprès de l'État ;

- de l'Agence France Trésor elle-même, au titre du financement de l'État à moyen et long terme et de la gestion de sa trésorerie (amortissement de la dette venant à maturité, paiements des intérêts, appels de marge, prêts, ...).

L'AFT veille à ce que la situation de trésorerie de l'État rende systématiquement possible le dénouement des opérations financières qui viennent s'imputer sur le compte du Trésor, dans des conditions de sécurité maximale. À cet effet, l'AFT suit en temps réel l'exécution des flux de recettes et de dépenses sur le compte unique du Trésor à la Banque de France. En 2013, ces flux de trésorerie ont atteint 41,7 milliards d'euros en moyenne journalière. »

Source : AFT

Le graphique qui suit montre l'évolution, sous l'axe des abscisses, des recettes de trésorerie et, au-dessus de cet axe, des charges brutes de trésorerie. La courbe représente la charge de trésorerie nette résultant de la différence entre charges brutes et recettes.

Évolution de la charge de trésorerie nette

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat

S'agissant des recettes de trésorerie, celles-ci resteraient faibles en 2015 en raison du niveau toujours bas des taux de court terme et devraient s'établir à 12 millions d'euros.

S'agissant des charges, le graphique illustre le poids de la rémunération des fonds non consommables destinés au financement des investissements d'avenir , dont le taux a été fixé une fois pour toutes et ne suit pas l'évolution des conditions de marché . En exécution, cette rémunération est passée de 165 millions d'euros en 2010 à 645 millions d'euros en 2012. La rémunération correspondant aux fonds non consommable du premier programme d'investissements d'avenir (PIA) a atteint son « rythme de croisière » en 2013 à 667 millions d'euros. S'y ajoute, à partir de 2014, la rémunération des fonds supplémentaires prévus par le second PIA, soit 80 millions d'euros en 2015. Au total, la rémunération des fonds des deux PIA devrait s'élever à 751 millions d'euros en 2015 .

Le coût de la rémunération des dépôts des correspondants est en baisse de 105 millions d'euros (de 278 millions d'euros dans la loi de finances initiale pour 2014 à 173 millions d'euros dans le projet de loi de finances pour 2015).

C. LA « BOMBE À RETARDEMENT » DE LA DETTE

1. La hausse continue de la dette sous l'effet des déficits budgétaires successifs

L'encours nominal de la dette négociable de l'Etat devrait augmenter de 71 milliards d'euros entre 2014 et 2015 , correspondant au plafond de la variation de la dette à moyen et long terme 5 ( * ) (70,9 milliards d'euros) et à l'évolution du coût d'indexation (100 millions d'euros), tandis que la dette à court terme resterait stable. Cet encours passera de 1 531,8 milliards d'euros fin 2013 à 1 602,8 milliards d'euros fin 2014, soit une augmentation de 4,6 %.

Évolution de l'encours de la dette négociable

(en milliards d'euros)

encours

fin
2009

fin
2010

fin
2011

fin
2012

fin
2013

fin
2014
(prévision)

fin
2015
(prévision)

Ensemble de la dette - valeur nominale

1 133,5

1 212,3

1 293,9

1 365,5

1 437,6

1 511,0

1 581,9

OAT & BTAN

919,4

1 025,2

1 116,1

1 198,9

1 263,8

1 333,0

1 403,9

BTF

214,1

187,1

177,8

166,6

173,8

178,0

178,0

Supplément d'indexation à la date considérée

14,5

16,7

19,1

20,7

20,2

20,8

20,9

Ensemble de la dette - valeur actualisée (1)

1 148,0

1 229,0

1 313,0

1 386,2

1 457,2

1 531,8

1 602,8

variation d'une année à l'autre

+131,4

+81,0

+84,0

+73,2

+71,0

+74,6

+71,0

Source : réponses au questionnaire budgétaire

(1) Nominal pour les titres à taux fixe ; nominal + supplément d'indexation à la date considérée pour les titres indexés

À la fin août 2014, l'encours de dette négociable de l'État s'élève à 1 524 milliards d'euros en valeur actualisée. Ces données confirment par ailleurs que la part de l'endettement à court terme continue à refluer. Après avoir atteint un pic fin 2009 (18,6 % de l'encours total), les bons du Trésor à taux fixe devraient représenter 11,25 % du stock de dette en valeur nominale à fin 2015 (178 milliards d'euros).

La progression de l'encours de la dette nominale ralentit par rapport aux années de crise 2008 et 2009 : elle s'élève à 5,1 % en 2014, 5,3 % entre 2012 et 2013, 5,6 % entre 2011 et 2012, 6,8 % entre 2010 et 2011 et 7,1 % entre 2009 et 2010.

Elle reste toutefois beaucoup trop élevée . Le Gouvernement développe en effet une stratégie de réduction très lente des déficits publics. L'objectif est de protéger la croissance en mettant à profit le niveau extrêmement bas des taux d'intérêt qui rend la dette publique peu pénalisante.

Cette stratégie est fondée sur une double illusion .

Premièrement, le maintien de déficit élevés, loin de protéger la croissance, déprime la demande privée et inhibe ainsi le reprise économique . En effet, face à ces déficits, les agents économiques attendent une hausse des impôts et une baisse des transferts publics dans le futur (principe d'équivalence ricardienne), donc dépensent moins dès aujourd'hui : on observe historiquement une nette corrélation entre creusement des déficits, hausse de l'épargne des ménages et baisse de l'investissement des entreprises. Au contraire, les exemples étrangers démontrent que la réduction des dépenses publiques est favorable à la croissance.

Deuxièmement, les taux d'intérêt bas ne sont pas un acquis définitif . Ils sont susceptibles de remonter brutalement si les investisseurs achèvent de se convaincre de l'inefficacité de la politique économique du Gouvernement et du caractère non soutenable de sa politique budgétaire. La politique de roulement d'une dette à maturité courte ou moyenne expose particulièrement à ce risque, dont la réalisation aurait un impact majeur sur le solde budgétaire de l'État .

2. Les conséquences potentiellement désastreuses d'une inévitable remontée des taux d'intérêt

Une remontée durable des taux d'intérêt constitue un facteur d'aggravation de la charge de la dette. Le projet annuel de performances présente une simulation d'un choc de 1 % (par rapport au scénario de référence) sur l'ensemble de la courbe à compter de 2015, présentée ci-dessous 6 ( * ) .

Conséquences d'un choc de 1 % sur la courbe des taux d'intérêts

(en milliards d'euros)

Source : projet annuel de performances pour 2015

Comme expliqué précédemment, la propagation du choc au stock de dette est d'autant plus rapide que le rythme de refinancement est élevé. Or, à date du 31 août 2014, 30 % de la dette négociable de l'État présentait une échéance à moins de deux ans (23 % entre deux ans et cinq ans et 47 % à plus de cinq ans).

Comme le relève la rapporteure générale Valérie Rabault dans son rapport sur le projet de loi de finances rectificative pour 2014, « la seule dégradation des conditions de financement du déficit et de la charge de la dette, qui actuellement bénéficient de taux d'intérêt historiquement bas, serait à très court terme insurmontable ».

Le scénario de remontée progressive des taux de long terme retenu par le présent projet de loi de finances prévoit un retour concomitant à une croissance plus soutenue. Dans cette hypothèse, l'impact positif sur le déficit budgétaire d'une croissance plus élevée peut venir compenser la hausse de la charge de la dette résultant de l'augmentation des taux d'intérêt.

Une hausse des taux sans reprise économique serait beaucoup moins soutenable. Cela pourrait être le cas dans deux hypothèses :

- celle d'un choc inflationniste non anticipé , comme lors des chocs pétroliers des années 1970-1980 ou lors de la forte hausse des prix des matières premières en 2007-2008 ;

- celle d'une forte augmentation de la prime de risque de la France , dans le cadre d'une crise de défiance des marchés financiers . Lorsque les investisseurs n'ont plus confiance en la capacité d'un pays à rembourser sa dette, alors ils demandent des taux d'intérêt plus élevés en contrepartie du risque de défaut. Ceci augmente la charge d'intérêt de la dette du pays concerné, et donc son déficit public. Un cercle vicieux, dont il est difficile de sortir, s'installe.

Cette dernière hypothèse est de plus en plus envisageable à mesure que le Gouvernement fait la preuve de son incapacité à engager les réformes nécessaires au redressement des finances publiques et de l'économie de notre pays . L'érosion de la crédibilité de la France a d'ailleurs commencé à se traduire dans les analyses des agences de notation. L'agence de notation Fitch a ainsi annoncé, le 14 octobre 2014, avoir placé la note « AA + » de la France sous surveillance négative. Cette décision intervient quelques jours après celle de Standard & Poor's qui a confirmé la note « AA » de la ' France tout en abaissant sa perspective, de stable à négative. L'agence Moody's avait adopté la même position en septembre dernier.

Le risque est également renforcé par la confirmation qu'apporte chaque jour la situation de la France au fait, établi par les études économétriques, qu' une dette publique élevée conduit à une croissance faible . Cette croissance faible conduit elle-même à une hausse plus rapide de l'endettement public si les mesures d'ajustement nécessaires ne sont pas rapidement prises. S'enclenche alors également un cercle vicieux conduisant potentiellement au défaut .

Il faut par ailleurs souligner qu'une reprise de l'inflation aurait un impact important sur la charge de la dette du fait de l'indexation de certains titres de dette. La provision pour charge d'indexation du capital des titres indexés est par construction très sensible au risque inflationniste. Un point d'inflation en plus représente 1,8 milliard d'euros de provision supplémentaire. Toutefois, cette provision constatant une charge payable dans le futur, l'impact budgétaire de cette hausse ne se traduirait pas immédiatement en trésorerie.

3. L'effet « boule de neige » et la nécessité de dégager un excédent primaire

L'État est en déficit de 31,4 milliards d'euros avant même de payer les intérêts de sa dette : ceux-ci sont donc financés par emprunt . Cela conduit à une progression autoentretenue de la dette de l'État, alimentée chaque année par la charge des intérêts.

Cette situation est d'autant plus inquiétante que le taux de croissance du produit intérieur brut (PIB) français devrait ressortir à 0,4% en 2014, selon les dernières prévisions de l'INSEE, soit un niveau inférieur au taux d'intérêt de la dette publique française. Cette situation conduit à l'enclenchement d'un « effet boule de neige » qui augmente mécaniquement le ratio entre endettement public et PIB.

Le rétablissement d'un excédent primaire, de l'État comme de l'ensemble des administrations publiques, est indispensable pour enrayer la mécanique d'accumulation de la dette et réduire le risque de refinancement. Il faut pour cela que l'État se recentre sur ses missions premières et réduise drastiquement les transferts directs ou indirects aux ménages et aux entreprises , y compris lorsqu'ils prennent la forme de dépenses fiscales.

II. LES AUTRES PROGRAMMES DE LA MISSION

A. LE PROGRAMME 114 « APPELS EN GARANTIE DE L'ETAT » : DES CRÉDITS EN LÉGER RECUL

Le projet de loi de finances pour 2015 présenté par le Gouvernement prévoyait 205 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et en crédits de paiement (CP) au titre du programme 114 « Appels en garantie de l'État », soit une baisse de 1,6 % par rapport à la loi de finances initiale 2014. Ce recul a été accentué par l'Assemblée nationale qui a adopté en seconde délibération un amendement du Gouvernement minorant de 8 millions euros les autorisations d'engagement et les crédits de paiement de ce programme, « en raison d'un ajustement à la baisse des prévisions de dépenses » et « pour garantir le respect de la norme de dépense en valeur de l'État ».

Conformément à l'article 34 de la loi organique relative aux lois de finances, tout nouveau régime de garantie de l'État doit être autorisé par une loi de finances. Les garanties ainsi octroyées constituent des engagements hors bilan retracés en annexe du compte général de l'État.

Elles n'entraînent une dépense budgétaire pour l'État qu'en cas de réalisation du risque garanti.

Cette réalisation présentant un caractère imprévisible, les crédits inscrits au programme 114 sont évaluatifs au sens de l'article 10 de la loi organique relative aux lois de finances.

La dépense budgétaire se concentre à près de 70 % sur les dispositifs de garantie mis en oeuvre par la Compagnie française pour le commerce extérieur ( COFACE) .

B. LE PROGRAMME 145 « ÉPARGNE » : DES CRÉDITS EN BAISSE SENSIBLE DU FAIT DU RECUL DES PRIMES D'ÉPARGNE-LOGEMENT

Le programme 145 comporte deux actions.

L'action 1 concerne les primes d'épargne-logement versées aux titulaires de comptes d'épargne-logement (CEL) et de plan d'épargne-logement (PEL), les frais au Crédit foncier de France (CFF) pour la gestion des primes et les frais à la Société de gestion du fonds de garantie à la propriété (SGFGAS) pour le contrôle des opérations d'épargne-logement. Le projet annuel de performance pour 2015 indique qu'une « procédure nouvelle a été mise en place en 2013  pour engager l'intégralité des crédits disponibles en début d'exercice, afin de faciliter la gestion infra-annuelle  et d'éviter d'avoir un solde débiteur de l'État vis-à-vis du CFF. L'État verse en fonction de sa position vis-à-vis de l'opérateur et des dépenses prévisionnelles la provision pour le paiement des primes du mois suivant ».

L'action 2 retrace d'une part les dépenses d'aide de l'État au secteur aidé, dispositif ancien de prêts à l'accession sociale distribués et gérés par le Crédit Foncier et d'autre part le remboursement des frais de la SGFGAS pour le contrôle des prêts conventionnés.

L'essentiel du programme 145 concerne la dépense de primes d'épargne-logement qui représente plus de 99 % du montant du programme.

Le montant des crédits du programme 145 baisse de 16 % entre 2014 et 2015, sous l'effet essentiellement de la baisse des dépenses de l'action 1 relatives aux primes d'épargne-logement (- 16 %).

La baisse de la dépense des primes d'épargne-logement peut résulter de plusieurs facteurs, la préférence pour l'épargne, l'évolution du marché de l'immobilier, les taux d'intérêt des prêts PEL qui sont supérieurs aux taux des prêts libres, l'impact de la réforme de l'épargne-logement de mars 2011 qui impose la souscription d'un prêt d'épargne-logement destiné au financement d'une résidence principale de 5 000 euros minimum pour bénéficier du versement de la prime.

C. LE PROGRAMME 168 « MAJORATION DE RENTES » : UNE RELATIVE STABILITÉ POUR UN DISPOSITIF GÉRÉ EN EXTINCTION

Les crédits du programme pour 2015 sont consacrés au financement du dispositif des majorations légales de rentes viagères 7 ( * ) . Ce dispositif ayant été fermé, les droits acquis disparaissent avec la diminution progressive de la population des crédirentiers. Comme indiqué en réponse au questionnaire budgétaire de votre rapporteur, la relative stabilité des crédits, qui s'établissent à 168 millions d'euros, contre environ 169 millions d'euros pour la prévision d'exécution pour 2014, s'explique par le fait que « les rentes en cours de constitution disposent de droits latents qui viennent progressivement contribuer à la charge de remboursement au fur et à mesure de l'arrivée en service de la rente ».

D. LE PROGRAMME 336 « DOTATION EN CAPITAL DU MÉCANISME EUROPÉEN DE STABILITÉ » : PAS DE DÉPENSES PRÉVUES EN 2015

Le programme 336 « Dotation en capital du Mécanisme européen de stabilité » retrace l'engagement de la dotation en capital apportée par la France, à la suite de l'adoption de la loi 2012-323 du 7 mars 2012 autorisant la ratification du traité instituant le Mécanisme européen de stabilité (MES).

Le MES a pris le relais du Fonds européen de stabilité financière (FESF) , mis en place en juin 2010 pour trois ans et ayant une capacité d'intervention financière de 440 milliards d'euros. L e MES ne repose pas seulement sur des garanties des États, mais sur un capital effectivement constitué.

La souscription de la France au capital MES s'est élevée au total à 16,3 milliards d'euros et a été versée en cinq tranches de 3,3 milliards d'euros chacune. La dernière tranche a été versée le 29 avril 2014.

Le présent projet de loi de finances ne prévoit pas de dépense pour l'exercice 2015.

E. LE PROGRAMME 338 « AUGMENTATION DE CAPITAL DE LA BANQUE EUROPÉENNE D'INVESTISSEMENT » : PAS DE DÉPENSES PRÉVUES EN 2015

La Banque européenne d'investissement (BEI) est la banque de prêts à long terme de l'Union européenne. Elle a été créée en 1958 par le Traité de Rome.

Aucune augmentation de capital n'étant envisagée à ce jour, il n'est pas inscrit de crédits dans le projet de loi de finances pour 2015.

F. LE PROGRAMME 344 « FONDS DE SOUTIEN RELATIF AUX PRÊTS ET CONTRATS FINANCIERS STRUCTURÉS À RISQUE »

Le programme 344 « Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers structurés à risque » a été créé au sein de la mission « Engagements financiers de l'État ». Le projet de loi de finances pour 2015 prévoit une ouverture de 1,427 milliard d'euros en autorisations de programme et de 50 millions d'euros en crédits de paiement. À ce programme est rattaché un fonds de concours alimenté à hauteur de 11,5 millions d'euros par an durant quinze ans à compter de 2014.

Le financement du dispositif était, en loi de finances initiale pour 2014, assuré par le programme 134 « Développement des entreprises et du tourisme » de la mission « Économie ».

SECONDE PARTIE - LES COMPTES SPÉCIAUX

I. LE COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS « AVANCES À DIVERS SERVICES DE L'ÉTAT OU ORGANISMES GÉRANT DES SERVICES PUBLICS »

En application de l'article 24 de la LOLF 8 ( * ) , le compte « Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics » retrace les avances accordées par le Trésor aux organismes susceptibles d'en recevoir. Ces avances, qui constituent les dépenses du compte, sont de trois ordres :

1) les avances consenties à des services de l'État (budgets annexes, services autonomes de l'État, services nationalisés) ou à des organismes distincts de l'État gérant des services publics (établissements publics nationaux, services concédés, sociétés d'économie mixte, organismes divers de caractère social). Ces avances visent à répondre à des situations d'urgence , pour assurer la continuité de l'action publique ou mettre en oeuvre une mesure de façon accélérée, ou à couvrir provisoirement un besoin de trésorerie imprévu. Elles sont retracées sur les programmes 823 « Avances à des organismes distincts de l'État et gérant des services publics » et 824 « Avances à des services de l'État » ;

2) les avances octroyées à l'Agence de services et de paiement (ASP), au titre du préfinancement des aides communautaires de la politique agricole commune (PAC), et imputée Ces avances sont imputées sur le programme 821 « Avances à l'Agence de services et de paiement, au titre du préfinancement des aides communautaires de la politique agricole commune » ;

3) les avances à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) au titre de l'indemnisation des victimes du Benfluorex 9 ( * ) ( programme 825). Ces avances, qui permettent à l'ONIAM d'honorer les premiers dossiers d'indemnisation, constituent une solution provisoire dans l'attente de ressources pérennes de l'ONIAM , parmi lesquelles des produits tirés des actions subrogatoires.

Chacun de ces programmes se trouve sous la responsabilité du ministre de l'économie et des finances et, au plan administratif, de celle du directeur général du Trésor. La mise en oeuvre en est assurée par l'AFT.

Les recettes du compte sont constituées des remboursements en capital des avances consenties.

Évolution des recettes et des dépenses entre 2014 et 2015

(en euros)

LFI 2014

PLF 2015

Variation

euros

%

Recettes

7 548 428 293

7 532 659 664

- 15 768 629

0,0%

01 - Remboursement des avances octroyées au titre du préfinancement des aides de la PAC

7 200 000 000

7 200 000 000

0

0 %

03 - Remboursement des avances octroyées à des organismes gérant des services publics

145 583 108

107 548 777

- 38 034 331

- 26,1%

04 - Remboursement des avances octroyées à des services de l'État

202 845 185

225 110 887

22 265 702

11%

05 - Remboursement des avances octroyées au titre de l'indemnisation des victimes du Benfluorex

0

0

0

0%

Dépenses

7 542 180 093

7 438 856 329

- 103 323 764

- 1,4%

821 - Avances à l'ASP

7 200 000 000

7 200 000 000

0

0 %

823 - Avances à des organismes distincts de l'État

59 500 000

56 000 000

- 3 500 000

- 5,9%

824 - Avances à des services de l'État

267 680 093

167 856 329

- 99 823 764

- 37,3%

825 - Avance à l'ONIAM au titre de l'indemnisation des victimes du Benfluorex

15 000 000

15 000 000

0

0 %

Solde

-19 776 394

93 803 335

113 579 729

n.s.

n.s. : non significatif

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Notre collègue Jean-Claude Frécon, dans son rapport d'information 10 ( * ) fait au nom de votre commission des finances, a défini deux recommandations afin d'améliorer la procédure d'octroi et de remboursement des avances du Trésor.

La première recommandation porte sur la définition d'une doctrine d'octroi des avances . Selon les indications données à votre rapporteur spécial, la rédaction d'un texte de doctrine est actuellement en cours, entre l'AFT et la direction du budget.

La seconde recommandation porte sur l'amélioration du suivi de la gestion des avances du Trésor en renforçant le rôle de l'AFT, agissant au nom du directeur général du Trésor comme responsable des programmes 821, 823, 824 et 825. Actuellement, l'AFT participe à l'instruction de toute nouvelle demande d'avance mais n'est pas consultée en cas de modification dans l'exécution de l'avance, notamment en cas de modification de l'échéancier de remboursement. L'AFT a indiqué à votre rapporteur avoir « pris note de la recommandation qui est soumise à discussion avec les autres administrations, le cas échéant pour établir une procédure d'avis préalable de l'AFT en cas de remise en cause de l'échéancier initialement convenu ».

II. LE COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS « ACCORDS MONÉTAIRES INTERNATIONAUX »

Eu égard aux niveaux importants de réserves détenues par les banques centrales de la zone franc et à la très faible probabilité d'appel en garantie de l'État qui en résulte, cette mission n'est dotée d'aucun crédit pour 2015, comme les années précédentes . Elle ne fait d'ailleurs pas l'objet d'un projet annuel de performances annexé au présent projet de loi de finances.

III. LE COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE « PARTICIPATION DE LA FRANCE AU DÉSENDETTEMENT DE LA GRÈCE »

Créé par la loi du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012 11 ( * ) , le compte d'affectation spéciale (CAS) « Participation de la France au désendettement de la Grèce » traduit dans le droit national les engagements pris par la France dans le cadre des réunions des ministres des finances de la zone euro (Eurogroupe) du 20 février 2012 et du 26 novembre 2012 .

Tout d'abord, lors de la réunion du 20 février 2012, la France s'est engagée, aux côtés des autres États membres de la zone euro, à reverser à la Grèce les revenus perçus et à percevoir par la Banque de France entre 2012 et 2020 sur les obligations grecques que celle-ci détient en compte propre . Ensuite, l'accord du 26 novembre 2012 prévoit que les banques centrales nationales de la zone euro doivent reverser aux États membres les revenus qu'elles reçoivent des obligations grecques détenues au titre du Programme pour les marchés de titres (PMT), ou Security Market Programme (SMP), qui sont ensuite restitués à la Grèce . Ces deux initiatives s'inscrivent parmi les différentes mesures tendant à réduire la dette publique grecque et à rétablir la soutenabilité de celle-ci ; le taux d'endettement de la Grèce a, en effet, crû continument, excédant 175 % du PIB en 2013, notamment en raison du recul de l'activité économique à laquelle le pays est confronté et du poids de la charge de la dette, supérieure à 4 % du PIB en 2013-2014.

Programme pour les marchés de titre (PMT)

En mai 2010, la Banque centrale européenne (BCE) a lancé le programme pour les marchés de titres (PMT), ou Securities Market Programme (SMP), qui permet aux banques centrales de la zone euro d' acheter de la dette publique sur les marchés secondaires , et ce afin d'empêcher une hausse excessive des taux d'intérêt des États membres touchés par la crise de la dette publique dans la zone euro. Entre mai 2010 et mars 2012, les banques centrales nationales (BCN) de l'Eurosystème, qui sont responsables de l'exécution des opérations de politique monétaire, ont acheté près de 220 milliards d'euros d'obligations grecques, irlandaises, portugaises, italiennes et espagnoles dans le cadre du PMT 12 ( * ) .

À compter de septembre 2012, le PMT a été remplacé par le programme des opérations monétaires sur titres (OMT), ou Outright monetary transactions , qui consisterait également, s'il devait être utilisé, en une intervention sur les marchés secondaires. Il a été précisé par la BCE qu'elle ne fixait aucune limite à ses interventions et celles-ci seraient conditionnées à l'acceptation d'un plan d'assainissement des finances publiques par les États concernés.

Aussi les transferts financiers opérés au profit de la Grèce dans ce cadre sont-ils inscrits au sein du programme 795 du présent compte d'affectation spéciale, dont le responsable est le directeur général du Trésor.

Le choix de recourir à un compte d'affectation spéciale (CAS) pour faire transiter ces flux connaît deux justifications 13 ( * ) . Tout d'abord, il convient de rappeler l'interdiction du financement monétaire des États membres de la zone euro par les banques centrales nationales prévue par l'article 123 du traité relatif au fonctionnement de l'Union européenne (TFUE). Ensuite, il était nécessaire d' isoler ces opérations spécifiques au sein du budget de l'État .

Ainsi, le compte d'affectation spéciale « Participation de la France au désendettement de la Grèce » retrace :

- en recettes , le produit de la contribution spéciale versée par la Banque de France au titre de la restitution des revenus qu'elle a perçus sur les titres grecs. Celui-ci s'élève à 399 millions d'euros en 2015 ;

- en dépenses , d'une part, le versement de la France à la Grèce au titre de la restitution à cet État des revenus précités (cf. programme 795) et, d'autre part, les rétrocessions de trop-perçus à la Banque de France (cf. programme 796).

Récapitulation des crédits par programme et action

Autorisations d'engagement (AE)

Crédits de paiement
(CP)

Programme/Action

LFI pour 2014

PLF pour 2015

LFI pour 2014

PLF pour 2015

795 - Versement de la France à la Grèce au titre de la restitution à cet État des revenus perçus sur les titres grecs

399,0

309,0

500,8

432,5

01 - Versement de la France à la Grèce au titre de la restitution à cet État des revenus perçus par la Banque de France sur les titres grecs détenus en compte propre

101,8

123,5

02 - Versement de la France à la Grèce au titre de la restitution à cet État des revenus perçus par la Banque de France sur les titres grecs détenus au titre du portefeuille dit SMP

399,0

309,0

399,0

309,0

795 - Rétrocession de trop-perçus à la Banque de France

0

0

0

0

Source : projet annuel de performances pour 2015 du compte d'affectation spéciale « Participation de la France au désendettement de la Grèce »

A. LES VERSEMENTS DE LA FRANCE À LA GRÈCE

Le programme 795 comporte deux actions. L'action 01 concerne la mise en oeuvre de l'engagement pris par les États de la zone euro le 20 février 2012, soit le versement de la France à la Grèce au titre de la restitution à cet État des revenus perçus par la Banque de France sur les titres grecs détenus en compte propre . Le montant de ce transfert doit s'élever à 754,3 millions d'euros pour la période 2012-2020 14 ( * ) .

L'action 02 retrace les montants correspondant au versement de la France à la Grèce au titre de la restitution à cet État des revenus perçus par la Banque de France sur les titres grecs détenus au titre du portefeuille dit SMP . Au total, les montants reversés sur la période 2013-2025 doivent s'élever à 2,06 milliards d'euros 15 ( * ) .

Pour l'exercice 2015, sont demandés, dans le cadre du présent programme, 309 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 432,5 millions d'euros en crédits de paiement (CP).

Il convient de préciser que la Banque de France a versé à l'État l'intégralité de la somme, soit 754,3 millions d'euros, devant être transférée à la Grèce au titre de la restitution à cet État des revenus perçus sur les titres grecs détenus en compte propre . Ainsi, 198,7 millions d'euros ont été versés par la banque centrale nationale au présent compte d'affectation spéciale (CAS) en 2012 et 555,6 millions d'euros en 2013 ; par suite, depuis 2014, seul le programme dit SMP donne lieu à la perception de recettes.

Pour autant, cette quotité n'a pas été totalement reversée à la Grèce à ce jour . Un premier décaissement de 198,7 millions d'euros est intervenu au profit de la Grèce en 2012, soit la somme rétrocédée par la Banque de France cette année-là. En 2013, le versement de 555,6 millions de la Banque de France a permis l'ouverture d'AE d'un même montant, couverts par des CP à hauteur de 149 millions d'euros en 2013 et de 101,8 millions d'euros en 2014. À la fin de l'année 2014 resteront donc 406,6 millions d'euros à restituer à la Grèce au titre des revenus perçus par la Banque de France sur les titres grecs détenus en compte propre . Aussi, dans le projet de loi de finances pour 2015, il est prévu l'ouverture de 123,5 millions d'euros en CP et les décaissements futurs apparaissent dans le tableau ci-après.

Chronique des versements de la France à la Grèce au titre de la restitution à cet État des revenus perçus par la Banque de France sur les titres grecs détenus en compte propre

Source : projet annuel de performances pour 2015 du compte d'affectation spéciale « Participation de la France au désendettement de la Grèce »

L'étalement de ces versements effectifs jusqu'à 2020 en dépit de l'ouverture de 555,6 millions d'euros en AE en 2013 explique la différence des montant d'AE (399 millions d'euros) et de CP (432,5 millions d'euros) demandés dans le cadre du projet de loi de finances pour 2015 au titre du présent compte d'affectation spéciale .

En effet, les AE dont il est proposé l'ouverture en 2015, soit 399 millions, correspondent aux CP inscrits à l'action 02 du programme 795, qui seront consommés au titre du versement de la France à la France à la Grèce au titre de la restitution à cet État des revenus perçus par la Banque de France sur les titres grecs détenus au titre du portefeuille dit SMP 16 ( * ) . Dans le cadre de ce programme, ont déjà été versés par la France à la Grèce 450 millions d'euros en 2013 et 399 millions d'euros en 2014. Après 2015, 902 millions d'euros devront encore être rétrocédés à la Grèce selon la chronique figurant dans le tableau ci-après.

Chronique des versements de la France à la Grèce au titre de la restitution à cet État des revenus perçus par la Banque de France sur les titres grecs détenus au titre du portefeuille dit SMP

Source : projet annuel de performances pour 2015 du compte d'affectation spéciale « Participation de la France au désendettement de la Grèce »

Ainsi, un total de 432,5 millions d'euros doit être transféré à la Grèce par l'intermédiaire du programme 795 en 2015 . L'écart, en flux annuels, entre les recettes et les dépenses afférentes au présent compte d'affectation spéciale pour un montant de 123,5 millions d'euros s'explique par le versement par la Banque de France, en 2013, de l'intégralité des ressources devant abonder les versements de la France à la Grèce au titre de la restitution à celle-ci des revenus perçus par la banque centrale nationale sur les titres grecs détenus en compte propre. En tout état de cause, la rétrocession française doit contribuer à réduire le besoin de financement de l'État grec hauteur de 1,1 % en 2015 , la réduction cumulée de la dette grecque devant atteindre, cette même année, 4,3 %, ainsi que le montre le tableau ci-après.

Participation de la France au désendettement de la Grèce

Source : projet annuel de performances pour 2015 du compte d'affectation spéciale « Participation de la France au désendettement de la Grèce »

B. LES RÉTROCESSIONS DE TROP-PERÇUS À LA BANQUE DE FRANCE

Le programme 796 du présent compte d'affectation spéciale retrace les rétrocessions de trop-perçus à la Banque de France . Si ce programme n'a jamais retracé aucun flux depuis sa création en 2012, son existence n'en présente pas moins une grande importance dans son principe.

En effet, le plan de désendettement de la Grèce adopté en juillet 2011 et mis en oeuvre à compter de 2012 prévoit un certain nombre de conditionnalités en contrepartie de l'aide financière apportée à cet État. Aussi, dans le cas où les conditions d'exécution du plan de désendettement ne seraient plus réunies, il y aurait lieu de revoir les modalités selon lesquelles la France rétrocède à la Grèce les revenus perçus par la Banque de France sur les titres grecs détenus en compte propre ou au titre du portefeuille dit SMP . Ainsi que le rappelle le projet annuel de performances (PAP) associé au compte d'affectation spéciale, les conventions du 3 mai 2012 et du 26 juin 2013 entre l'État et la Banque de France prévoient que « le dispositif sera revu dans l'hypothèse d'une rupture par la Grèce des conditions contractuelles fixées par le plan, ou d'une restructuration des titres détenus par la Banque de France ou de l'annonce par le Fonds monétaire international et/ou de l'Union européenne de l'interruption de leur soutien financier en raison d'une rupture par la Grèce des conditions qui y sont attachées ».

Dès lors, le présent programme porterait, le cas échéant, la restitution à la Banque de France tout ou partie des sommes versées au présent compte d'affectation spéciale dans l'hypothèse d'une remise en cause du plan de désendettement de la Grèce .

LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

En seconde délibération, l'Assemblée nationale a adopté un amendement du Gouvernement minorant de 8 millions d'euros les autorisations d'engagement et les crédits de paiement du programme 114 « Appels en garantie de l'État », « en raison d'un ajustement à la baisse des prévisions de dépenses » et « pour garantir le respect de la norme de dépense en valeur de l'État ».

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le jeudi 30 octobre 2014, sous la présidence de Mme Michèle André, présidente, la commission a procédé à l'examen du rapport de M. Serge Dassault, rapporteur spécial, sur la mission « Engagements financiers de l'État », les comptes de concours financiers « Accords monétaires internationaux » et « Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics » et le compte d'affectation spéciale « Participation de la France au désendettement de la Grèce ».

M. Serge Dassault , rapporteur spécial . - Je vous ferai d'abord part de mes observations sur la situation des finances publiques, que je trouve alarmante, puis je développerai les solutions qui me semblent nécessaires pour retrouver des finances avec moins de déficits et moins de dettes.

Le Gouvernement prévoit pour 2015 une croissance de 1 %, alors que le président du Haut Conseil des finances publiques, Didier Migaud, indique dans son avis du 15 octobre dernier que cette prévision lui paraît optimiste. Il affirme qu'un tel niveau de croissance suppose « un redémarrage rapide et durable de l'activité que n'annoncent pas les derniers indicateurs conjoncturels ». D'une part, l'environnement international pourrait se révéler moins porteur, comme en attestent les dernières prévisions de croissance du commerce mondial de l'Organisation mondiale du commerce (OMC). D'autre part, la reprise de l'investissement productif pourrait être significativement retardée.

Il est anormal que les hypothèses de croissance présentées par le Gouvernement ne tiennent aucun compte de l'avis de Didier Migaud. Cela met en cause la crédibilité de ces prévisions. Le Gouvernement n'a même pas cherché à entrer en contact avec lui pour s'en expliquer. On se demande à quoi sert ce Haut Conseil si le Gouvernement ne tient pas compte de ses avis, pas plus d'ailleurs que de ceux de la Cour des comptes.

Il y a deux façons de présenter des prévisions : la plus dangereuse consiste à faire des prévisions optimistes pour donner confiance, au risque de graves échecs dans le cas où elles ne se réalisent pas ; la moins risquée consiste à faire des prévisions pessimistes ou à tout le moins prudentes, qui peuvent être meilleures que prévu, ce qui démontre la qualité de la gestion. C'est cette dernière méthode que pratiquent les entreprises.

Didier Migaud observe que tant que la France ne respectera pas ses engagements européens en termes de réduction de déficits, sa dette publique continuera à augmenter. Alors que l'Allemagne a présenté un budget en équilibre pour 2015 et prévoit de dégager un excédent record de 16,1 milliards d'euros, ce qui lui permet de commencer à rembourser sa dette, la France s'apprête à voter un nouveau budget déficitaire et il ne sera pas le dernier. Cet état de fait d'une France qui ne respecte pas ses engagements est de plus en plus inacceptable pour nos partenaires européens car il montre la légèreté de ses prévisions.

J'en viens au budget 2015 proprement dit. Notre besoin de financement atteindra 196,6 milliards d'euros. Ce montant correspond au déficit budgétaire, soit 75,7 milliards d'euros, et au refinancement de 119,5 milliards d'euros de dette arrivant à échéance en 2015. Le besoin en financement sera couvert par un emprunt de 188 milliards d'euros. Le solde sera financé par 4,1 milliards d'euros de disponibilité du Trésor et 4 milliards d'euros de recettes de cession de participations de l'État.

Nous emprunterons en 2015 environ 188 milliards d'euros : 113 milliards pour rembourser les échéances de notre dette et 75 milliards pour combler le déficit prévisionnel. On emprunte donc pour rembourser. C'est dramatique ; cela s'appelle de la cavalerie.

Notre dette ne commencera à être remboursée qu'avec un équilibre, voire un excédent budgétaire. Ce n'est pas demain la veille ! Les dépenses totales de l'État en 2015 seront en réalité de 491 milliards d'euros, dont 119 milliards d'euros pour financer le remboursement des emprunts venant à échéance en 2015, contre des recettes de 292 milliards d'euros. Nous dépensons presque deux tiers de plus que nous ne percevons de recettes. Nous vivons nettement au-dessus de nos moyens !

Cette situation alarmante de nos finances publiques a aujourd'hui toutes les raisons de perdurer. Les faibles économies proposées, loin d'être réalisées, les augmentations de dépenses qui se multiplient, notamment celle de la masse salariale des fonctionnaires, et l'absence de croissance malgré les annonces optimiste, feront croître notre dette inexorablement, sauf si le Gouvernement se décide à prendre les décisions qui s'imposent.

Tant que la France peut emprunter à des niveaux exceptionnellement bas - c'est la réponse toute faite du Gouvernement à chacune de nos remarques - le mal n'apparaît pas. Mais cela ne durera pas éternellement. Déjà le projet de loi de finances prévoit que le taux à 10 ans passera de 1,25 % actuellement à 1,9 % fin 2014 puis 2 % fin 2015. Un choc plus violent ne peut être exclu, tant les doutes des investisseurs et des agences de notation sur la situation économique et la politique de la France commencent à apparaître, Chaque point de taux d'intérêt supplémentaire représenterait un coût de 2,4 milliards d'euros la première année ; 5,3 milliards d'euros la deuxième ; 7,4 milliards d'euros la troisième. Notre charge de la dette augmentera considérablement et diminuera d'autant nos recettes fiscales. Nous courrons à la catastrophe ! La Commission européenne, les agences de notation et nos investisseurs risquent de ne plus nous faire confiance. Ces derniers refuseront nos emprunts ou les prendront à des taux exorbitants. C'est ce qui est arrivé à l'Argentine en 2002, à la Russie en 1998 ou encore à l'Islande en 2008 et ce sera la cessation de paiement et la faillite.

Comme l'a écrit plusieurs fois le premier président de la Cour des comptes, il faut tout faire pour réduire nos dépenses et nos impôts. Mais pour le Gouvernement, ce n'est pas à la Cour des comptes de gouverner la France, et il ignore ses excellentes propositions : à quoi sert dans ces conditions la Cour des comptes ?

Voilà pourquoi c'est la réduction des déficits qui doit être la priorité absolue du Gouvernement, et non la réforme territoriale, les rythmes scolaire, ou le mariage pour tous avec lesquels il nous amuse. Je vais vous faire maintenant quelques propositions.

M. Richard Yung . - Ah !

M. Serge Dassault , rapporteur spécial . - L'État devrait se doter de nouvelles règles de bonne gestion budgétaires : la règle d'or, qui obligerait tout Gouvernement à présenter des budgets équilibrés, proposée par Nicolas Sarkozy mais abandonnée à cause du refus des socialistes de la voter.

M. Serge Dassault , rapporteur spécial . - Préparer les budgets avec une croissance prévisionnelle voisine de 0 %, ne réservant que de bonnes surprises ; le plafonnement de la dette par la Constitution : sans limite, elle augmente de 80 milliards par an ! Ça va vite !

Éliminer drastiquement les crédits d'impôt et les exonérations de charges des entreprises et des contribuables.

Pour arrêter de fabriquer des fonctionnaires à vie, arrêter de titulariser - comme j'ai dû le faire à contrecoeur dans ma ville - tout le personnel des administrations et des collectivités territoriales et appliquer la règle du non remplacement d'un sur deux. Ce n'est pas compliqué ! L'embauche d'un fonctionnaire sur 60 ans - 40 années travaillées et 20 autres de retraite - représente plus de 1,5 million d'euros. Embaucher comme veut le faire le gouvernement 60 000 fonctionnaires dans l'éducation en cinq ans est une dépense d'au moins 90 milliards d'euros que l'on devra financer par l'emprunt, pendant soixante ans.

Mener une vraie politique de croissance en réduisant les impôts des entreprises et des entrepreneurs, les véritables créateurs d'emplois et de richesse, et en supprimant l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF), au lieu d'assujettir les dividendes aux charges sociales... Les investisseurs français partent et les étrangers ne viennent plus !

Flexibiliser l'emploi pour réduire le chômage, en rendant les licenciements automatiques en cas de baisse d'activité et en créant des emplois de mission, comme les vendangeurs ou dans le secteur du bâtiment. Il faudra supprimer les 35 heures qui paralysent notre économie et relever les seuils sociaux.

Il serait enfin judicieux de refonder notre fiscalité en transformant l'impôt progressif en impôt égalitaire, avec le même taux pour tous les revenus : la Flat Tax , comme la pratique la Russie à 13 %. Ainsi la contribution sociale généralisée (CSG) rapporte plus que l'impôt sur le revenu qui empoisonne tout le monde !

Mes observations rejoignent les analyses de la Commission européenne, du Haut Conseil des finances publiques et des organisations internationales. Ce ne sont pas des réformes de droite ou de gauche, ce sont des réformes de bon sens, pour l'intérêt de la France. Il est souvent dit que « la gauche a du coeur, mais pas de tête, et que la droite a de la tête, mais pas de coeur ».

M. Serge Dassault , rapporteur spécial . - Il faut avoir à la fois de la tête et du coeur, il faut à la fois travailler et distribuer pour sortir la France du marasme dans lequel elle est plongée.

M. Richard Yung . - Vous êtes donc du centre !

M. Serge Dassault , rapporteur spécial . - Je vous propose d'adopter les crédits de cette mission, car la France doit respecter ses engagements à l'égard de ses créanciers.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Partageant certaines de vos analyses, je crois aussi qu'il serait difficile de rejeter les crédits consacrés aux intérêts de la dette. Je suivrai donc notre rapporteur spécial.

La commission a décidé de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission « Engagements financiers de l'État ».

La commission a décidé de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits des comptes de concours financiers « Accords monétaires internationaux » et « Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics » ainsi que du compte d'affectation spéciale « Participations de la France au désendettement de la Grèce ».

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Réunie à nouveau le jeudi 20 novembre 2014, sous la présidence de Mme Michèle André, présidente, la commission a confirmé sa décision de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits de la mission et des comptes spéciaux.


* 1 Special report, recherche économique, 1 er octobre 2014, n° 129.

* 2 Les correspondants du Trésor sont les entités qui, par obligation législative, réglementaire ou par convention, disposent d'un compte ouvert dans les livres du Trésor, auprès d'un comptable public. Le décret relatif à la gestion budgétaire et comptable publique du 7 novembre 2012, entré en vigueur au 1 er janvier 2013, réaffirme le principe de l'obligation, pour les organismes publics, de déposer leurs fonds au Trésor. Les encours déposés sur le compte du Trésor par les correspondants, en particulier par les collectivités territoriales et leurs établissements publics au titre de la loi organique relative aux lois de finances, constituent une ressource stable pour la trésorerie de l'État.

* 3 Indice quotidien, publié par l'AFT, des rendements des emprunts d'État à long terme correspondant au taux de rendement actuariel d'une obligation du Trésor fictive dont la durée serait de 10 ans. Il est calculé par interpolation linéaire à partir des cotations, données par les SVT (Spécialistes en valeurs du Trésor) chaque jour à 10 heures, des deux OAT (Obligation assimilable du Trésor) encadrant le plus près la maturité théorique de 10 ans.

* 4 Toutefois, comme l'indique le Rapport annuel de performance pour l'exercice 2013, « dans la mesure où l'action « Trésorerie » peut présenter un excédent de recettes sur les dépenses, il a été décidé de regrouper, pour le calcul des versements à destination du compte de commerce, les dépenses et recettes de trésorerie avec celles de l'action «Dette«. Aucun versement n'est donc enregistré au niveau comptable en exécution sur l'action «Trésorerie«, même si cette dernière affiche un solde négatif sur l'exercice . Pour assurer la bonne information du Parlement, un suivi extracomptable permet de ventiler les versements entre les deux actions et de retracer ainsi la consommation des crédits action par action. »

* 5 Plafond fixé par l'article d'équilibre du présent projet de loi de finances, conformément à l'article 34 de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances.

* 6 Cette simulation correspond à « une optique ?maastrichtienne«, avec une charge agrégeant intérêts courus et étalement des primes et décotes à l'émission ». Dans le cadre de sa politique d'émission à moyen et long terme, l'Agence France Trésor complète les émissions sur lignes nouvelles par la réouverture d'anciennes « souches ».

* 7 Ces dispositifs sont issus de lois votées à la fin des années 1940, pour permettre, dans une période de très forte inflation, la revalorisation des contrats de rentes viagères souscrits à titre privé. En 1986, compte tenu du changement de l'environnement socio-économique marqué par la maîtrise de l'inflation et la généralisation des régimes de retraite obligatoires, les pouvoirs publics ont décidé de fermer ce mécanisme aux contrats souscrits à partir du 1 er janvier 1987. Les contrats souscrits depuis cette date sont ainsi revalorisés dans le cadre des mécanismes contractuels et légaux de participation aux bénéfices. Pour les contrats antérieurs au 1 er janvier 1987, l'État finance au minimum 80 % des majorations pour les rentes versées. Pour les contrats postérieurs à cette date, 10 % des majorations versées sont à la charge de l'État.

* 8 « Art. 24. - Les comptes de concours financiers retracent les prêts et avances consentis par l'État. Un compte distinct doit être ouvert pour chaque débiteur ou catégorie de débiteurs. Les comptes de concours financiers sont dotés de crédits limitatifs, à l'exception des comptes ouverts au profit des États étrangers et des banques centrales liées à la France par un accord monétaire international, qui sont dotés de crédits évaluatifs.

« Les prêts et avances sont accordés pour une durée déterminée. Ils sont assortis d'un taux d'intérêt qui ne peut être inférieur à celui des obligations ou bons du Trésor de même échéance ou, à défaut, d'échéance la plus proche. Il ne peut être dérogé à cette disposition que par décret en Conseil d'État.

« Le montant de l'amortissement en capital des prêts et avances est pris en recettes au compte intéressé.

« Toute échéance qui n'est pas honorée à la date prévue doit faire l'objet, selon la situation du débiteur :

« - soit d'une décision de recouvrement immédiat, ou, à défaut de recouvrement, de poursuites effectives engagées dans un délai de six mois ;

« - soit d'une décision de rééchelonnement faisant l'objet d'une publication au Journal officiel ;

« - soit de la constatation d'une perte probable faisant l'objet d'une disposition particulière de loi de finances et imputée au résultat de l'exercice dans les conditions prévues à l'article 37. Les remboursements ultérieurement constatés sont portés en recettes au budget général. »

* 9 La mise en place du dispositif d'indemnisation des victimes du Benfluorex (commercialisé sous le nom de Mediator) résulte des dispositions de la loi n° 2011-900 du 29 juillet 2011 de finances rectificative pour 2011.

* 10 Rapport d'information n° 602 (2013-2014), « Les avances aux services de l'État et aux organismes gérant des services publics : un dispositif original, aux procédures éprouvées mais à conforter dans son pilotage et son suivi ».

* 11 Cf. article 21 de la loi n° 2012-958 du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012.

* 12 C. Blot, C. Mathieu et C. Rifflart, « Politiques monétaires : en attendant la demande... », Revue de l'OFCE , 2012/6, n° 125, 2012, p. 221-246.

* 13 Conformément à l'article 21 de la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), les « comptes d'affectation spéciale retracent, dans les conditions prévues par une loi de finances, les opérations budgétaires financées au moyen de recettes particulières qui sont, par nature, en relation directe avec les dépenses concernées ».

* 14 Au total, 3 950 millions d'euros doivent être rétrocédés à la Grèce par les banques centrales de la zone euro conformément aux décisions prises lors de la réunion de l'Eurogroupe du 20 février 2012, la somme de 754,3 millions d'euros correspondant à la quote-part de la Banque de France.

* 15 Le montant total devant être reversé par les banques centrales à la Grèce en application de l'accord du 26 novembre 2012 s'élève à 9 902 millions d'euros, la quote-part française étant de 2 060 millions d'euros.

* 16 En effet, comme l'indique le projet annuel de performances (PAP) pour 2015 du présent compte d'affectation spéciale : « Concernant la restitution des revenus sur les titres grecs détenus au titre du programme pour les marchés de titres (programme dit SMP), les versements de la Banque de France seront effectués annuellement, de sorte que les AE seront couvertes et consommées annuellement, au même rythme que les CP ».

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