EXAMEN DE L'ARTICLE RATTACHÉ

ARTICLE 57 ter (nouveau) (Art. 14 de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine) - Report au 1er janvier 2016 de la dissolution de l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances (ACSé) (Rapporteur spécial : Daniel Raoul)

Commentaire : le présent article vise à reporter d'un an, soit au 1 er janvier 2016, la dissolution de l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances (ACSé) et le transfert de ses activités à l'État.

I. LE DROIT EXISTANT

A. L'AGENCE NATIONALE POUR LA COHÉSION SOCIALE ET L'ÉGALITÉ DES CHANCES (ACSÉ)

Instaurée par la loi n° 2006-396 du 31 mars 2006 pour l'égalité des chances , l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances (ACSé) a été mise en place à compter du 30 juillet 2006 par le décret du 28 juillet 2006 36 ( * ) . Elle s'est ainsi substituée au Fonds d'action et de soutien pour l'intégration et la lutte contre les discriminations (FASILD).

En vertu de l'article L. 121-14 du code de l'action sociale et des familles, l'ACSé avait vocation à mener « des actions en faveur des personnes rencontrant des difficultés d'insertion sociale ou professionnelle », à concourir à la lutte contre l'illettrisme et à la mise en oeuvre du service civil volontaire et à participer aux « opérations en faveur des habitants des quartiers prioritaires de la politique de la ville ». L'ACSé assure également la gestion du fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD) en vertu de la loi n° 2007-297 du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance, ainsi que du programme européen d'échanges pour un développement urbain durable (URBACT).

L'ACSé a ainsi vocation à gérer l'essentiel des crédits consacrés à la politique de la ville, constituant ainsi le principal opérateur du programme 147 « Politique de la ville ».

Pour mener à bien ses missions, l'ACSé agissait dans le cadre des contrats urbains de cohésion sociale (CUCS) conclus entre l'État et les collectivités territoriales, lesquels sont désormais remplacés par les contrats de ville qui devraient être conclus en 2015.

Autre acteur de la politique de la ville, le Secrétariat général du comité interministériel des villes (SG-CIV) , créé par l'article 7 du décret n° 2009-539 du 14 mai 2009 relatif aux instances en charge de la politique de la ville, était par ailleurs chargé de préparer les travaux du comité interministériel des villes (CIV) et de veiller à l'application de ses décisions.

B. LA CRÉATION DU COMMISSARIAT GÉNÉRAL À L'ÉGALITÉ DES TERRITOIRES

Dans son rapport public thématique de juillet 2012, « La Politique de la ville une décennie de réformes », la Cour des comptes a identifié des défauts de gouvernance persistants des politiques de la ville, relevant notamment le « manque d'une coordination interministérielle suffisamment forte dans un contexte où les intervenants sont de plus en plus nombreux ». De plus, « à l'échelle régionale, le pilotage assuré par le secrétariat général du comité interministériel des villes est insuffisant pour assurer une bonne coordination entre les interventions des agences nationales et les ministères concernés et entre ces derniers et les collectivités territoriales ».

Par lettre en date du 11 mars 2013, le Premier ministre a ainsi demandé à quatre inspections générales de conduire une mission sur le rapprochement entre le SG-CIV et l'ACSé. Le rapport de la mission inter-inspections 37 ( * ) , remis en mai 2013, a souligné que le partage des missions entre les deux organismes aboutissait ainsi à une organisation peu efficace de la gouvernance de la politique de la ville.

Examinant les causes de ce constat, la mission inter-inspections a notamment relevé le manque de synergies entre les deux établissements ainsi que l'autonomisation marquée de l'ACSé par rapport à sa tutelle.

Ainsi, la mission a recommandé la reprise de l'intégralité des missions actuelles de l'ACSé et du SG-CIV dans une direction d'administration centrale pour mettre en place un outil de pilotage unifié de la politique de la ville.

Dans le prolongement des préconisations de ce rapport ainsi que du rapport de la Commission pour la création d'un Commissariat général à l'égalité des territoires 38 ( * ) , le Comité interministériel pour la modernisation de l'action publique (CIMAP) du 17 juillet 2013 a entériné la création du Commissariat général à l'égalité des territoires (CGET) qui s'est concrétisée par un décret du 31 mars 2014 39 ( * ) .

Placé sous l'autorité du Premier ministre, le CGET regroupe désormais l'ACSé, le SG-CIV et la délégation à l'aménagement des territoires et à l'attractivité régionale (DATAR).

La fusion de ces trois structures s'inscrit dans une logique de mutualisation et vise à construire une politique globale des territoires. En application de l'article 2 du décret du 31 mars précité, le CGET « conçoit, prépare et met en oeuvre la politique nationale d'égalité des territoires, dont il assure le suivi et la coordination interministérielle » .

Pour mener à bien ses différentes actions, le CGET est organisé en trois grands pôles :

- la direction de la ville et de la cohésion urbaine en charge du pilotage et de la coordination interne de la politique de la ville ;

- la direction des stratégies territoriales chargée de superviser la remise à plat de la géographie d'intervention ainsi que l'observation des territoires et l'évaluation des politiques ;

- la direction du développement des capacités des territoires qui vise à concevoir et piloter la politique interministérielle d'égalité des territoires.

En conséquence de la création du CGET, l'article 14 de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine a prévu la dissolution de l'ACSé et la réintégration de ses activités, biens, droits et obligations dans le périmètre de l'État au plus tard le 1 er janvier 2015.

De plus, le décret n° 2014-563 du 30 mai 2014 fixant les modalités et le calendrier de transfert des activités de l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances à l'État a précisé que l'agence continuait « de mettre en oeuvre la politique de la ville [...] jusqu'au 31 décembre 2014 inclus ».

II. LE DISPOSITIF ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

En modifiant l'article 14 précité de la loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine, le présent article, adopté par l'Assemblée nationale à l'initiative du Gouvernement, avec l'avis favorable de la commission des finances, vise à repousser d'un an le transfert des activités de l'ACSé à l'État et la dissolution de l'agence, soit au 1 er janvier 2016 au plus tard .

En effet, si le décret du 31 mars 2014 précité a permis la création du CGET, Patrick Kanner, ministre de la ville, de la jeunesse et des sports, a indiqué « qu' il n'a pas été possible de finaliser à ce jour les dispositifs opérationnels et les circuits budgétaires et financiers liés à la prise en charge par le CGET de l'ensemble des missions de paiement jusqu'alors assurées par l'ACSé ». Cela concerne à la fois les crédits de subvention liés à la politique de la ville, au programme européen URBACT II et aux crédits du FIPD.

Afin de sécuriser la mise en place de la nouvelle politique de la ville et de ne pas créer de difficultés dans la gestion des crédits jusqu'à présent gérés par l'ACSé, il est donc proposé de laisser un an supplémentaire au CGET pour prendre en charge ces missions de paiement de l'ACSé .

III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

La création du CGET devrait permettre de renforcer les synergies entre les différents acteurs du développement du territoire et de dégager des économies de fonctionnement .

Le présent article ne remet en cause ni la création du CGET, ni la dissolution future de l'ACSé , mais offre la possibilité d'assurer la continuité de la mise en oeuvre des différents programmes de la politique de la ville.

Ce décalage d'un an permettra ainsi de sécuriser les circuits de paiement des subventions aux associations, de préparer la connexion des outils de gestion , sans dégradation de la qualité du service offert, et de finaliser les dispositifs opérationnels .

Votre rapporteur spécial ne peut que souscrire à cette mesure de prudence de reporter d'un an la dissolution de l'ACSé.

Il convient de préciser que parallèlement, un amendement de crédits adopté par l'Assemblée nationale a transféré 775 000 euros du programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire », dans lequel avaient été regroupés l'ensemble des crédits de fonctionnement du CGET, vers le programme 147 « politique des territoires » (675 000 euros pour la masse salariale et 100 000 euros pour la dotation de fonctionnement 40 ( * ) ).

Votre commission vous propose un amendement de coordination , tendant à repousser au 1 er janvier 2016 la suppression de l'ensemble des dispositions faisant référence à l'ACSé dans le code de l'action sociale et des familles ainsi que dans le code du service national.

Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.


* 36 Décret n° 2006-945 du 28 juillet 2006 relatif à l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances.

* 37 Rapport remis en mai 2013 par l'inspection générale de l'administration (IGA), l'inspection générale des affaires sociales (IGAS), l'inspection générale des finances (IGF) et le conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD) relatif au rapprochement entre l'ACSé et le SG-CIV.

* 38 Rapport remis le 7 février 2013 par la commission chargée de travailler sur l'évolution des outils administratifs en charge de l'égalité des territoires et présidée par M. Thierry Wahl.

* 39 Décret n° 2014-394 du 31 mars 2014 portant création du Commissariat général à l'égalité des territoires.

* 40 Voir les principales modifications apportées par l'Assemblée nationale.

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