II. LA PROFONDE RÉFORME DU SYSTÈME FISCAL ANDORRAN

A. UN PAYS À LA FISCALITÉ TRÈS FAIBLE ET LONGTEMPS CONSIDÉRÉ COMME PEU COOPÉRATIF

Au début des années 2000, il n'existait en Andorre aucun système d'imposition directe des revenus, des bénéfices et du patrimoine. La fiscalité très limitée du pays consistait en diverses impositions indirectes. L'essentiel des recettes de l'État provenait de l'impôt indirect sur les marchandises qui frappait les produits importés (il s'agissait donc de droits de douane) et les produits d'origine andorrane, à un taux variant de 1 à 12 % selon la catégorie de produits visée. Au-delà de ce dispositif, il existait un impôt sur les activités commerciales au taux fixe de 0,8 %, un impôt indirect sur les services des entreprises et des professions libérales au taux compris entre 1 % et 7 % de la valeur du service rendu, et un impôt indirect de 7 % sur la prestation de services bancaires et financiers. Le régime fiscal andorran était ainsi très en-deçà des impôts existant en France.

A ces spécificités s'ajoutait l'absence d'accords d'échanges de renseignement fiscaux, ce qui avait valu à Andorre d'être placé sur la « liste gris foncé » des paradis fiscaux publiée par l'Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) le 2 avril 2009 . Cette liste regroupaient les États ou territoires qui s'étaient engagés à respecter les standards internationaux (contrairement aux pays de la « liste noire »), mais qui n'avaient pas - ou pas encore - signé douze accords d'échanges d'informations (contrairement aux pays de la « liste blanche »).

B. UNE RÉFORME FISCALE ET FINANCIÈRE AMBITIEUSE

L'effet cumulé de la crise de 2008 et des pressions internationales a conduit le Gouvernement d'Andorre à engager une réforme de grande ampleur du système fiscal de la principauté , afin de le mettre en conformité avec les standards européens en la matière. La réforme, toujours en cours, a principalement consisté en l'instauration de quatre impôts :

- un impôt sur les plus-values de cession des biens immobiliers réalisées par les personnes physiques , instauré dès 2007 et fixé à 15 % du prix de cession la première année et dégressif sur les dix années suivantes ;

- un impôt sur les bénéfices des sociétés et un impôt sur les activités économiques des personnes physiques , soit deux impôts directs au taux de 10 %, entrés en vigueur le 1 er janvier 2012. Ce dispositif a été complété par la mise en place d'un impôt sur le revenu des non-résidents , personnes physiques ou morales, également fixé à un taux de 10 % et prélevé par voie de retenue à la source 7 ( * ) ;

- une TVA unique , qui reprend tous les impôts indirects existant, entrée en vigueur le 1 er janvier 2013. Le taux général de cette TVA est fixé à 4,5 %, le taux réduit à 1 %, pour les produits alimentaires et les boissons non alcoolisées, et le taux majoré à 9,5 %, pour les services bancaires et financiers.

- un impôt universel sur le revenu des personnes physiques , fixé à 10 % au-delà de 40 000 euros de revenu annuel, et à 5 % entre 24 000 et 40 000 euros de revenu annuel. En deçà du seuil de 24 000 euros, les revenus sont exonérés. Cet équivalent de l'impôt sur le revenu français, qui représente un changement majeur pour la principauté, a été instauré par la loi du 24 avril 2014 et est applicable à compter du 1 er janvier 2015 .

À cette réforme fiscale se sont ajoutées des avancées majeures en matière de coopération fiscale internationale . Entre 2009 et 2011, Andorre a signé vingt-six accords d'échange de renseignements en matière fiscale , ou tax information exchange agreements (TIEA) 8 ( * ) , parmi lesquels figure l'accord du 22 septembre 2009 avec la France (cf. infra ). Ces avancées ont permis à Andorre de sortir de la « liste grise » de l'OCDE le 24 février 2010. Andorre s'est également engagée, lors de la réunion de l'OCDE à Berlin le 29 octobre 2014, à mettre en oeuvre l'échange automatique d'informations à compter de 2018 (cf. infra ).

Enfin, l'étude d'impact annexée au présent projet de loi d'approbation souligne que le secteur bancaire andorran a reçu l'aval du Conseil de l'Europe et du Fonds monétaire international (FMI) , tant pour la supervision que pour la vérification de l'origine et de la destination des fonds. Par ailleurs, la législation andorrane ne permet pas la création de structures opaques telles que les trusts , susceptibles d'empêcher l'identification des bénéficiaires effectifs.

Ces profondes réformes , et notamment l'introduction d'un impôt sur le revenu des personnes physiques et d'un impôt des sociétés, ainsi que la taxation des revenus d'activité et des non-résidents, ont permis d'envisager la signature d'une convention fiscale entre la France et Andorre, que la principauté sollicite de longue date . La présente convention fiscale du 2 avril 2013, qui vise à renforcer et à sécuriser les liens économiques entre les deux pays, est donc le résultat des négociations entamées à partir de 2012.

Lors de sa visite du 12 juin 2014, le Président de la République et le chef du Gouvernement d'Andorre ont appelé à la ratification rapide de cette convention. Pour mémoire, Andorre négocie actuellement un accord d'élimination des doubles impositions avec l'Espagne.


* 7 Par exception, un taux de 1,5 % est appliqué pour les revenus au titre des opérations de réassurance. Les revenus du capital mobilier, les contrats d'achat/vente international de marchandises, les exportations temporaires de marchandises pour réparation ou transformation et les traitements et salaires des travailleurs affiliés à la caisse andorrane de sécurité sociale sont exonérées d'impôt.

* 8 Avec les pays suivants : Allemagne, Argentine, Australie, Autriche, Danemark, Espagne, Finlande, France, Groenland, Îles Féroé, Islande, Liechtenstein, Monaco, Norvège, Pays-Bas, Pologne, Portugal, République Tchèque, San Marin, Suède, Afrique du Sud, Belgique, Brésil, Corée, Royaume-Uni et Suisse.

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