EXPOSÉ GÉNÉRAL

Mesdames, Messieurs,

Le Sénat est saisi en nouvelle lecture du projet de loi n° 76 (2014-2015) relatif à la modernisation et à la simplification du droit et des procédures dans les domaines de la justice et des affaires intérieures.

À l'origine, ce texte comptait plus de quinze demandes d'habilitation. En première lecture, notre assemblée a suivi sa commission des lois qui lui proposait d'appliquer quelques principes simples de bonne législation : contenir le champ des habilitations à légiférer par ordonnance dans des limites strictes ; privilégier, dans la mesure du possible, l'intégration dans la loi des réformes proposées sans renvoyer à une ordonnance future ; éviter l'accumulation, souvent observée à l'occasion des lois de simplification, d'amendements trop nombreux, qui étendent excessivement le périmètre du texte.

Mais avant tout, elle s'est opposée à ce que la réforme du droit des obligations échappe au Parlement et soit abandonnée à la procédure de l'ordonnance : les enjeux politiques de la réforme méritaient, en effet, d'être soumis à la décision de la représentation nationale. Ce faisant, le Sénat a réaffirmé sa confiance dans l'examen parlementaire.

La majorité de l'Assemblée s'est, elle, laissée convaincre par les arguments avancés par le Gouvernement sur la technicité du texte ou l'ordre du jour irrémédiablement encombré. Instruit des expériences passées et plus confiant dans les ressources de la volonté politique, lorsque l'enjeu est unanimement reconnu, le Sénat avait pourtant écarté de tels arguments.

Ce désaccord de principe entre les deux chambres a conduit à l'échec de la commission mixte paritaire, en dépit des efforts des rapporteurs pour examiner, sur les autres points restants en discussion, les moyens de rapprocher les points de vue de nos deux assemblées.

L'Assemblée nationale avait pourtant en première lecture largement approuvé les nombreuses modifications apportées par le Sénat au projet de loi. Elle avait elle-même amélioré le texte (I).

Lors de la nouvelle lecture, la rapporteure de l'Assemblée nationale s'est d'ailleurs inspirée de certaines propositions que lui avait soumises votre rapporteur.

Elle a toutefois maintenu sa position sur la réforme du droit des obligations et refusé de reprendre, sur d'autres points, comme l'accès au compte bancaire du défunt ou la communication par voie électronique en matière pénale, les solutions que votre rapporteur avait défendues (II).

Votre commission a donc conçu cette nouvelle lecture comme un moyen de présenter le texte sur lequel les parlementaires auraient pu s'entendre si l'hypothèque de l'ordonnance pour la réforme du droit des obligations avait été levée.

Pour cette raison, elle a adopté, dès l'établissement de son texte, les amendements susceptibles, sous réserve de l'adoption du texte par le Sénat, d'être repris, à l'initiative d'un député, pour être discutés, lors de la lecture définitive à l'Assemblée nationale du présent projet de loi, conformément au dernier alinéa de l'article 45 de notre Constitution.

I. DES AMÉLIORATIONS BIENVENUES

Les députés ont apporté au texte plusieurs améliorations en première et en nouvelle lecture, auxquelles votre commission a souscrit sous réserve de quelques modifications.

Ils ont ainsi modifié l'article premier , pour permettre d'allonger la durée initiale des mesures de tutelles de cinq à dix ans, tout en limitant la durée maximale après renouvellement, qui n'était pas encadrée jusqu'alors, à vingt ans. À l'initiative du Gouvernement, l'Assemblée nationale a précisé les modalités d'entrée en vigueur de ces dispositions à l'article 15 bis .

À l'article 2 , ils ont renforcé encore les pouvoirs liquidatifs du juge aux affaires familiales en matière de divorce et levé une incertitude rédactionnelle quant au degré de succession des collatéraux privilégiés.

Soucieux de garantir, dans une succession, la protection de certains créanciers ou ayants-droit privilégiés, ils ont, d'une part, à l'article 2 bis , facilité le règlement, par les héritiers, des salaires des employés du défunt, et, d'autre part, à l'article 2 ter , assuré à celui qui vivait avec le défunt un droit d'attribution préférentiel du véhicule de ce dernier s'il était nécessaire aux besoins de la vie courante.

À l'article 2 quater , l'Assemblé nationale a transposé la jurisprudence autorisant les magistrats à tenir compte des sommes déjà versées par le débiteur d'une prestation compensatoire versée sous forme de rente, pour estimer l'avantage, le cas échéant excessif, que le maintien de cette rente pourrait constituer. Un amendement de votre commission modifie la rédaction retenue pour correspondre plus exactement avec la jurisprudence transposée.

À l'article 4 , les députés ont supprimé les dispositions relatives à l'application du pacte civil de solidarité en Polynésie française, devenues sans objet à la suite de l'avis rendu par le Conseil d'État le 29 avril 2014, dans lequel il a considéré que la règlementation du pacte civil de solidarité (Pacs) relevait de la compétence du territoire.

À l'initiative du Gouvernement, l'Assemblée nationale a ensuite simplifié, à l'article 4 bis , les règles applicables en matière de garantie des vices cachés.

Les députés ont aussi apporté plusieurs améliorations rédactionnelles et de clarification à l'article 5 qui ratifie l'ordonnance relative à la partie législative du code des procédures civiles d'exécution et à l'article 7 qui organise la réforme du Tribunal des conflits.

À l'initiative du Gouvernement, l'Assemblée nationale a, par ailleurs, complété l'article 8 pour simplifier le régime de restitution et d'aliénation des scellés judiciaires et tirer les conséquences de la censure par le Conseil constitutionnel, pour défaut de recours, de la procédure de destruction de ces scellés. Elle a notamment confié aux procureurs de la République la charge de prendre ses décisions, en organisant un recours possible devant la chambre de l'instruction.

Partageant le souci d'unification des régimes de gestion des scellés judiciaires, votre commission a toutefois adopté un amendement maintenant la compétence plus protectrice du juge des libertés et de la détention pour prendre ses décisions, à la demande du procureur de la République. Elle a, par ailleurs, veillé, par un autre amendement, à conserver une symétrie dans les délais applicables en cette matière lors de l'enquête préliminaire et lors de l'instruction.

Au même article, en nouvelle lecture, les députés ont autorisé le règlement par voie électronique des amendes routières.

À l'article 9 , la commission des lois de l'Assemblée nationale a limité à un seul membre de la famille le nombre de proches nécessaires pour surveiller l'opération d'exhumation du défunt.

L'article 14 bis A propose de nouvelles modalités d'établissement des signalétique apposées sur les DVD et les Blu-Ray de films ou de jeux-vidéos et destinées à en limiter la diffusion auprès des mineurs, en fonction des risques qu'ils présentent.

Enfin, aux articles 14 bis et 14 ter , ils ont prévu la mise en place du tribunal foncier de la Polynésie française, dont la création avait été actée dans la loi n° 2004-193 du 27 février 2004 complétant le statut d'autonomie de la Polynésie française, mais qui n'avait pu entrer en fonction faute de texte fixant ses modalités d'organisation, l'ordonnance prévue à cet effet n'ayant pas été prise par le Gouvernement.

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