C. DE NOUVEAUX TRANSFERTS QUI NE SONT PAS ACCEPTABLES

Parmi les nombres dépenses de transfert que la branche AT-MP prend à sa charge, la plus importante en volume est celle en direction de la branche maladie au titre de la sous-déclaration des maladies professionnelles.

Evolution du montant des transferts à la charge de la branche AT-MP
entre 2010 et 2015

(en millions d'euros)

2010

2011

2012*

2013

2014

2015

Mines

407

401

376

353

334

316

MSA

111

115

117

123

127

116

Branche Maladie

710

710

790

790

790

1 000

Fcat

29

28

23

20

18

15

Fcaata

880

890

890

890

821

693

Fiva

315

340

315

115

435

380

CNSA

42

43

40

41

38

38

CNAV pénibilité

-

35

110

0

0

0

Total

2 494

2 562

2 661

2 332

2 562

2 559

Source : Réponse de la Cnam-AT-MP au questionnaire de votre rapporteur

Le PLFSS pour 2016 prévoit la mise en place d'un nouveau versement à la branche maladie, représentant un demi-milliard d'euros en 2016 et 2017. Au total, les dépenses de transfert de la branche AT-MP représenteraient ainsi près de 2,8 milliards d'euros en 2016 contre moins de 2,5 milliards d'euros en 2010.

1. Le versement à la branche maladie au titre de la sous-déclaration des maladies professionnelles

Depuis 1997, conformément à l'article L. 176-1 du code de la sécurité sociale, un versement annuel de la branche AT-MP du régime général au profit de l'assurance maladie est prévu pour tenir compte des dépenses liées à des sinistres ou pathologies d'origine professionnelle mais non déclarés comme tels. Le montant du versement destiné à couvrir les sommes indument mises à la charge de la branche maladie est fixé chaque année par la loi de financement de la sécurité sociale.

Une commission, présidée par un magistrat de la Cour des comptes, évalue tous les trois ans le coût réel de cette sous-déclaration par un rapprochement entre les diverses données épidémiologiques existantes et les statistiques des sinistres indemnisés par la branche. Une estimation du nombre de cas sous-déclarés est rapprochée des données de coût moyen par pathologie fournies par la Cnam.

Dans son rapport de juin 2014, la dernière commission a conclu à une estimation du coût de la sous-déclaration située dans une fourchette comprise entre 695 millions d'euros et 1,3 milliard d'euros. Par rapport à l'estimation de la précédente commission dans son rapport de juin 2011 (587 millions d'euros à 1,11 milliard d'euros), l'évolution est significative. La progression est de 18,4 % pour la borne basse et de 17,1 % pour la borne haute.

La commission indique que cette évolution n'est pas liée au coût des soins médicaux, lequel a plutôt diminué au cours des trois dernières années, mais plutôt au nombre de personnes malades qui a fortement augmenté.

Sur le fondement de cette estimation, le Gouvernement propose de reconduire pour 2016 le montant fixé à 1 milliard d'euros pour 2015. Par rapport au montant versé pour les exercices 2012 à 2014 (790 millions d'euros), l'augmentation, qui atteint 26,6 %, apparaît considérable. Entre 2002 et 2014, le versement a connu une hausse de près de 164 %.

Votre rapporteur réitère les réserves qu'il a déjà eu l'occasion de formuler à l'occasion de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale l'année dernière. Au-delà des modalités d'évaluation de la sous-déclaration, qui nécessiteraient d'être objectivées, il considère que la réalité des efforts engagés pour lutter contre ce phénomène reste sujette à caution. Le caractère automatique de ce versement ne doit pas exonérer d'un débat de fond sur les causes de la sous-déclaration et sur les actions à mener pour la circonscrire.

2. Le nouveau transfert prévu par le PLFSS pour 2016 en faveur de l'assurance maladie

L'annexe B du PLFSS pour 2016 annonce un transfert de cotisations de 0,05 point de la branche AT-MP vers la branche maladie du régime général. En 2016, les cotisations augmenteraient ainsi de 0,5 %, à un rythme sensiblement inférieur à la masse salariale du secteur privé (+2,8 %). La mise en place de ce nouveau transfert conduirait à ponctionner l'excédent de la branche AT-MP d'un demi-milliard d'euros supplémentaire en 2016 et 2017.

Les raisons avancées pour justifier une telle opération laissent craindre l'instauration d'un transfert pérenne. Selon le Gouvernement en effet, le transfert de cotisations « est justifié par l'approche solidaire entre branches du régime général, au coeur des principes de la sécurité sociale depuis son origine, ainsi que par les effets indirects dont bénéficie la branche AT-MP du fait de l'amélioration de l'efficience du système de soins, essentiellement financé par la branche maladie ».

En vertu de l'accord auquel sont parvenus les partenaires sociaux le 30 octobre dernier sur les retraites complémentaires, il est par ailleurs question de compenser la hausse des cotisations de retraite des employeurs, à hauteur de 700 millions d'euros, par une baisse des cotisations de la branche AT-MP à compter de 2019. Votre rapporteur regrette qu'aucune information précise n'ait pour l'instant été fournie sur l'échelonnement et l'ampleur de la baisse envisagée.

De manière générale, votre rapporteur déplore que les excédents de la branche AT-MP soient utilisés pour la mise en place de nouvelles dépenses de transfert. De telles opérations comptables ne sont pas acceptables dès lors qu'elles remettent en cause l'autonomie de la branche et sa vocation assurantielle et amoindrissent une nouvelle fois la portée des leviers sur lesquels il est permis de jouer pour renforcer l'incitation à la prévention auprès des employeurs.

*

* *

Suivant l'avis de son rapporteur, la commission a émis un avis défavorable à l'adoption des objectifs de dépenses de la branche accidents du travail - maladies professionnelles.

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