II. L'ÉVOLUTION THÉMATIQUE DES CRÉDITS

A. L'AIDE BILATÉRALE

1. L'AFD : des moyens confirmés

Le présent paragraphe retrace les moyens budgétaires mis à disposition de l'Agence française de développement (AFD), au titre de l'aide publique au développement, qu'ils relèvent du programme 110, du programme 209 ou du compte de concours financiers « Prêts à des États étrangers ».

Moyens budgétaires mis à disposition de l'AFD

(en millions d'euros)

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Exécutées 2014

LFI 2015

Demandées en PLF 2016

Exécutées 2014

LFI 2015

Demandées en PLF 2016

Subventions projets de l'AFD

195,8

172,0

172,0

188,1

158,0

151,0

Assistance technique

45,0

45,0

45,0

43,0

Bonification des prêts outre-mer 7 ( * )

-

-

-

17,3

15,0

12,0

Bonifications de prêts dans les États étrangers

241,9

250,0

255,0

164,8

178,0

180,0

Bonifications de prêts pour le Clean Technology Fund

-

30,0

-

5,2

11,1

5,2

Ressource à condition spéciale

447,0

760,0

400,0

327,0

390,0

58,5

Rémunération de l'AFD

27,0

27,0

27,0

27,0

27,0

27,0

Rémunération de l'AFD pour les opérations réalisées pour le compte de l'État

2,0

3,0

3,0

2,4

3,0

3,0

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires (programmes 110, 209 et 853)

L'AFD reçoit tout d'abord des subventions pour financer des projets sous forme de dons . Ces crédits s'élèvent à 172 millions d'euros en AE en 2016, auxquels on peut ajouter 45 millions d'euros au titre de l'assistance technique. Cette enveloppe de 217 millions d'euros en AE est parfaitement stable par rapport à 2015 . Les crédits de paiement sont fixés à 194 millions d'euros, soit légèrement moins qu'en 2014.

Par ailleurs, l'AFD intervient dans les États étrangers en accordant des prêts, plus ou moins concessionnels, cette concessionnalité étant financée sous plusieurs formes.

D'une part, lorsqu'elle se finance aux conditions du marché, les bonifications de prêts par l'État lui permettent d'abaisser directement le taux d'intérêt proposé aux bénéficiaires de ses concours. Celles-ci représentent 180 millions d'euros en CP en 2016.

D'autre part, l'AFD bénéficie de la part de l'État d'une « ressource à condition spéciale » (RCS) , sous la forme d'un prêt à des termes préférentiels (durée de trente ans dont dix ans de différé du remboursement en capital, à un taux de 0,25 %), qui lui permet d'accorder des prêts concessionnels. La RCS est en forte baisse en 2016, en atteignant 400 millions d'euros en AE (- 360 millions d'euros) et à peine 59 millions d'euros en CP (- 331 millions d'euros).

La baisse importante des AE s'explique par le fait que ces crédits contribuaient, en 2015, à la fois au financement des opérations courantes de l'AFD et à une partie du prêt de 430 millions d'euros accordé par la France à l'Association internationale de développement (AID), le guichet concessionnel de la banque mondiale, et géré par l'AFD. La différence importante entre AE et CP s'explique par le retranchement de 280 millions d'euros de CP en 2016 - comme cela avait été le cas en 2015 - du fait de la recapitalisation, à hauteur de ce montant de l'AFD par l'État, à travers le compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État » (voir encadré).

Le renforcement des fonds propres de l'AFD

Le niveau des fonds propres de l'AFD est un sujet de préoccupation récurrent de vos rapporteurs spéciaux, dans la mesure où la nécessité de respecter les ratios bancaires limitera sa capacité à prendre de nouveaux engagements dans certains pays. Les signatures de nouvelles conventions de prêts au Maroc se trouvent limitées aux remboursements en capital.

Aussi, le Gouvernement a-t-il décidé en 2014 la conversion de la ressource à condition spéciale (RCS) en véritables fonds propres, à hauteur de 840 millions d'euros. En 2015, 2016 et 2017, 280 millions d'euros de crédits de paiement sur la RCS sont supprimés par rapport à 2014, tandis que l'État acquiert - pour un même montant - des titres subordonnés de l'AFD, à partir du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État ». Ce renforcement des capacités de l'AFD prendra également la forme de son adossement à la Caisse des dépôts et consignations (cf. supra ).

L'AFD met également en oeuvre le programme de renforcement des capacités commerciales (PRCC), une partie des subventions aux ONG, les aides budgétaires globales et les contrats de désendettement et de développement (C2D), qui sont traités dans les paragraphes suivants.

Enfin, la rémunération de l'AFD atteint 30 millions d'euros, en AE comme en CP, et n'évolue pas par rapport à 2015. Elle correspond aux opérations réalisées par l'AFD pour le compte de l'État (aides budgétaires globales, opérations de conversion de dettes, etc.) et pour des actions confiées à l'AFD (dons projets, C2D, crédits délégués, etc.). Ces rémunérations sont calculées à partir de formules basées en particulier sur les volumes d'engagement.

Ainsi, vos rapporteurs spéciaux constatent que les moyens de l'AFD sont préservés.

2. Des crédits d'aide liée stables en AE

L'aide liée est constituée des dispositifs pour lesquels une part minimale des contrats financés doit correspondre à des achats de biens et services fournis par des entreprises françaises. Pour pouvoir être liée, l'aide doit répondre à des critères de l'OCDE, notamment en matière de concessionnalité.

Les deux principaux outils de l'aide liée française sont la Réserve pays émergents (RPE) et le Fonds d'études et d'aide au secteur privé (FASEP). La RPE, mise en oeuvre par la direction générale du Trésor, prend la forme de prêts concessionnels, tandis que le FASEP permet de financer, sous forme de dons, des études de faisabilité ou d'assistance technique.

Évolution des crédits de l'aide liée en 2016

(en millions d'euros)

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Exécutées 2014

LFI 2015

Demandées en PLF 2016

Exécutées 2014

LFI 2015

Demandées en PLF 2016

Développement du commerce extérieur

263,4

330,0

330,0

229,3

440,0

300,0

FASEP

7,1

18,6

18,3

21,5

20,9

22,2

Évaluation préalable et appui pour le montage des projets (RPE et FASEP)

0,3

0,3

0,3

0,1

0,3

0,3

Rémunération de Natixis

3,2

3,4

3,4

3,2

3,4

3,4

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires (programmes 110 et 851)

Les crédits de la première action, « prêts à des États étrangers en vue de faciliter la vente de biens et de services concourant au développement du commerce extérieur de la France », qui comprennent notamment la « Réserve pays émergents », sont stables, ce qui pourrait laisser supposer une baisse des crédits réellement affectés au développement .

En effet, depuis l'an dernier et l'adoption de la seconde loi de finances rectificative pour 2014 8 ( * ) , le champ d'intervention de cette action a été élargi, contre l'avis de votre commission des finances et du Sénat, à des prêts non concessionnels destinés à soutenir les exportations françaises. Vos rapporteurs spéciaux regrettent à nouveau ce choix, d'autant plus que les documents budgétaires ne permettent pas de différencier les crédits destinés au développement des autres.

3. La coopération technique : des crédits relativement stables

Le développement des pays du sud nécessite une expertise technique, pour renforcer leurs capacités à mettre en place des politiques publiques complexes en matière d'infrastructures ou de santé par exemple, qui peut être apportée à travers l'aide publique au développement.

Il s'agit également pour la France de diffuser des modèles d'organisation et des normes conformes à ses valeurs et à ses intérêts. L'aide technique, qui représente un marché considérable évalué à près de 100 milliards d'euros par an, constitue en effet un moyen privilégié de mettre en valeur nos savoirs faires et d'influer sur des choix qui peuvent se traduire in fine par des contrats pour des entreprises françaises. La coopération technique relève ainsi à la fois de la solidarité et de l'influence.

Le tableau ci-dessous présente les crédits de divers dispositifs de coopération technique. Cependant, ils sont loin de couvrir à eux seuls la politique de coopération technique bilatérale de la France, qui représentait 1 584 millions d'euros d'APD selon l'OCDE, en 2013 .

Évolution des crédits de l'aide technique en 2016

(en millions d'euros)

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Exécutées 2014

LFI 2015

Demandées en PLF 2016

Exécutées 2014

LFI 2015

Demandées en PLF 2016

« Expertise France » (dotation ex-Adetef)

7,4

4,0

3,9

9,8

4,0

4,9

« Expertise France » (dotation ex- GIP Esther)

3,4

3,6

3,4

3,4

3,6

3,4

Programme de renforcement des capacités commerciales (géré par l'AFD)

-

3,0

13,6

3,0

3,0

1,5

Bourses

6,9

6,6

5,8

6,9

6,6

5,8

Échanges d'expertise

2,5

2,9

2,4

2,5

2,9

2,4

Volontariat international

17,1

19,2

19,2

17,9

19,2

19,2

Canal France international

12,1

11,2

9,5

11,9

11,2

9,5

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires (programmes 110 et 209)

L'augmentation des AE au titre du programme de renforcement des capacités commerciales (PRCC) s'explique par le renouvellement de ce programme, le « PRCC 4 » (2013-2015) étant arrivé à son terme.

On constate également que « Expertise France » bénéficie de deux lignes de financement, l'une provenant du ministère de l'économie, correspondant à la dotation qui était consacrée au GIP Assistance au développement des échanges en technologies économiques et financières (Adetef), et une provenant du ministère des affaires étrangères, correspondant à la dotation qui était consacrée au GIP Ensemble pour une solidarité thérapeutique hospitalière en réseau (Esther). Il s'agit là d'une conséquence de la fusion en 2014 , au sein de « Expertise France », de France expertise internationale (FEI), du GIP Adetef, du GIP Esther, du GIP International (Inter), du GIP Santé protection sociale internationale (SPSI) et du GIE Agence pour le développement et la coordination des relations internationales (Adecri).

4. L'aide humanitaire et alimentaire en légère hausse

Le fonds d'urgence humanitaire permet de financer par exemple des interventions humanitaires d'urgence mises en oeuvre par l'État, l'expédition de matériels ou de personnels, des subventions accordées à des ONG, etc.

L'aide alimentaire française s'oriente en priorité vers les populations victimes de crise.

Ces crédits sont en très légère hausse (+ 1 million d'euros).

Évolution des crédits relatifs à l'aide humanitaire et d'urgence en 2016

(en millions d'euros)

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Exécutées 2014

LFI 2015

Demandées en PLF 2016

Exécutées 2014

LFI 2015

Demandées en PLF 2016

Fonds d'urgence humanitaire

15,4

10,9

11,9

15,5

10,9

11,9

Aide alimentaire

34,5

37,1

37,1

34,4

37,1

37,1

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires (programmes 110 et 209)

5. La coopération décentralisée

La coopération décentralisée est essentiellement financée par les collectivités territoriales, sur leurs fonds propres. Mais le MAEDI intervient pour des cofinancements, en fonction des priorités retenues.

Ces crédits permettent donc de soutenir - et d'orienter, sur la base d'appels à projets - les actions des collectivités territoriales françaises en matière de coopération avec des autorités locales étrangères. On rappellera que l'APD des collectivités représentait, en 2013, 63 millions d'euros au total. Ces crédits sont stables par rapport à 2015 .

Évolution des crédits relatifs à la coopération décentralisée en 2016

(en millions d'euros)

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Exécutées 2014

LFI 2015

Demandées en PLF 2016

Exécutées 2014

LFI 2015

Demandées en PLF 2016

8,7

9,3

9,3

8,6

9,3

9,3

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires (programme 209)

6. Les autres dispositifs d'aide bilatérale

Le présent paragraphe présente les autres dispositifs d'aide bilatérale, dont le montant peut être très variable.

Globalement, ces crédits sont en diminution de 27,6 millions d'euros en CP, malgré la hausse des crédits destinés aux organisations non gouvernementales (ONG) (+ 14 millions d'euros).

Évolution des crédits des autres dispositifs d'aide bilatérale en 2016

(en millions d'euros)

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

Exécutées 2014

LFI 2015

Demandées en PLF 2016

Exécutées 2014

LFI 2015

Demandées en PLF 2016

Fonds français pour l'environnement mondial

-

90,0

-

26,0

27,0

22,0

Aides budgétaires globales (gérées par l'AFD)

33,5

33,0

35,0

40,0

50,0

35,0

Dépenses de fonctionnement autres que celles de personnel

0,5

0,3

0,3

0,6

0,3

0,3

Dotations pour opérations aux EAF

0,4

0,7

0,4

0,4

0,7

0,4

Autres moyens bilatéraux d'influence

7,4

7,7

2,3

7,5

7,7

2,3

Fonds de solidarité prioritaire (FSP)

42,9

45,0

34,0

46,9

43,0

32,1

Subventions ONG (gérées par l'AFD)

58,2

71,0

79,0

51,2

60,0

74,0

AFPAK

4,1

5,0

-

3,1

5,0

-

Fonds Pacifique

1,4

1,5

1,5

1,4

1,5

1,5

Aide budgétaire post-conflit et sortie de crise

35,4

22,3

22,3

35,6

22,3

22,3

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires (programmes 110 et 209)

Le fonds de solidarité prioritaire (FSP), qui est l'instrument d'aide projet du ministère des affaires étrangères et du développement international (MAEDI), voit ses crédits diminuer de 25 % après une baisse de 10 % en 2015.


* 7 Les bonifications de prêts en outre-mer ne correspondent pas à de l'aide publique au développement et relèvent, depuis 2010, de la mission « Outre-mer » (les CP correspondent exclusivement à des engagements antérieurs).

* 8 Article 3 de la loi n° 2014-1655 du 29 décembre 2014 de finances rectificative pour 2014.

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