B. LES ÉVOLUTIONS DE LA GOUVERNANCE DU RÉSEAU ACTION LOGEMENT

Le réseau du « 1 % logement », rebaptisé depuis 2009 « Action Logement », collecte la PEEC et la redistribue. Il est composé de plusieurs entités : l'Union des entreprises et des salariés pour le logement (UESL), tête de réseau des collecteurs, les collecteurs interprofessionnels du logement (CIL), l'Association pour l'accès aux garanties locatives (APAGL) et l'Association foncière logement (AFL).

La Cour des comptes a examiné à plusieurs reprises le fonctionnement d'Action Logement 1 ( * ) et émis plusieurs recommandations afin d'améliorer le fonctionnement du réseau.

1. La réorganisation des collecteurs

Initialement, la participation des employeurs à l'effort de construction (PEEC) faisait l'objet d'une collecte décentralisée par différents types d'organismes :

- par des collecteurs interprofessionnels du logement (CIL) , qui sont des associations gérées de façon paritaire par les partenaires sociaux, à hauteur de 95% de la collecte ;

- par des collecteurs non associés de l'UESL , agréés pour la collecte de la PEEC : organismes d'habitations à loyer modéré et sociétés d'économie mixte exerçant à titre principal une activité de construction, d'acquisition ou de gestion de logements sociaux, chambres de commerce et d'industrie et société immobilière des chemins de fer (ICF, collecteur de la SNCF), à hauteur de 5% de la collecte.

Les partenaires sociaux ont engagé un mouvement de réforme à partir de 2012 pour simplifier la collecte de la PEEC . Ainsi, il a été décidé que les chambres de commerce et d'industrie ne seraient plus des collecteurs de la PEEC à partir de juillet 2012 en application du décret n° 2012-721 du 9 mai 2012 portant diverses dispositions relatives à la participation des employeurs à l'effort de construction pris en application de l'article L. 313-36 du code de la construction et de l'habitation. Puis, la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour un accès au logement et un urbanisme rénové, dite loi ALUR, a prévu que les organismes HLM-SEM ne seraient plus collecteurs à compter du 1 er janvier 2015.

Désormais, seuls les CIL et la société immobilière des chemins de fer sont habilités à collecter la PEEC . Le montant de la collecte par cette dernière demeure marginal.

Parallèlement, s'est engagé un mouvement de regroupement des CIL . Depuis le début des années 90, leur nombre a été très fortement réduit passant de 198 CIL en 1990 à 20 aujourd'hui.

ÉVOLUTION DU NOMBRE DE COLLECTEURS CIL ET CCI ENTRE 1990 ET 2014

Source : ANCOLS - Données permanentes du système de gestion des collecteurs et des entités bénéficiaires de la PEEC, in PEEC - Rapport annuel statistique et financier - Exercice 2014, octobre 2015

La Cour des comptes avait encouragé ce mouvement dans ses rapports de 2006 et 2009. Toutefois, elle s'est montrée très critique en 2013 2 ( * ) quant à la réorganisation qui en a résulté. S'appuyant sur un rapport de l'Agence nationale pour la participation des employeurs à l'effort de construction (ANPEEC), la Cour notait ainsi : « Il apparaît que très souvent les nouvelles entités consistent en une juxtaposition des anciennes, avec le risque de doublons et de surcoûts correspondants ; l'organisation reste dépendante des implantations territoriales préalables et se redéfinit peu par filière d'activité. Dans la majorité des cas, les traités de fusion prévoient l'absence de licenciement économique, le maintien sur leur territoire des personnels des comités fusionnés, le maintien ou la compensation des avantages sociaux et la mise en place d'une gestion prévisionnelle des emplois et des carrières . » Elle ajoutait : « Ni l'UESL, ni l'ANPEEC, ni les ministères ne disposent d'une cartographie des collectes et des financements de l'ensemble des CIL , ce qui ne permet donc pas de savoir à quelle logique répondent principalement les fusions . La stratégie et la rationalité de la réorganisation des collecteurs manquent encore de lisibilité et l'État ne s'est pas assuré, de son côté, que la réorganisation se faisait en cohérence avec les orientations de la politique nationale du logement . »

Pour répondre à ces critiques, l'UESL a décidé d'encadrer les fusions de CIL afin de garantir la cohérence d'ensemble des projets. Un cahier des charges des coopérations et des fusions entre CIL a été adopté en février 2013 ; il prévoit que les projets de fusion doivent respecter des critères financiers, d'organisation, de gouvernance, ou encore de taille suffisante du CIL. Le CIL issu de la fusion doit ainsi représenter entre 2 % et 12 % des fonds collectés pondérés en 2011. Par ailleurs, la loi ALUR a renforcé les pouvoirs de l'UESL en la matière en lui confiant le soin d'approuver les fusions entres les organismes collecteurs afin d'assurer « la cohérence des interventions et de l'organisation territoriale des associés collecteurs et de leurs filiales ».

2. Le renforcement du rôle de pilotage de l'UESL, tête de réseau des collecteurs

L'Union des entreprises et des salariés pour le logement (UESL) est la tête de réseau des collecteurs. Il s'agit d'une société anonyme coopérative qui a pour seuls associés les CIL et les organisations interprofessionnelles représentatives au plan national de salariés ou d'entreprises.

En 2006, la Cour des comptes avait porté une appréciation très critique sur la gouvernance d'Action Logement. Elle indiquait ainsi : « Les faiblesses constatées dans la gouvernance du dispositif, marquée par le mélange des rôles des différents acteurs et le dessaisissement de l'État, aggravées du fait de l'absence de stratégie et, en conséquence, de pilotage du réseau des collecteurs, rendent indispensable une remise en ordre. » 3 ( * )

Ces remarques ont été prises en compte par l'article 8 de la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion, dite loi MOLLE, qui a profondément modifié la gouvernance d'Action Logement en distinguant les fonctions de contrôle et celles de gestion : les premières étant confiées à l'ANPEEC, les secondes étant exercées par l'UESL.

Jusqu'alors chargée de représenter les intérêts communs de ses associés et de signer les conventions avec l'État relatives à l'emploi des fonds de la PEEC, l'UESL a vu ses missions évoluer. Ainsi, ses recommandations s'imposent désormais à l'ensemble de ses associés collecteurs. Cependant, elle n'est plus chargée à partir de 2009 de négocier les conventions avec l'Etat, le Gouvernement ayant décidé de mettre fin à la gestion partenariale et conventionnelle de l'emploi de la PEEC . Désormais, la nature des emplois et les modalités de leur utilisation sont fixées par décret en Conseil d'État pris après avis des représentants des organisations syndicales et patronales membres de l'UESL. Ce décret fixe également les enveloppes minimales et maximales qui leurs sont consacrées chaque année.

Ces règles instaurées en 2009 ont été critiquées par les partenaires sociaux qui en ont dénoncé la rigidité. Des recours ont été formés à l'encontre des décrets et arrêtés fixant les emplois et enveloppes de la PEEC. Le Gouvernement est revenu sur cette disposition lors de l'examen de la loi ALUR, restaurant un cadre conventionnel entre l'État et l'UESL pour déterminer les emplois de la PEEC. En outre, le rôle et les missions de l'UESL ont été renforcés .

L' UESL est actuellement chargée en application de l'article L. 313-19 du code de la construction et de l'habitation :

- de conclure avec l'État une convention relative aux emplois de la PEEC et d'en assurer la mise en oeuvre. Cette convention s'impose aux CIL auxquels l'UESL fixe des objectifs par emploi ou catégorie d'emplois pour la mise en oeuvre de ladite convention et des engagements pris avec des collectivités territoriales et tout autre organisme. La convention quinquennale entre l'État et l'UESL a été signée le 2 décembre 2014 ;

- d'animer le réseau des collecteurs, assurer le suivi et l'évaluation de la gestion et l'amélioration de leur performance, animer la politique de gestion des risques des CIL ;

- de veiller à la cohérence des interventions et à l'organisation territoriale des CIL, et de valider les fusions entre CIL ;

- de veiller au respect des principes qu'elle fixe en matière de déontologie et de rémunération ;

- de mobiliser les CIL pour la mise en oeuvre du droit au logement opposable, notamment par l'utilisation d'une partie des contrats de réservation ;

- de pouvoir en cas de non-respect caractérisé de certaines de ses directives exiger d'un collecteur la révocation de son directeur général.

L'UESL est gérée par un conseil d'administration composé de cinq représentants permanents au plus désignés par les organisations d'employeurs associées et de cinq représentants permanents au plus désignés par les organisations de salariés associées. En outre, la présence de l'État ayant été renforcée par la loi MOLLE, trois commissaires du Gouvernement siègent au conseil d'administration. Ils représentent respectivement les ministères du logement, de l'économie et du budget. Outre qu'ils peuvent demander une seconde délibération d'une décision, ils disposent d'un veto qu'ils peuvent opposer conjointement aux délibérations :

- qui ne sont pas compatibles avec le respect de l'équilibre entre les emplois et les ressources des fonds issus de la PEEC ou avec l'atteinte des fins mentionnées à l'article L. 313-19 du code de la construction et de l'habitation ;

- qui compromettent le remboursement des emprunts souscrits par l'union ;

- qui fixent pour l'union un budget manifestement surévalué au regard de ses missions ;

- qui sont non conformes à la réglementation ou à la convention quinquennale signée avec l'État.

L'Agence nationale pour la participation des employeurs à l'effort de construction (ANPEEC) qui était chargée jusqu'en 2008 d'une mission générale d'élaboration des règles régissant les activités des collecteurs s'est vu confier « une mission d'étude, d'évaluation et de contrôle relative à la participation des employeurs à l'effort de construction ». Son champ de contrôle qui concernait les collecteurs a été étendu à l'UESL et aux filiales des collecteurs et de l'Union. En outre, la composition de son conseil d'administration a été recentrée sur des représentants de l'État. La loi ALUR a fusionné l'ANPEEC avec la mission interministérielle d'inspection du logement social (Miilos) pour devenir à compter du 1 er janvier 2015, l'Agence nationale de contrôle du logement social (ANCOLS).

SCHÉMA D'ORGANISATION ACTUELLE DU RÉSEAU ACTION LOGEMENT

Source : Action Logement

3. L'amélioration de la gestion financière du réseau Action logement et la baisse de ses coûts de fonctionnement

La réduction des coûts de fonctionnement du réseau Action Logement est un objectif ancien, avancé lors de la réforme d'Action Logement mise en oeuvre par la loi MOLLE en 2009, laquelle avait pour objectif d'améliorer la gestion des collecteurs et ainsi permettre la réalisation d'économies importantes à hauteur de 100 millions d'euros dès 2011.

Action Logement s'est fixé pour objectif en novembre 2010 de réduire les coûts de gestion des collecteurs de 10 %. Afin de contribuer à cette réduction des coûts, outre la diminution du nombre de collecteurs, plusieurs mesures ont été privilégiées : développement d'une culture de contrôle de gestion pour améliorer la performance des collecteurs, recentrage des collecteurs sur leurs missions principales de collecte et d'actionnaire de logements sociaux, incitation à une plus grande maîtrise des coûts.

Par ailleurs, la loi dite ALUR a prévu plusieurs mesures pour maîtriser les frais de fonctionnement d'Action Logement et pour moderniser la gestion financière du réseau.

À compter de l'exercice 2016, les collecteurs doivent établir un rapport de gestion publié dans les mêmes conditions que leurs comptes annuels. Ils doivent en outre mettre en place des comptes combinés, selon les règles définies par le règlement de l'Autorité des normes comptables, publiés dans les mêmes conditions que leurs comptes annuels. Des comptes combinés de l'ensemble constitué par l'union, l'APAGL, l'Association foncière logement et les CIL doivent également être publiés par l'UESL.

En outre, la loi a également prévu que la convention quinquennale entre l'État et l'UESL fixerait le montant maximum annuel affecté au financement des investissements et des charges nécessaires au fonctionnement des collecteurs. Ce montant a été fixé à 317 millions d'euros.


* 1 Cour des comptes, la participation des employeurs à l'effort de construction, rapport public annuel 2006, février 2006

Cour des comptes, les enjeux de la participation des employeurs à l'effort de construction, rapport public annuel 2009, février 2009

Cour des comptes, la réforme de l'organisation et de la gestion du « 1% logement », rapport public annuel 2010, février 2010

Cour des comptes, le 1% logement : une réforme à mi-parcours, rapport public annuel 2013, février 2013

* 2 Cour des comptes, le 1% logement : une réforme à mi-parcours, février 2013

* 3 Cour des comptes, la participation des employeurs à l'effort de construction, 2006

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