CHAPITRE IV - RENFORCEMENT DES CAPACITÉS D'INTERVENTION DE L'ÉTAT

Article 27 (art. L. 122-2 du code de la sécurité intérieure ; art. L. 6332-2 du code des transports) - Transfert au préfet de police de Paris de la police des aérodromes de Paris-Charles-de-Gaulle, du Bourget et d'Orly

L'article 27 du projet de loi propose de confier au préfet de police la police spéciale des aérodromes parisiens afin qu'il apporte son expertise technique à leur sécurisation.

Initialement, cet article ne concernait que les aérodromes de Paris-Charles-de-Gaulle et du Bourget, qui relèvent aujourd'hui du préfet de Seine-Saint-Denis.

En première lecture, le Sénat a adopté, avec un avis favorable de votre rapporteur et contre l'avis du Gouvernement, un amendement de M. Vincent Capo-Canellas visant à étendre l'article 27 à l'aérodrome de Paris-Orly 43 ( * ) .

Comme l'a précisé notre collègue Vincent Capo-Canellas, « Orly dénombre 30 millions de passagers (...). Sur ces trois sites 44 ( * ) , les problématiques sont les mêmes en matière de sûreté. Nous avons tous à l'esprit que les plateformes aéroportuaires peuvent être des cibles pour les terroristes (...). À Orly, comme à Roissy, il est nécessaire d'assurer la coordination des services de police et d'accroître le travail de renseignement pour faire face aux défis et aux menaces actuelles » 45 ( * ) .

L'Assemblée nationale n'a pas remis en cause l'intégration de Paris-Orly au dispositif de l'article 27.

À l'initiative de MM. Jean-Yves Le Bouillonnec et Patrick Mennucci, rapporteurs, elle s'est bornée à aménager le calendrier de la réforme, « afin de laisser aux services de sécurité intérieure un délai suffisant pour redéployer leurs moyens » 46 ( * ) . Ce texte a été adopté dans les mêmes termes en nouvelle lecture.

Concrètement, le préfet de police serait en charge :

- des aérodromes de Paris-Charles-de-Gaulle et du Bourget au lendemain de la publication de la loi, comme prévu initialement ;

- de l'aérodrome d'Orly-Paris à une date fixée par décret et, au plus tard, à l'issue d'un délai de trois ans à compter de la promulgation de la loi.

Tout en reprenant la volonté du Sénat de rationnaliser la police des aérodromes parisiens, l'Assemblée nationale a prévu un délai suffisant pour organiser au mieux cette réforme.

Article 28 (art. L. 323-2, L. 323-3 [nouveau] et L. 324-1 du code de la sécurité intérieure, art. L. 561-2 et L. 561-13 du code monétaire et financier, art. 706-73-1 du code de procédure pénale, art. 47 et 49 de la loi du 30 juin 1923 portant fixation du budget général de l'exercice 1923 [abrogés]) - Réforme de la police des jeux et création de « clubs de jeux »

L'article 28 du projet de loi poursuit deux objectifs : la réforme de la police des jeux, d'une part, et la création, à titre expérimental, de « clubs de jeux » , d'autre part.

Initialement, cet article tendait à habiliter le Gouvernement à légiférer par ordonnance dans un délai de neuf mois à compter de la publication de la présente loi.

En première lecture, votre commission des lois a supprimé l'article 28 à l'initiative de notre collègue Pierre Charon. Elle s'est notamment montrée très réservée concernant le recours à une ordonnance pour réformer la police des jeux. Elle a également regretté l'insertion de cette demande d'habilitation dans un projet de loi portant prioritairement sur le droit des collectivités territoriales.

L'Assemblée nationale a considéré, comme le Sénat, « que l'on ne pouvait passer par une ordonnance pour une matière touchant à l'ordre public et à la fiscalité » 47 ( * ) .

En première lecture, nos collègues députés ont adopté un amendement de MM. Jean-Yves Le Bouillonnec et Patrick Mennucci visant à réformer la police des cercles de jeux et des casinos sans habiliter le Gouvernement à procéder par ordonnance. En nouvelle lecture, ils ont adopté trois amendements de précision des rapporteurs.

• La réforme de la police des jeux

Le texte transmis au Sénat tend, tout d'abord, à réformer la police des jeux. Il comprend deux dispositions qui s'appliqueraient tant aux casinos qu'aux clubs de jeux.

Il s'agit, tout d'abord, de créer un régime d'autorisation pour certaines opérations financières modifiant le capital de ces établissements, en lieu et place de l'actuel régime de déclaration 48 ( * ) (nouvel article L. 323-3 du code de la sécurité intérieure). Les services du ministère de l'intérieur disposeraient de plusieurs prérogatives pour instruire ces dossiers : recours au service TRACFIN ainsi qu'à la coopération internationale et obtention de documents « sans que le secret professionnel ne puisse être (...) opposé » .

L'article 28 vise à appliquer l'article 706-73-1 du code de procédure pénale à deux délits lorsqu'ils sont commis en bande organisée : la participation à la tenue d'une maison de jeux et l'importation, la fabrication, la mise à disposition de tiers, l'installation et l'exploitation d'appareils de jeux de hasard ou d'adresse 49 ( * ) .

Cette disposition permettrait d'appliquer à ces deux délits « la procédure applicable à la criminalité et à la délinquance organisées » . Il s'agit, notamment, de permettre des interceptions judiciaires lors d'enquêtes préliminaires (articles 706-95 à 706-95-10 du code de procédure pénale) et des perquisitions de nuit (article 706-89 du même code).

• La création de clubs de jeux

Le texte transmis au Sénat tend à créer à Paris, à titre expérimental et pour une durée de trois ans à compter du 1 er janvier 2018, des « clubs de jeux » qui se substitueraient aux actuels cercles de jeux 50 ( * ) .

L'autorisation d'exploitation des clubs serait délivrée par le ministère de l'intérieur, notamment après enquête administrative concernant le personnel de ces établissements 51 ( * ) . Cette autorisation pourrait être suspendue ou abrogée en cas « d'inobservation » du droit applicable, sans que cette suspension ou abrogation ouvre droit à indemnités.

Contrairement aux cercles, les clubs de jeux seraient constitués sous forme de sociétés régies par le code de commerce et devraient nommer un commissaire aux comptes. Les clubs seraient soumis à l'impôt sur les maisons de jeux (articles 1559 à 1566 du code général des impôts) mais également à l'impôt sur les sociétés (article 206 du même code).

Ils assureraient eux-mêmes la fonction de « banquier » , alors que ce rôle est aujourd'hui exercé, dans les cercles de jeux, par un ou plusieurs joueurs professionnels 52 ( * ) .

Enfin, les clubs de jeux se verraient appliquer les mêmes dispositions que les casinos concernant la lutte contre le blanchiment des capitaux 53 ( * ) , la constitution de leur directoire 54 ( * ) et la modification de leur capital 55 ( * ) .

Ces établissements pourraient proposer des jeux de cercle ou de contrepartie 56 ( * ) dont la liste serait fixée par décret en Conseil d'État. L'usage de machines à sous resterait proscrit.


* 43 Aérodrome qui relève aujourd'hui de la préfecture du Val-de-Marne.

* 44 Soit les aérodromes de Paris-Charles-de-Gaulle, du Bourget et de Paris-Orly.

* 45 Compte rendu intégral de la séance du Sénat du 8 novembre 2016.

* 46 Rapport n° 4293 de première lecture de MM. Jean-Yves Le Bouillonnec et Patrick Mennucci, fait au nom de la commission des lois de l'Assemblée nationale, p. 215. Ce rapport est consultable à l'adresse suivante : http://www.assemblee-nationale.fr/14/pdf/rapports/r4293.pdf .

* 47 Rapport n° 4293 de première lecture de MM. Jean-Yves Le Bouillonnec et Patrick Mennucci, fait au nom de la commission des lois de l'Assemblée nationale, p. 227. Ce rapport est consultable à l'adresse suivante : http://www.assemblee-nationale.fr/14/pdf/rapports/r4293.pdf .

* 48 Actuel article R. 321-18 du code de la sécurité intérieure.

* 49 Délits prévus aux articles L. 324-1 et L. 324-2 du code de la sécurité intérieure.

* 50 Par coordination, les articles 47 et 49 de la loi du 30 juin 1923 portant fixation du budget général de l'exercice 1923 (cercles de jeux) seraient abrogés. Les cercles de jeux existants bénéficieraient d'une période transitoire : ils resteraient régis par le droit actuel entre le 1 er janvier 2018 et le 1 er janvier 2019, puis prendraient part à l'expérimentation prévue par l'article 28.

* 51 Conformément à l'article L. 114-1 du code de la sécurité intérieure.

* 52 Pour mémoire, en l'état du droit, des joueurs professionnels - et non les cercles de jeux - apportent des liquidités en encaissant les mises des perdants et en prenant à leur charge les gains des gagnants.

* 53 Chapitre I er du titre VI du livre V du code monétaire et financier.

* 54 Article L. 321-4 du code de la sécurité intérieure. Le directoire des clubs de jeux devrait être composé de ressortissants français ou d'un des États membres de l'Union européenne ou d'un des autres États parties à l'accord sur l'Espace économique européen, majeurs, jouissant de leurs droits civiques et politiques.

* 55 Nouvel article L. 323-3 du code de la sécurité intérieure (Cf. supra) .

* 56 Cf. , pour plus de précisions sur les différentes catégories de jeux, le rapport n° 82 (2016-2017) de première lecture, fait au nom de la commission des lois du Sénat, p. 80-82. Ce rapport est consultable à l'adresse suivante : http://www.senat.fr/rap/l16-082/l16-0821.pdf .

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