B. LA POURSUITE D'UNE RÉDUCTION DES CHARGES DE LA MISSION

Les dépenses de la mission s'inscrivent sur une trajectoire régulièrement baissière dont la pente devrait s'accentuer à mesure de l'entrée en vigueur de l'ensemble des réformes apportées aux régimes spéciaux de retraite, dont le calendrier a été conçu comme devant être progressif et subir un décalage par rapport à l'application aux autres régimes de retraite, notamment à celui de la fonction publique de l'État.

La baisse des dépenses de la mission, qui permet de respecter le plafond de la programmation triennale des finances publiques, est étroitement liée cette année encore à une inflation contenue et à l'économie procurée de ce fait par l'absence de toute revalorisation des pensions en cours d'année.

Quelques nuances doivent être apportées à ce panorama pour tenir compte de la situation de certains régimes et mettre en évidence la vocation de subvention d'équilibre des dépenses de la mission sensibles à ce titre aux évolutions des dépenses mais aussi des recettes des régimes subventionnées.

1. Une dépense moins dynamique que prévu dans la programmation triennale

Malgré une plus que faible contribution à la gestion de l'équilibre budgétaire de l'exercice, la mission peut être considérée comme ayant participé à la maîtrise des dépenses publiques programmée à moyen terme, dans le cadre de la loi de programmation des finances publiques.

Après que l'an dernier, avait été constaté un dépassement de la programmation, le montant des crédits exécutés en 2015 ayant été supérieur de 38 millions d'euros (soit + 0,5 %) au montant prévu dans le cadre du triennal 2014-2019, l'exécution des crédits a renoué en 2016 avec les résultats constatés en 2013 et 2014 où le plafond annuel fixé en loi de programmation des finances publiques avait été respecté.

En 2016, l'exécution a dégagé une marge de l'ordre 76 millions d'euros sous le plafond de la programmation pluriannuelle.

Dépassement et respect des dernières lois de programmation

(en millions d'euros de crédits de paiement)

2013

2014

2015

2016

2017

Triennal 2013-2015 (au format 2014)

6 540

6 755

Exécution

6 438

6 506

Triennal 2015-2017 (au format 2015)

6 414

6 396

6 396

Exécution

6 452

6 320,3

LFI

6 414

6 320,3

* Programmation initiale, à périmètre courant.

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données des rapports annuels de performances de la mission et des lois de programmation pour 2012-2017 et pour 2014-2019)

Ce résultat provient, en particulier, d'une inflation plus faible que celle sur laquelle avait été construite la programmation budgétaire (de 1 % pour les années 2015 et 2016).

Déjà, l'exécution 2015, malgré le dépassement du plafond auquel elle avait donné lieu avait profité d'une revalorisation moindre qu'escomptée (au lieu de + 0,9 % au 1 er octobre 2015, elle avait été limitée à 0,1 %) cet écart dégageant des économies chiffrées à 47 millions d'euros par le Gouvernement.

En 2016, les réformes apportées aux modalités d'indexation des prestations sociales, parmi lesquelles les retraites, par les lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2016 sont entrées en application.

Elles sont la dernière étape en date d'une chronique d'évolution des règles de revalorisation des pensions particulièrement fournie ces dernières années.

La revalorisation des pensions en 2014 et 2015 et depuis la réforme de 2016

Aux termes de la loi du 21 août 2003, le coefficient de revalorisation des pensions est égal à l'évolution prévisionnelle des prix hors tabac pour l'année N , corrigé, le cas échéant, de la révision de la prévision d'inflation de l'année N-1 telle que figurant dans le rapport économique, social et financier (RESF) annexé au projet de loi de finances de l'année N.

Entre 2009 et 2013 , la revalorisation de l'ensemble des pensions est intervenue au 1 er avril de chaque année et non plus au 1 er janvier. La revalorisation pour l'année N était égale à la prévision d'inflation établie par la Commission économique de la Nation, ajustée sur la base de l'inflation définitive constatée pour N-1 (connue en avril N de manière définitive).

En application de la loi du 20 janvier 2014 « garantissant l'avenir et la justice du système de retraites », la revalorisation de l'ensemble des pensions (hors minimum vieillesse et majoration pour tierce personne) doit désormais intervenir au 1 er octobre de chaque année 240 ( * ) .

Dans ces conditions, aucune revalorisation n'est intervenue en 2014 compte tenu de l'application du correctif destiné à compenser les effets d'une surestimation du rythme de l'inflation en 2012 (0,7 effectif contre une prévision de 1,2 %) dans un contexte où cet écart s'était révélé juste égal à l'inflation prévue dans le rapport économique social et financier annexé au projet de loi de finances de l'année (0,5 %).

Compte tenu des prévisions d'inflation, les pensions de retraite ont été revalorisées de 0,1 % au 1 er octobre 2015 , soit la prévision d'inflation pour 2015 telle que figurant dans le rapport économique, social et financier (RESF) annexé au projet de loi de finances pour 2016, car le gel initialement prévu lors de l'élaboration de la loi de financement rectificative pour la sécurité sociale de juillet 2014 a conduit à ne pas appliquer le correctif entre l'inflation prévisionnelle de 2014 et l'inflation définitive constatée.

Compte tenu du nouveau calendrier d'application des revalorisations des pensions, l'effet en année pleine de la revalorisation des pensions en 2015 peut être estimé à un équivalent-revalorisation entre 0,015 et 0,025 %.

Les lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2016 ont apporté de nouvelles évolutions. Elles prévoient d'harmoniser et de simplifier les règles de revalorisation de l'ensemble des prestations sociales, y compris des pensions de retraite. Ainsi, les pensions de retraite demeureront revalorisées au 1 er octobre de chaque année mais cette revalorisation se fondera désormais sur l'évolution des prix hors tabac constatée en moyenne annuelle sur les douze derniers mois disponibles . En cas d'évolution négative des prix, une règle de « bouclier » garantira le maintien des prestations à leur niveau antérieur.

Compte tenu de ces nouvelles règles et de l'hypothèse d'inflation retenue dans le projet de loi de finances pour 2016, les pensions de retraite devaient être revalorisées de 0,6 % au 1 er octobre 2016. Or, les évolutions des prix ont conduit à l'absence de toute revalorisation des pensions à cette échéance.

Ainsi, le jeu de l'indexation des pensions sur l'exercice 2016 s'est limité à l'application de l'indexation de l'année précédente en année pleine (soit, compte tenu du calendrier, un « effet-prix » de l'ordre de 0,06 %).

Néanmoins, même si l'inflation avait été conforme à la prévision qui en avait été formulée, les dépenses de la mission auraient respecté la programmation triennale, ne laissant toutefois qu'une marge d'environ 12,8 millions d'euros sous le plafond du triennal en 2016 contre les quelque 76 millions constatés.

2. Une baisse des dépenses de la mission qui admet quelques nuances...
a) Une baisse globale des dépenses de la mission...

Les réformes des régimes de retraite inaugurés en 2003 ont commencé à toucher les régimes spéciaux à partir de 2016 moyennant un calendrier d'application décalé (de quatre ans) par rapport à leur application aux fonctionnaires de l'État. Par ailleurs, des régimes ont été exemptés de ces réformes : les régimes fermés et le régime des marins que finance le programme 197 de la mission.

L'année 2016 est la dernière avant l'application du relèvement des seuils d'âge prévu par la loi de novembre 2010 (plus deux ans en respectant les différences existantes entre les catégories sédentaires et les catégories actives).

Néanmoins, un certain nombre de dispositions sont entrés en application : relèvement des taux de cotisation salariales et employeurs, décote, décalage de l'échéance de l'indexation des pensions..., tandis que les mesures de carrière négociées dans le cadre des réformes, comme la création d'échelons supplémentaires de fin de carrière) exercent déjà des effets sur les comportements de départ en retraite.

Ces mesures modifient le système dans le sens d'une hausse des recettes des régimes qu'elles touchent et d'une modération de la progression des dépenses. A contexte donné 241 ( * ) , elles tendent à réduire les besoins de financement des régimes.

L'exercice 2016 traduit cette réduction puisque les dépenses de la mission s'inscrivent en baisse de 132 millions d'euros par rapport à 2015, soit un repli de 2 % qui amplifie les économies constatées l'an dernier. Au total, par rapport à 2014, les dépenses de la mission ont été allégées de 186 millions d'euros (- 2,9 %).

b) ...qui admet quelques nuances

Les économies réalisées en 2016 ont touché tous les régimes spéciaux mais à l'exception du régime de la RATP et selon des proportions très variables.

Le régime de la RATP est le seul des régimes spéciaux couverts par la mission qui a dû appeler en 2016 une subvention d'équilibre supérieure à celle de 2015. L'augmentation de la subvention a été de l'ordre de 18 millions d'euros (+ 2,9 %). Les pensions ont connu une certaine dynamique (+ 28,8 millions d'euros, soit + 2,7 %) tandis que les cotisations ont progressé mais moins (de 1,9 %). La hausse des pensions résulte d'une augmentation du nombre des pensionnés qui devrait se prolonger jusqu'en 2050.

L'autre grand régime de retraite des transports terrestres, celui de la SNCF, même s'il a dû bénéficier d'une subvention supérieure à la prévision budgétaire (voir supra ) a dégagé une économie de 14,8 millions d'euros, qu'on peut qualifier de très mesurée (0,04 % par rapport à 2015), les cotisations versées au régime étant en repli de 25,4 millions d'euros (1,2 %) alors qu'elles étaient attendues en hausse, la moins-value de recettes atteignant 63,3 millions d'euros (soit une déconvenue de l'ordre de 3 %).

Dans ces conditions, l'essentiel du repli de la dépense de la mission est attribuable aux régimes des marins et aux régimes des mines, évolution qui traduit la baisse régulière des pensionnés de ces deux régimes.


* 240 En pratique, compte tenu des délais de paiement, le versement effectif de la pension revalorisée n'intervient qu'en novembre, dans la plupart des cas.

* 241 Le contexte des régimes spéciaux est sensible à des évolutions économiques et sociodémographiques pouvant marquer les entreprises auxquelles ils sont associés, sort commun à tous les régimes de retraites mais particulièrement prononcé pour les régimes spéciaux qui, du fait de leur isolement, ne bénéficient pas des effets amortisseurs de régimes plus diversifiés.

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