MISSION « RÉGIMES SOCIAUX ET DE RETRAITE » ET CAS « PENSIONS » - M. JEAN-CLAUDE BOULARD, RAPPORTEUR SPÉCIAL

I. EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION « RÉGIMES SOCIAUX ET DE RETRAITE » EN 2016

La mission « Régimes sociaux et de retraite » regroupe les subventions versées par l'État à certains régimes spéciaux en déséquilibre démographique et comporte, à ce titre, presque exclusivement des crédits de titre 6 (dépenses d'intervention).

Ces régimes correspondent à des entreprises (SNCF, RATP, SEITA...) ou à des professions (marins, mineurs...) considérées comme dotées de caractéristiques particulières du fait d'une diversité de facteurs propres à leur histoire, leurs équilibres, la nature des professions exercées... Certains sont dits « ouverts » c'est-à-dire qu'ils renouvellent leur population quand d'autres dits « fermés » n'accueillent plus de nouveaux cotisants et sont appelés à s'éteindre plus ou moins rapidement.

Les dépenses budgétaires en provenance de la mission, qui ne couvre que certains des régimes spéciaux de retraite, s'élèvent en 2016 à 6,3 milliards d'euros .

À titre d'illustration, cette somme représente 11 % des dépenses de pensions autorisées dans le cadre du compte d'affectation spéciale « Pensions » ou encore, pour la comparer avec une autre mission budgétaire dédiée à des dépenses de transferts vers les ménages, deux fois et demi les dépenses d'intervention de la mission « Anciens combattants ».

Les dépenses de la mission ne financent pas la totalité des prestations servies par les régimes spéciaux mais seulement les déséquilibres financiers, qui sont assez différenciés selon les cas, entre les prestations qu'ils servent et leurs ressources propres.

Au niveau de la mission, qui comporte trois programmes d'importance inégale, les dépenses ont été conformes aux crédits initialement programmés pour 2016 , moyennant un léger ajustement en gestion entre les programmes qu'elle regroupe, marquant une réduction par rapport à l'année précédente , avec, toutefois, des nuances selon les programmes de la mission.

A. UNE EXÉCUTION PRESQUE CONFORME AUX PRÉVISIONS AU PRIX DE QUELQUES ADAPTATIONS EN GESTION

Au cours de l'exercice 2016, les crédits programmés ont connu des taux d'exécution élevés, manifestation d'une programmation budgétaire globalement satisfaisante. Quelques ajustements, mineurs, ont été nécessaires afin de compenser la sous-dotation des besoins de financement de la caisse de retraite de la SNCF, qui se révèle récurrente. La pleine consommation des crédits a contraint les gestionnaires à lever la réserve de précaution, qui apparaît comme d'application largement virtuelle s'agissant d'une mission budgétaire chargée de financer des droits sociaux.

Dans ces conditions, la contribution de la mission au bouclage des objectifs macrofinanciers a été nulle.

1. Des dépenses globales exactement identiques aux crédits programmés...

L'écart entre la prévision de dépenses et l'exécution a été très faible ces trois dernières années.

À titre d'exemple, 99,9 % des crédits votés en loi de finances initiale en 2014 avaient été consommés tandis qu'en 2015, la dépense n'avait été supérieure aux crédits votés en loi de finances initiale que de 38 millions d'euros, soit un écart minime de 0,5 %.

En 2016, l'écart entre les crédits de la mission et les dépenses est nul .

Données l'exécution des crédits de la mission entre 2014 et 2016

Exécution 2014

Exécution 2015

Crédits votés en LFI 2016

Crédits ouverts en 2016

Exécution 2016

Dépenses 2016/2015

Dépenses 2016/ crédits votés en 2016

Programme 198 « Régimes sociaux de retraite et transports terrestres »

4 129

4 089

4 039

4 066

4 066

- 23

27

Programme 197 « Régimes de retraite et de sécurité sociale des marins »

820

853

825

825

825

- 28

0

Programme 195 « Régimes de retraite des mines, de la SEITA et divers »

1 557

1 510

1 457

1 429

1 429

- 81

- 27

Total

6 506

6 452

6 321

6 320

6 320

- 132

0

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données du rapport annuel de performances de la mission « Régimes sociaux et de retraite » annexé au projet de loi de règlement pour 2015 et 2016)

2. ...au prix d'adaptations en gestion, mineures mais récurrentes en leur nature
a) Des transferts mineurs entre programmes de la mission

Si, globalement, le taux de consommation des crédits ouverts par la loi de finances pour 2016 s'est élevé à 100 %, ce résultat s'est accompagné d'écarts entre les taux de consommation des crédits des différents programmes.

Si, pour le programme 197, les crédits ouverts en 2016 ont suffi, moyennant une consommation de 100 % des dotations, les crédits initialement ouverts pour le programme 198 n'auraient pas suffi à couvrir les dépenses effectives. Celles-ci ont excédé les crédits ouverts de 27,4 millions d'euros (soit un excédent de 0,7 %). De son côté, le programme 195 n'a pas dépensé la totalité de ses dotations. Ses dépenses ont été inférieures au niveau des crédits programmés de 27,4 millions d'euros.

Les écarts, en plus et en moins, observés sur les programmes 195 et 198 ont été constatés par un décret de transfert intervenu en gestion (le 26 novembre 2016) par lequel 27,3 millions d'euros ont été transférés du programme 195 vers le programme 198, permettant de financer l'impasse de la prévision initiale.

Dans son analyse de l'exécution budgétaire, la Cour des comptes s'interroge sur la conformité de ce transfert aux dispositions de la loi organique sur les lois de finances (article 12-2° de la loi organique) dans la mesure où les objets initial et final des crédits transférés pourraient être considérés comme différents. Elle en conclut que ce mouvement de crédits aurait dû passer par un décret d'avances ou par une loi de finances rectificative.

Votre rapporteur spécial prend acte de l'observation de la Cour des comptes et recommande qu'à l'avenir, si les conditions en sont réunies, des mouvements de crédits de cette nature empruntent les voies prévues par la loi organique.

b) Un arbitrage plus significatif au sein du programme 198

Au-delà, il y a lieu de considérer les mouvements de crédits intervenus au sein des programmes.

Deux mouvements d'ampleur disparate doivent être mentionnés. Le premier, interne au programme 195, a consisté à mettre à disposition de la Caisse des régies ferroviaires d'outre-mer des crédits de la Caisse autonome nationale de sécurité sociale dans les mines. D'un montant très modeste (27 700 euros), il contraste de ce point de vue avec les 24 millions d'euros versés à la Caisse de prévoyance et de retraite de la SNCF, qui avait déjà été bénéficiaire du décret d'avances de novembre 2016.

Au total, les crédits destinés à cette caisse ont été abondés en gestion de plus de 51 millions d'euros , dont 16 millions d'euros redéployés à partir des crédits ouverts au bénéfice de la caisse de la RATP et 8 millions provenant de régimes divers.

L'an dernier, le besoin de financement de la CPRP SNCF avait déjà contraint à adapter en cours d'année la gestion de la mission pour le combler, un déficit supplémentaire de près de 81 millions d'euros par rapport aux prévisions budgétaires ayant dû être financé.

C'est donc la deuxième année consécutive que le besoin de financement de la CPRP SNCF à couvrir par des crédits budgétaires se trouve sous-estimé en prévision avec, cette année, une ampleur de 1,5 % des dépenses effectives, somme toute modérée.

c) Une réserve de précaution globalement dégelée

La mise en réserve des crédits du programme 198 (au taux de 8 % en 2016) a été intégralement levée en fin de gestion. Il en a été de même pour le programme 197 tandis que pour le programme 195 une partie des crédits gelés (17,1 millions d'euros sur un total de 116,5 millions d'euros mis en réserve) a été laissée disponible pour les opérations de fin de gestion.

L'application d'un taux de réserve aussi élevé à des crédits dont la vocation, même si elle est moins directe que lorsque celui-ci verse directement des prestations représentatives de créances des administrés, est d'honorer des engagements de l'État suscite une réelle perplexité. Prise à la lettre, elle jette une sorte de suspicion sur la parole de l'État, qui, convenons-en est particulièrement fâcheuse. Sa seule justification pourrait provenir d'ajustements sur les recettes propres des régimes dont l'État garantit les équilibres financiers. Or, cette variable est peu flexible, se trouvant l'objet d'une programmation réglementaire qui est au coeur des réformes des régimes spéciaux de retraite mises en oeuvre depuis 2007.

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