N° 108

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2017-2018

Enregistré à la Présidence du Sénat le 23 novembre 2017

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances pour 2018 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

Par M. Albéric de MONTGOLFIER,

Rapporteur général,

Sénateur

TOME III

LES MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES

ET LES DISPOSITIONS SPÉCIALES

( seconde partie de la loi de finances )

ANNEXE N° 21

COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE : PARTICIPATIONS FINANCIÈRES DE L'ÉTAT

Rapporteur spécial : M. Victorin LUREL

(1) Cette commission est composée de : M. Vincent Éblé , président ; M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général ; MM. Éric Bocquet, Emmanuel Capus, Yvon Collin, Bernard Delcros, Mme Fabienne Keller, MM. Philippe Dominati, Charles Guené, Jean-François Husson, Georges Patient, Claude Raynal , vice-présidents ; M. Thierry Carcenac, Mme Nathalie Goulet, MM. Alain Joyandet, Marc Laménie , secrétaires ; MM. Philippe Adnot, Julien Bargeton, Arnaud Bazin, Yannick Botrel, Michel Canevet, Vincent Capo-Canellas, Philippe Dallier, Vincent Delahaye, Mme Frédérique Espagnac, MM. Rémi Féraud, Jean-Marc Gabouty, Jacques Genest, Alain Houpert, Éric Jeansannetas, Patrice Joly, Roger Karoutchi, Bernard Lalande, Nuihau Laurey, Mme Christine Lavarde, MM. Antoine Lefèvre, Dominique de Legge, Gérard Longuet, Victorin Lurel, Sébastien Meurant, Claude Nougein, Didier Rambaud, Jean-François Rapin, Jean-Claude Requier, Pascal Savoldelli, Mmes Sophie Taillé-Polian, Sylvie Vermeillet, M. Jean Pierre Vogel .

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) : 235 , 264 rect. , 266 rect. , 273 à 278 , 345 et T.A. 33

Sénat : 107 et 109 à 114 (2017-2018)

LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DU RAPPORTEUR SPÉCIAL

1. Le compte d'affectation spéciale présente une singularité : afin de préserver la confidentialité sur les opérations de cessions, la programmation est conventionnellement déterminée à l'équilibre, avec un montant de 5 milliards d'euros en produit de cessions. Sans remettre en cause la nécessaire confidentialité des opérations de cession, l'inscription de la moyenne des cessions réalisées lors des trois derniers exercices permettrait de renforcer l'information du Parlement et sa capacité de contrôle de l'action du Gouvernement.

2. La recapitalisation d'EDF et d'Areva pour un montant total de 7,5 milliards d'euros a été menée à bien en 2017. L'anticipation du précédent Gouvernement par l'augmentation du solde cumulé du compte a favorisé cette refondation ambitieuse de la filière nucléaire française.

3. La présentation du compte en déficit prévisionnel de 1,5 milliard d'euros en loi de finances pour 2017 a permis d'intégrer dès la prévision l'effet négatif de la recapitalisation sur le solde budgétaire, concrétisé par un versement d'un même montant en provenance du budget général.

4. Malgré le retour à une programmation conventionnelle présentant le compte à l'équilibre pour 2018, les objectifs pluriels qui lui sont assignés le mettront sous tension. Les dépenses déjà identifiées pour la fin de l'exercice 2017 et pour 2018 représentent environ 1,7 milliard d'euros, tandis que la contribution au désendettement est réactivée en 2018, pour un montant de 1 milliard d'euros. Ces dépenses conduiraient, toutes choses égales par ailleurs, à un solde négatif du compte de - 2,3 milliards d'euros, soit la moyenne des cessions réalisées en 2015 et 2016.

5. Le Gouvernement a annoncé vouloir lancer une nouvelle vague de cessions pour un montant de 10 milliards d'euros, afin d'alimenter un « fonds pour l'innovation de rupture ».

6. Ces objectifs soulignent la volonté d'opérer un recentrage du portefeuille des participations de l'État. Il importe donc que le Gouvernement précise sa conception du rôle des participations publiques. Toute redéfinition du périmètre de l'État actionnaire ne saurait intervenir sans réflexion et débat démocratique préalables.

7. De ce point de vue, le traitement du dossier STX, favorisé par la participation de l'État au capital de l'entreprise, contraste avec le renoncement du Gouvernement dans le dossier Alstom. En renonçant à exercer son option d'achat sur les titres prêtés par Bouygues, le Gouvernement a privé l'État de toute capacité d'influence directe dans le nouvel ensemble Alstom-Siemens. Cette décision reflète la conception libérale de l'État actionnaire promue par le Gouvernement.

8. Compte tenu des participations stratégiques réaffirmées par le Gouvernement et des contraintes de marché, réaliser pour dix milliards d'euros de cessions représenterait près de 30 % du portefeuille cessible.

9. Une telle atrophie remettrait en question le fonctionnement du compte, en accroissant sa rigidité. Elle menacerait la capacité de réaction de l'État face aux difficultés sectorielles temporaires en la soumettant aux contingences budgétaires annuelles, à rebours de la vision de long terme qui devrait prévaloir.

10. L'objectif poursuivi par le Gouvernement avec ces cessions doit être critiqué. Outre que ses modalités concrètes de fonctionnement demeurent inconnues, il peut être douté de l'opportunité de créer un « fonds pour l'innovation » financé par des cessions de participations : il reviendrait à céder 10 % du portefeuille de l'État pour abonder un dispositif qui représenterait 2 % du montant total des montants consacrés chaque année au soutien de l'innovation. Ce mécanisme s'apparente de surcroît à une débudgétisation.

11. Le rendement espéré du « fonds pour l'innovation » doit être rapproché des recettes tirées par l'État de ses participations publiques. Entre 2012 et 2016, 3,26 milliards d'euros de dividendes ont été versés au budget général chaque année en moyenne, soit un montant proche des crédits proposés par le projet de loi de finances pour 2018 pour la mission « Relations avec les collectivités territoriales » (3,66 milliards d'euros).

12. Il importe donc que le Gouvernement privilégie le pragmatisme en étudiant les alternatives afin de déterminer la solution permettant de concilier la volonté louable de soutenir l'innovation de rupture et les intérêts patrimoniaux de l'État. L'affectation des dividendes en numéraire à l'Agence des participations de l'État doit être envisagée.

Au 10 octobre 2017, date limite, en application de l'article 49 de la LOLF, pour le retour des réponses du Gouvernement aux questionnaires budgétaires concernant le présent projet de loi de finances, 43 % des réponses (9 sur 21) portant sur le compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État » étaient parvenues à votre rapporteur spécial.

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