B. LA SORTIE DU VOLET CORRECTIF DU PACTE DE STABILITÉ EST SUSPENDUE AUX DÉCISIONS D'EUROSTAT

La prévision de solde public du Gouvernement au titre de l'année 2017 apparaît en ligne avec celle de la Commission européenne et légèrement plus optimiste (+ 0,1 point) que les estimations retenues par le FMI et l'OCDE dans leur scénario central.

Prévisions de solde public pour 2017

(en % du PIB)

Note de lecture : la prévision de la Commission européenne ne tient pas compte du coût de la recapitalisation d'Areva en comptabilité nationale, estimé à 2,3 milliards d'euros par le Gouvernement.

Source: commission des finances du Sénat (d'après les prévisions d'automne 2017 de la Commission européenne, le scénario central de la mission menée par le FMI au titre de l'article IV dont les conclusions ont été publiées en septembre 2017 et le rapport « Études économique de l'OCDE : France 2017 » de l'OCDE paru en septembre 2017)

Il peut être noté que l'ensemble des prévisions disponibles permettent d'envisager une sortie de la France du volet correctif du pacte de stabilité au printemps prochain, qui suppose au préalable de contenir le déficit public à 3 % du PIB à l'issue de l'exercice 2017.

Les conditions d'une sortie du volet correctif du pacte en 2018

Une décision sur l'existence d'un déficit excessif ne peut être abrogée « que si, selon les prévisions de la Commission européenne, le déficit ne dépassera pas la valeur de référence de 3 % du PIB prévue par le traité au cours de la période de prévision » 6 ( * ) .

Concrètement, sortir du volet correctif du pacte de stabilité exigera donc non seulement que le déficit 2017 soit contenu à 3 % du PIB dans les prévisions de la Commission européenne de printemps 2018 mais également que l'estimation du déficit « à politique inchangée » en 2018 et 2019 ne dépasse pas ce seuil.

Source : commission des finances du Sénat

Deux incertitudes sont toutefois susceptibles de compromettre la sortie de la France du volet correctif.

La première incertitude concerne la comptabilisation de la recapitalisation d'Areva.

Dans le scénario du Gouvernement, la recapitalisation d'Areva pèserait à hauteur de 2,3 milliards d'euros sur le déficit public en 2017. La Commission européenne estime pour sa part qu'il existe un risque que le montant retenu par Eurostat soit supérieur 7 ( * ) .

L'incertitude porte sur le traitement comptable de l'augmentation de capital de l'entreprise NewCo 8 ( * ) - pour un montant de 3,0 milliards d'euros, dont 2,5 milliards d'euros souscrits par l'État.

En effet, le Gouvernement considère qu'Eurostat traitera cette opération comme une opération financière , sans impact sur le solde en comptabilité nationale. En pratique, le traitement comptable des recapitalisations est apprécié par Eurostat au cas par cas selon le principe général suivant : « l'apport de capitaux doit être traité en opération non financière toutes les fois qu'il s'agit d'une opération sans contrepartie », c'est-à-dire lorsque « l'administration ne reçoit pas en échange un actif financier de même valeur » 9 ( * ) . L'apport de fonds ne peut ainsi être qualifié d'opération financière dans sa totalité que « s'il existe un large consensus quant à la forte probabilité que l'entreprise redevienne bénéficiaire dans un avenir proche » 10 ( * ) .

Interrogé sur ce point, le Gouvernement indique que « l'entreprise [NewCo] pourrait dégager des bénéfices à horizon de deux ou trois ans ». Votre rapporteur général estime que la présence d'investisseurs privés japonais aux côtés de l'État conforte cette analyse , qui devra néanmoins être confirmée par Eurostat.

La deuxième incertitude concerne l'impact de l'invalidation par le Conseil constitutionnel de la taxe à 3 % sur les dividendes.

Le scénario du Gouvernement repose en effet sur la comptabilisation de remboursements à hauteur de 5 milliards d'euros en 2017 au titre du contentieux, le reliquat étant supposé peser sur l'exercice 2018.

Là aussi, l'interprétation qui est faite par le Gouvernement des règles fixées dans le système européen des comptes devra toutefois être confirmée par Eurostat 11 ( * ) . Le Gouvernement estime en particulier que, le Conseil constitutionnel ayant seulement dit pour droit de façon générale la non-compatibilité avec la Constitution de l'article 235 ter ZCA du code général des impôts, la charge doit être enregistrée à la date à laquelle la valeur de l'obligation est déterminée de façon fiable par l'administration fiscale, ce qui permettrait de répartir les créances sur deux exercices.

Dans son avis relatif au premier projet de loi de finances rectificative, le Haut Conseil des finances publiques soulignait toutefois qu'à défaut d'une telle répartition sur les deux exercices 2017 et 2018, l'intégralité de la charge pourrait être imputée en 2017, ce qui serait de nature à compromettre la sortie du volet correctif du pacte de stabilité 12 ( * ) .

En pratique, la décision d'Eurostat sera connue « à travers la publication, par l'Insee, du compte provisoire des administrations publiques à la fin du mois de mars 2018 et l'avis qu'Eurostat formulera à son propos » 13 ( * ) .


* 6 « Spécifications relatives à la mise en oeuvre du pacte de stabilité et de croissance et lignes directrices concernant le contenu et la présentation des programmes de stabilité et de convergence », adoptées le 5 juillet 2016 par le comité économique et financier.

* 7 Commission européenne, « Commission opinion on the Draft Budgetary Plan of France », 22 novembre 2017, p. 3.

* 8 NewCo constitue le nouvel Areva, recentré sur le cycle du combustible. Les risques accumulés ont été cantonnés dans une entité juridique distincte, Areva SA.

* 9 Commission européenne, Manuel SEC95 pour le déficit public et la dette publique, édition 2002, p. 61.

* 10 Eurostat, « Apports de capitaux par les administrations publiques dans des entreprises publiques », 21 août 2003.

* 11 Voir sur ce point : Rapport n° 76 (2017-2018) d'Albéric de Montgolfier, fait au nom de la commission des finances et déposé le 8 novembre 2017.

* 12 Avis n° HCFP-2017-5 relatif au premier projet de loi de finances rectificative pour l'année 2017, 30 octobre 2017.

* 13 Réponse du Gouvernement au questionnaire adressé par votre rapporteur général.

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