D. ... S'ACCOMPAGNE D'UNE DIMINUTION DES MOYENS ALLOUÉS AUX ORGANISMES DE RECHERCHE

1. Une hausse des crédits suffisant à peine à compenser le coût des mesures salariales
a) Hors mesures salariales, la stabilité des subventions pour charges de service public traduit une mise à contribution des opérateurs

En 2019, le montant global des subventions pour charges de service public (SCSP) allouées aux opérateurs de la mission « Recherche » représenterait 7,8 milliards d'euros, en augmentation de 42 millions d'euros (+ 0,53 %) à périmètre courant et 39 millions d'euros (+ 0,50 %) à périmètre constant.

La relative stabilité de cette enveloppe globale recouvre néanmoins des réalités diverses, certains opérateurs subissant une baisse substantielle de leur dotation, à commencer par l'IFP Énergies nouvelles
(- 4,1 millions d'euros), tandis que la plupart bénéficient d'une majoration de leur subvention publique pour tenir compte des mesures « fonction publique ».

Ainsi, pour les opérateurs relevant des programmes 172 et 193, les mesures « fonction publique » représentent 28 millions d'euros de coûts supplémentaires, tandis qu'elles entrainent des dépenses de l'ordre de 2 millions d'euros pour les organismes du programme 190. Corrigée de ces mesures salariales, la subvention pour charges de service public allouée aux organismes de recherche ne progresserait que de 0,15 %, traduisant une mise à contribution importante de ces organismes à l'effort de maîtrise de la dépense publique.

Évolution de la subvention pour charges de service public des opérateurs à périmètre courant

(en milliers d'euros)

Opérateurs

Exécution 2017

LFI 2018

PLF 2019

Variation 2019 / 2018 (valeur)

Variation 2019 / 2018 (%)

P172

Académie des technologies

1 298

1 374

1375

1

0,1 %

ANR

29 076

30 192

30 218

26

0,1 %

BRGM

48 190

49 422

49 451

29

0,1 %

CEA

472 898

491 561

490 315

- 1 246

- 0,3 %

CIRAD

127 992

130 234

130 312

78

0,1 %

CNRS

2 721 817

2 622 000

2 643 651

21 651

0,8 %

Génopole

2 826

2 998

3 000

2

0,1 %

IFREMER

147 780

170 503

171 350

847

0,5 %

IHEST

1 473

1 546

1 547

1

0,1 %

INED

16 989

17 193

17 356

163

0,9 %

INRA

682 995

693 112

6 988

6 768

1,0 %

INRIA

170 614

173 642

173 946

304

0,2 %

INSERM

626 073

632 359

635 366

3 007

0,5 %

IPEV

21 829

14 869

14 951

82

0,6 %

IRD

205 810

204 296

205 342

1 046

0,5 %

IRSTEA

60 036

60 827

61 364

537

0,9 %

P193

CNES

544 128

569 775

566 555

- 3 220

- 0,6 %

P190

ANSéS

1 507

1 551

1 551

0

0,0 %

CEA

1 183 572

1 216 028

1 223 869

7 841

0,6 %

IFPEN

125 063

130 110

125 940

- 4 170

- 3,2 %

IFSTTAR

82 908

86 806

87 881

1 075

1,2 %

INERIS

6 188

6 373

6 373

0

0,0 %

IRSN

157 947

170 483

171 633

1 150

0,7 %

P192

GENES

8 918

9 941

10 035

94

0,9 %

Groupe Mines TELECOM

173 248

183 402

189 233

5 831

3,2 %

LNE

24 045

24 385

24 475

90

0,4 %

P191

CEA

26 165

27 318

29 318

2 000

7,3 %

CNES

42 161

45 827

43 827

- 2 000

- 4,4 %

P186

Universcience

94 751

98 544

98 544

0

0,0 %

TOTAL

7 713 546

7 768 128

7 810 174

42 046

0,53 %

Mesures statutaires

- 30 000

12 046

0,15 %

Source : commission des finances du Sénat, à partir des réponses aux questionnaires budgétaires

b) La forte augmentation de la masse salariale contraint les opérateurs à réduire leurs effectifs

La subvention pour charges de service public versée aux opérateurs finance à titre principal la masse salariale des emplois sous plafond et pour une moindre part, les crédits de fonctionnement, d'équipement et d'investissement (FEI).

Or, la masse salariale des organismes de recherche a augmenté dans des proportions considérables au cours des trois dernières années en raison de la relance de la politique salariale , avec la revalorisation du point d'indice, la modernisation des « parcours professionnels, carrières et rémunérations » (PPCR), le régime indemnitaire fondé sur les fonctions, les sujétions, l'expertise et l'engagement professionnel (RIFSEEP) ainsi que le glissement vieillesse et technicité (GVT).

Éléments de politique salariale

Le protocole « « Parcours professionnels, carrières et rémunérations » (PPCR) vise à revaloriser la carrière des fonctionnaires en prévoyant un rééquilibrage progressif au profit de la rémunération indiciaire.

Le glissement vieillesse technicité (GVT) positif est un solde qui traduit l'augmentation de la masse salariale du fait de la progression des agents dans leurs grilles indiciaires (changements d'échelon, de grade ou de corps). Le GVT négatif (ou « effet noria ») désigne les économies dues au fait que les nouveaux recrutés ont un indice plus bas que les agents qui quittent le CNRS.

Du fait des nouvelles grilles PPCR, qui ouvrent de nouveaux espaces indiciaires pour les agents, le GVT est en augmentation.

Si l'impact de ces mesures n'est pas le même en fonction des opérateurs, les Établissements public à caractère industriel et commercial (EPIC) n'étant par exemple pas concernés par les mesures « fonction publique », force est de constater qu'elles ont fait l'objet d'une compensation inégale .

Ainsi, alors que le GVT est financé pour tous les ministères, il ne l'est pas pour les Établissements publics à caractère scientifique et technique (EPST) qui doivent appliquer un principe « d'auto-assurance » , c'est-à-dire dégager par eux-mêmes des marges de manoeuvre budgétaires permettant sa prise en charge. À titre d'exemple, le GVT représente un coût supplémentaire de 25,3 millions d'euros pour le CNRS en 2019, soit un peu plus de 1,1 % de la masse salariale sur subvention de l'État.

De la même manière, plusieurs organismes de recherche ont signalé à votre rapporteur spécial que l'augmentation de 1,7 point du taux de CSG en 2018 a été intégrée dans la hausse de la dotation globale allouée aux EPST, mais pas intégralement compensée . Pour les EPIC, qui n'ont reçu aucune compensation , la hausse du taux de CSG s'est répercutée en baisse de pouvoir d'achat pour les employés. Enfin, si le coût du PPCR a été correctement financé pour 2018 par le biais d'un abondement exceptionnel, rien ne garantit à l'heure actuelle que soient prises en compte les conséquences des nouvelles grilles sur le plus long terme .

Ainsi, selon les informations communiquées à votre rapporteur spécial, les crédits alloués aux opérateurs via la SCSP ne leur permettent pas de financer la totalité de leur schéma d'emploi. La masse salariale budgétée en loi de finances se révèle en tout état de cause insuffisante pour neutraliser l'impact de la politique salariale à effectif constant.

Pour absorber la hausse de cette masse salariale et rester à l'équilibre, les organismes de recherche n'ont dès lors d'autre choix que de réduire leurs effectifs ou puiser dans leur fonds de roulement À titre d'exemple, les effectifs du CNRS ont diminué de 375 ETPT entre 2015 et 2017 (- 1,4 %), tandis que la masse salariale a augmenté de 68 millions d'euros (+ 3,3 %). De son côté, l'Inserm a réduit ses crédits de vacation et d'accueil pour absorber plus de 3 millions d'euros de mesures salariales non couvertes par la SCSP.

Dans ce contexte, la hausse des plafonds d'emploi pour les opérateurs (+ 315 ETPT en 2019) ne peut être suivie d'effet. Ainsi, la plupart de ces plafonds d'emploi demeurent sous-exécutés car hors d'atteinte pour de nombreux opérateurs . En exécution 2017, l'écart entre les plafonds d'emploi et les emplois effectifs s'est creusé à 6 656 ETPT pour les EPST rattachés à la mission « Recherche », tandis qu'il demeure plus limité pour les EPIC, à 131 ETPT.

Écart entre les plafonds d'emploi et les emplois effectifs dans les EPST
de la mission « Recherche » en 2017

(en ETPT)

Source : réponse au questionnaire budgétaire

Sur la période 2011 - 2018, les emplois effectifs des EPST ont ainsi diminué de 4000 ETPT. La situation est relativement similaire pour les EPIC , pour lesquels les plafonds d'emploi restent stables, alors que certains, comme le CEA, doivent faire face à une augmentation inéluctable de leurs effectifs dans certains domaines.

Votre rapporteur spécial est bien évidemment favorable à une gestion rigoureuse des deniers publics, passant par un effort de maîtrise de la dépense. Néanmoins, la sanctuarisation des crédits en faveur de la recherche doit être réelle, et ne pas résulter d'un simple effet d'affichage. Il semble dans ce cadre primordial d'aider les opérateurs à dégager des marges de manoeuvre budgétaires, leur permettant d'assurer leurs missions. Alors que notre pays cherche à attirer des chercheurs, la baisse des effectifs envoie un signal singulièrement négatif.

2. Une diminution bienvenue des taux de mise en réserve pour les opérateurs

Jusqu'en 2018, la sous-budgétisation récurrente de certaines lignes bien identifiées était compensée en gestion par l'utilisation d'une part importante des crédits mis en réserve sur les programmes concernés . Ce procédé s'apparentait à un détournement de l'esprit des mises en réserve , normalement destinées à permettre de faire face à des imprévus. Il posait donc un vrai problème de principe.

En loi de finances pour 2018, dans un effort de sincérité budgétaire , les taux de mise en réserve ont été ramenés de 8 % à 3 % des crédits . Cette moindre mise en réserve a permis de verser aux opérateurs de recherche un abondement complémentaire d'un montant total de 25 millions d'euros en 2018 : 20 millions d'euros destinés au soutien des laboratoires de recherche et 5 millions d'euros plus spécifiquement dédiés à la recherche en sciences humaines et sociales.

Ce montant a été réparti entre les principaux organismes de recherche au prorata de leurs effectifs de chercheurs ou assimilés, soit au total 16 millions d'euros pour les EPST et 4 millions d'euros pour les EPIC. Les Maisons des sciences humaines (MSH), les plateformes universitaires de données (PUD), les Laboratoires d'excellence en sciences humaines et sociales (LabEx SHS), et les Instituts d'études avancées (IEA) se sont partagé l'enveloppe de 5 millions d'euros pour la recherche en sciences humaines et sociales.

Répartition de l'enveloppe de 25 millions d'euros
entre les organismes de recherche

(en millions d'euros)

Total des crédits complémentaires alloués

EPST

CNRS

10,586

INSERM

2,023

INRIA

0,523

INED

0,048

IRSTEA

0,114

IRD

0,677

INRA

1,726

Total EPST

15,697

EPIC

CEA Civil

2,585

CIRAD

0,480

BRGM

0,465

IFREMER

0,470

Total EPIC

4,000

FONDATIONS

Institut PASTEUR

0,253

Institut CURIE

0,050

SHS forfait 5 M€

5,000

Total fondations

5,303

Total

25,000


Source : réponse au questionnaire budgétaire

Cette enveloppe a eu des conséquences concrètes, en matière de gestion, pour les opérateurs de recherche de la mission , leur permettant de retrouver des marges de manoeuvre . Selon les informations communiquées à votre rapporteur spécial, les laboratoires auraient fait usage de ces crédits supplémentaires pour maintenir le matériel, investir dans des équipements semi-lourds à la pointe et financer des tests de recherche en amont du montage de projets présentés à l'ANR ou à Horizon2020.

À nouveau, votre rapporteur spécial note une certaine inégalité de traitement entre les opérateurs, les EPST se voyant appliquer un taux de réserve dérogatoire de 4,85 % pour les dépenses (hors dépenses de personnel, pour lesquels un taux de 0,35 % s'applique), moins favorable que le nouveau taux de 3 % . Il serait bon, dans ce contexte, de clarifier et d'uniformiser les taux applicables aux organismes de recherche.

La mesure de soutien ponctuelle de 25 millions d'euros devrait être reconduite en 2019 , sans que cet aspect ait fait l'objet d'une confirmation officielle jusqu'à présent. Votre rapporteur spécial serait favorable au renouvellement de cette initiative et appellera la ministre à présenter des garanties dans ce sens. Il souhaiterait, par ailleurs, que le fléchage de crédits puisse faire l'objet d'une discussion avec le Parlement.

Enfin, si la restitution à l'État, envisagée dans le projet de loi de finances rectificative pour 2018, de 183 millions d'euros témoigne d'une gestion rigoureuse, votre rapporteur spécial réitère ses regrets de ne pas voir cette enveloppe consacrée aux opérateurs en difficulté.

3. La persistance de plusieurs impasses budgétaires à moyen-terme

Plusieurs situations d'impasse budgétaire à moyen et long terme ont été signalées à votre rapporteur spécial, appelant à une gestion plus prospective des crédits dédiés aux organismes de recherche.

a) Les impasses de financement à moyen terme du CEA

Créé par l'ordonnance du 18 octobre 1945, le Commissariat à l'énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA) est un établissement de recherche à caractère scientifique technique et industriel relevant de la classification des EPIC. Il est placé sous la tutelle des ministères chargés de la recherche, de l'énergie, de la défense et de l'industrie. La stratégie de recherche du CEA inclue le nucléaire civil et militaire, mais également les nouvelles technologies de l'énergie.

Le contrat d'objectif et de performance (COP) conclu entre l'État et le CEA pour 2016 -2022 n'a pas tenu compte d'un certain nombre de surcoûts sur la période, laissant en suspens 2 milliards d'euros d'impasses de financement , liées à la construction du réacteur expérimental Jules Horowitz (582 millions d'euros), au projet Astrid (141 millions d'euros), à la couverture des dépenses 2015 des fonds dédiés aux obligations de fin de cycle du CEA (376 millions d'euros), à la dette du CEA vis-à-vis d'ORANO Cycle (800 millions d'euros) et à l'acquisition par le CEA de 20 % du capital de TechnicAtome (120 millions d'euros).

Ces impasses de financement ont été partiellement résolues. Par conséquent, le CEA n'identifie pas de risque majeur pour 2019, si tant est que les abondements prévus au titre du plan Nano 2022 soient conformes aux annonces faites , le phasage annuel demeurant encore incertain.

Le reclassement au sein de la sphère publique de la plupart des actifs du CEA, alliés aux financements complémentaires alloués par l'État à hauteur de 200 millions devraient rendre possible le remboursement la dette vis-à-vis d'Orano , tandis qu'un ralentissement des dépenses sur le projet Astrid permettrait de finaliser en 2019 la phase d'avant-projet définitif sans financements complémentaires.

Néanmoins, le CEA reste confronté à une impasse de financement dans le cadre de la construction du Réacteur Jules Horowitz . En effet, alors que le coût du projet était initialement estimé à 500 millions d'euros, il a été revu une première fois à la hausse en 2015, à 1,8 milliard d'euros. Le coût final pourrait se révéler encore supérieur de plusieurs centaines de millions d'euros (entre 400 millions d'euros et 700 millions d'euros selon les informations communiquées à votre rapporteur spécial). Or, jusqu'à présent, seuls 300 millions d'euros de financement en provenance du PIA ont été identifiés pour répondre à ce besoin de financement exceptionnel.

Cette impasse de long terme est d'autant plus problématique qu'un effort budgétaire conséquent est demandé au CEA, avec une diminution de 10 millions d'euros de la subvention versée par le programme 190, à laquelle s'ajoute une réduction nette de 1 million d'euros sur le programme 191 à périmètre constant 32 ( * ) . À compter de 2019, le CEA devrait donc réaliser une économie pérenne de 24 millions d'euros par an, alors qu'il sera confronté à une forte augmentation de ses dépenses dans les années à venir.

Dans ce contexte, il apparait donc indispensable de clarifier la programmation de moyen et long terme du CEA, de manière à identifier précisément les besoins de financement de cet opérateur .

b) La baisse considérable de la dotation globale de l'IFP Énergies nouvelles

L'IFP Énergies nouvelles (IFPEN), opérateur centré sur la recherche et l'innovation (R&I) dans les domaines de l'énergie, de la mobilité et de l'environnement verra sa subvention pour charge de service public diminuer de 4,1 millions d'euros en 2019 puis en 2020. L'IFPEN serait le seul opérateur du programme 190 à voir sa dotation se réduire en 2019.

Cette dotation, en baisse constante et significative depuis de nombreuses années , est passée de 169 millions d'euros en 2010 à 128,5 millions d'euros en 2018, soit une diminution de 24 % sur huit ans, alors que dans le même temps les crédits alloués à la mission « Recherche » ont augmenté.

S'il traduit le choix du Gouvernement de ne plus financer la recherche dans les hydrocarbures, ce mouvement est discutable . En effet, selon les informations communiquées à votre rapporteur spécial, plus de 50 % du budget de cet opérateur, soit l'intégralité de sa dotation budgétaire, serait consacré au développement de nouvelles technologies de l'énergie.

L'IFPEN n'ayant pas bénéficié de l'effort de sanctuarisation des moyens de la recherche au cours des dernières années , de nouvelles baisses de la dotation budgétaire qui lui est alloué se traduiraient inévitablement par un ralentissement du redéploiement de ses activités vers la transition énergétique et la mobilité durable.

Votre rapporteur spécial souhaiterait que l'avenir de l'IFPEN puisse faire l'objet d'une réflexion alliant parties prenantes et ministères de tutelle, avant que ne soient prises des décisions aux conséquences irréversibles.

c) L'absence de financements pour les plans santé confiés à l'Inserm

Seul organisme public de recherche français entièrement dédié à la santé humaine , l'Inserm est un EPST placé sous la tutelle des ministères chargés de la recherche et de la santé. Ses recherches ont pour vocation l'étude de toutes les maladies ; la mission première de l'Inserm est de faciliter les échanges entre la recherche fondamentale, la recherche clinique, la recherche thérapeutique ou diagnostique et la recherche en santé publique.

Dans ce cadre, l'Inserm est régulièrement sollicité par l'État pour la conception et la mise en oeuvre de grands plans de santé.

Ces dernières années ont été marquées par une recrudescence de ces commandes , avec notamment la lutte contre les nouvelles menaces virales (Ebola, plan REACTing), le plan France médecine génomique 2025, le plan de lutte contre les maladies dégénératives, le plan Autisme ou encore le plan national contre l'antibiorésistance.

S'il est tout à fait cohérent que l'État recoure à l'expertise de l'Inserm pour l'établissement de ces plans de santé , le financement de ces derniers a pu se révéler problématique par le passé . En effet, les annonces n'ont pas toujours été suivies des crédits budgétaires correspondant, plaçant l'organisme dans une situation financière délicate.

En 2018, la subvention versée à l'Inserm a été augmentée en cours d'année de 9,1 millions d'euros pour faire face à ces coûts supplémentaires :

- 2 millions d'euros pour le soutien aux laboratoires ;

- 1 million d'euros pour le P4 de Lyon ;

- 2 millions d'euros pour le plan France Médecine Génomique ;

- 1 million d'euros pour REACTing ;

- 2,5 millions d'euros plan Anti Microbial resistance ;

- 600 000 euros pour le Plan Maladies NeuroDégénératives.

Si tout risque d'impasse budgétaire a été évité en 2018, l'Inserm semble de nouveau confronté à un besoin de financement non couvert en 2019. Évalué à 8,2 millions d'euros , il serait lié à la mise en oeuvre des missions confiées par le Gouvernement :

- 0,5 million d'euros pour le pilotage du plan REACTing ;

- 4 millions d'euros pour le financement de l'extension de l'opération de vaccination à la crise Ebola en République Démocratique du Congo ;

- 1 million d'euros pour le partenariat laboratoire P4 France - Chine ;

- 0,8 million d'euros pour le Plan Maladies NeuroDégénératives ;

- 1,9 million d'euros pour le Plan France médecine génomique.

Or, la hausse de 2,7 millions d'euros de la subvention pour charges de service public versée à l'Inserm en 2019 serait destinée à couvrir partiellement le coût des mesures PPCR, et non à répondre aux besoins de financement identifiés .

Votre rapporteur spécial estime que la mise à disposition de financements pérennes en faveur de l'Inserm semble incontournable, le fonctionnement « par à-coups budgétaires » suivi jusqu'à présent ne constituant pas, de toute évidence, une solution satisfaisante. Une enveloppe budgétaire dédiée au financement des plans de santé devrait être sanctuarisée, pour permettre à l'Inserm de poursuivre ses travaux en France et à l'International, l'établissement participant notamment au rayonnement de la francophonie.

À l'Assemblée nationale, les députés ont adopté un amendement du Gouvernement visant à consacrer 5 millions d'euros au plan Cancer, financée par un redéploiement de 3 millions d'euros issus de l'action 7 du programme 193 « Développement des satellites de météorologie » vers l'action 15 du programme 172 « Recherches scientifiques et technologiques en sciences de la vie et de la santé ». Les deux millions d'euros restants seraient mobilisés par le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche par redéploiement interne des crédits du programme 172 destinés à l'Inserm . Ces crédits seront fléchés vers l'INCa pour le plan Cancer.

d) Les investissements à venir pour renouveler la flotte océanographique de l'IFREMER

Institué par le décret n°84-428 du 5 juin 1984, l'Institut Français de Recherche pour l'Exploitation de la Mer (IFREMER) est un EPIC placé sous la tutelle des ministères chargés de la recherche, de l'environnement et des pêches maritimes et des cultures marines.

Institut national de recherche en sciences marines, l'IFREMER contribue, par ses travaux et expertises, à la connaissance des océans et de leurs ressources , ainsi qu'à la surveillance du milieu marin et du littoral. L'action de l'institut se situe à la confluence de plusieurs champs de force : recherche, innovation en lien avec le monde économique et appui aux politiques publiques.

À ces fins, il conçoit et met en oeuvre des outils d'observation , d'expérimentation et de surveillance, et gère notamment une flotte océanographique d'envergure , composée de quatre navires hauturiers, cinq navires côtiers, deux navires déployés outremer, cinq engins sous-marins et des équipements lourds comme les équipements sismiques.

Étant donné la nature de ses activités, l'institut doit nécessairement adopter une approche prospective. Ainsi, le projet de l'institut à l'horizon 2030 , présenté en conseil d'administration en juin 2018 et dont votre rapporteur a pu prendre connaissance, entend notamment concevoir, développer et prévoir l'évolution de l'océan à l'horizon 2100 . Ces ambitions se déclinent dans un nouveau contrat d'objectifs et de performance pour les années 2019-2023, qui sera signé à la fin de l'année 2018.

Néanmoins, selon les informations communiquées à votre rapporteur spécial, ces documents prospectifs ne suffisent pas à anticiper les investissements conséquents auxquels se trouvera confronté l'IFREMER à horizon 2050 . Le renouvellement d'une partie de la flotte océanographique entre 2035 et 2045 génèrerait en effet un besoin de financement de près 500 millions d'euros. Or, à l'heure actuelle, aucun plan d'investissement à moyen terme n'a été conçu.

Dans ce contexte, votre rapporteur spécial serait favorable à la mise en oeuvre d'une programmation pluriannuelle pour les investissements de la flotte océanographique , à l'instar des plans à moyen terme existant pour le CEA et le CNES .

Lors du Comité interministériel de la mer du 15 novembre 2018, le Gouvernement s'est fait l'écho de ces préoccupations, en annonçant le lancement d'« une réflexion pour le maintien de la capacité opérationnelle de la flotte scientifique et la modernisation de ses équipements 33 ( * ) ». Votre rapporteur spécial ne saurait que soutenir cette démarche et inviter le Gouvernement à poursuivre dans cette voie, de manière à doter la flotte océanographique d'un plan d'investissement pluriannuel permettant d'anticiper au mieux les besoins de financement de l'institut . Il s'agirait d'un vrai choix en faveur d'une politique d'excellence.


* 32 L'augmentation de la subvention du programme 191 de 2 millions d'euros entre 2018 et 2019 correspond à la participation du ministère des Armées au financement du plan Nano 2022, qui s'élève sur ce programme à 3 millions d'euros par an sur la durée du plan, le million d'euros restant étant financé par redéploiement au sein de la dotation versée au CEA ; à périmètre constant, la subvention diminue donc d'un million d'euros.

* 33 Mesure 75 adoptée lors du CIMER 2018

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