B. LA RELATION BILATÉRALE DE DÉFENSE

1. L'état de la coopération actuelle

En matière de coopération structurelle, le MEAE 7 ( * ) a indiqué à votre rapporteur que la formation d'officiers albanais a longtemps constitué la principale orientation, avec l'accueil d'officiers albanais à l'École de guerre, entre 1995 et 2015. Durant cette période, plusieurs médecins militaires ont également été formés dans le cadre d'une coopération avec la direction centrale du service de santé des armées.

En 2017, la coopération structurelle de défense et de sécurité financée par la Direction de la coopération de sécurité et de défense (DCSD) du MEAE représentait environ 5 000 € et se limitait à l'enseignement du français au profit de personnels du ministère albanais de la défense (financement de cours assurés par l'Alliance française).

Des contacts avec différents services du ministère des armées (ancienne direction aux affaires stratégiques (DAS), direction générale de l'armement (DGA)) se sont aussi traduits par une mission de conseil en vue de la création d'une cellule politico-stratégique au sein de la direction politique du ministère albanais de la défense, ainsi que par la mise en place de procédures d'acquisition inspirées de celles en vigueur à la Direction général de l'armement (DGA).

Une coopération s'est également établie dans le domaine de l'aéromobilité. Elle a permis la formation du personnel technique et naviguant pour opérer de manière autonome la flotte d'hélicoptères. Un officier coopérant a aussi été mis en place auprès de l'armée de l'air albanaise de 2011 à 2014, sur la base d'un financement de la DCSD du MEAE, puis de celui d'AIRBUS Helicopters pour une année supplémentaire, dans le cadre de l'accompagnement du contrat d'acquisition d'hélicoptères COUGAR signé en 2009. Une nouvelle mission a été organisée en 2018 pour maintenir la capacité du ministère de la défense albanais à opérer en sécurité, en maintenant ses hélicoptères sur le long terme.

Dans le domaine maritime, l'Albanie bénéficie, depuis fin 2016, d'au moins une escale annuelle, qui est mise à profit pour développer les compétences des plongeurs-démineurs locaux.

Sur le plan opérationnel, la France a su convaincre l'Albanie de participer à l'opération EUFOR Tchad-RCA, à l'été 2008, et d'embarquer deux officiers de marine sur une frégate française en 2011 dans le cadre de la mission EUNAVFOR Atalanta.

Une coopération mémorielle s'est également établie, depuis la fin de l'année 2016, dans le cadre des commémorations du centenaire du début de l'engagement militaire français dans le sud de l'Albanie durant la Première guerre mondiale. Le 11 novembre dernier, le centenaire de l'armistice a ainsi été célébré dans l'important cimetière militaire français de la ville de Korça.

En matière de rencontres enfin, la dernière réunion d'état-major franco-albanaise a eu lieu à Tirana, le 16 octobre 2012. Une rencontre stratégique de haut niveau, organisée le 12 novembre 2018, à Tirana a confirmé la volonté de la France et de l'Albanie de développer la coopération bilatérale de défense.

Le MEAE 8 ( * ) a indiqué à votre rapporteur, qu'en dépit d'un faible volume d'activités de coopération, la bonne interactivité avec l'Albanie méritait d'être soulignée, ce partenaire répondant à toutes les sollicitations françaises pour développer utilement la coopération bilatérale. L'Albanie est un Etat, francophile et francophone, qui manifeste une forte volonté de coopérer avec la France dans des domaines d'intérêt partagé tels que l'aéromobilité, la lutte contre le terrorisme, les questions relatives aux espaces maritimes ou la valorisation de la mémoire commune.

L'ouverture d'une mission de défense en résidence à Tirana, à l'été 2019, devrait logiquement amener à accroître le niveau et l'intensité de la relation de défense. On rappelle que, dans un contexte de restrictions budgétaires, la mission de défense résidente avait été fermée en 2008.

2. Les forces et le budget de la défense albanais

Armée professionnelle depuis 2010, l'armée albanaise a poursuivi sa réforme jusqu'en 2015 et doit consentir un effort substantiel pour poursuivre sa mise à niveau.

Le personnel affecté aux missions de défense en Albanie s'élève aujourd'hui à 8500 personnes, dont 6850 militaires et 1650 civils, alors qu'il était de 120 000 personnes dans les années 1990.

La part du personnel militaire affecté à des tâches administratives et des missions de soutien reste encore très importante, de l'ordre de 50 % (4 960 personnes). L'état-major est structuré selon le modèle de l'OTAN et a autorité sur les trois composantes majeures (Terre, Air, Mer) ainsi que sur un commandement du soutien et un commandement de la doctrine et de l'entraînement.

Parmi le personnel militaire, les unités de combat représentent 3540 personnes (2400 pour l'armée de terre, 500 pour l'armée de l'air et 640 pour la marine, voir détails infra) .

L'armée de terre, qui compte moins de 2 400 personnels, est articulée autour de trois bataillons d'infanterie. Compte tenu des objectifs capacitaires assignés dans le cadre de l'OTAN (fourniture d'un bataillon d'infanterie légère avec ses appuis et soutiens), les efforts de modernisation devraient logiquement porter sur cette composante terrestre. Compte tenu des contraintes financières, la modernisation reste toutefois tributaire de l'aide des principaux partenaires. Ainsi, les États-Unis ont fourni des véhicules blindés légers (type Hummer ), tandis que l'Italie a fait don de fusils d'assaut.

L'armée de l'air ne compte qu'un peu plus de 500 personnels. La police du ciel est assurée alternativement par la Grèce et l'Italie en l'absence d'avions. L'armée de l'air est équipée exclusivement d'hélicoptères modernes acquis auprès d'Eurocopter en 2009. Son parc comprend également quatre COUGAR et deux EC145, en plus d'une dizaine d'autres appareils divers. Si les appareils sont en bonne condition, le niveau de compétence des équipages reste insuffisant et a tendance à se dégrader depuis le départ de l'officier coopérant français en 2015. Le principal projet de modernisation a trait à la surveillance aérienne, Tirana ayant déjà fait le choix d'équipements américains ( Lockheed-Martin ).

La marine, qui compte 640 personnels, s'est équipée de quatre patrouilleurs côtiers modernes acquis entre 2008 et 2011 dans le cadre d'un contrat passé avec les chantiers néerlandais Damen, auxquels ont été intégrées, cette année, des tourelles navales télé-opérées NARWHAL du Groupe Nexter, afin notamment de permettre la participation à la mission de l'OTAN « Activité en mer Égée ». S'y ajoutent d'autres unités navales plus petites.

L'expérience opérationnelle acquise au cours de la dernière décennie, la participation régulière à des exercices multinationaux, la formation de cadres à l'étranger et l'existence d'un système de formation autonome permettent aux armées albanaises de développer progressivement leurs compétences et, in fine , leur interopérabilité. La forte politisation du système, la concentration des responsabilités au plus haut niveau de la chaîne hiérarchique et la désorganisation de l'appareil administratif, constituent toujours des freins.

En 2018, le budget de la défense s'établit à 150 millions d'euros, réparti entre les dépenses de personnel (51 M€), de fonctionnement (81 M€) et d'investissement (18 M€). Ce budget est en forte hausse par rapport à celui de 2017 qui s'élevait à 97 M€ en raison du transfert vers le ministère de la défense de deux nouvelles lignes budgétaires (38 M€ pour le soutien social, et 3,5 M€ pour les situations d'urgence). Par conséquent, à périmètre constant, la hausse se situe à 10 %, soit 10 M€.

Si les projections font apparaître une hausse continue, pour atteindre 195  millions d'euros en 2020, il est néanmoins difficile d'estimer la part qui sera dédiée, dans cette enveloppe, à l'équipement des forces pour répondre aux objectifs capacitaires fixés par l'OTAN.

Les priorités de l'Albanie dans le domaine de la défense sont largement orientées par les objectifs capacitaires agréés avec ses alliés de l'OTAN (Voir Supra ).

Depuis 2017, le ministère de la défense est en charge de la protection civile, en coordination étroite avec les préfectures, si bien que les forces armées sont également très sollicitées pour des missions d'assistance aux populations.

La Revue stratégique de défense (RDS), publiée en 2013, fait l'objet actuellement d'une mise à jour pour prendre en compte l'évolution des menaces (notamment terrorisme, combattants étrangers) et une nouvelle RDS devrait être publiée en fin d'année. Le plan de développement à long terme 2016-2025 sera vraisemblablement adapté en conséquence.

Par ailleurs, la coopération de l'Albanie avec ses voisins est dynamique, en matière d'exercices, de formation, de missions de secours aux populations ou d'engagements opérationnels.


* 7 Réponses du Gouvernement aux questions de la commission.

* 8 Réponses du Gouvernement aux questions de la commission.

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