Rapport n° 237 (2018-2019) de Mme Élisabeth DOINEAU , fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 16 janvier 2019

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N° 237

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2018-2019

Enregistré à la Présidence du Sénat le 16 janvier 2019

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des affaires sociales (1) sur la proposition de loi , ADOPTÉE PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE , visant à améliorer la santé visuelle des personnes âgées en perte d' autonomie ,

Par Mme Élisabeth DOINEAU,

Sénatrice

Procédure de législation en commission,

en application de l'article 47 ter du Règlement

(1) Cette commission est composée de : M. Alain Milon , président ; M. Jean-Marie Vanlerenberghe , rapporteur général ; MM. René-Paul Savary, Gérard Dériot, Mme Colette Giudicelli, M. Yves Daudigny, Mmes Michelle Meunier, Élisabeth Doineau, MM. Michel Amiel, Guillaume Arnell, Mme Laurence Cohen, M. Daniel Chasseing , vice-présidents ; M. Michel Forissier, Mmes Pascale Gruny, Corinne Imbert, Corinne Féret, M. Olivier Henno , secrétaires ; Mme Cathy Apourceau-Poly, M. Stéphane Artano, Mmes Martine Berthet, Christine Bonfanti-Dossat, MM. Bernard Bonne, Jean-Noël Cardoux, Mmes Annie Delmont-Koropoulis, Catherine Deroche, Chantal Deseyne, Nassimah Dindar, Catherine Fournier, Frédérique Gerbaud, M. Bruno Gilles, Mmes Nadine Grelet-Certenais, Jocelyne Guidez, Véronique Guillotin, Victoire Jasmin, M. Bernard Jomier, Mme Florence Lassarade, M. Martin Lévrier, Mmes Marie-Noëlle Lienemann, Monique Lubin, Viviane Malet, Brigitte Micouleau, MM. Jean-Marie Morisset, Philippe Mouiller, Mmes Frédérique Puissat, Laurence Rossignol, Patricia Schillinger, MM. Jean Sol, Dominique Théophile, Mme Claudine Thomas, M. Jean-Louis Tourenne, Mme Sabine Van Heghe .

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) :

1326 , 1450 et T.A. 204

Sénat :

185 et 238 (2018-2019)

La commission a examiné cette proposition de loi selon la procédure de législation en commission, en application de l'article 47 ter du Règlement.

En conséquence seuls sont recevables en séance, sur cette proposition de loi, les amendements visant à :

- assurer le respect de la Constitution,

- opérer une coordination avec une autre disposition du texte en discussion, avec d'autres textes en cours d'examen ou avec les textes en vigueur,

- procéder à la correction d'une erreur matérielle.


LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

Réunie le mercredi 16 janvier 2019 sous la présidence de M. Alain Milon, président, la commission des affaires sociales a examiné selon la procédure de législation en commission (articles 47 à 47 quinquies du Règlement du Sénat) le rapport de Mme Élisabeth Doineau sur la proposition de loi n° 185 (2018-2019) adoptée par l'Assemblée nationale visant à améliorer la santé visuelle des personnes âgées en perte d'autonomie.

L'article unique de ce texte ouvre la possibilité pour l'opticien-lunetier de pratiquer des tests de réfraction et des adaptations de verres correcteurs ou de lentilles de contact au sein d'établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad), atténuant ainsi l'obligation de réaliser ces actes en magasin.

La portée de ce texte, animé par l'intention de garantir un meilleur confort visuel à des personnes vulnérables ou atteintes de difficultés de déplacement, est néanmoins limitée. Restreinte aux seuls actes accomplis par l'opticien-lunetier, la proposition de loi ne s'inscrit pas dans une vision d'ensemble de réorganisation de la filière visuelle et ne traite pas des problèmes structurels d'accès aux soins visuels des populations les plus vulnérables.

Pour autant, sensible au signal envoyé par ce texte d'un plus grand assouplissement de l'exercice de la profession d'opticien, l a commission des affaires sociales a adopté la proposition de loi sans modification, dans sa version issue des travaux de l'Assemblée nationale.

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Près de 40 % des personnes âgées de plus de 78 ans hébergées dans un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) n'ont pas de lunettes adaptées à leur vue. La première raison de cet alarmant constat se trouve dans un accès limité aux soins de ville, notamment de spécialité ophtalmologique, qui reste l'incontournable porte d'entrée de la filière des soins visuels.

Dans un contexte de pénurie de professionnels de santé libéraux dans les zones sous-denses, au premier rang desquels les médecins spécialistes, la continuité du suivi médical en Ehpad est difficile. Les opticiens-lunetiers, qui assurent l'équipement des personnes âgées en perte d'autonomie en matériel d'acuité visuelle (verres correcteurs et lentille de contact oculaire), ne peuvent intervenir sans prescription médicale.

De plus, les tests de réfraction ainsi que les adaptations d'équipement doivent être réalisées dans l'enceinte de leur magasin. Dans le cas de résidents d'Ehpad, souvent dans l'incapacité de se déplacer de façon autonome, les gestionnaires d'Ehpad ne sont pas en mesure de dégager des ressources pour assurer leur accompagnement.

C'est pourquoi la présente proposition de loi propose d'assouplir les conditions d'accomplissement de ces opérations, en autorisant l'opticien-lunetier à se rendre au sein de l'Ehpad pour les effectuer directement auprès du résident.

Votre commission est favorable à cet assouplissement. Toutefois, un meilleur accès des personnes âgées en perte d'autonomie aux soins visuels reste conditionné à une réforme en profondeur de l'ensemble de la filière, et tout particulièrement aux acteurs prescripteurs.

EXPOSÉ GÉNÉRAL

I. L'INTERVENTION DES ACTEURS DE LA FILIÈRE VISUELLE AUPRÈS DES PERSONNES ÂGÉES SOUFFRE DE PLUSIEURS DÉFICIENCES

A. LA FILIÈRE VISUELLE COMPREND PLUSIEURS ACTEURS DONT LES COMPÉTENCES RESTENT IMPARFAITEMENT COORDONNÉES

Les compétences en matière de santé oculaire et visuelle font l'objet d'une répartition complexe :

- les médecins spécialistes en ophtalmologie disposent d'une compétence générale d'intervention au terme d'une formation d'une durée de dix ans ;

- les orthoptistes , professionnels de santé reconnus par le code de la santé publique (CSP) ont une formation d'une durée de trois ans dans les facultés de médecine, sanctionnée par un certificat de capacité d'orthoptiste. Ils assurent le dépistage, la rééducation, la réadaptation et l'exploration fonctionnelle des troubles de la vision, et peuvent coter les actes ainsi réalisés. Ils peuvent également, sous la responsabilité d'un médecin, réaliser diverses techniques d'imagerie du fond d'oeil, les électrorétinogrammes, les tomographies en cohérence optique, qui permettent le diagnostic et le suivi des maladies du nerf optique et des voies visuelles, et les échographies ;

- les optométristes , dont la profession s'acquiert après un double cursus comprenant l'obtention du BTS opticien-lunetier (deux ans) puis d'un master de biologie en spécialité sciences de la vision (trois ans) suivi dans une faculté de sciences et sanctionné par un diplôme d'État délivré par le ministère de l'Éducation nationale. La profession telle qu'elle existe actuellement en France est compétente sur la seule partie fonctionnelle de la vision et non sur le dépistage pathologique. Les actes pratiqués par l'optométriste ne peuvent l'être que sous le contrôle d'un médecin et ne font pas l'objet d'une cotation dans la nomenclature générale des actes professionnels. De ce fait, les optométristes sont soit, pour la grande majorité d'entre eux, opticiens, soit salariés de cabinets ou de services d'ophtalmologie, où ils effectuent le plus souvent des examens préparatoires à la consultation. On en dénombre environ 3 000 ;

- les opticiens sont des professionnels de santé et auxiliaires médicaux reconnus par le code de la santé publique. À l'issue du BTS d'opticien-lunetier, ils ont la possibilité d'opter pour une licence professionnelle permettant d'acquérir une compétence particulière en réfraction, contactologie, basse vision ou pathologie.

De façon générale, les professionnels de la filière visuelle ont à connaître de deux grandes catégories de besoins exprimés par les patients : le soin à apporter aux cas de pathologie visuelle , qui demeure du ressort exclusif du médecin et des professionnels de santé agissant par délégation d'acte, et l' équipement optique (verres correcteurs et lentilles de contact oculaire) requis en cas de perte de l'acuité visuelle. C'est ce besoin particulier qui mobilise l'ensemble de la filière, depuis la prescription médicale jusqu'à la délivrance en magasin.

La loi du 26 janvier 2016 portant modernisation de notre système de santé 1 ( * ) a apporté plusieurs modifications à l'organisation de la filière visuelle, dans le but d'une meilleure coordination de ses acteurs, dont deux ont particulièrement retenu l'attention de votre rapporteure.

1) L'affirmation de l'orthoptiste dans la prise en charge de la pathologie visuelle

En application du nouvel article L. 4342-1 du CSP, un décret du 5 décembre 2016 2 ( * ) dispose que, lorsqu'il exerce dans le cadre du cabinet d'un médecin ophtalmologiste ou au sein d'un établissement de santé, l'orthoptiste peut réaliser certains actes de diagnostic, de bilan ou de traitement, à la condition préalable d'une prescription médicale ou, de manière plus souple, dans le cadre d'un protocole organisationnel établi par un ou plusieurs médecins ophtalmologistes.

Le texte définit le cadre juridique d'une délégation d'actes médicaux aux orthoptistes et confirme ces derniers dans un statut de professionnels de santé habilités, avec l'objectif de spécialiser le temps strictement médical sur l'analyse des pathologies visuelles en le déchargeant des actes de diagnostic et de bilan primaire.

Ce cap n'est pas unanimement approuvé par la profession d'orthoptiste, dont certaines instances représentatives estiment qu'elle relève prioritairement du soin strictement optique, au titre notamment de sa spécialité en rééducation et réadaptation de la vision. Plus largement, le décret du 5 décembre 2016 fait craindre une « auxiliarisation » de l'orthoptiste vis-à-vis de l'ophtalmologiste, qui serait de nature à menacer son indépendance et à compromettre l'exercice de sa profession en libéral. Un recours conjointement déposé en ce sens par le syndicat national autonome des orthoptistes (SNAO) et par l'association des optométristes de France (AOF) contre le décret a récemment été rejeté par une décision du Conseil d'État du 21 décembre 2018 3 ( * ) .

Votre rapporteure, très attachée à l'objectif d'efficience qui doit animer la réorganisation de la filière visuelle, se montre quant à elle favorable aux initiatives visant à faciliter les délégations d'actes médicaux.

2) Un renforcement avorté du rôle de l'opticien dans la délivrance de l'équipement optique

Les délivrances de verres correcteurs ou de lentilles de contact oculaire par un opticien-lunetier sont soumises à l'existence d'une prescription médicale en cours de validité. Il lui est toutefois permis d' adapter , uniquement dans le cadre d'un renouvellement , les prescriptions médicales initiales, à la condition que le médecin ne s'y soit pas préalablement opposé. La loi du 26 janvier 2016 a par ailleurs attribué à l'opticien la possibilité de délivrer un équipement de remplacement en cas de bris ou de perte, sans nécessité d'une prescription.

Ces différents aménagements, qui s'inscrivent dans le strict champ de la vérification de l'acuité visuelle et non du diagnostic pathologique, ne doivent pas s'interpréter comme des délégations d'acte médical, mais comme une facilitation du suivi de l'équipement optique des patients. Ils respectent la dichotomie des tâches qui structure la filière visuelle, selon laquelle l'acte thérapeutique est réservé aux professionnels de santé et la délivrance du matériel optique ordinaire est assurée, dans une autonomie renforcée, par des professionnels commerciaux.

Ces assouplissements prévus par la loi ont néanmoins été paradoxalement restreints par un décret d'application du 12 octobre 2016 4 ( * ) . Ce dernier confirme en effet la possibilité pour l'opticien, dans le cadre d'un test de réfraction, de procéder à l'adaptation de l'équipement optique, mais limite cette faculté aux cas où la prescription médicale a été émise moins de trois auparavant , pour les personnes âgées de plus de 42 ans.

Or, dans les cas des personnes âgées accueillies en établissement que concerne la présente proposition de loi, il est extrêmement rare qu'une prescription médicale ait été émise moins de trois ans avant leur admission.

B. LES PERSONNES ÂGÉES ACCUEILLIES EN ÉTABLISSEMENT SONT PARTICULIÈREMENT EXPOSÉES AUX RUPTURES DE PARCOURS DU SOIN VISUEL

Il ressort des auditions menées par votre rapporteure le constat d'une négligence par les personnes âgées de leur santé visuelle, qui peut avoir plusieurs causes : l'apparition tardive de symptômes somatiques, l'absence de causalité immédiatement établie entre le trouble visuel et la perte d'autonomie, ou, le plus souvent, le résultat d'un renoncement au soin .

En raison du caractère incontournable de la prescription médicale, les vulnérabilités particulières des personnes âgées, qu'elles soient dues aux pathologies visuelles dont l'âge augmente la prévalence ou à l'inadéquation de leur équipement optique, trouvent en effet leur cause première dans la difficulté d'accès aux médecins spécialistes en ophtalmologie .

Cette difficulté d'accès est d'abord d' ordre géographique . L'inégale répartition des ophtalmologistes sur le territoire, cumulée à la dynamique démographique décroissante de la profession (155 places actuellement réservées à l'issue de l'examen de classement national des facultés de médecine alors que les départs annuels s'élèvent à environ 250), en concentre l'exercice dans les grands pôles urbains. Une étude de l'institut de recherche et documentation en économie de la santé (Irdes) parue en 2014 établissait qu'environ 45 % des patients obtiennent un premier rendez-vous dans des délais supérieurs à trois mois .

À ce titre, les assouplissements de la délégation d'actes médicaux de premier recours pris par la loi du 26 janvier 2016 n'ont pas encore porté leurs fruits. Malgré la possibilité ouverte par le décret du 5 décembre 2016, la Cour des comptes notait dans un rapport récent que « moins de 1 % des bilans visuels ont été effectués par un orthoptiste dans un cadre expérimental », en raison notamment de leur incapacité à les réaliser en-dehors d'une structure où est présent un médecin et non dans leur propre cabinet libéral. Il en découle pour les orthoptistes une forte dépendance d'implantation vis-à-vis des cabinets ou des services d'ophtalmologie, ce qui échoue à mieux répartir l'offre de soins visuels.

Délégation de tâche à l'orthoptiste et télémédecine : un hiatus à corriger

La montée en compétence clinique de l'orthoptiste, permise par la loi du 26 janvier 2016 et le décret du 5 décembre 2016, est un indéniable progrès mais souffre d'un important défaut de mise en oeuvre, qui lui fait manquer l'objectif de désenclavement.

En droit, une fois définies les compétences des différents professionnels de santé, rien ne s'oppose à ce que certaines prestations ou actes soient prescrits et exécutés par le biais de la télémédecine , pour autant que la participation d'au moins un médecin y soit garantie. Cette pratique médicale, dont la définition a été précisée par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 5 ( * ) , a précisément pour objectif de permettre l'accomplissement de l'acte médical sans maintien d'une condition de proximité physique des acteurs .

Or le décret du 5 décembre 2016, qui définit le protocole organisationnel associant l'ophtalmologiste et l'orthoptiste et organisant la délégation de tâches, a pris soin de maintenir cette condition en disposant qu'il ne pouvait être conclu que dans les cas où l'orthoptiste exerce en cabinet médical ou en établissement de santé. En sont donc exclus les orthoptistes ayant fait le choix d'une activité libérale et seuls bénéficiaires d'une liberté d'implantation.

Ayant pu s'assurer du soutien des deux professions à l'approfondissement de la délégation de tâches, votre rapporteure souhaite donc que la possibilité de signature d'un protocole organisationnel soit ouverte aux orthoptistes libéraux, avec une pratique des actes délégués en télémédecine.

L'accès aux soins est par ailleurs compliqué par des coûts élevés . Plus d'un ophtalmologiste sur deux est désormais installé en secteur 2, avec une tendance à la hausse (les deux tiers des installations constatées sont en secteur 2). Il faut noter l'importance des dépassements d'honoraires qui atteignent en moyenne 57 % des tarifs opposables. La même étude de l'Irdes conclut ainsi que le renoncement au soin visuel, qui touche 30 % des patients, s'explique pour 17 % par la longueur des délais, pour 10 % par le coût trop élevé et pour 3 % par l'éloignement du médecin.

Ces trois facteurs de renoncement au soin visuel sont sensiblement aggravés dans le cas particulier des personnes âgées sur lesquelles les contraintes de temps, d'isolement géographique et de financement peuvent peser plus lourdement. Bien qu'on puisse légitimement s'attendre à ce que l'accompagnement thérapeutique assuré par l'Ehpad permette un accès facilité au soin visuel, le problème se maintient dans la situation de personnes âgées accueillies en établissement , spécifiquement visée par la présente proposition de loi, pour deux raisons principales :

-  alors que le code de la santé publique lui en reconnaît la faculté, le médecin traitant de la personne âgée se montre très souvent réticent à émettre une prescription médicale en matière ophtalmologique. L'extension du pouvoir de prescription au médecin coordonnateur de l'Ehpad, récemment consacrée à l'initiative du Sénat, ne manquera pas de se heurter à ce même obstacle ;

-  l'éloignement géographique de certains établissements, ainsi que la saturation des personnels assurant l'accompagnement des personnes âgées, ne permettent bien souvent pas à ces dernières de se rendre physiquement dans un cabinet d'ophtalmologie. Par ailleurs, le remboursement des frais de transport de l'assuré par l'assurance maladie étant étroitement encadré par les articles R. 322-10 et suivants du code de la sécurité sociale et limité aux cas d'hospitalisation ou d'affection de longue durée, le coût du transport pour la personne âgée incapable de se déplacer de façon autonome est un facteur aggravant du non-recours.

II. LA PROPOSITION DE LOI REND PLUS COHÉRENT LE CADRE JURIDIQUE DE L'ACCOMPLISSEMENT DES TESTS DE RÉFRACTION

Malgré les carences précédemment exposées de l'accès des personnes âgées aux soins assurés par la filière visuelle, la présente proposition de loi ne concerne que les modalités de renouvellement de l'équipement optique des personnes hébergées en établissement .

A. UN CONTEXTE FAVORABLE À L'ACCESSIBILITÉ ACCRUE DES SOINS OPTIQUES

La proposition de loi s'inscrit dans un mouvement de réforme visant à faciliter l'accessibilité financière des équipements optiques, initié par l'une des préconisations d'un rapport de la Cour des comptes 6 ( * ) , qui pointait le niveau excessif de leurs prix. Dans le prolongement de ce constat, le Gouvernement a récemment posé les jalons, au sein de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2019 7 ( * ) , d'un panier de soins intégralement pris en charge dans les domaines de l' optique , de l'audiologie et du dentaire.

L'accès à des montures sans reste à charge sera possible pour des montures dont le prix sera inférieur ou égal à 30 euros, ce qui correspond à des montures de qualité déjà présentes sur le marché. L'opticien devra dorénavant mettre en avant ces montures et proposer un minimum de 35 montures pour adultes et 20 montures pour enfants, avec 17 modèles différents de monture « adulte » correspondant à cette gamme et 10 modèles différents pour les enfants.

B. LA PROPOSITION DE LOI PORTE UN ASSOUPLISSEMENT BIENVENU DU CADRE D'INTERVENTION DES OPTICIENS-LUNETIERS EN ÉTABLISSEMENT

Au-delà de leur accessibilité financière, la proposition de loi se concentre sur la facilitation des modalités d'adaptation de l'équipement pour les personnes âgées hébergées en établissement.

L'article D. 4362-18 du CSP dispose en effet que « l'opticien-lunetier déterminant la réfraction reçoit le patient dans l'enceinte du magasin d'optique-lunetterie ou dans un local y attenant, conçu de façon à permettre une prise en charge dans les bonnes conditions d'isolement phonique et visuel et d'assurer la confidentialité des informations échangées par la personne lors de l'examen optique », consacrant ainsi un principe d'exclusivité du test de réfraction en magasin .

Compte tenu des difficultés soulevées relatives au déplacement des personnes âgées hébergées en établissement, la proposition de loi pose les conditions d'une réalisation de la réfraction et de l'adaptation de l'équipement optique au sein de l'établissement .

Bien que recueillant l'accueil globalement favorable des acteurs concernés, votre rapporteure s'est montrée sensible aux alertes de plusieurs d'entre eux, inquiets des risques de pratiques anticoncurrentielles que pouvaient engendrer des partenariats conclus entre enseignes et gestionnaires d'Ehpad. Le test de réfraction et l'adaptation de l'équipement optique n'ouvrent stricto sensu aucune obligation d'achat pour le patient, mais il y aurait effectivement à craindre que l'ouverture d'une possibilité d'intervention en établissement ne se traduise indirectement par la constitution d'un monopole de fait sur la vente des équipements.

Votre rapporteure se montre optimiste quant à ce risque :

-  l'équipement optique ne figurant pas sur la liste des prestations minimales obligatoires fournies par l'établissement, ce dernier aurait l'obligation, en cas de convention de partenariat dûment conclue avec un opticien-lunetier, de faire figurer cette prestation dans une rubrique « prestations optionnelles proposées », laissée à la libre appréciation du résident et de sa famille au moment de l'admission ;

-  par ailleurs, la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) a assuré à votre rapporteure que les Ehpad seraient très prochainement intégrés au champ de l'ordonnance du 19 janvier 2017 qui porte interdiction de recevoir ou d'offrir des avantages à des personnes fabriquant ou commercialisant des produits ou des prestations de santé 8 ( * ) ;

-  enfin, l'importante chalandise des enseignes d'optique-lunetterie conforte votre rapporteure dans l'idée qu'une convention conclue avec un Ehpad en contravention du droit de la concurrence ne manquerait pas d'être signalée et attaquée par les candidats évincés.

Ces mesures ont pour objectif de garantir la pleine effectivité de l'accessibilité financière et géographique de l'équipement optique, telle que récemment conçue par le législateur, à des publics particulièrement vulnérables et non avertis, plus facilement exposés à des pratiques de prix déloyal.

III. LA COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES SE MONTRE FAVORABLE AU TEXTE TOUT EN DÉPLORANT SA PORTÉE LIMITÉE

La commission des affaires sociales du Sénat accueille favorablement l'initiative portée par la proposition de loi, en ce que cette dernière permettra un accès facilité aux interventions des opticiens-lunetiers pour les personnes âgées hébergées en établissements.

Elle tient toutefois à signaler que le dispositif proposé, s'il ouvre indéniablement un droit nouveau, risque de rencontrer une effectivité très limitée . Le dépassement quasi-systématique de la durée de validité de l'ordonnance pour les résidents arrivant en Ehpad maintiendra l'incapacité pour l'opticien, même investi de la capacité d'intervenir en établissement, de procéder à la réfraction ainsi qu'à l'adaptation du matériel de la personne. La racine du problème de l'accès à l'équipement optique se trouve bien moins dans les modalités d'intervention de l'opticien que dans les bornes étroites dans lesquelles les délais de la prescription médicale la maintiennent . Votre rapporteure en appelle donc à un rehaussement de ce délai de trois ans.

Plus largement, la réorganisation de la filière visuelle doit pleinement intégrer l'exercice de la profession d'opticien, mais ne peut se réaliser à la faveur d'un texte de portée limitée. Votre rapporteure s'est saisie de l'opportunité présentée par ce texte pour évoquer les pistes d'un approfondissement de la délégation d'actes médicaux, condition nécessaire au désenclavement des déserts en soins visuels dont seul dépend, pour reprendre le titre ambitieux de la proposition de loi, « l'amélioration de la santé visuelle des personnes âgées en perte d'autonomie ».

Néanmoins, consciente des risques que la poursuite de la navette parlementaire ferait peser sur l'aboutissement de ce texte, votre rapporteure se prononce en faveur de son adoption, dans sa version conforme à celle adoptée par l'Assemblée nationale .

EXAMEN DE L'ARTICLE UNIQUE

Article unique
Possibilité pour un opticien-lunetier de réaliser une réfraction ou une adaptation de l'équipement optique au sein d'un Ehpad

Objet : Cet article ouvre à l'opticien-lunetier la faculté d'intervenir en Ehpad pour accomplir des tests de réfraction de l'acuité visuelle et procéder à des adaptations d'équipement.

I - Le dispositif proposé

La version initiale de l'article unique de la proposition de loi prévoyait de compléter l'article L. 4362-11 du CSP, qui énumère les matières relatives à l'exercice de la profession d'opticien-lunetier susceptibles d'être définies par décret. S'y seraient alors ajoutées les conditions dans lesquelles l'opticien-lunetier, jusqu'alors tenu de réaliser des tests de réfraction ou de procéder à des adaptations d'équipements optiques dans un magasin d'optique-lunetterie, pouvait réaliser ces actes dans un Ehpad.

L'examen de réfraction

L'examen de la réfraction a pour but de caractériser et mesurer l'importance du défaut optique de l'oeil. Ces défauts oculaires optiques sont regroupés sous le terme d' « amétropie » ou « anomalies de la réfraction » (myopie, astigmatisme et hypermétropie). L'examen de la réfraction permet donc de déterminer et quantifier l'importance de l'amétropie.

La mesure des anomalies de la réfraction débute par une mesure automatisée par une machine appelée auto-réfractomètre qui permet d'estimer le degré de myopie, d'hypermétropie et d'astigmatisme. Le patient fixe une mire dans un oculaire que le médecin déplace successivement sur chaque oeil. Un faisceau infrarouge est émis puis recueilli par l'instrument après réflexion sur la rétine. Les résultats fournis servent de repère initial en fournissant une estimation souvent assez précise de la puissance du défaut optique à corriger.

Toutefois, seul l'examen d'acuité visuelle réalisé par un professionnel de la mesure de la réfraction permet de déterminer avec précision le degré de correction optique qui permet d'obtenir la meilleure acuité visuelle.

II - Les modifications adoptées par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté en séance publique, sur l'initiative des membres du groupe La République en marche, un amendement de réécriture de cet article .

Cet amendement maintient la possibilité d'intervention de l'opticien-lunetier en Ehpad tout en introduisant d'importantes modifications :

-  il soumet cette possibilité à l'autorisation préalable du directeur général de l'agence régionale de santé (ARS), qui ne pourra y recourir que dans un cadre expérimental d'une durée de trois ans ;

-  il précise l'obligation pour l'opticien-lunetier d'informer la personne âgée que l'acte de réfraction ou d'adaptation pratiqué est dépourvu de nature médicale ;

-  il prévoit la désignation d'au plus quatre régions dans lesquelles l'expérimentation pourra être menée ;

-  il prévoit la transmission, dans les quatre mois précédant l'issue de l'expérimentation, d'un rapport au Parlement.

Cet amendement revient par ailleurs sur la codification de l'article telle qu'initialement prévue par notre collègue députée.

III - La position de la commission

Outre les réserves précédemment exprimées par votre commission sur la portée limitée de cet article unique, elle souligne que les modifications apportées par l'Assemblée nationale tendent encore à les renforcer.

Ces dernières, introduites au prétexte d'une démarche plus mesurée, ne manqueront pas de considérablement restreindre les effets d'une disposition dont on a déjà pourtant montré la modestie . Cette restriction pourra même être double. Une fois déterminées les quatre seules régions dans lesquelles la disposition, revêtue d'un caractère expérimental, pourra se déployer, le texte modifié conserve au directeur général de l'ARS concernée le pouvoir de ne pas attribuer l'autorisation d'intervention de l'opticien-lunetier en Ehpad.

Votre commission craint fort que ces précautions, excessives au point d'entraver l'intention initiale de l'auteur, ne la dépouillent in fine de tout effet.

Soucieuse néanmoins de ne pas menacer ce droit nouveau par un prolongement incertain de la navette parlementaire, votre commission a adopté cet article ainsi que la proposition de loi sans modification .

EXAMEN EN COMMISSION

___________

Réunie le mercredi 16 janvier 2019, sous la présidence de M. Alain Milon, président, la commission examine selon la procédure de législation en commission (articles 47 à 47 quinquies du Règlement) le rapport de Mme Élisabeth Doineau sur la proposition de loi n° 185 (2018-2019) visant à améliorer la santé visuelle des personnes âgées en perte d'autonomie.

M. Alain Milon , président. - Nous examinons ce matin la proposition de loi, adoptée par l'Assemblée nationale, visant à améliorer la santé visuelle des personnes âgées en perte d'autonomie.

Ainsi qu'il a été décidé par la conférence des présidents, avec l'accord de tous les présidents de groupe, nous légiférons selon la procédure de législation en commission prévue aux articles 47 ter et suivants du règlement du Sénat. Le droit d'amendement s'exerce donc uniquement en commission. Notre réunion est publique, avec une retransmission sur le site du Sénat ; elle se tient en présence du Gouvernement. Je salue donc Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre de la santé et des solidarités.

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé. - La qualité de vie des personnes âgées et l'accompagnement de la perte d'autonomie sont deux priorités du Gouvernement. Nous sommes tous convaincus que mieux prendre en charge nos aînés est un devoir de solidarité ; c'est la marque d'une société qui reconnaît ce qu'elle doit aux plus anciens.

Plusieurs réformes sont déjà en cours pour avancer vers une société plus inclusive et protectrice pour les personnes âgées. Je pense à la transformation du système de santé autour du vieillissement de la population et de l'augmentation des maladies chroniques, aux nouvelles synergies entre médecine de ville, médico-social et hôpital et à la suppression progressive du reste à charge pour les assurés dans les domaines de l'optique, du dentaire et de l'audiologie. Cette dernière réforme était une promesse de campagne forte du Président de la République et elle répondra aux attentes des personnes âgées qui auront accès plus facilement à un ensemble de prestations de soins identifiées et nécessaires : bien voir, bien entendre et soigner son hygiène bucco-dentaire.

L'amélioration de la qualité de vie des personnes âgées passe aussi par une transformation en profondeur de la manière dont est reconnu et pris en charge le risque de perte d'autonomie lié au vieillissement.

Le Gouvernement a lancé en octobre dernier une vaste concertation et un débat national autour du grand âge et de la perte d'autonomie. Cette mission conduite par Dominique Libault devra formuler, d'ici au mois de mars, des propositions couvrant l'ensemble des aspects de la prise en charge des personnes âgées.

Sans remettre en cause ces différents travaux qui s'inscrivent dans le temps long, la proposition de loi vise à résoudre un problème précis et concret : l'accès aux soins visuels dans les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad).

En effet, le dispositif actuel ne permet pas aux personnes accueillies en Ehpad de disposer de lunettes adaptées à leur correction. Obtenir un rendez-vous est déjà délicat pour les patients ordinaires, mais cela s'avère être un parcours du combattant pour les personnes âgées en établissement. Au regard des projections démographiques concernant la profession d'ophtalmologue, les difficultés d'accès à une consultation ophtalmologique sont appelées à perdurer. Des mesures ont été prises pour étendre les champs de compétences des orthoptistes et des opticiens-lunetiers, mais elles n'ont pas résolu l'ensemble des problèmes.

L'article unique de la proposition de loi visait initialement à lever une restriction, afin que les personnes âgées hébergées en Ehpad puissent bénéficier d'un test de réfraction et d'une adaptation de leur correction sans se déplacer chez un opticien.

Néanmoins, si cette préoccupation est légitime, il est compliqué de légiférer sur ce sujet sans s'assurer au préalable que les conditions de qualité et de sécurité des soins sont réunies. Or, chez la personne âgée, les pathologies oculaires qui peuvent se traduire par une baisse de l'acuité visuelle sont fréquentes et nombreuses et seul un examen ophtalmologique complet permet de les détecter, examen que l'opticien n'est pas en mesure de faire.

Pour cette raison, le Gouvernement souhaite privilégier la voie de l'expérimentation et a soutenu la modification du texte en séance. Le texte modifié autorise ainsi les opticiens-lunetiers à réaliser directement dans les Ehpad une réfraction et à adapter, dans le cadre d'un renouvellement, les prescriptions médicales. Cette expérimentation n'étend donc pas les compétences des opticiens-lunetiers, mais les autorise à délocaliser leur exercice au profit des personnes ne pouvant se déplacer.

Mme Élisabeth Doineau , rapporteur. - Si l'accès aux soins ophtalmologiques est un casse-tête pour l'ensemble de la population, le problème est exacerbé pour les patients hébergés dans une structure médico-sociale. Inscrite à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale sur l'initiative de la députée Agnès Firmin Le Bodo, du groupe UDI, Agir et Indépendants, cette proposition de loi, d'envergure modeste, pose les premiers jalons d'une politique publique qui retiendra toute notre attention cette année, dans le cadre du débat national sur le grand âge et de la discussion de la future loi Santé : l'accompagnement de la perte d'autonomie et la prise en charge financière et humaine de la perte de certaines facultés.

La filière visuelle présente plusieurs blocages auxquels ce texte entend remédier.

Plusieurs acteurs interviennent lorsqu'une personne âgée perd de l'acuité visuelle : tout acte de correction de la vue doit d'abord être prescrit par un ophtalmologue ; la prescription peut être ensuite adaptée par un opticien-lunetier. Cette adaptation se fait dans le cadre d'une opération dite « de réfraction », au cours de laquelle le professionnel mesure le défaut optique et détermine la qualité de l'équipement à fournir.

Bien que le code de la santé publique consacre explicitement l'opticien-lunetier comme auxiliaire médical, l'exercice du test de réfraction n'est en aucun cas une délégation d'acte médical : l'ophtalmologue et l'opticien exercent chacun leur art dans le cadre distinct de l'activité médicale libérale ou hospitalière pour le premier, et commerciale pour le second. Cette dichotomie, conséquence logique de la différence des métiers, n'en est pas moins préjudiciable in fine.

La loi du 26 janvier 2016 portant modernisation de notre système de santé avait eu le mérite d'apporter plusieurs assouplissements à la rigidité de ce partage des tâches. Ils ont été intégralement neutralisés par un décret d'application le 12 octobre de la même année.

Auparavant, la délivrance de verres correcteurs, sur prescription médicale, ne pouvait être adaptée par l'opticien qu'à la double condition d'un renouvellement et d'une prescription initiale datant de moins de trois ans. La loi du 26 janvier 2016 a supprimé cette deuxième condition pour les verres ; le décret d'application l'a néanmoins maintenue pour la délivrance des lentilles de contact.

Ce même décret a conditionné la délivrance de verres correcteurs à l'existence d'une ordonnance médicale de moins de trois ans, pour tout patient âgé de plus de 42 ans. C'est tout simplement le rétablissement de la situation antérieure ! Pour le dire de façon plus explicite, les réformes les plus récentes ont mis en échec les tentatives pour atténuer les contraintes liées à la pluralité des acteurs de la filière visuelle.

Ce primat de la prescription médicale a des causes tout à fait légitimes, mais se heurte de plus en plus à certaines difficultés de terrain, dont les personnes âgées accueillies en établissement sont plus particulièrement victimes.

En premier lieu, l'écrasante majorité des personnes âgées, que ce soit pour des raisons financières ou d'arbitrage personnel, négligent leur santé visuelle. Au moment de l'admission en Ehpad, les ordonnances dépassent très souvent la limite de trois ans imposée par le décret, rendant impossible toute adaptation de l'équipement par un opticien.

La situation peut alors prendre un tour doublement déconcertant. D'abord, la personne âgée se voit contrainte de recourir à un prescripteur médical, alors même que l'intervention d'un opticien-lunetier serait dans la plupart des cas suffisante - et facilitée par la chalandise importante des enseignes. Ensuite, la personne âgée se trouve confrontée à la pénurie criante de soins ophtalmologiques, aggravée par un exercice de la profession concentré dans les pôles urbains et éloigné de la plupart des Ehpad situés en milieu rural ou sous-dense.

La durée moyenne d'attente d'un rendez-vous chez l'ophtalmologue, hors région parisienne, est de 87 jours. À ce problème de délai s'ajoute celui, non moins prégnant, du transport de la personne âgée au cabinet.

C'est ce dernier point qui motive la présente proposition de loi. Le décret d'application précité mentionne l'obligation pour l'opticien-lunetier de procéder au test de réfraction dans l'enceinte de son magasin ou dans un local y attenant. Cette restriction est d'autant moins compréhensible qu'est prévue, quelques lignes plus bas, la possibilité de délivrer des lentilles ou des verres aux patients à leur domicile ou en établissement. La personne âgée doit donc se déplacer en magasin pour bénéficier du test de réfraction, mais a la possibilité de se voir délivrer un équipement, directement consécutif à ce test, à domicile ou en établissement !

C'est à cette aberration que le présent texte entend remédier. Son article unique prévoit la possibilité, pour le directeur général de l'Agence régionale de santé (ARS), d'autoriser au sein des Ehpad la réalisation par les opticiens-lunetiers des tests de réfraction et l'adaptation, dans le cadre d'un renouvellement, des verres correcteurs ou des lentilles de contact. Cette disposition est indéniablement bienvenue, mais reste d'ampleur limitée.

Premièrement, alors que l'intention initiale de notre collègue députée était d'habiliter directement les opticiens-lunetiers à effectuer des opérations de réfraction et d'adaptation en Ehpad, le groupe La République en marche en séance publique a voulu ajouter une autorisation préalable du directeur général de l'ARS. Ce qui risque de compliquer l'accès à ce droit nouveau. Les députés de la majorité ont invoqué le risque de conventions anticoncurrentielles que les gestionnaires d'Ehpad pourraient être tentés de signer avec un ou plusieurs opticiens partenaires. Or ces conventions sont déjà incluses dans le contrôle de qualité externe imposé aux Ehpad par la loi relative à l'adaptation de la société au vieillissement ! La précaution est donc largement superflue : au lieu de protéger la personne, elle risque au contraire de la priver du droit ouvert par le texte.

Deuxièmement, je déplore que ce texte se limite au seul exercice des missions de l'opticien en Ehpad. Il aurait été tout aussi judicieux d'y traiter de l'allongement de la durée de validité de l'ordonnance émise par le prescripteur médical, ainsi que du partage des tâches au sein de la filière visuelle, car il est trop éloigné des réalités de terrain.

L'intitulé de cette proposition de loi a fait naître chez nous certains espoirs, rapidement déçus. Le texte affiche l'ambition d'« améliorer la santé visuelle des personnes âgées en perte d'autonomie » mais se limite à ouvrir la possibilité d'un test de réfraction en Ehpad, négligeant ainsi la grande majorité des pathologies visuelles dont sont atteints les résidents et qui ne peuvent être traitées par la simple délivrance d'un équipement optique.

Traiter d'un tel sujet nous éloignerait certes des bornes étroites de notre texte, mais nous toucherions alors aux enjeux réels et substantiels de l'organisation de la filière visuelle. Après avoir entendu l'ensemble des acteurs concernés, je suis convaincue que tous sont d'accord pour valoriser davantage les compétences de l'orthoptiste dans le dépistage et le diagnostic de ces pathologies.

Au vu de cet enjeu de santé publique, les réponses apportées par cette proposition de loi, limitées au seul champ de l'équipement en verres correcteurs des personnes âgées accueillies en Ehpad, sont insuffisantes. Mme la secrétaire d'État me répondra probablement que l'ampleur de ces sujets appelle un texte plus ambitieux et qu'une prochaine loi Santé ne manquera pas de leur apporter une réponse adéquate.

Ce n'est pas la première fois que le Sénat est appelé à se prononcer sur des textes modestes, dont la discussion est si étroitement corsetée par le Gouvernement qu'elle ne manque jamais de mêler une légère amertume à la légitime fierté de leurs auteurs. Ces initiatives se voient limitées à l'échelon restreint d'un acte ou d'une autorisation particulière, sans que l'appréhension globale du problème posé nous soit ouverte, alors que notre expérience d'élus locaux nous en donne bien souvent la connaissance fine.

Aux ajouts profitables que le Sénat pourrait faire est opposée la menace implicite d'une interruption de la navette ou d'un retrait du soutien de la majorité de nos collègues députés, avec pour conséquence regrettable la privation d'un droit nouveau pour nos concitoyens. C'est pourquoi malgré l'intention louable dont ce texte est animé et que je tiens à saluer, je vous recommande sans enthousiasme son adoption conforme dans la version adoptée par l'Assemblée nationale.

M. Daniel Chasseing . - Les troubles de la vision aggravent la perte d'autonomie des personnes âgées. Une étude réalisée auprès de 700 personnes de 84 ans révèle que 40 % d'entre elles présentent des troubles de la réfraction. Or les personnes âgées, même lorsqu'elles sont encore autonomes, ne vont pas consulter, notamment en raison de l'absence de prise en charge des transports et des délais pour obtenir un rendez-vous auprès d'un ophtalmologue. Les opticiens peuvent effectivement examiner la vue et adapter la correction, mais il faut que le patient se rende au magasin : on retrouve alors les problèmes de transport.

La proposition de loi autorise les opticiens à se rendre dans les Ehpad pour examiner les troubles de réfraction, cela me paraît important. Bien sûr, il existe d'autres pathologies associées aux troubles de réfraction qui devront être prises en charge par un ophtalmologue. L'opticien pourrait adresser un compte rendu au médecin traitant pour signaler que les troubles de réfraction ne sont pas seuls en cause. Toutefois, si la situation de 40 % des personnes concernées peut être améliorée, cette expérimentation mériterait d'être généralisée.

M. Alain Milon , président. - Notre collègue a fait allusion aux transports sanitaires, sujet sur lequel nous devrions travailler. En effet, l'article 80 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 pose des problèmes aux petits transporteurs ; les gros transporteurs, dans nos régions, prennent de plus en plus le contrôle de l'ensemble des transports sanitaires.

Mme Catherine Deroche . - Je vais voter ce texte, mais je partage tout à fait l'analyse d'Élisabeth Doineau. Malgré un titre ronflant, il s'agit simplement de permettre aux opticiens de faire le test de réfraction dans les Ehpad.

Je suis plus réservée quant à l'extension de la durée de validité des ordonnances, car il faut bien distinguer les pathologies médicales des simples troubles de réfraction, surtout chez les personnes âgées.

La filière visuelle s'est réorganisée, mais pas suffisamment. Ce sujet mérite un texte consensuel, élaboré avec tous les professionnels, pour définir le champ d'intervention de chaque professionnel et simplifier le parcours du patient, quel que soit son âge ou son lieu de résidence. En adoptant des mesures ponctuelles, on n'arrive à rien de lisible ni d'efficace.

Si le cloisonnement au sein de la filière a longtemps posé problème, tel n'est plus le cas aujourd'hui, car chacun est conscient des difficultés. Les ministres successifs nous promettent un texte spécifique à chaque PLFSS, mais on ne voit rien venir. Ce n'est pas cette proposition de loi qui changera la donne.

Mme Nassimah Dindar . - Je partage l'analyse de Catherine Deroche : nous devons envisager la perte d'autonomie des personnes âgées à l'aune de ses différentes manifestations, visuelles certes, mais également auditives. Le champ de la présente proposition de loi n'apparaît pas suffisamment large pour casser les cloisonnements que notre commission dénonce régulièrement.

Dans certains territoires isolés - je pense notamment à La Réunion - les ophtalmologues, comme d'autres professionnels, s'organisent déjà pour mieux répondre aux besoins de santé. Dès lors, il ne me semble pas nécessaire de prévoir, s'agissant des opticiens-lunetiers, une autorisation du directeur général de l'ARS préalablement à l'intervention en Ehpad. Cette limitation risque de contraindre l'application du dispositif proposé, voire d'entrer en contradiction avec le principe du reste à charge zéro. Le texte prévoit le lancement d'une expérimentation dans quatre régions. Comment ces territoires seront-ils choisis ? L'outre-mer bénéficiera-t-elle de l'expérimentation ? J'estime, pour ma part, que la mesure devrait s'appliquer immédiatement à l'ensemble des régions. Par ailleurs, un texte plus ambitieux en matière d'accès aux soins me semble indispensable.

M. Yves Daudigny . - Nos collègues députés ont adopté la présente proposition de loi à l'unanimité. Son ambition paraît certes limitée, mais elle n'en apportera pas moins une amélioration concrète pour les personnes âgées en Ehpad. En France, l'accès aux soins visuels représente un défi plus général compte tenu des inégalités territoriales en matière d'offre et de la diminution du nombre d'ophtalmologues. La Cour des comptes estime ainsi que, d'ici 2030, la densité ophtalmologique aura reculé de 20 %. Je regrette, à l'aune de ce constat, l'exclusion des optométristes des plans régionaux de santé. Un quart des résidents en Ehpad ne dispose pas des appareils visuels nécessaires. L'initiative des députés mérite donc d'être saluée : nous soutenons le texte proposé. La rémunération des interventions d'opticiens-lunetiers en Ehpad n'a cependant pas été évoquée. Des précisions pourraient-elles nous être apportées sur ce point ?

Mme Florence Lassarade . - Je rejoins également Catherine Deroche. La proposition de loi tente de répondre, modestement, au nombre insuffisant d'ophtalmologues sans remédier véritablement au problème. Nous nous installons un peu plus, avec ce texte, dans une logique de gestion de la pénurie qui pourrait concerner à terme bien d'autres spécialités. La dégénérescence maculaire liée à l'âge (DMLA) représente la principale pathologie visuelle des personnes âgées. Il faudrait permettre sa prise en charge spécifique au sein des Ehpad. Par ailleurs, le médecin traitant peut déjà prescrire des verres correcteurs.

Mme Laurence Cohen . - Je remercie notre rapporteure pour son travail d'une grande pédagogie. La présente proposition de loi ressort hélas du bricolage : elle répond à une urgence sans envisager le problème dans son ensemble. En outre, la nécessité de l'adopter conforme pour assurer sa rapide application dévalue une fois de plus le rôle du Sénat et, au-delà, du Parlement. À l'heure où nos concitoyens réclament davantage de démocratie, cette restriction n'a nul sens ! Le texte reste muet sur le fait que les personnes en perte d'autonomie ne peuvent consulter facilement un professionnel de santé par manque de personnel dans les Ehpad. Les revendications en la matière sont pourtant connues. Il est urgent que le Gouvernement agisse ! Rien ne ressort non plus s'agissant des inégalités territoriales et des déserts médicaux, qui ne concernent pas uniquement les zones rurales. Au-delà des seuls soins optiques, le manque de praticiens apparaît pourtant général. Devrons-nous encore voter des textes pour trouver des alternatives à la pénurie de telle ou telle professions de santé ? La réflexion doit être globale. Par ailleurs, j'insiste à nouveau : le Gouvernement doit cesser de brider l'initiative parlementaire sous le prétexte de l'urgence. La méthode ne grandit ni l'action gouvernementale ni la démocratie représentative !

M. Daniel Chasseing . - Les opticiens-lunetiers peuvent déjà délivrer des lunettes en magasin. Il me semble pertinent qu'ils y soient également autorisés en Ehpad, même s'ils ne pourront prendre en charge des pathologies comme la cataracte ou la DMLA. Le texte, bien que modeste, contribuera à l'amélioration de la prise en charge sanitaire de nos aînés.

Mme Élisabeth Doineau , rapporteure. - Je vous remercie de l'intérêt que vous portez à ce sujet, même si je perçois dans vos propos une certaine frustration. Victoire Jasmin, qui a assisté à mes côtés aux auditions, pourra témoigner de la volonté des professionnels de santé de réfléchir de concert à une meilleure coordination des tâches.

Il existe indéniablement un problème de santé visuelle dans les Ehpad. Une meilleure coopération des professionnels concernés, au niveau des territoires, améliorera sans nul doute l'accès aux soins visuels, mais également auditifs et bucco-dentaires. Elle existe déjà entre ophtalmologues et médecins traitants ; elle pourrait également s'organiser entre ces derniers et les opticiens-lunetiers.

J'approuve les propos de Catherine Deroche sur le parcours de santé visuelle. Il convient, par une meilleure collaboration entre professionnels, de dégager du temps d'expertise au profit des ophtalmologues.

Nous avons examiné la situation des orthoptistes, avec lesquels certains ophtalmologues collaborent déjà afin de se consacrer aux consultations plus techniques. Ils souhaiteraient intervenir dans les Ehpad aux côtés des opticiens-lunetiers en vue de détecter des pathologies et de travailler sur les équipements.

Madame Dindar, l'outre-mer doit évidemment participer à l'expérimentation prévue par la proposition de loi. Je vous indique qu'une expérimentation de télémédecine menée récemment dans le département du Finistère avec des ophtalmologues a donné des résultats fort intéressants s'agissant du nombre de consultations menées. Il convient donc de poursuivre, en lien avec les ARS, les expérimentations en matière de coordination des soins, tel que le prévoit l'article 51 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2018.

Monsieur Daudigny, les statistiques que vous avez évoquées apparaissent effectivement inquiétantes. L'amélioration de la santé visuelle constitue une priorité pour les personnes âgées. Vous avez raison, Madame Lassarade, nous ne prétendons pas, avec le présent texte, gérer la pénurie d'ophtalmologues, mais cela vaut mieux, il me semble, que de demeurer impuissants. Nous devons agir au mieux avec les moyens dont disposent les territoires, car la situation continuera à s'aggraver d'ici 2030.

Je vous rejoins, madame Cohen, sur le peu de cas que le Gouvernement fait de l'initiative parlementaire. Les sénateurs, pourtant, ont à coeur de trouver des solutions en mobilisant leur connaissance des territoires, dans le souci d'améliorer la cohésion sociale et territoriale. Sur ce sujet comme sur d'autres, je crois utile de croiser le regard des députés et celui des sénateurs.

Il convient enfin de renforcer la formation du personnel des Ehpad afin d'améliorer l'accompagnement de nos aînés souffrant de troubles visuels et de leur assurer, en matière de prise en charge, la dignité qui leur est due. À cet égard, j'estime qu'un bilan des troubles cognitifs et sensoriels devrait être systématiquement réalisé à l'entrée en établissement.

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État. - Je tiens à rappeler qu'il ne s'agit pas d'un texte du Gouvernement, mais d'une initiative parlementaire. Nous le soutenons, car il apportera aux personnes âgées en Ehpad une amélioration appréciable de leur prise en charge sanitaire dans un contexte de pénurie d'ophtalmologues. Le sujet apparaît d'importance car les troubles visuels peuvent constituer le signe annonciateur de pathologies plus lourdes. À cet égard, il demeure évident qu'une visite médicale reste préférable à l'intervention d'un opticien-lunetier.

Madame Dindar, la Haute Autorité de santé (HAS) ayant émis un avis défavorable à un transfert de compétences plus large des ophtalmologues aux opticiens-lunetiers, les députés de la majorité ont modifié la proposition de loi pour prévoir l'expérimentation du dispositif dans quatre régions avant une éventuelle généralisation. Il convient de veiller, dans ce cadre, à prendre en compte les territoires ultramarins.

Les échanges d'informations entre les professionnels médicaux et paramédicaux doivent être renforcés. Les ARS procèderont, pour fonder l'expérimentation, à une évaluation des dynamiques et des ressources locales pour recenser les opticiens-lunetiers, déjà en lien avec des ophtalmologues, susceptibles d'intervenir en Ehpad.

Enfin, monsieur Daudigny, la rémunération des interventions en Ehpad, y compris dans le cadre du reste à charge zéro, sera identique à celle pratiquée en magasin.

M. Alain Milon , président. - Madame la ministre, la loi, si elle ouvre de nouvelles possibilités aux professionnels de santé, doit les laisser libres de s'organiser à leur guise. Par ailleurs, l'initiative parlementaire doit être davantage respectée par le Gouvernement, ne serait-ce que parce que les sénateurs, malgré l'interdiction du cumul des mandats, apportent au débat leur connaissance fine du ressenti des territoires.

La proposition de loi est adoptée sans modification.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

___________

Fédération nationale des associations de directeurs d'établissements et services pour personnes âgées (Fnadepa)

Annabelle Vêques-Malnou , directrice

Syndicat national des centres d'optique mutualistes (Synom)

Véronique Bazillaud,
déléguée générale Synom-Synam, directrice de la communication et des relations institutionnelles Visaudio

Audition conjointe

Rassemblement des opticiens de France (ROF)

André Balbi , président

Nicolas Raynal, délégué général

Sandrine Ladoux , administratrice

Didier Cohen , administrateur

Fédération nationale des opticiens de France (FNOF)

Alain Gerbel, président

Hugues Verdier-Davioud, chargé de mission

Audition conjointe

Syndicat national des établissements et résidences privés pour personnes âgées (Synerpa)

Pauline Meyniel , responsable pôle médico-social

Audrey Houssais , responsable affaires publiques et territoires

Fédération hospitalière de France (FHF)

Annie Lelièvre, responsable du pôle autonomie

Perrine Bonnefoy, collaboratrice

Audition conjointe

Céline Lebigre Robine, opticienne de santé mobile

Mathieu Gerber , fondateur du réseau des opticiens mobiles

Ministère de l'Économie et des Finances

Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF)

Jean-Yves Savoie, adjoint au chef du bureau des produits et prestations de santé et des services à la personne (5B)

Audition conjointe

Syndicat national autonome des orthoptistes (SNAO)

Laurent Milstayn, président

Francia Giulia, conseiller en affaires publiques

Victor Cracan, conseiller en affaires publiques

Association française d'orthoptique (AFO)

Aline Kostas, orthoptiste libérale Paris - salariée à temps partiel aux XV-XX

Nadia Kebbal, orthoptiste salariée au CH de Haguenau

Audition conjointe

Conseil national professionnel d'ophtalmologie (CNP)

Béatrice Cochener , présidente

Syndicat national des ophtalmologistes de France (SNOF)

Thierry Bour , président

Audition conjointe

Gaëtan Gicquel, directeur France du laboratoire Glaukos

Sabina Lindstedt, directrice conseil au sein du cabinet Anthenor


* 1 Loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé.

* 2 Décret n° 2016-1670 du 5 décembre 2016 relatif à la définition des actes d'orthoptie et aux modalités d'exercice de la profession d'orthoptiste.

* 3 Conseil d'État, 5 e chambre, 21 décembre 2018, n° 410187.

* 4 Décret n° 2016-1381 du 12 octobre 2016 relatif aux conditions de délivrance de verres correcteurs ou de lentilles de contact oculaire correctrices et aux règles d'exercice de la profession d'opticien-lunetier.

* 5 Loi n° 2017-1836 du 30 décembre 2017 de financement de la sécurité sociale pour 2018.

* 6 COUR DES COMPTES, Rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale , octobre 2018.

* 7 Loi n° 2018-1203 du 22 décembre 2018 de financement de la sécurité sociale pour 2019, article 33.

* 8 Ordonnance n° 2017-49 du 19 janvier 2017 relative aux avantages offerts par les personnes fabriquant ou commercialisant des produits ou des prestations de santé.

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