MISSION « ENGAGEMENTS FINANCIERS DE L'ÉTAT » ET DIVERS COMPTES SPÉCIAUX - Mme Nathalie Goulet, rapporteur spécial

I. EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION ET DES COMPTES SPÉCIAUX EN 2018

A. LA MISSION « ENGAGEMENTS FINANCIERS DE L'ÉTAT »

1. Un seul programme concentre la quasi-totalité des crédits de la mission

La mission « Engagements financiers de l'État » porte l'ensemble des crédits destinés à permettre à l'État de respecter ses obligations financières . Elle se compose de sept programmes , de poids budgétaires inégaux :

Répartition des crédits de paiement
de la mission « Engagements financiers de l'État » par programme en 2017

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

- le programme 117 « Charge de la dette et trésorerie de l'État » (crédits évaluatifs) doit répondre au besoin de financement de l'État et lui permettre de gérer sa dette et sa trésorerie en conciliant sécurité et intérêt des contribuables. Représentant 98 % des crédits de la mission , le programme joue un rôle prépondérant dans sa bonne exécution. À noter toutefois que, conformément à l'article 22 de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) 153 ( * ) , les crédits ne sont pas directement versés aux acteurs financiers mais transitent par le compte de commerce 903 « Gestion de la dette et de la trésorerie de l'État » ;

- le programme 114 « Appels en garantie de l'État » (crédits évaluatifs) porte les crédits destinés à couvrir la mise en jeu des garanties octroyées par l'État, notamment pour les dettes émises par des tiers ;

- le programme 145 « Épargne » répond à deux grands objectifs : (i) le pilotage des dispositifs de financement du logement, à la fois pour les organismes de logement social et pour les particuliers et (ii) le pilotage des systèmes de l'épargne réglementée ;

- le programme 168 « Majoration de rentes » , qui permettait à l'État de rembourser partiellement certains organismes débirentiers du coût de majorations des rentes viagères, connaissait son dernier exercice en 2018 154 ( * ) ;

- le programme 336 « Dotation en capital du mécanisme européen de stabilité (MES) » correspond à la contribution française au MES ;

- le programme 338 « Augmentation de capital de la Banque européenne d'investissement (BEI) » n'a été abondé qu'une seule fois, en 2013, pour porter la contribution française à l'augmentation en capital de la BEI ;

- le programme 344 « Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers structurés à risque » porte les aides financières destinées aux collectivités territoriales et à leurs établissements ayant contracté des emprunts dits « toxiques ».

2. L'exécution proche de la prévision à l'échelle de la mission masque des disparités fortes entre les programmes

À l'échelle de la mission , l'exécution est, à l'instar des années 2016 et 2017, légèrement supérieure à la prévision inscrite en loi de finances initiale (+ 0,82 % en CP), mais inférieure à l'exécution constatée en 2017 (- 0,55 %). Votre rapporteur spécial note que, pour la troisième année consécutive et après plusieurs années de sous-exécution d'ampleur, les écarts sont globalement maîtrisés.

Exécution des crédits de la mission par programme en 2018

( en millions d'euros )

Programme

Exécution 2017

LFI 2018

Exécution 2018

Exécution 2017 / Exécution 2018

Exécution 2018 / LFI 2018

[ 117 ] Charge de la dette et trésorerie de l'État (crédits évaluatifs)

AE

41 697,19

41 197,00

41 541,28

- 0,37%

0,84%

CP

41 697,19

41 197,00

41 541,28

- 0,37%

0,84%

[ 114 ] Appels en garantie de l'État (crédits évaluatifs)

AE

34,98

104,09

44,63

27,58%

- 57,12%

CP

34,98

104,09

44,63

27,58%

- 57,12%

[ 145 ] Épargne

AE

97,08

149,99

101,00

4,04%

- 32,66%

CP

97,05

149,99

101,00

4,07%

- 32,66%

[ 168 ] Majoration de rentes

AE

260,90

141,80

142,48

- 45,39%

0,48%

CP

260,90

141,80

142,48

- 45,39%

0,48%

[ 336 ] Dotation en capital du mécanisme européen de stabilité

AE

86,71

0,00

100,00

15,32%

CP

86,71

0,00

100,00

15,32%

[ 338 ] Augmentation du capital de la Banque européenne d'investissement

AE

0,00

0,00

0,00

CP

0,00

0,00

0,00

[ 344 ] Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers structurés à risque

AE

-49,96

0,00

- 249,98

400,32%

CP

174,00

183,92

189,90

9,13%

3,25%

TOTAL MISSION

AE

42 126,90

41 592,88

41 679,42

- 1,06%

0,21%

CP

42 350,84

41 776,80

42 119,30

- 0,55%

0,82%

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Ce bilan plutôt positif est, en réalité, tiré par l'exécution satisfaisante du programme 117 et masque des disparités importantes au sein de la mission :

- l'écart constaté sur le programme 114 entre l'exécution en 2017 et la prévision en 2018 (+ 280 %) provenait de l'abondement plus important de l'action 04 « Développement international de l'économie française ». Toutefois, les sous-exécutions constatées sur les actions 02 « Soutien au domaine social, logement et santé » (- 34,71 %) et 04 (- 71,18 %) expliquent le moindre écart finalement constaté entre les années 2017 et 2018 et l'écart important entre la prévision et l'exécution en 2018 ;

- le programme 145 présente également une sous-exécution importante (- 32,66 %), à l'instar des années précédentes. En effet, les taux d'intérêts attractifs des PEL et des CEL n'incitent pas les particuliers à les clôturer, alors même que les conditions des prêts d'épargne-logement sont moins intéressantes que celles aujourd'hui offertes par le réseau bancaire. Si la direction du budget a toujours mis en avant un principe de prudence dans l'évaluation des crédits du programme, votre rapporteur spécial note avec satisfaction que la prévision en loi de finances pour 2019 est plus en ligne avec l'exécution constatée en 2018 ;

- le programme 344 était le seul programme avec un reliquat important de restes à payer. L'écart observé pour les AE en 2018 s'explique par le retrait de près de 250 millions d'euros en AE, pour tenir compte du montant réel des conventions signées entre le fonds de soutien et les collectivités ;

- sur le programme 336, votre rapporteur spécial regrette que, cette année encore, un décret ait dû être pris le 26 décembre 2018 pour ouvrir des crédits à hauteur de 100 millions d'euros pour la dotation en capital du MES . Comme le soulignent nos collègues MM. Thierry Carcenac et Claude Nougein, rapporteurs spéciaux de la mission « Gestion des finances publiques et des ressources humaines », le recours au programme « dépenses accidentelles et non prévisibles » de la mission « Crédits non répartis » est d'autant plus critiquable que cette dépense, sans être certaine, était très probable . Cela nuit donc à la sincérité de la budgétisation. Votre rapporteur spécial n'est pas convaincue par la justification du Gouvernement, qui explique l'absence de budgétisation initiale par l'absence d'engagement réciproque de l'Allemagne au moment de l'élaboration de la loi de finances initiale 155 ( * ) . Votre rapporteur spécial regrette ainsi que le Gouvernement ait encore une fois fait le choix de ne pas inscrire de crédits sur le programme 336 dans la loi de finances pour 2019.

Ainsi, le plafond (hors dette) inscrit dans la loi n°2018-32 du 22 janvier 2018 de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 (LPFP 2018-2022) pour la mission « Engagements financiers de l'État » a tout juste été respecté en 2918 (578,01 millions d'euros en exécution, contre 580 millions d'euros en prévision).

Le programme 117 lui-même n'est pas exempt de tout reproche . Des crédits supplémentaires ont dû être ouverts, notamment par le biais de la loi de finances rectificative du 28 décembre 2017. Cette exécution, supérieure à la prévision initiale, s'explique par la majoration des charges des obligations indexées, du fait d'une inflation plus forte qu'anticipée . Cette charge supplémentaire n'a pas été totalement compensée par le niveau des taux.

Mouvements de crédits intervenus en gestion
au cours de l'exercice 2018

( CP, en millions d'euros )

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires


* 153 Article 22 de la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances : « les opérations budgétaires relatives à la dette et à la trésorerie de l'État, à l'exclusion de toute opération de gestion courante, sont retracées dans un compte de commerce déterminé ».

* 154 L'article 142 de la loi n°2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018 supprime en effet ce dispositif au 1 er janvier 2018. Toutefois, les versements de l'État correspondant aux remboursements partiels d'une année n étant effectués en année n+1, le programme 168 a été abondé en crédits en 2018.

* 155 Le ministre de l'Économie et des Finances s'est engagé à rétrocéder les intérêts négatifs perçus sur la fraction du capital du MES placée à la Banque de France à la condition que l'Allemagne s'engage à faire de même pour la fraction placée à la Bundesbank.

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