B. LA TAXATION SUR LA VALEUR AJOUTÉE DOIT ÊTRE REVUE EN PROFONDEUR POUR FAVORISER LA RELANCE DE L'ACTIVITÉ ET LE PROGRÈS VERS DAVANTAGE DE JUSTICE SOCIALE

Dans le contexte actuel de crise sanitaire, il est indispensable d'activer l'ensemble des leviers disponibles pour favoriser la relance de l'activité et de la consommation . En ce sens, le rapporteur spécial considère que le levier de la TVA a été insuffisamment mobilisé par le Gouvernement. Instrument fiscal mais également de justice sociale via les taux réduits, la TVA ne doit pas uniquement être perçue sous l'angle des recettes budgétaires. Le rapporteur spécial estime en effet que d'importantes inégalités subsistent devant la TVA, de nombreux produits de première nécessité n'entrant pas dans le champ des taux réduits .

Le champ des produits de première nécessité doit pouvoir être étendu : le taux de 5,50 % ou même celui de 2,1 % devraient viser tous les produits répondant aux besoins essentiels des personnes ainsi que ceux indispensables au maintien de leur dignité .

Sur une initiative sénatoriale, le taux réduit à 5,50 % a été étendu aux protections hygiéniques féminines en 2015 16 ( * ) . Il est nécessaire de poursuivre l'extension de ce taux réduit . On peut notamment penser à un taux réduit sur les protections hygiéniques pour les personnes âgées, voté en 2015 par le Sénat mais écarté à l'Assemblée nationale au motif de contrariété avec le droit européen.

En effet, le champ des taux réduit doit respecter les dispositions de la directive TVA du 28 novembre 2006 17 ( * ) qui fixe, à l'annexe III, la liste limitative des biens et prestations de services pouvant faire l'objet d'un taux réduit 18 ( * ) . En l'état du droit de l'Union européenne, des marges restent disponibles pour le législateur national qui pourrait abaisser à 5,5 % le taux sur certains produits, notamment certains droits d'entrée (musées, monuments, etc.) ou le bois de chauffage.

Les différents taux de TVA applicables en France

Le taux normal de la TVA est fixé à 20 % , et s'applique à tous les produits ou services pour lesquels aucun autre taux n'est expressément prévu 19 ( * ) .

Le taux réduit de 10 % s'applique aux produits agricoles non transformés, au bois de chauffage, à certains travaux d'amélioration du logement, à certaines prestations de logement et de camping, aux foires et salons, aux jeux et manèges forains, aux droits d'entrée des musées, zoo, monuments, aux transports de voyageurs, au traitement des déchets ainsi qu'à la restauration 20 ( * ) .

Le taux réduit de 5,5 % s'applique aux produits alimentaires, aux protections hygiéniques féminines, équipements et services pour handicapés, livres sur tout support, abonnements gaz et électricité, fourniture de chaleur issue d'énergies renouvelables, fourniture de repas dans les cantines scolaires, billetterie de spectacle vivant et de cinéma, certaines importations et livraisons d'oeuvres d'art, travaux d'amélioration de la qualité énergétique des logements, logements sociaux ou d'urgence, accession à la propriété 21 ( * ) .

Le taux particulier de 2,1 % est réservé aux médicaments remboursables par la sécurité sociale, aux ventes d'animaux vivants de boucherie et de charcuterie à des non assujettis, à la redevance télévision, à certains spectacles et aux publications de presse inscrites à la Commission paritaire des publications et agences de presse 22 ( * ) .

Source : ministère de l'Économie et des finances 23 ( * )

Le rapporteur spécial considère qu'il est particulièrement urgent d'engager, au niveau européen, une réflexion approfondie sur le champ des taux réduits. En effet, au nom de la justice sociale et de la lutte contre les inégalités les plus criantes, la France doit défendre, au niveau européen, l'extension des taux réduits à certains produits de première nécessité malheureusement oubliés dans la liste actuelle.

Pour exemple, le savon, le dentifrice, le gel douche ou le shampooing sont tous des produits indispensables aux personnes et à leur dignité et doivent donc à ce titre être considérés comme des produits de première nécessité .

Plus largement, le rapporteur spécial considère qu'une réflexion doit impérativement être engagée pour permettre une franchise de TVA sur certains produits.

Dans certains États membres de l'Union européenne, en application d'une clause dite « grand-père » des produits sont déjà exonérés de TVA. Tel est le cas en Suède sur les médicaments prescrits ou au Royaume-Uni sur l'approvisionnement en eau ou de façon plus étonnante sur les protections et casques de moto 24 ( * ) . L'annexe III de la directive de 2006 est aujourd'hui dépassée et doit évoluer pour permettre de mettre en oeuvre un système de taxation plus juste et mieux adapté à la situation des personnes les plus précaires.


* 16 Adopté par le Sénat lors de l'examen du PLF pour 2016 , sur amendement notamment du groupe CRCE.

* 17 Directive 2006/112/CE du Conseil relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée

* 18 Le taux réduit désigné ici concerne uniquement le taux de 5,50 %, le taux de 2,1 % ne trouvant à s'appliquer en France qu'en vertu d'une clause dite « grand-père » permettant le maintien de taux super-réduits antérieurs à la mise en oeuvre des directives TVA.

* 19 Article 278 du code général des impôts.

* 20 Articles 278 bis , 278 quater , 278 sexies A , 278 septies et art. 279 du code général des impôts.

* 21 Articles 278-0 bis et 278-0 bis A , et 278 sexies

* 22 Article 281 quater et suivants du code général des impôts

* 23 https://www.economie.gouv.fr/cedef/taux-tva-france-et-union-europeenne

* 24 Ces exceptions sont autorisées par le titre VIII, chapitre IV de la directive de 2006.

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