B. L'EFFORT EN FAVEUR DES ANCIENS COMBATTANTS PORTÉ PAR LE PROGRAMME 169 ENTRE ATONIE ET DÉBUDGÉTISATIONS

Les crédits de paiement du programme 169, qui regroupe la plus grande part des dispositifs de réparation et de reconnaissance en faveur du monde combattant (ayants droit et ayants cause), baissent de 4,5 % dans le projet de loi de finances pour 2020 (- 79,1 millions d'euros contre - 126,2 millions d'euros, l'an dernier).

Évolution des crédits du programme 169
entre 2020 et 2021

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les données du projet annuel de performances pour 2021

La diminution en autorisations d'engagement est un peu moins forte (- 4,1 %, mais après une baisse de plus de 7 % l'an dernier), du fait d'une augmentation des autorisations d'engagement prévues au bénéfice de l'Office national des Anciens Combattants et Victimes de guerre (ONAC-VG) et l'Institution nationale des Invalides (INI) après le fort repli observé l'an dernier.

On rappelle qu'en 2019, la diminution des crédits de ce programme avait été la plus marquée observée depuis 2015.

Pour être plus contenue cette année, elle n'en demeure pas moins nette, ce qui correspond largement à une tendance naturelle à la contraction de la population bénéficiaire des allocations de reconnaissance et à une déformation de la structure des allocataires, qui est composée de plus en plus par des pensions dérivées.

Néanmoins, sous l'effet d'une dynamique, toutefois très relative, du point de pension militaire d'invalidité (PMI) qui sert d'étalon aux principales allocations servies aux anciens combattants, le programme 169 tout en poursuivant sa tendance naturelle à la décrue, qui en fait un contributeur régulier à la réduction des dépenses publiques, perd un peu moins de crédits que ces dernières années, tout en devant rattraper, sur certaines lignes de crédits, le retard accumulé ces dernières années.

Évolution des crédits de paiement d'intervention du programme 169
par type de prestation (2020-2021)

(en millions d'euros)

Dispositif

PLF
2020

PLF 2021

Différence

PMI

911,7

850,9

- 60,8

Retraite du combattant

660,2

644,8

- 15,4

Soins médicaux gratuits, appareillage, expertises

45,4

40,5

- 4,9

Remboursement réductions de transport

1,8

1,3

- 0,5

Remboursement prestations sécurité sociale

73,8

75,4

+1,6

Majoration des rentes mutualistes

226,1

221,2

- 4,9

ONAC (action sociale)

26

25

- 1

Actions en faveur des rapatriés

18,6

24,8

+ 6,2

TOTAL

1 963,6

1 883,9

- 79,7

Source : commission des finances du sénat d'après le projet annuel de performances pour 2021

La réduction relative des crédits est dans la ligne de l'évolution global des dotations de la mission, mais cependant un peu plus forte (-4,8 %), pour les deux interventions regroupées au titre de l'administration de la dette viagère (pensions militaires d'invalidité et retraites du combattant), qui concentrent les trois quarts des crédits du programme, interventions qui avaient toutefois beaucoup plus baissé l'an dernier ( 6,1 %).

Cette évolution pèse à son tour sur les dépenses prévues du fait de l'exercice des droits liés à la perception d'une pension d'invalidité (soins médicaux, transports, remboursements des prestations de sécurité sociale) tout en se trouvant légèrement amortie (- 3,1 %) du fait de l'inertie relative des dépenses liées à ces derniers.

Les dotations prévues au titre de l'action sociale baissent à nouveau, de 3,8 %.

Après avoir connu un net recul l'an dernier, les crédits provisionnés pour payer les allocations de reconnaissance aux rapatriés sont marqués par une forte progression (+ 33 %).

Les crédits destinés à financer la majoration des rentes mutualistes, dont le classement sous la rubrique « solidarité » pourrait être discuté, reculent un peu moins que les allocations versées aux anciens combattants (- 2,2 %).

Enfin, les crédits provisionnés au programme 169 à destination des opérateurs de la mission ressortent en hausse (+0,9 %), mais pour des raisons essentiellement conventionnelles.

La réduction des dépenses programmées pour 2021 est largement le produit de deux variations : l'une porte sur la population des bénéficiaires, qui se replie plus fortement que les dotations provisionnées, l'autre est liée à l'évolution de la valeur du point de PMI, qui tout en étant mineure, est plus forte que l'an dernier et limite l'impact des évolutions démographiques. L'intervention d'une mesure nouvelle qui coûterait 1 million d'euros en 2021, ne joue qu'un très modeste rôle. L'extension en année pleine de mesures adoptées les années précédentes va quant à elle au soutien des dépenses du programme.

Une particularité liée à la « tuyauterie budgétaire » mérite attention

Le suivi des dépenses de PMI et de la retraite du combattant doit tenir compte de ce que la consommation des crédits inscrits à ce titre au programme 169 peut ne pas se traduire par des transferts équivalents au bénéfice des titulaires de droits en raison des modalités de la maquette budgétaire. Les dépenses sur crédits du programme 169 sont, en effet, versées en direction du compte d'affectation spéciale « Pensions » (en particulier du programme 743 de ce compte).

Elles en constituent les recettes, à partir desquelles sont effectués les versements effectifs aux bénéficiaires. Pour suivre la consommation des crédits correspondants du programme 169, il convient donc de mesurer les dépenses effectives du programme 743 qui correspondent aux recettes ainsi apportées à ce compte.

C'est ainsi qu'en 2019, s'agissant des PMI, pour des crédits inscrits en loi de finances initiale de 965,3 millions d'euros au titre du programme 169, les dépenses effectives réalisées à partir du compte d'affectation spéciale « Pensions » devraient s'élever à 990 millions d'euros (soit un excédent de 24,7 millions d'euros). Pour la retraite du combattant, un constat inversé tend à faire valoir que les crédits consommés à partir du programme 169 (708,5 millions d'euros) excéderont les dépenses effectives (697,3 millions d'euros) de 11,2 millions d'euros.

Pour 2021, les ressources du programme 743 du CAS « pensions » ayant été sollicitées ces dernières années, les écarts entre les dotations du programme 169 et celles du programme 743 sont nettement plus faibles. Nul pour les PMI, il s'élève à 800 000 euros pour la retraite du combattant (soit l'excédent des dépenses programmées dans le CAS « Pensions » par rapport aux dépenses provisionnées dans le programme 169 de la mission sous revue).

1. Des extensions de droits de portée limitée ces dernières années, un manque d'initiatives nouvelles réellement significatives en 2021, comme en 2020

Au cours des cinq dernières années, une série de mesures d'extension des droits en faveur des anciens combattants sont intervenues.

Les modifications apportées aux droits des anciens combattants (propres ou dérivés) n'ont eu qu'un assez faible impact sur leur situation.

Les données transmises en réponse au questionnaire du rapporteur spécial ne permettent pas de l'évaluer avec une précision complète, mais elles suggèrent des ordres de grandeur permettant d'aboutir à cette conclusion.

Évolutions législatives intervenues entre 2015 et 2020 pour modifier
les droits des anciens combattants

Mesure

Références

Impact sur le nombre de bénéficiaires

Valeur unitaire des droits (prise en compte de la valeur du point PMI à 14,68 €)

Pension militaire d'invalidité

Revalorisation des majorations spéciales de pensions des conjoints survivants ayant donné des soins constants à un pensionné grand invalide. Abaissement de la condition de mariage ou de PACS et de soins constants de 15 à 10 ans.

Article 85 de la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015

66

Selon la situation de l'invalide avant son décès :

• 7 340 €

• 6 018,8 €

Proportionnalité de la majoration spéciale des conjoints survivants ayant donné des soins constants à un pensionné grand invalide, selon la durée de mariage ou de PACS et de soins.

Article 131 de la loi n°2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016

27

Selon la situation de l'invalide avant son décès :

• 4 404 €

• 3 376 €

• 2 202 €

• 1 541 €

Octroi d'un supplément de pension aux conjoints ou partenaires survivants âgés de moins de 40 ans et ayant au moins un enfant à charge.

Article 119 de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017

Pas de demande reçue

Valeur maximale :

1 307 €

Alignement des pensions des militaires titulaires d'une pension militaire d'invalidité (PMI) rayés des contrôle avant le 3 août 1962 (taux du soldat) et leurs ayants-cause sur les PMI des militaires rayés des contrôle depuis le 3 août 1962 (taux du grade) et leurs ayants-cause.

Article 125 de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018

5 286 dossiers traités au 31 décembre 2018, dont 363 ne peuvent être valorisés.

Coût global estimé au 31 décembre 2018 à 3,4 M€, soit 644 € par personne. N.B. : Ce coût unitaire ne reflète pas l'hétérogénéité des PMI et le public concerné (conjoints survivants, orphelins, invalides).

Carte du combattant

Carte « à cheval » permettant aux militaires déployés en Algérie au moins 4 mois, au-delà du 2 juillet 1962, et ce sans interruption.

Article 109 de la loi n°2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014

Au 31 décembre 2019 14 364 cartes du combattant attribuées

Retraite du combattant

763,36 € par an au 1 er janvier 2020

Une durée d'au moins quatre mois de service en OPEX permet d'obtenir la carte du combattant.

Article 87 de la loi n°2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015

Au 31 décembre 2019: 35 813 10 ( * ) cartes du combattant attribuées à des personnes âgées de 65 ans et plus

Retraite du combattant

763,36 € par an au 1 er janvier 2020

Retraite du combattant

Augmentation de la retraite du combattant de 2 points PMI au 1 er janvier 2017 et de 2 autres points au 1 er septembre 2017.

Décret n° 2016-1904 du 28 décembre 2016 modifiant l'article D. 321-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre 11 ( * )

Néant
les conditions d'attribution sont inchangées

763,36 € par an 1 er janvier 2020

Allocations versées aux anciens membres des forces supplétives et à leurs conjoints survivants

Augmentation de 167 € de l'allocation de reconnaissance. Le montant de l'allocation option 1 (rente viagère seule) est fixé à 3415 € et le montant de l'allocation viagère option 2 (rente diminuée du versement d'un capital) est fixé à 2322 €.

Article 86 de la loi n°2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015

Néant. Les conditions sont inchangées. De plus, l'accès au dispositif est frappé de forclusion à compter du 20 décembre 2014 (LPM 2014-2019, article 52).

Allocation de reconnaissance option 1 : 3415 €

Allocation de reconnaissance option 2 : 2322 €

Création de l'allocation viagère indexé sur le taux d'évolution en moyenne annuelle des prix à la consommation de tous les ménages, hors tabac, destinée aux conjoints et ex-conjoints, mariés ou ayant conclu un pacte civil de solidarité, survivants de harkis, moghaznis et personnels des autres formations supplétives de statut civil de droit local ayant servi en Algérie qui ont fixé leur domicile en France. Les conjoints survivants ne doivent être ni remariés ni avoir conclu de PACS. Le montant est identique à celui de l'allocation de reconnaissance, option 1 (3415 €).

Article 133 de la loi n°2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016.

Au 1 er juillet 2020, l'allocation viagère est versée à 1 092 bénéficiaires.

3 415 €

Revalorisation du montant de l'allocation de reconnaissance (option 1) et de l'allocation viagère à 3515 € et de l'allocation de reconnaissance (option 2) à 2422 €.

Article 120 de la loi n°2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017

Néant. Les conditions sont inchangées.

Allocation de reconnaissance option 1 et allocation viagère : 3 515 €

Allocation de reconnaissance option 2 : 2 422 €

Revalorisation du montant de l'allocation de reconnaissance (option 1) et de l'allocation viagère à 3663 € et de l'allocation de reconnaissance (option 2) à 2555 €.

Article 124 de la loi n°2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018

Néant. Les conditions sont inchangées.

Allocation de reconnaissance option 1 et allocation viagère : 3 663 €

Allocation de reconnaissance option 2 : 2 555 €

Revalorisation du montant de l'allocation de reconnaissance (option 1) et de l'allocation viagère à 4 109 € et de l'allocation de reconnaissance (option 2) à 2 987 € (portées respectivement à 4 150 € et 3 017 € au 1 er octobre 2019 au terme des arrêtés d'indexation sur l'augmentation des prix à la consommation hors tabac)

Article 223 de la loi n°2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019

Néant. Les conditions sont inchangées.

Allocation de reconnaissance option 1 et allocation viagère : 4 109 € (4 150€)

Allocation de reconnaissance option 2 : 2 987 € (3 017€)

Source : réponse au questionnaire du rapporteur spécial

Les mesures législatives adoptées ont assez modérément élargi la population des titulaires effectifs de droits.

Hors attribution de la carte du combattant aux militaires présents en Algérie au-delà du 2 juillet 1962, qui ne relevait pas de la compétence du législateur, les bénéficiaires des nouvelles mesures ont été au nombre d'un peu plus de 21 492 personnes.

Si l'on inclut les premiers, la population supplémentaire des bénéficiaires effectifs des droits liés à la reconnaissance de la Nation envers ses anciens combattants s'élève à 56 600 personnes , dont 50 447 au titre du bénéfice de la retraite du combattant.

Dans ce contexte, deux mesures ont eu un réel impact  sur le nombre des bénéficiaires des droits : l'attribution de la « carte à cheval » en 2013 par la loi de finances pour 2014 (+14 364 personnes ), et, surtout, la reconnaissance par la loi de finances pour 2015 de l'éligibilité à la carte du combattant des effectifs ayant passé quatre mois en OPEX .

Les bénéficiaires de cette mesure ayant dépassé l'âge de 65 ans, qui est une condition de versement de la retraite du combattant, sont au nombre de 35 813 .

Mais, la population couverte par l'attribution de la carte de combattant au titre des OPEX est nettement plus nombreuse. Au 1 er juillet 2020, 110 752 cartes du combattant ont été attribuées à ce titre.

Impact sur la population des titulaires de la carte du combattant de l'article 87 de la loi de finances pour 2015 élargissant le bénéfice de la carte aux militaires ayant participé à des OPEX

Années

Demandes reçues

Attributions

Rejets

En cours d'instruction en fin d'année

2015*

19 787

13 524

1 109

5 154

2016

21 891

19 177

840

3 280

2017

14 069

13 780

1 039

2 530

2018

23 249

11 891

888

13 026

2019

38 177

46 187

2 016

3 000

2020**

7 000

6 193

786

3 021

* à partir du 1 er octobre 2015

** état au 1 er juillet 2020

*** dont 35 108 cartes attribuées au titre de la mesure 62/64

Source : réponse au questionnaire du rapporteur spécial

Le contingent des titulaires de la carte du combattant au titre des OPEX est marqué par l'impact de la mesure adoptée en 2019, sur une base réglementaire, ouvrant le droit à la carte du combattant aux militaires présents sur le sol algérien entre le 2 juillet 1962 et le 1 er juillet 1964.

Cette mesure régulièrement et fermement soutenue par le Sénat a été officialisée le 16 décembre 2018 par la publication au Journal officiel de la République française de l'arrêté du 12 décembre 2018 modifiant l'arrêté du 12 janvier 1994 fixant la liste des opérations ouvrant droit au bénéfice de la carte du combattant au titre de l'article L. 253 ter (devenu l'article L. 311-2) du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre (CPMIVG). Cette mesure devait bénéficier principalement aux appelés, les militaires de carrière bénéficiant souvent de la carte du combattant à un autre titre.

Sa portée numérique est encore entourée d'incertitudes.

Les prévisions réalisées par la direction des affaires financières du ministère des armées et le service historique de la défense avaient fixé à 50 000 le nombre de bénéficiaires potentiels de cette mesure. Le nombre de bénéficiaires au seul titre de l'année 2019 a, quant à lui, été estimé à 35 000.

Au 1 er juillet 2020, à la suite de 9 réunions de la commission nationale de la carte du combattant, 37 878 demandes de carte du combattant présentées au titre de cette mesure avaient été examinées. 36 368 avaient reçu un avis favorable dont 35 108 en 2019. Ainsi, le taux de satisfaction des demandes d'attribution s'élève à 96 %, ce qui est plutôt satisfaisant. En 2020 une diminution notable des demandes est toutefois constatée . Après deux commissions, 1 260 cartes du combattant supplémentaires ont été délivrées au titre de cette mesure .

Le début de l'année 2020 marqué par la catastrophe sanitaire ne permet pas de dire précisément s'il s'agit d'une tendance durable ou si cette diminution est conjoncturelle, imputable à la pandémie de la COVID 19. D'ici la fin de l'année, deux commissions nationales de la carte du combattant devraient se tenir. D'ores et déjà, 346 dossiers sont en attente de passer à la commission prévue le 15 septembre 2020 .

À ce stade, selon le ministère, il est difficile de se prononcer sur l'atteinte de la prévision initiale, qui à ce jour se situe autour de 72 %. Si celle-ci est atteinte, ce sera vraisemblablement sur une durée plus longue.

En toute hypothèse, le nombre des cartes délivrées illustre la significativité d'une demande qui, trop longtemps, n'a pas été satisfaite.

La contrepartie financière des élargissements de la population des titulaires de droits ne peut être estimée qu'avec une certaine approximation.

En ce qui concerne l'extension de l'éligibilité à la carte du combattant dite carte 62/64, l'impact budgétaire en avait été estimé à 6,6 millions d'euros en 2019 , sans compter les transferts induits sous forme de dépenses fiscales.

Il ne s'agit que d'une fraction du coût du dispositif puisque, sous réserve d'une application complète aux 49 819 bénéficiaires potentiels, le coût budgétaire en dépenses s'élèverait entre 30 millions d'euros et 37 millions d'euros , dont une partie substantielle (mais non précisée par l'information budgétaire) impactera le budget de la retraite du combattant en 2020.

Il conviendra d'y ajouter un impact de 30 millions d'euros au titre des dépenses fiscales associées à la détention de la carte du combattant.

En comparaison, l'unique mesure nouvelle annoncée pour 2020, une majoration des pensions militaires d'invalidité perçues par les conjoints survivants de grands invalides ayant agi comme tierce personne en apportant des soins constants pendant une durée minimum de quinze années de vie commune avait été assortie d'un faible poids budgétaire (0,6 million d'euros).

Cette mesure, qui s'inscrit dans une longue séquence de revalorisation des pensions des ayants cause, avec une priorité donnée aux conjoints survivants ayant apporté un concours constant à l'invalide, fournit l'occasion de s'interroger sur les conditions dans lesquelles les « aidants » sont accompagnés dans leur oeuvre par la solidarité nationale.

Rappels sur les pensions de réversion

Aux termes du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre (CPMIVG), pour ouvrir un droit à pension pour les ayants cause, il faut que le décès soit imputable au service, ou que le décès soit en relation avec une infirmité pensionnée ou que le militaire soit pensionné d'un taux supérieur ou égal à 60 %.

Les conjoints survivants ont droit à pension au taux dit « normal » (500 points) lorsque le décès est imputable au service ou en relation avec une infirmité pensionnée, ou que l'ouvrant droit était pensionné pour un taux d'invalidité de 85 % au moins.

Les conjoints dont le militaire était pensionné à un taux d'invalidité inférieur à 85 % et au moins égal à 60 % ont droit à une pension au taux dit « simple », soit les 2/3 de la pension au taux normal.

Ces dernières années des modifications des droits sont intervenues.

1°) La loi de finances pour 2004 (article 121) a permis l'augmentation uniforme de quinze points d'indice de toutes les pensions de veuves à compter du 1 er juillet 2004.

2°) La loi de finances pour 2006 (article 124) a institué le principe d'égalité hommes-femmes pour les bénéficiaires du CPMIVG, en substituant dans ce dernier, à compter du 1 er janvier 2006, au terme de « veuve » celui de « conjoint survivant » ou de « partenaire d'un pacte civil de solidarité » (PACS).

3°) La situation des conjoints survivants des plus grands invalides a été prise en compte lors de l'élaboration de la loi de finances pour 2010. En effet, son article 115 a augmenté de cinquante points la majoration de pension des conjoints survivants ayant soigné l'invalide, obligé de recourir aux soins constants d'une tierce personne, pendant au moins quinze ans . Ces conjoints bénéficient d'une majoration de leur pension égale à 310 points (au lieu de 260) pour les conjoints des titulaires de l'allocation 5 bis a (cas général) et à 400 points (au lieu de 350), si l'invalide était titulaire de l'allocation 5 bis b (aveugles, paraplégiques ou bi-amputés).

4°) La loi de finances pour 2011 (article 147) a majoré de 360 points d'indice les pensions d'ayants cause d'invalides titulaires d'une pension relevant du CPMIVG dont l'indice était égal ou supérieur à 12 000 points. Cette disposition s'appliquait aux pensions de conjoints ou partenaires survivants et d'orphelins en paiement au 1 er janvier 2011, à compter de la demande des intéressés.

5°) L'article 117 de la loi de finances pour 2012 a étendu cette majoration de 360 points, à compter du 1 er janvier 2012, aux pensions d'ayants cause d'invalides titulaires d'une pension du CPMIVG dont l'indice était égal ou supérieur à 11 000 points.

6°) L'article 110 de la loi de finances pour 2014 a étendu la majoration de 360 points lorsque le bénéficiaire du droit à pension était, à son décès, titulaire d'une pension dont l'indice était égal ou supérieur à 10 000 points. Cette disposition s'applique aux pensions de conjoints ou partenaires survivants et aux pensions d'orphelins en paiement au 1 er janvier 2014, à compter de la demande des intéressés. Il en résulte que les pensions d'ayants cause concédées à compter du 1 er janvier 2014, issues de pensions d'invalides au moins égales à 10 000 points, sont systématiquement assorties d'une majoration de pension de 360 points, sans que la date d'effet de cette majoration ne puisse être antérieure au 1 er janvier 2014. Par ailleurs, les ayants cause concernés par ces nouvelles dispositions et déjà pensionnés au 1 er janvier 2014 peuvent demander, à compter de cette date, une majoration de pension de 360 points et obtenir la révision de leur pension avec effet à la date du dépôt de leur demande.

7°) L'article 85 de la loi de finances pour 2015 a modifié l'article L. 52-2 en augmentant de cinquante points, dès le 1 er janvier 2015, la pension des conjoints survivants des grands invalides de guerre , et en réduisant la durée minimale pour l'acquisition des droits de quinze à dix ans.

Une a ugmentation supplémentaire de 50 points a également été accordée le 1 er janvier 2016. Ainsi, depuis cette date, les conjoints survivants bénéficient d'une majoration de leur pension égale à 500 points pour le conjoint survivant d'un invalide titulaire de l'allocation 5 bis b (aveugles, bi-amputés, paraplégiques), ou 410 points pour le conjoint survivant d'un invalide titulaire de l'allocation 5 bis a (toute autre infirmité justifiant de l'attribution de l'article L. 18 du CPMIVG (article L. 133-1 du nouveau CPMIVG)).

8°) L'article 131 de la loi de finances pour 2016 a modifié l'article L52-2, à compter du 1 er juillet 2016 :

- afin d'o uvrir le droit à la majoration spéciale aux conjoints survivants et aux partenaires liés par un PACS qui justifient d'une durée, inférieure à dix ans, d'union et de soins donnés d'une manière constante après l'attribution de la majoration de l'article L18 (tierce personne) (article L. 133-1 du nouveau CPMIVG) et de l'allocation 5 bis (b ou a) à un grand invalide ;

- afin de moduler le nombre de points d'indice de la majoration spéciale proportionnellement à cette durée et selon la catégorie d'allocation 5 bis (b ou a, spécifiées respectivement 16 ou 15).

9°) L'article 119 de la loi de finances pour 2017 attribue, aux conjoints âgés de moins de 40 ans et ayant au moins un enfant à charge, un supplément social qui a pour effet de porter la PMI au taux dit « normal ». Cette mesure vise à soutenir les conjoints survivants les plus jeunes.

10°) L'article 125 de la loi n° 2017-1837 du 30 décembre 2017 de finances pour 2018 harmonise les pensions des conjoints survivants des militaires radiés des cadres, rayés des contrôles ou décédés avant l'entrée en vigueur de la loi n° 62-873 du 31 juillet 1962 de finances rectificative pour 1962, avec ceux radiés après 1962, en élevant leur pension au taux du grade. Cette nouvelle disposition a pour conséquence une réévaluation de la PMI à compter du 1 er janvier 2018.

À l'issue du processus exposé ci-dessus, les majorations de pensions accessibles sont les suivantes.

Conditions d'attribution de la majoration spéciale et progression
du nombre de points d'indice de cette majoration

Date d'effet

Années de mariage ou de PACS et de soins donnés de manière constante, postérieures à l'ouverture de l'avantage prévu à l'article L18 (tierce personne) (article L. 133-1 du nouveau CPMIVG)

Conjoint survivant ou partenaire lié par un PACS d'un grand invalide titulaire de l'allocation aux grands invalides

Allocation GI

n° 5 bis 16

Allocation GI

n° 5 bis 15

Avant le 01/01/2002

Au moins 15 ans

230

140

A/C du 01/01/2002

Au moins 15 ans

350

260

A/C du 01/01/2010

Au moins 15 ans

400

310

A/C du 01/01/2015

Au moins 10 ans

450

360

A/C du 01/01/2016

Au moins 10 ans

500

410

A/C du 01/07/2016

Au moins 5 ans

150

105

Au moins 7 ans

300

230

Au moins 10 ans

500

410

Source : réponse au questionnaire du rapporteur spécial

La mesure adoptée l'an devait augmenter les dépenses de réversion de 0,16 % des dépenses cumulées au profit des conjoints survivants et des orphelins.

Les personnes bénéficiaires seraient au nombre de 461 , sur un total de 54 000 pensionnés au titre du veuvage et de l'orphelinat. Autant dire que, même si elle avait constitué une avancée (un soutien de 1 301 euros par bénéficiaire), cette mesure symbolique était tout à fait insusceptible d'offrir une solution à la problématique des sacrifices consentis par les aidants des grands invalides.

Il en va de même de la seule mesure nouvelle positive proposée en 2021.

Il s'agit de desserrer les conditions à l'éligibilité des majorations de pensions de droit dérivé.

Cette initiative ne peut qu'être approuvée. Néanmoins, force est d'en mettre en évidence la portée limitée.

Elle bénéficierait à 197 personnes selon le recensement réalisée au 31 décembre 2019, pour un coût complet sur crédits budgétaires de 1 million d'euros .

Si le bénéfice de la mesure ne serait pas négligeable apprécié individuellement, il resterait cependant assez modeste (360 points d'indice, soit 5 285 euros par an, - 440 euros par mois).

En toute hypothèse, la mesure proposée ne peut être considérée comme suffisante dans un contexte où les difficultés rencontrées par les aidants sont considérables, que les aidants soient les conjoints et partenaires ou d'autres personnes déployant leur dévouement au bénéfice des invalides qui ne trouvent pas nécessairement dans l'offre de soin et d'accueil des soutiens à la hauteur de leurs besoins.

Le rapporteur spécial avait l'an dernier rappelé à quel point l'attrition des moyens des établissements d'accueil des personnes dépendantes dans notre pays confronté de ce point de vue à un formidable défi, y compris dans les établissements les plus prestigieux de l'AP-HP, devrait être pleinement mesurée et combattue.

Elle fait des « aidants » des collaborateurs volontaires sans guère de reconnaissance d'un service public qui s'étiole et n'assure plus les soins les plus élémentaires. Les anciens combattants invalides, comme les personnes qui les assistent bénévolement subissent comme le reste de la population française une situation souvent inadmissible.

La mesure proposée cette année, qui est conditionnée au déclenchement d'un droit d'ayant cause n'est évidemment pas de nature à apporter une solution à un problème qu'il faut résoudre de toute urgence.

Observation : la revalorisation des réversions promise aux conjoints survivants des grands invalides toute symbolique est insusceptible de compenser les sacrifices consentis par les aidants de ces patients.

Recommandation : réaliser au plus vite une évaluation des besoins réels d'accompagnement des aidants dans un contexte de sérieuse dégradation des conditions d'accueil des personnes dépendantes par les établissements de santé, même les plus prestigieux.

Le rapporteur spécial signale une évolution moins favorable. Conformément aux dispositions visées par le dernier alinéa du 2 de l'article 7 de l'ordonnance n° 2015-1781 du 28 décembre 2015, les résidents des départements ou régions d'outre-mer (DROM), collectivités d'outre-mer (COM) ou de Nouvelle-Calédonie ne pourront plus bénéficier de la retraite du combattant dès leurs 60 ans et entrent désormais dans le droit commun (perception à 65 ans).

2. L'impact des faits démographiques
a) Une réduction à nouveau forte des populations bénéficiaires des allocations du programme pour les titulaires de la retraite du combattant

En l'absence de toute revalorisation réellement significative des deux principales prestations de reconnaissance de la Nation pour ses anciens combattants (les pensions militaires d'invalidité et la retraite du combattant) et du fait de modalités d'indexation qui freinent leur dynamique, la réduction de la population bénéficiaire de ces prestations tend à jouer un rôle déterminant dans l'évolution des crédits de rente viagère.

Malgré un impact moins défavorable des règles d'indexation l'an prochain, les évolutions démographiques conservent ce rôle en 2021.

Les prévisions sont en la matière évidemment entourées d'une marge d'incertitude, qui, hélas, s'est élargie ces derniers temps. Mais, la tendance est structurellement sans ambiguïté.

Évolution des effectifs titulaires d'une pension d'invalidité
et d'une retraite du combattant en dix ans

Source : projet annuel de performances pour 2021

Entre 2010 et 2018, les deux populations bénéficiant des deux prestations majeures du programme ont reculé d'environ un tiers (- 30 %). La baisse tend à s'accélérer.

Pour 2021, la baisse du nombre des bénéficiaires se poursuivrait. Elle serait légèrement plus faible que l'an dernier pour les PMI (- 9 562 contre - 9 891 contre - 10 080 en 2020), mais nettement plus élevée pour les titulaires de la retraite du combattant 63 414, soit une baisse de 7,3 % par rapport à 2020, contre - 50 067 en 2020 par rapport à 2019).

L'accélération des sorties nettes du dispositif de la retraite du combattant se constate dans un contexte où les effets de l'extension de l'attribution de la retraite du combattant aux militaires présents en Algérie entre le 2 juillet 1962 et le 1 er juillet 1964 a conduit à augmenter le contingent des bénéficiaires de la retraite du combattant mais tend à s'épuiser et, par un effet retour, constitue un facteur de l'accélération de la réduction de la population titulaire d'une retraite du combattant.

L'âge moyen des titulaires de la retraite du combattant joue d'autant plus que cette allocation n'est ni réversible, ni modulable.

La répartition des titulaires de la carte du combattant attribuée en fonction des opérations de combat auxquelles ils ont participé laisse envisager que l'accélération du rythme de réduction du nombre des bénéficiaires anticipée pour 2021 devrait se prolonger dans les années à venir mais qu'un ressaut interviendra lorsque les titulaires d'une carte du combattant trop jeunes pour bénéficier de la retraite du combattant atteindront l'âge de la percevoir.

Répartition des cartes de combattant attribuées
en fonction des combats justifiant les attributions

Conflits

Cartes du combattant attribuées au 1 er juillet 2020

Première guerre mondiale et TOE

4 425 379

Seconde guerre mondiale

2 605 181

Guerres d'Indochine et de Corée

211 030

Guerre d'Algérie, combats en Tunisie et au Maroc

1 687 391

Opérations extérieures

230 530

Total

9 159 511

Source : réponse au questionnaire du rapporteur spécial

Ce ressaut resterait cependant limité.

Si le nombre des titulaires d'une carte du combattant au titre des OPEX a nettement augmenté depuis 2019 passant de 176 107 à 230 530 (+ 54 423), c'est pour beaucoup à l'extension de la population éligible au titre de la Guerre d'Algérie que cela est dû.

Dans ce contexte, le nombre des cartes de combattant correspondant à des opérations postérieures à 1964 est inférieur à 200 000 soit un quart de la population actuellement admise au bénéfice de la retraite du combattant.

b) Des effets de composition démographique réduisent la valeur unitaire des pensions militaires d'invalidité

La confrontation sur longue période de l'évolution des crédits avec celle des bénéficiaires montre que si les crédits de PMI sont inscrits sur une trajectoire constamment descendante, qui amplifie l'impact de la réduction des bénéficiaires, pour les dépenses liées à la retraite du combattant, les liens entre les deux variables présentent des évolutions à la fois amorties et plus fluctuantes.

En ce qui les concerne, une sorte de cycle électoral semble se dessiner. Même si les ruptures d'évolution ne sont pas très franches, tous les cinq ans se produisent des inflexions consécutives à des engagements politiques de revalorisation de la retraite du combattant. Si l'inertie est plus forte pour les PMI, c'est qu'elles sont encadrées par un mécanisme d'indexation qui n'est guère revisité lors de ces échéances charnières 12 ( * ) . Cette discordance entre les deux prestations n'est pas satisfaisante. Elle fait naître le sentiment d'une attention à deux vitesses portée à des anciens combattants de mérite identique.

Le projet de budget pour 2021 s'inscrit pleinement dans ce cadre traditionnel tout en faisant ressortir une élasticité élevée des crédits par rapport aux dynamiques des populations bénéficiaires.

Pour les PMI, pour 2021, le taux moyen de baisse des effectifs serait de 5,1 % alors que les dépenses baisseraient de 7,4 %, soit une élasticité des crédits proche de 1,45.

Évolution des titulaires et des dépenses de PMI
entre 2006 et 2021

Source : commission des finances du Sénat

Pour la retraite du combattant, la baisse du nombre des bénéficiaires atteindrait 7,3 % en 2021, soit une baisse relative parmi les plus fortes enregistrées dans l'histoire récente.

De leur côté, les dépenses ne se replieraient que de 6,2 % suivant une élasticité inférieure à l'unité, situation pouvant résulter d'effets de composition infra-annuels, mais, également, cette année, d'une dynamique, toute relative, de l'indexation (voir infra ) qui pour jouer aussi pour les PMI se trouve globalement privée de sa portée budgétaire par une déformation de la structure de la population bénéficiant de ces allocations.

Les valeurs prises par les élasticités des dépenses correspondant aux deux prestations s'expliquent par des facteurs propres à chacune d'elles.

En ce qui concerne les PMI, leur valeur unitaire baisse régulièrement, du fait d'une recomposition de la population des allocataires.

Le nombre relatif des pensions « reversées », d'une valeur moindre que les pensions de droit direct, a eu tendance à s'élever au cours du temps même s'il s'est stabilisé ces dernières années mais moyennant un repli relativement plus fort des pensions de réversion aux conjoints survivants mieux dotées.

Pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre-évolution
entre 2009 et 2019

Années*

Conjoints

Orphelins

Ascendants

Total

2009

101 289

3 276

5 507

110 072

2010

96 713

3 257

5 223

105 193

2011

87 776

3 139

4 348

95 263

2012

83 312

3 139

4 119

90 570

2013

78 255

3 050

3 926

85 231

2014

73 631

2 939

3 730

80 300

2015

69 246

2 854

3 541

75 641

2016

64 455

2 779

3 371

70 605

2017

60 497

2 682

3 246

66 425

2018

54 962

2 608

3 102

60 672

2019

51 484

2 543

2 995

57 022

* Effectifs au 1 er janvier

Source : DGFIP, service des retraites de l'État, base des PMIVG

Part des pensions aux ayants cause dans le total des dépenses PMI

2017

2018

Effectif
au 31/12

Montant annuel au 31/12 (1)

Effectif au 31/12

Montant annuel au 31/12

(1)

Invalides (ayants-droits)

155 824

577 795 392

149 654

540 550 248

Conjoints et orphelins

57 570

403 450 560

54 027

382 511 160

Ascendants

3 102

9 454 896

2 995

9 164 700

Total PMI

216 496

990 700 848

206 676

932 226 108

Part des ayants-cause
(conjoints et orphelins; ascendants)

42 %

42 %

(1) Calculé sur la base du montant mensuel moyen au 31/12.

Champ : Pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre en paiement au 31/12/2017 et au 31/12/2018.

Source : DGFiP, Service des retraites de l'État, bases des PMIVG 2017 et 2018

En outre, la dispersion des droits versés est assez nette, de sorte qu'au cas où les pensions les plus élevées tendent à une attrition plus forte, cette dernière conduit à une accélération de la baisse des dépenses constatées.

L'éventail des valeurs indiciaires sur lesquelles sont calculées les pensions est large, en particulier pour les pensions d'invalidité, depuis que le plafond au-delà duquel les infirmités n'étaient plus indemnisées, fixé à 100 % et dix degrés par la loi du 31 mars 1919 (un degré valant 10 %), a été supprimé par la loi du 31 décembre 1953.

Les pensions au montant le plus élevé correspondent à un taux de 100 % + 100 degrés et plus (un degré valant 10 %). Il s'agit de cas isolés qui illustrent la multiplicité des paramètres de calcul des pensions et traduisent les effets cumulés des nombreuses dispositions introduites au fil du temps dans la législation.

La répartition exhaustive du nombre de bénéficiaires par taux et par indice aboutit au constat que le nombre d'indices auxquels les pensions sont payées se chiffre en milliers pour les invalides et à plusieurs centaines pour les veuves .

À cet égard, le rapporteur spécial considère qu'il pourrait être souhaitable de simplifier le barème des pensions, tant pour améliorer l'équité dans la détermination des allocations que pour permettre une application plus fluide des dispositions d'indemnisation.

Si l'on considère les pensions égales ou supérieures à 100 % (6 462 bénéficiaires contre 8 025 selon les estimations précédentes) comme étant celles qui indemnisent les invalides se trouvant dans l'incapacité d'assurer une activité professionnelle, les anciens combattants qui se trouvent dans cette situation constituent une faible partie (4,5 %) des 143 499 titulaires d'une pension d'invalidité, et une partie en baisse. À l'inverse, les pensions inférieures ou égales à 55 % sont au nombre de 117 669, soit 82 % de l'ensemble des pensions d'invalides tandis que 78 197 invalides perçoivent une pension d'invalidité inférieure à 30 %, soit 54,5 % de l'effectif.

De fait, la dispersion des pensions versées est très forte en fonction des taux d'invalidité reconnus.

Une analyse synthétisant des données très dispersées avait été transmise au rapporteur spécial il y a deux ans.

Il en mentionne les résultats.

Répartition des charges de PMI
par taux d'invalidité

Taux

Article L 16 13 ( * )

Effectif

Montant annuel en euros

10

39 416

28 338 127

15

15 700

17 004 200

20

19 829

28 912 451

25

7 361

13 591 013

30

16 165

35 373 609

35

5 425

14 237 338

40

8 274

24 399 280

45

3 891

13 141 862

50

6 388

23 719 041

55

3 158

13 132 030

60

3 978

17 923 678

65

4 047

19 605 309

70

2 694

14 109 048

75

3 000

16 564 388

80

2 327

14 047 570

85

2 444

19 309 595

90

2 013

18 366 501

95

1 689

18 219 072

100

2 912

38 102 563

100

de 1 à 9 degrés

1 993

37 473 060

100

de 10 à 19

1 100

31 018 665

100

de 20 à 29

584

22 561 156

100

de 30 à 39

408

19 757 219

100

de 40 à 49

320

18 445 948

100

de 50 à 59

219

14 935 079

100

de 60 à 69

144

10 503 772

100

de 70 à 79

88

7 870 497

100

de 80 à 89

74

6 465 726

100

de 90 à 99

59

5 857 574

100

de 100 à 109

79

8 663 229

100

de 110 à 119

37

4 759 791

100

de 120 à 129

5

807 099

100

de 130 et plus

3

611 214

Total

155 824

577 826 704

Source : DGFIP, service des retraites de l'État, base des PMIVG 2017

Quoiqu'il en soit, la valeur unitaire des pensions militaires d'invalidité se replierait une fois de plus très fortement, évolution au terme de laquelle, en euros courants, la PMI individuelle moyenne aura reculé depuis 2017 de 393 euros, soit un repli de sa valeur unitaire de 7,7 %.

De 5 073 euros en 2017 et 4 793 euros en 2020, elle ne serait plus que de 4 680 euros en 2021 (soit un nouveau repli de 2,4 %).

Pour la retraite du combattant, la valeur unitaire fixée par la réglementation serait inchangée par rapport à sa valeur au 1 er janvier 2020, à 763,36 euros, en attente d'éventuelles futures réindexations rétroactives (voir infra ).

Le nombre des titulaires de la carte du combattant percevant une retraite du combattant, après avoir été quelque peu soutenu par les attributions réalisées à l'occasion des opérations extérieures ainsi qu'à la mesure d'attribution de la carte de combattant aux soldats présents en Algérie après le 2 juillet 1962, se replierait franchement (- 7,3 %).

Dans les années à venir les dépenses liées à la retraite du combattant devraient connaître une baisse significative, que ne viendrait freiner que l'atteinte de l'âge de service par les titulaires de la carte du combattant au titre des OPEX.

Or, comme l'indiquent les données ci-dessous, ces derniers ne représentent qu'une faible proportion des titulaires de la carte tandis que les flux d'attributions nouvelles de la carte du combattant nettes des extinctions sont voués à baisser.

Point sur les titulaires de la carte du combattant

Aucune statistique ne recense le nombre de titulaires de la carte du combattant en vie chaque année. Toutefois, une estimation relativement précise peut être réalisée à partir du nombre de bénéficiaires de la retraite du combattant.

Années

(a)

Titulaires de la retraite du combattant au

1 er janvier

(b)

Titulaires de la carte du combattant OPEX au 1 er janvier âgés de moins de 65 ans au 1 er janvier**

+ (b)

Nombre total estimé de titulaires de la carte du combattant

2010

1 393 201

36 000

1 429 201

2011

1 339 730

36 000

1 375 730

2012

1 287 388

40 000

1 327 388

2013

1 237 694

48 000

1 285 694

2014

1 200 185

63 000

1 263 185

2015

1 159 167

78 000

1 237 167

2016

1 108 996

100 000

1 208 996

2017

1 059 106*

124 000

1 182 947

2018

1 003 202

140 000

1 143 202

*Donnée consolidée RAP 2017.

** Estimations.

Flux d'attributions nettes de la carte du combattant de 2013 à 2021

Années

Effectifs au 1er janvier

Attributions au cours de l'année

Extinctions au cours de l'année

Effectifs au 31 décembre
(*)

Solde

2013

1 237 694

18 327

55 836

1 200 185

-37 509

2014

1 200 185

17 058

58 076

1 159 167

-41 018

2015

1 159 167

11 395

61 637

1 108 925

-50 242

2016

1 108 925

8 741

58 745

1 058 921

-50 004

2017

1 058 921

5 472

63 843

1 000 550

-58 371

2018

1 000 550

4 731

65 210

940 071

-60 479

2019

940 071

33 196

60 255

913 012

-27 059

Prévisions2020

913 012

13 333

63 400

862 945

-50 067

Prévisions 2021

862 945

12 126

75 540

799 531

-63 414

(*) Pour les années 2015 à 2017, le service des retraites de l'Etat a réévalué les effectifs de bénéficiaires de la retraite du combattant (source RAP 2018)

Source : réponse au questionnaire du rapporteur spécial

Aux yeux du rapporteur spécial, le statut des titulaires de la carte du combattant appelle une réflexion.

Certes la possession de la carte du combattant ouvre un accès appréciable à un certain nombre de droits connexes. Mais, c'est au regard de la retraite du combattant qu'il existe un problème non résolu. Mais la revalorisation de la retraite du combattant pourrait également passer par d'autres initiatives.

Il convient de relever que la retraite du combattant n'est, dans la plupart des cas, accessible qu'après 65 ans et que sa jouissance n'est pas réversible.

On r appelle également que si cette allocation n'est pas une retraite, elle témoigne de la reconnaissance de la Nation pour un engagement, qui est souvent celui suprême de la personne même.

Dans ces conditions, il est pour le moins paradoxal que des conditions de travail, certes pénibles, mais ne présentant pas les mêmes risques que l'engagement militaire, ouvrent des droits à prestation très précoces, beaucoup plus que dans le cas de la retraite du combattant.

Par ailleurs, il existe des considérations, plus techniques, qui plaident pour davantage d'équité.

Ainsi que le suggèrent les données relatives à la population des anciens combattants percevant une pension d'invalidité, une proportion non négligeable d'entre eux décèdent avant d'avoir perçu les sommes correspondant à la retraite du combattant. Cette situation, qui n'est pas réservée aux militaires titulaires d'une pension d'activité, crée une forme d'inégalité viagère. Des militaires et leurs familles, particulièrement éprouvés par des conflits, peuvent être privés par les aléas de l'existence du bénéfice d'une allocation de reconnaissance, qui pour n'être pas davantage une indemnité qu'une retraite n'en a pas moins une vocation partiellement indemnitaire.

Le rapporteur spécial souhaite qu'une réflexion soit conduite pour faire évoluer ces conditions.

3. Une indexation des droits légèrement moins atone que ces dernières années

Si les dépenses du programme sont allégées par la baisse du nombre des bénéficiaires (effet de volume) dans un contexte de faible revalorisation des allocations, une autre composante des économies doit être attribuée à la perte du pouvoir d'achat des principales prestations qu'il finance du fait d'une indexation des allocations du programme 169 très inerte .

En l'absence de mesures de revalorisation des allocations, qui, ces dernières années ont pris la forme d'une amélioration du nombre de points de PMI pris en compte pour calculer la retraite du combattant (+4 points en deux fois au 1 er janvier et au 1 er septembre 2017, pour un montant de 58,7 euros en valeur actuelle, soit 47 millions d'euros de dépenses supplémentaires en 2021) ainsi que celle de revalorisations successives des allocations de reconnaissance attribuées aux rapatriés et à leurs ayants droit (voir supra ), seule joue l'indexation des allocations.

Il convient, à cet égard, de rappeler les principes de base de l'indexation des principales prestations financées par le programme, marqués par la préoccupation d'assurer un « rapport constant » entre la valeur de ces allocations et celle des traitements des fonctionnaires.

Principes d'indexation des prestations versées au monde combattant
à partir du programme 169

Les prestations assurées au titre de la dette viagère (pensions militaires d'invalidité et retraite du combattant), la majoration des rentes mutualistes et de l'allocation de reconnaissance font l'objet de mécanismes de « revalorisation », qu'il vaudrait mieux appeler « indexation ». Les règles suivies varient selon les allocations considérées.

Les autres prestations subventionnées par le programme 169 sont attribuées au cas par cas à partir de l'étude particulière des besoins (soins médicaux, dépenses d'appareillages, remboursement de prestations de sécurité sociale, frais de transport, aides sociales, prestations aux rapatriés...) des différents bénéficiaires.

Action 01 - « Administration de la dette viagère »

Pensions militaires d'invalidité :

Le montant des pensions d'invalidité est calculé, selon le taux d'invalidité, en nombre de points d'indice de pension militaire d'invalidité (point PMI). La valeur du point PMI évolue selon les variations de l'«indice de traitement brut - grille indiciaire » , publié conjointement et trimestriellement par l'INSEE et la DGAFP. C'est le mécanisme dit du « rapport constant ».

Retraite du combattant :

La retraite du combattant est calculée également en nombre de points PMI . Le nombre de points d'indice était fixé à 48 depuis le 1 er juillet 2012 (article 116 de la loi de finances pour 2012) mais il a été accru dans le cadre de la loi de finances pour 2017. Il est aujourd'hui de 52 contre 50 avant le 1 er septembre 2017. Pour le reste, la retraite du combattant évolue à raison de la valeur du point de PMI.

Action 03 - Solidarité

Majoration des rentes mutualistes :

Le plafond donnant lieu à majoration est également déterminé depuis 1998 par référence à l'indice du point PMI .

Le plafond annuel majorable a été fixé à 125 points PMI à compter du 1 er janvier 2007 (article 101 de la loi de finances pour 2007).

Action 07 - « Actions en faveur des rapatriés »

Allocation de reconnaissance :

Avant la loi de finances pour 2019, il était prévu par voie législative que l'allocation de reconnaissance versée aux rapatriés soit indexée sur l'évolution annuelle des prix à la consommation des ménages (hors tabac). Ce type de disposition paraissant ne pas devoir figurer au rang des dispositions d'une loi de finances, en ce qu'elle conduirait à outrepasser les limites de l'annualité budgétaire aux yeux du Conseil Constitutionnel, l'indexation des allocations de reconnaissance est désormais entièrement aux mains du pouvoir exécutif. Un vide juridique s'ensuit, les conditions d'indexation de cette allocation n'étant plus encadrées par la loi, ce qui est fâcheux. La sécurité juridique de l'indexation en ressort affectée de même que la qualité des textes puisqu'aussi bien le visa du dernier arrêté fixant la valeur des allocations correspondantes est erroné.

Source : commission des finances à partir des réponses au questionnaire du rapporteur spécial

La valeur du point de pension militaire d'invalidité sert ainsi de référence à de nombreuses prestations servies à partir des crédits du programme.

Conformément au « rapport constant », elle est révisée en fonction de l'indice de traitement brut-grille indiciaire publié conjointement par l'INSEE et la direction générale de l'administration et de la fonction publique.

Cet agrégat statistique dépend de l'évolution de la valeur de l'indice de la fonction publique mais aussi de certaines mesures catégorielles ayant des incidences sur l'échelle indiciaire des fonctionnaires.

L'indice de traitement brut-grille indiciaire

Il s'agit d'un indice de salaire à structure de qualifications annuelle constante qui vise à apprécier les évolutions du traitement brut des agents de la fonction publique de l'État. Le traitement brut d'un agent est le produit de son indice par la valeur du point fonction publique.

L'ITB-GI (et son équivalent en net, l'ITN-GI) évoluent notamment sous l'effet de l'évolution de la valeur du point fonction publique, de la revalorisation du minimum de traitement, et des mesures générales et des réformes catégorielles qui modifient la grille indiciaire. Les réformes sont prises en compte de la manière suivante : pour chaque mesure catégorielle concernant un corps donné, une table de correspondance indiciaire (avant/après) est construite. Elle permet de calculer la proportion des agents de l'ancien échelon Y qui, en passant à l'échelon Z de la nouvelle grille, obtiennent un gain indiciaire T. Cette table de passage est associée à l'estimation de la répartition de la population par corps/grade/échelon, et l'indice résulte de la pondération de chacune de ces entités dans le total des salariés de la fonction publique.

Or, l'indice est fort peu dynamique.

Pour un indice 100 au quatrième trimestre 2000, il se situe « vingt ans après » à 117,88 soit une croissance de 17,9 % en vingt ans (moins de 0,8 % par an).

Encore faut-il relever qu'après avoir été un peu (plus) dynamique dans la première décennie (+ 11,2 % entre 2000 et 2010), l'indice suit un parcours de hausse très ralentie depuis (6,7 %, soit moins de 0,6 % l'an).

Ainsi, chaque année, les allocations indexées sur le point de PMI tendent elles à voir leur valeur réelle diminuer plus ou moins en fonction de l'inflation.

Sous cet angle, l'année 2020 pourrait représenter une exception dans la mesure où en lien avec la pandémie en cours les prix à la consommation ne progresseraient que de 0,2 % contre une hausse légèrement plus forte de l'ITB-GI (+0,7% entre le deuxième trimestre 2020 et le deuxième trimestre 2019) ayant conduit à une augmentation de la valeur du point de PMI consacrée par un arrêté du 28 août 2020 et appliqué au 1 er janvier de 2020.

Ainsi le point de PMI fixé à 14,57 euros depuis 2019 est passé à 14,68 euros à compter du 1 er janvier 2020, soit une hausse de 0,75 %.

Il n'en reste pas moins que le jeu du « rapport constant » est généralement défavorable aux allocataires.

Il faut ajouter que le mécanisme d'indexation tend à se déclencher avec des délais qui, outre qu'ils créent une incertitude budgétaire, peuvent être défavorables aux bénéficiaires.

Comme l'a utilement rappelé la Cour des comptes dans sa dernière note d'exécution budgétaire, « dans tous les cas, il existe un décalage entre la date de publication de l'indice et la date d'effet de la mesure. En revanche, cela n'explique pas un décalage d'une telle durée, qui peut atteindre deux années, alors même qu'un tel étalement de la rétroactivité sur une période aussi longue « crée de facto un risque budgétaire sur la gestion de la dette viagère du ministère déjà sous forte tension », selon le contrôleur budgétaire et comptable ministériel » .

Le rapporteur spécial remarque encore que, si des rappels peuvent être réalisés, ils ne le peuvent qu'au seul bénéfice des titulaires encore vivants ou de leurs éventuels ayants droit.

Quant à ces derniers, la Cour des comptes avait pu préciser dans le document mentionné qu'une indexation rétroactive portant sur un centime d'euro avait obligé à rechercher les héritiers de quelques 10 000 ayants droit disparus entre l'année 2017 et la date (octobre 2019) où était survenue cette opération.

Le tableau ci-dessous présente les évolutions de l'indice ITB-GI ces trois dernières années ayant entraîné des conséquences sur la valeur du point PMI :

(*) Arrêté fixant la valeur du point d'indice de pension militaire d'invalidité en application des articles L. 125-2 et R. 125-1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre.

(**) 14,57 € * (117,88/117,02) =14,68 € (arrondi).

Le coût en année pleine de la revalorisation de la valeur du point à 14,68 euros est estimé à 12 millions d'euros dont 6,9 millions d'euros au titre des pensions militaires d'invalidité et 5,1 millions d'euros au titre de la retraite du combattant.

Dans la réponse transmise au questionnaire du rapporteur spécial, le ministère tend à faire valoir l'ampleur des charges résultant des revalorisations ci-dessus exposées.

Il les évalue pour la période 2017-2019 à 47,41 millions d'euros pour les PMI et 27,05 millions d'euros pour la retraite du combattant. Il convient d'ajouter 1,6 million d'euros pour l'année 2020 si bien qu'au total la revalorisation du point PMI aura eu un impact à la hausse des dépenses correspondantes de 76,06 millions d'euros de 2017 à 2020.

Il faut ajouter les montants résultant de l'indexation intervenue en août 2020 (voir ci-dessus).

Cette présentation doit être remise dans un contexte où, au cours de cette période (2017 à 2021), les économies réalisées sur ces deux prestations ont atteint, en glissement, 302 millions d'euros 14 ( * ) tandis que l'indexation effectuée n'a pas suivi l'inflation.

Il faut donc retenir que les modalités d'indexation du point de PMI se sont traduites par un effritement du pouvoir d'achat des prestations principales allouées aux anciens combattants.

S'agissant des pensions militaires d'invalidité (PMI) et de la retraite du combattant, le tableau ci-dessous présente les estimations des économies de charges résultant de la sous-indexation de ces allocations par rapport à l'évolution des prix au cours des cinq années écoulées entre 2015 et 2019.

Évolution des PMI et de la retraite du combattant sous différentes hypothèses
de revalorisation du point de PMI

PMI et retraite du combattant

Année

Valeur réelle du point PMI au 1er janvier

taux d'inflation (source INSEE)

Valeur du point PMI indexé sur le taux d'inflation

Dépenses selon indexation

Dépenses réelles

Surcoût

Montant selon indexation selon l'inflation

Montant selon indexation selon l'inflation

PMI CAS P

RC CAS P

PMI

RC

2015

14,00 €

0,00%

14,64 € 15 ( * )

1 342 979 000 €

821 147 000 €

1 278 408 380 €

771 498 790 €

64 570 620 €

49 648 210 €

2016

14,04 €

0,20%

14,67 €

1 253 444 000 €

789 161 000 €

1 191 863 333 €

737 259 266 €

61 580 667 €

51 901 734 €

2017

14,42 €

1,00%

14,81 €

1 170 120 000 €

813 447 000 €

1 133 370 077 €

744 993 857 €

36 749 923 €

68 453 143 €

2018

14,45 €

1,80%

15,08 €

1 105 916 037 €

765 207 048 €

1 064 811 467 €

733 269 402 €

41 104 570 €

31 937 646 €

2019

14,57 €

1,10%

15,25 €

1 036 571 826 €

745 768 288 €

990 659 826 €

712 736 603 €

45 912 000 €

33 031 685 €

Source : calcul en variante réalisé à la demande du rapporteur spécial par les services du ministère

Les économies réalisées se montent à 78,9 millions d'euros en 2019 contre 70,9 millions d'euros en 2018.

Elles se décomposent en 45,9 millions d'euros pour les PMI et 33  millions d'euros pour la retraite du combattant.

Encore faut-il tenir compte de ce que la réduction du nombre des bénéficiaires de ces prestations contribue à limiter les économies ainsi calculées, mais aussi de ce que les revalorisations exceptionnelles mises en oeuvre en 2017 ont pu transitoirement les plafonner.

Si aux contraintes financières du moment les anciens combattants ne sauraient, ni ne souhaitent, se soustraire, encore faut-il qu'elles ne pèsent pas davantage sur eux que sur les reste des Français.

Sur ce point, il convient de rappeler que l'argument avancé pour défendre l'absence d'indexation des traitements publics, à savoir l'existence d'un glissement-vieillesse-technicité, ne saurait en rien s'appliquer à une population qui de toute évidence n'est pas positivement concernée par lui.

Le rapporteur spécial engage chaque année le Gouvernement à veiller à ce que l'accélération des prix n'aboutisse pas à dégrader la situation faite aux anciens combattants.

Il regrette qu'une fois encore cet appel n'ait pas été entendu.

Par ailleurs, les différences réglementaires concernant les conditions d'indexation des allocations versées par le programme (et plus encore par la mission, une fois prise en compte la réglementation des allocations du programme 158 ; voir infra ) peuvent créer un trouble.

S'agissant des allocations à destination des rapatriés, les anciens membres des forces supplétives de la guerre d'Algérie et leurs conjoints survivants ont droit à des allocations financées par le programme 169 intitulées « allocation de reconnaissance » 16 ( * ) et « allocation viagère » 17 ( * ) dont l'article 223 de la loi n°2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019 précise que, désormais, les montants annuels sont fixés par arrêté signé conjointement par les ministres chargés des Rapatriés et du Budget.

Leur montant est revalorisé annuellement en fonction de l'indice des prix à la consommation hors tabac 18 ( * ) , qui est souvent plus favorable que le « rapport constant ».

La perspective de la constitution d'une commission tripartite pour examiner les conditions de revalorisation des allocations annoncée par le Gouvernement appelle quelques précisions sur son format, ses missions et son calendrier.

En l'état, elle inspire une certaine perplexité, conduisant le rapporteur spécial à souhaiter qu'intervienne au plus vite une solution permettant d'obvier aux pertes de valeur réelle de l'effort en faveur des anciens combattants.

4. Une déformation des équilibres de la politique de reconnaissance en faveur du monde combattant malgré des avantages peu mobilisés

Les interventions financées par le programme 169 sont composites. Certaines à vocation universelle (PMI, retraite du combattant) sont versées à tous ceux qui réunissent des conditions objectives tenant à leur situation de combattant ou de santé et à raison de celles-ci, d'autres impliquent un choix du bénéficiaire, et l'influence de variables tierces par rapport à celles en rapport avec la seule situation d'ancien combattant.

En dehors de l'effet asymétrique des dépenses fiscales déjà relevé, il en va tout particulièrement ainsi de la majoration des rentes mutualistes qui, pour concerner 315 175 bénéficiaires 19 ( * ) , n'est servie qu'à un peu plus de 28 % des titulaires de la carte du combattant (et à moins de 20 % des bénéficiaires potentiels, qui incluent les titulaires du titre de reconnaissance de la Nation).

La rente mutualiste

La retraite mutualiste du combattant, devenue rente mutualiste du combattant, bénéficie d'un certain nombre d'avantages, de nature fiscale ou liés au régime de majoration légale institué par la loi du 4 mai 1948.

Les contribuables anciens combattants peuvent, chaque année, déduire de leur revenu imposable, dans la limite d'un plafond, les versements effectués en vue de la constitution d'une rente donnant lieu à majoration de l'État.

Cette rente bénéficie, en plus de la majoration légale attachée à toute rente viagère (mais sans limite de plafond de ressources), d'une majoration spécifique de l'État de 12,5 % à 60 % selon le titre détenu et sa date d'obtention.

Le total formé par la rente et la majoration spéciale de l'État est limité à un plafond, dit « plafond majorable » dont la dynamique dépend de celle du point de PMI (en hausse, à ce titre, de 1 821,25 euros en 2019 à 1 835 euros à compter de janvier 2020).

La rente mutualiste se cumule avec toutes les autres pensions et retraites. Elle est exonérée d'impôt pour sa part inférieure au plafond légal. Au-delà de ce plafond, le régime fiscal est celui de l'assurance-vie.

Or, cet avantage mobilise une part importante des dotations du programme comme le montre le tableau ci-dessous (11,7 % du total).

Évolution de la réparation des principales interventions
du programme

Dispositif

Part dans le total 2020

Part dans le total 2021

PMI

46,4 %

45,2 %

Retraite du combattant

33,6 %

34,2 %

Soins médicaux gratuits, appareillage, expertises

2,3 %

2,1 %

Remboursement réductions de transport

0,1 %

0,07 %

Remboursement prestations sécurité sociale

3,8 %

4 %

Majoration des rentes mutualistes

11,5%

11,7%

ONAC (action sociale)

1,3%

1,3 %

Rapatriés

1 %

1,3 %

TOTAL

100,00 %

100 %

Source : commission des finances du Sénat d'après le projet annuel de performances pour 2021

La part de la charge budgétaire liées aux majorations de rentes mutualistes augmente plus ou moins chaque année, mais au total, inexorablement. Le rapporteur spécial rappelle que la majoration des rentes mutualistes n'absorbait que 8 % des dépenses du programme en 2011.

Le montant unitaire de la rente mutualiste a augmenté de l'ordre de 8 % entre 2014 et 2019 et de 5,7 % entre 2016 et 2020.

Données relatives aux rentes mutualistes (2016-2020)

Année de facturation

Montant des remboursements des majorations légales (M€)

Montant des remboursements des majorations spécifiques (M€)

Total
(M€)

Nombre de bénéficiaires
(au 1 er janvier de l'année en cours)

Montant moyen annuel des majorations remboursées

2016

116,78

133,75

250,53

362 770

690,61

2017

113,12

131,55

244,67

353 031

693,05

2018

107,59

129,44

237,03

340 918

695,18

2019

105,95

126,62

232,57

328 943

707,01

2020

106,91

123,14

230,05

315 175

729,91

Source : réponse au questionnaire du rapporteur spécial

Cette évolution a limité l'impact de la baisse du nombre des bénéficiaires sur la réduction des dépenses.

Les dépenses correspondantes ont connu une certaine résistance, qui contraste avec les prestations plus universelles financées par le programme 169.

Évolution de la charge des avantages attribués aux rentes mutualistes
des anciens combattants et des effectifs bénéficiaires
(2009-2020)

Source : commission des finances du Sénat

Le déficit de revalorisation mentionné plus haut a toutefois, comme pour les autres prestations liées à la valorisation du point de PMI, également altéré la dynamique de dépense correspondante, avec pour effet l'extériorisation d'économies budgétaires (voir le tableau infra ).

Évolution des majorations de rentes mutualistes sous l'hypothèse d'une indexation
sur l'inflation du point de PMI

(en euros)

Rentes mutualistes du combattant

Année

Valeur réelle du point PMI au 1er janvier

taux d'inflation (source INSEE)

Valeur du point PMI indexé sur le taux d'inflation

Plafond majorable (125 points d'indice PMI)

Plafond selon indéxation

Différence de plafond

Nombre de bénéficiaires au plafond

Surcoût

A

B

C = B - A

D

E = C X D

2015

14,00 €

0,00%

14,64 €

1 750 €

1 829,60 €

79,60 €

47 127

3 751 356 €

2016

14,04 €

0,20%

14,67 €

1 755 €

1 833,26 €

78,26 €

48 600

3 803 445 €

2017

14,42 €

1,00%

14,81 €

1 803 €

1 851,59 €

49,09 €

41 540

2 039 314 €

2018

14,45 €

1,80%

15,08 €

1 806 €

1 884,92 €

78,67 €

39 164

3 081 089 €

2019

14,57 €

1,10%

15,25 €

1 821 €

1 905,66 €

84,41 €

35 764

3 018 682 €

* Le plafond majorable équivaut à 125 points PMI.

Source : calcul en variante réalisé à la demande du rapporteur spécial par les services du ministère

Par rapport à une indexation du plafond majorable sur l'inflation, qui aurait porté ce plafond à 1 905,66 euros en 2019, compte tenu d'un nombre de bénéficiaires au plafond qui reste limité par rapport au nombre des porteurs (35 764 contre 328 943 bénéficiaires), la sous-indexation du plafond a permis de dégager 3 millions d'euros d'économies en 2019.

La contribution de l'État aux rentes mutualistes (751 euros par bénéficiaire en 2021) apporte aux bénéficiaires, un quasi doublement de la valeur de la retraite du combattant qu'ils perçoivent.

Il convient de considérer que ce doublement touche un nombre des bénéficiaires limité par rapport aux prestataires de la retraite du combattant.

Dans ces conditions, le rapporteur spécial est conduit à s'interroger sur les facteurs expliquant une éventuelle sous-utilisation de la faculté ouverte aux ayants droit de se constituer un complément de retraite disposant d'un soutien élevé de l'État.

Elle appelle une élucidation. Le ministère renvoie sur ce point à la décision individuelle des souscripteurs. Il conviendrait de vérifier que le dispositif fait l'objet d'une publicité suffisante de sa part ou de celle des organismes gestionnaires.

À ce stade, le rapporteur spécial se limitera à relever que cette sous-utilisation conduit à des économies significatives.

Le ministère avance à ce propos un chiffre de 40 millions d'euros sur la base du ratio des militaires âgés de 50 ans et plus (soit 4,5 % des bénéficiaires potentiels non entrés dans le dispositif) susceptible de bénéficier de la majoration instantanément.

Sur plus longue période, les économies liées à la faible mobilisation de l'avantage sont en cumulé nettement plus fortes et allègent très significativement les engagements financiers de l'État par rapport à une situation de saturation des droits.

En outre, il conviendra de suivre avec attention le sort de cet avantage dans le cadre de la mise en place d'un régime universel de retraites dans la mesure où celui-ci devrait déboucher sur une revue générale des dispositifs de solidarité pouvant impacter la situation des personnes en retraite.

5. Les opérateurs du programme, quel avenir pour l'ONAC-VG ?

Les évolutions cycliques imprimées à l'effort financier de la Nation pour ses anciens combattants - en lien avec le décrochage de la valeur des prestations par rapport à l'inflation et une tendance à la déformation de la structure des transferts vers une forme de sélectivité aux effets globalement peu redistributifs - conduit à souligner l'importance de développer le rôle et les moyens des deux principaux opérateurs du programme 169, l'Institution nationale des Invalides (INI) et, surtout, l'ONAC-VG.

L'an dernier, les dotations des deux principaux opérateurs de la mission (l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre - ONAC-VG - et l'Institution nationale des Invalides-INI) avaient évolué dans un sens différent.

Les dotations pour l'ONAC-VG avaient été très fortement réduites, de 12,5 millions d'euros, soit un repli de près de 15 %, celles destinées à l'INI progressant de 11 millions d'euros, soit un peu moins qu'un doublement par rapport aux 14,8 millions d'euros de 2019. Cette dernière évolution ne concernait toutefois que les crédits de paiement, les autorisations d'engagement s'inscrivant en forte baisse (- 35 millions d'euros) ce qui pouvait être de nature à faire anticiper pour les exercices postérieurs une réduction des crédits de paiement.

De fait, les crédits de paiement prévus au profit de l'INI en 2021 sont en nette réduction (-11,8 millions d'euros, soit - 57,6 %).

Inversement, les crédits de paiement réservés à l'ONAC VG, qui avaient été installés sur une trajectoire non soutenable, identifiée comme telle par le rapporteur spécial, augmentent de l'ordre de 10,4 millions d'euros (+ 22,9 %) par rapport à une année 2020 où l'ONAC VG avait été appelé à financer des charges courantes sur son fonds de roulement. Cette augmentation est cependant partiellement optique comme exposé ci-après.

Une fois mentionné que les crédits fléchés pour financer le Conseil national des communes « Compagnon de la Libération » sont stables à 1,7 million d'euros, au total, les dotations destinées aux opérateurs de la mission (subventions pour charges de service public et dotations financières) et financées par cette dernière seraient en très légère hausse, largement apparente, par rapport à l'an dernier.

Elles atteindraient 73,7 millions d'euros contre 73 millions d'euros en 2020, soit 3,8% des crédits du programme 169.

Évolution des dépenses versées aux deux principaux opérateurs
du programme 169 (2013-2021)

(en milliers d'euros)

Exécution 2013

Exécution 2014

Exécution 2015

Exécution 2016

Exécution 2017

2018

2019

PLF 2020

PLF 2021

INI

12 154

11 839

12 089

12 089

12 089

12 889

14 789

25 789

16 012

ONAC-VG

56 871

56 432

56 978

57 149

55 937

57 424

51 383

45 533

55 918

Total

69 025

68 271

69 067

69 238

68 026

70 313

66 172

71 322

71 930

Source : commission des finances du Sénat

L'accroissement des crédits de paiement inscrits pour l'INI était venu l'an dernier des premiers besoins immobiliers de l'établissement, dans le cadre de sa modernisation. La subvention pour charges de service public était restée constante. Pour 2021, une dotation en fonds propres est à nouveau budgétée mais sur une base nettement réduite (3,7 millions d'euros au lieu de 13,7 millions d'euros). La subvention pour charges de service public est, quant à elle, à peu près maintenue à son niveau de 2020. Elle est portée à 12,312 millions d'euros contre 12,089 millions d'euros l'an dernier (+223 000 euros). Les bases de budgétisation de l'INI apparaissent, à plusieurs égards, fragiles.

De son côté, la subvention pour charges de service public de l'ONAC-VG, qui avait été fortement réduite l'an dernier, le rapporteur spécial mettant alors en évidence une forme de débudgétisation, serait ramenée à un niveau plus habituel et compatible avec la préservation des ressources de l'ONAC VG. Les évolutions portant sur la subvention pour charges de service public attribuée à l'ONAC VG n'en apparaissent pas moins assez « optique », cette caractéristique dissimulant mal une opération de réduction de la voilure de l'établissement, programmée dans le dernier contrat d'objectifs et de performance 2020-2025.

Ces évolutions se dérouleraient dans un contexte marqué par la poursuite de la réduction des plafonds d'emplois des deux opérateurs.

L'an dernier, le recul s'était amplifié par rapport aux années précédentes avec - 64 ETPT, dont - 14 pour l'INI et - 60 pour l'ONAC-VG.

En 2021, le total des emplois serait en diminution apparemment moins marquée (- 15 ETPT), mais cela proviendrait d'une hausse relative des emplois hors plafond, les emplois sous plafond se réduisant de 50 ETPT, soit une baisse moins forte qu'en 2020 mais présentée, à raison, par le projet annuel de performances de la mission comme « forte ».

Évolution des emplois ouverts aux deux principaux opérateurs du programme
(2013-2020)

Exécution 2013

Exécution 2014

Exécution

2015

Exécution 2016

Exécution 2017

Exécution

2018

PLF 2019

PLF 2020

PLF 2021

INI

440

439

434

439

429

435

432

418

421

dont sous plafond

438

436

432

436

424

430

424

418

412

ONAC-VG

1 604

1 594

1 604

1 636

1 053

901

895

845

827

dont sous plafond

873

860

863

871

848

883

878

845

801

Total

2 044

2 033

2 038

2 075

1 482

1 336

1 327

1 263

1 248

dont sous plafond

1 311

1 296

1 295

1 307

1 272

1 313

1 327

1 263

1 213

Source : réponse au questionnaire du rapporteur spécial de la commission des finances

a) L'ONAC-VG, une nette attrition des moyens en perspective dans le cadre d'un projet de restructuration aux contours très incertains
(1) Un organisme de proximité aux procédures parfois un peu lourdes

L'ONAC VG est confronté à la multiplication des missions qui lui sont confiées, missions très hétéroclites, dont certaines, qualitatives, prennent le relais d'une certaine paupérisation des allocations de reconnaissance servies aux anciens combattants mais aussi, sans doute, du renforcement des difficultés subies par le monde combattant, dans un contexte marqué par un contrat d'objectifs et de performance (COP) très contraignant.

Aperçu sur la gouvernance de l'ONAC VG

Établissement public administratif sous tutelle du Ministère des Armées, l'Office est géré conjointement par l'Etat et les grandes associations du monde combattant et des victimes de guerre (et d'actes de terrorisme). Cette gestion paritaire permet aux ressortissants de l'ONAC-VG de participer aux grandes décisions concernant leur avenir à travers différentes structures : le conseil d'administration, les conseils départementaux et un ensemble de commissions spécialisées.

Cette gouvernance repose sur le dialogue entretenu avec les autorités de tutelle dans le cadre du pilotage stratégique exercé par celles-ci, notamment à travers le suivi de la mise en oeuvre des orientations fixées dans le contrat d'objectifs et de performance.

Le conseil d'administration

Actuellement présidé par la ministre déléguée auprès de la ministre des Armées, le conseil d'administration définit la politique générale de l'Office et se prononce, notamment, sur le budget, le compte financier et les orientations relatives à l'action sociale de l'établissement.

Les travaux préparatoires au conseil d'administration sont examinés au sein de trois commissions et du collège du Bleuet de France.

La commission permanente donne son avis sur les projets de textes réglementaires modifiant l'organisation et le fonctionnement de l'Office, délibère sur l'acceptation des dons et legs, propose le règlement intérieur du conseil et examine toutes les questions à l'ordre du jour des réunions du conseil d'administration.

Présidé par la directrice générale de l'ONAC-VG, le collège du Bleuet de France donne, en amont du conseil d'administration, les grandes orientations de la politique de promotion et de valorisation des actions sociales et mémorielles soutenues par le Bleuet de France.

Les conseils départementaux pour les anciens combattants et victimes de guerre et la mémoire de la Nation

Au sein de chaque conseil, présidé par le préfet ou son représentant, plusieurs commissions peuvent être constituées pour se prononcer sur : les demandes d'aides relevant de la solidarité ; les projets relatifs à la politique de mémoire ; les demandes de délivrance des diplômes d'honneur de porte-drapeau. Par ailleurs, le conseil départemental peut émettre un avis sur les demandes de cartes du combattant soumises à la commission nationale de la carte.

La commission nationale de la carte

La commission nationale de la carte du combattant 20 ( * ) est chargée d'examiner les demandes de cartes du combattant ou de retrait de cartes entrant dans le champ d'application des articles R. 311-1 à R. 311-20 du CPMIVG.

La commission nationale du diplôme d'honneur de porte-drapeau

Présidée par la secrétaire d'État chargée des anciens combattants et de la mémoire, elle est chargée :

- d'étudier les demandes d'attribution des diplômes d'honneur de porte-drapeau émanant des associations nationales ou basées à l'étranger ;

- d'instruire les recours en cas de refus d'attribution ou de retrait d'un diplôme d'honneur par les commissions départementales ;

- d'étudier les demandes de subvention à l'achat ou à la restauration des drapeaux associatifs émanant des associations nationales ou basées à l'étranger ;

- de se prononcer sur les questions relatives à la mission et à la fonction de porte-drapeaux.

Le tissu associatif du monde combattant

Il est constitué de près de 8 000 associations : 467 associations nationales , répertoriées dans un annuaire actualisé chaque année par la direction générale de l'ONAC-VG; plus de 7 500 associations départementales.

Ces associations, se répartissent en quatre catégories :

- les associations d'anciens combattants ;

- les associations de victimes de guerre ;

- les associations de victimes d'actes de terrorisme ;

- les associations mémorielles et/ou patriotiques qui oeuvrent pour promouvoir la mémoire combattante et défendre les valeurs du monde combattant.

L'ONAC-VG agit en relais de leurs attentes auprès de la secrétaire d'État et, de façon plus générale, auprès de toutes les autorités compétentes.

La généralisation de partenariats est censée permettre à l'ONAC-VG de soutenir l'implication sociale des associations qui ne disposent pas de fonds propres pour intervenir financièrement.

Les caractéristiques institutionnelles de l'ONAC VG semblent relever d'intentions, fréquentes dans l'organisation administrative française, d'association des bénéficiaires de l'action de l'ONAC VG à la gestion de l'établissement, cette association paraissant être plus ou moins profonde selon les volets de l'action de l'ONAC VG mais aussi plus ou moins effective, l'ensemble pouvant poser quelques difficultés au regard d'un objectif justifié de fluidité.

Englobée dans cette « philosophie » organisationnelle générale, figure une départementalisation du déploiement de l'ONAC VG. Toutefois, cet  élément de proximité paraît plus ou moins effectif et se trouve menacé par le nouveau COP.

Les instances collégiales de l'ONAC VG sont essentiellement consultatives. Par exemple, la commission nationale de la carte (qui siège en formation complète ou restreinte) ne fait que donner un avis sur les attributions et retraits de cartes du combattant qui sont de la compétence du ministre chargé des anciens combattants (compétence qu'il peut déléguer).

Par ailleurs, le collège de l'oeuvre nationale du Bleuet de France constitué au sein de l'ONAC VG est chargé de promouvoir les valeurs civiques et morales attachées au Bleuet de France et de garantir une gestion saine des fonds récoltés. Il se réunit au moins une fois par an en amont des réunions du conseil d'administration de l'ONAC-VG. Mais, pour les fonds, contrepartie de la générosité publique qui reviennent effectivement dans les ressources de l'ONAC VG (voir infra pour d'autres développements à ce sujet), le collège n'en est pas le gestionnaire.

Le passage obligé par cette instance pourrait être réévalué. Autant, son existence est utile et nécessaire, autant sa consultation systématique peut sembler superflue. Sans doute faudrait-il le réserver à certaines situations ou, peut-être mieux, attribuer à la commission nationale de la carte un rôle de supervision a posteriori des décisions d'attribution ou de rejet des demandes d'attribution.

En ce qui concerne le maillage avec le tissu associatif, il est l'une des justifications à un maillage territorial de l'ONAC VG suffisamment serré pour appréhender les réalités auxquelles sont confrontés les anciens combattants.

Les associations locales notamment permettent de fournir une incarnation au monde des anciens combattants, jouant un rôle, qui s'il ne peut être de décision, n'en est pas moins très important.

Par exemple, en 2019, le nombre de dossiers d'aides sociales « parrainés » par les associations a été de 3 931 pour un montant d'aides versées de 2 millions d'euros, montant certes en baisse depuis 2017 après une augmentation de 67 % en 2016 (3,85 millions d'euros versés) du fait de la diminution du nombre des adhérents dans les associations du monde combattant au niveau local, mais qui reste très significatif (9,5 % du nombre total de dossiers validés).

(2) Un organisme au défi de son nouveau contrat d'objectifs et de performance

Un nouveau contrat d'objectifs et de performance a été approuvé par les tutelles (dont la ministre déléguée auprès de la ministre des Armées) et voté par le conseil d'administration de l'ONAC VG, présidé par la même ministre le 2 juillet 2020.

Les objectifs fixés à l'ONAC sont variés. Il doit :

- assurer le meilleur service aux anciens ressortissants ;

- ancrer la politique de mémoire et de citoyenneté dans les territoires ;

- renforcer l'accompagnement des combattants dans la durée ;

- porter une nouvelle ambition pour le Bleuet de France ;

- poursuivre la modernisation de l'Office.

Ces objectifs, dessinés à grands traits, ont de quoi surprendre pour certains d'entre eux. Que l'ONAC VG soit un acteur de la citoyenneté n'est pas nécessairement incongru mais qu'il soit chargé d'ancrer la citoyenneté dans les territoires pourrait bien paraître tel, sauf à ce que cette orientation se résume à viser l'action mémorielle de l'ONAC VG. De la même manière, transformer l'ONAC VG, maison des anciens combattants en une maison des combattants implique un élargissement de la mission dont les contours ne sont pas d'une totale netteté.

Mais, l'essentiel est, peut-être, qu'une fois reconnue la contribution de l'ONAC VG comme chargé de missions de proximité ou l'impliquant par nécessité, la définition des moyens de l'établissement semble contredire frontalement cette vocation.

Il est peu contestable que le nombre des ressortissants de l'ONAC-VG accuse une baisse tendancielle, reflétant ainsi les évolutions mentionnées plus haut dans le présent rapport.

Évolution passée et prévue des ressortissants de l'ONAC-VG

2013

2018

(estimation rapport CGA)

2018

(estimation actualisée)

2023

Combattants 21 ( * )

1 419 300

1 187 400

1 195 108

922 400

PMI et pensions de victimes civiles (PVC) hors double titre & VG non pensionnées 22 ( * )

131 500

93 000

93 000

64 200

Total des ayants droit

1 550 800

1 280 400

1 288 108

986 600

Ayants cause PMI et PVC 23 ( * )

80 200

72 300

72 300

45 800

Veuves de ressortissants

1 128 400

799 500

799 500

655 300

Orphelins de guerre

222 700

200 600

200 600

147 100

Total des ayants cause

1 431 300

1 072 400

1 072 400

848 200

Total des ressortissants

2 982 100

2 352 800

2 360 508

1 834 800

Source : réponse au questionnaire du rapporteur spécial

Par rapport à 2013, le nombre des ressortissants a diminué de 622 000, soit un repli de 20 %. La baisse devrait se poursuivre.

Pour autant, cet indicateur est à la fois trop global et trop incomplet pour apprécier les conditions du plan de charges de l'ONAC-VG.

Du premier point de vue, force est de nuancer l'impression suscitée par les données globales mentionnées ci-dessus que ces dernières permettraient de réduire les moyens de l'ONAC-VG.

Les ressortissants de cet établissement ne sont pas une masse compacte d'individus pouvant constituer un public unique. Les ressortissants de l'ONAC-VG sont répartis sur le territoire national, ce qui justifie le déploiement des services de l'ONAC-VG sur le territoire, en proximité, et même sur des territoires étrangers ; les problématiques auxquelles ils sont confrontés sont souvent individuelles.

En bref, les ressortissants de l'ONAC-VG constituent une population à tous égards composite qui ne saurait relever d'une approche aux termes de laquelle toute réduction du nombre des ressortissants de l'ONAC-VG pourrait être mise à profit pour appliquer des « rabots budgétaires » à due proportion.

Aperçu sur les ressortissants de l'Office national des anciens combattants
et victimes de guerre

Sont ressortissants de l'ONAC-VG :

1-Les invalides pensionnés de guerre et des opérations extérieures ;

2-Les titulaires de la carte du combattant ;

3-Les combattants volontaires de la Résistance ;

4- Les conjoints et partenaires survivants pensionnés au titre du présent code ou qui auraient bénéficié d'une pension militaire ou de victime civile, s'ils n'avaient pas opté pour un autre régime de pension ;

5- Les ascendants de militaires ou de civils morts pour la France ;

6-Les pupilles de la Nation et orphelins de guerre ;

7-Les déportés et internés résistants et politiques ;

8-Les anciens prisonniers de guerre ;

9-Les patriotes résistant à l'occupation des départements du Rhin et de la Moselle, incarcérés en camps spéciaux ;

10-Les réfractaires ;

11- Les patriotes transférés en Allemagne ;

12- Les patriotes réfractaires à l'annexion de fait ;

13-Les victimes civiles de guerre ;

14-Les personnes contraintes au travail en pays ennemi ;

15-Les victimes de la captivité en Algérie ;

16-Les titulaires du titre de reconnaissance de la Nation ;

17-Les prisonniers du Viet-Minh ;

18-Les conjoints ou partenaires survivants de titulaires de la carte du combattant ou de bénéficiaires du présent code.

Au demeurant, les compétences attribuées à l'établissement n'ont cessé d'être diversifiées et complexifiées.

Ainsi, l'action sociale de l'ONAC-VG a été reconfigurée dans le sens d'interventions plus qualitatives. De même, il s'est vu confié la charge de gérer la totalité des allocations de reconnaissance aux rapatriés et à leurs enfants, ce qui peut susciter des traitements complexes.

En bref, il faut pondérer d'une dimension qualitative les indicateurs purement quantitatifs sur la base desquels on pourrait trouver justifié de réduire la voilure de l'établissement.

Il faut d'ailleurs ajouter que ce dernier est prié de contribuer à la politique mémorielle qui tend à se complexifier à mesure des exigences des autorités publiques elles-mêmes et implique souvent d'épouser des réalités locales.

Les voies d'atténuation des impacts de la restructuration de l'ONAC-VG ne sont pas clairement appréciables. Il est question de mutualisation mais jusqu'à présent les suppléments de mission confiés à l'ONAC-VG se sont plutôt traduits par des désengagements des ministères (intérieur, Outre-mer) tandis que l'étiolement des services déconcentrés de l'État ne laisse pas percevoir de grandes opportunités de mutualisation.

Dans ce contexte, l'augmentation de la subvention pour charges de service public prévue pour 2021 est passible d'une appréciation ambivalente : d'un côté, elle témoigne du peu de poids réel des optimisations envisagées, ce qui signe l'irréalisme du nouveau COP, d'un autre côté, elle pourrait être jugée comme représentative d'une inflexion bienvenue. Mais, cette dernière conclusion ne saurait être admise sans sérieuses nuances.

En premier lieu, l'augmentation de la subvention pour charges de service public versée à l'ONAC VG (+10,4 millions d'euros) est assez optique. Un changement de méthode de budgétisation voit une dotation fléchée en provenance du programme 167 de la mission, et destinée à assurer l'entretien courant des sépultures de guerre, est intégrée, pour 2,5 millions d'euros, à la subvention versée à partir du programme 169. Il est exposé que cette intégration permettra davantage de souplesse de gestion. Compte tenu des retards fréquemment constatés dans l'entretien des sépultures de guerre, on doit craindre que les fonds correspondants ne soient utilisés à des fins étrangères à leur destination.

C'est d'autant plus à craindre que les moyens de l'ONAC VG sortiront inférieurs à leur situation d'entrée au terme de la budgétisation pour 2021.

L'an dernier, le projet annuel de performances de la mission avait justifié la forte réduction de la subvention pour charges de service public de l'ONAC-VG (un recul de 12,1 millions d'euros), qui tendait à amputer les ressources attribuées à l'ONAC-VG pour assurer son fonctionnement de plus d'un cinquième, par la « déflation des effectifs dans le cadre d'une démarche de réorganisation impulsée par l'ONAC-VG » .

Le rapporteur spécial avait remarqué qu'en réalité, la réduction de la subvention de fonctionnement allait très au-delà des baisses d'effectifs qui, pour atteindre une réelle ampleur, s'élevait à - 3,7 %.

Il en avait déduit que la trésorerie de l'établissement, déjà engagée par les charges qui lui étaient imputées dans le cadre de la rénovation des sépultures et des hauts lieux de mémoire (pour un montant de plus de 4 millions d'euros, voir supra ), serait ponctionnée afin de couvrir l'impasse de financement de la masse salariale de l'ONAC-VG suscitée par la baisse de la subvention de fonctionnement.

Le projet de budget pour 2020 se traduisait ainsi par de lourds transferts de charges reportées sur la trésorerie de l'ONAC-VG, et le rapporteur spécial jugeait que la débudgétisation ainsi opérée n'était pas soutenable en l'état actuel de la réorganisation de l'ONAC-VG.

De fait, le fonds de roulement de l'ONAC VG serait considérablement sollicité en 2020, à hauteur de près de 23 millions d'euros (plus de 60 % du fonds de roulement constaté en 2019).

En bref, comme annoncé par le rapporteur spécial, l'Office a dû mobiliser sa trésorerie afin de compléter les moindres subventions reçues en 2020 des programmes 167 et 169. Trois domaines sont concernés par cette mobilisation de la trésorerie :

- les dépenses en faveur des sépultures de guerre et lieux de la mémoire (rénovation en particulier) ;

- les dépenses d'intervention concernant les harkis-rapatriés, dans le cadre du fonds pour les enfants de harkis, qui, du fait de l'élargissement des conditions d'accès à l'aide sociale de l'ONAC VG formalisé par le décret n° 2020-513 du 4 mai 2020, ont été révisées en nette hausse, le dispositif devant finalement coûter 5,5 millions d'euros eu lieu des 3,1 millions initialement prévus;

- la subvention pour charges de service public elle-même.

Impact des baisses de dotations 2020 sur la trésorerie et le fonds de roulement
(au 31 juillet 2020)

(en euros)

PLF 2020

Prélèvement prévu sur la trésorerie au PLF 2020

Prélèvement prévu sur la trésorerie au 31/07/2020

SCSP

45 532 659

9 940 000

9 940 000

Actions en faveur des rapatriés

0

3 100 000

5 500 000

Sépultures de guerre et lieux de mémoire

220 000

4 410 000

4 410 000

Total

45 752 659

17 450 000

19 850 000

Source : réponse au questionnaire du rapporteur spécial

La baisse de la subvention pour charges de service public non compensée par une utilisation de la trésorerie, c'est-à-dire correspondant à des réelles économies structurelles, s'est élevée à 2,1 millions d'euros.

Cette baisse correspond à l'économie prévisionnelle du fait de la restructuration :

- masse salariale : - 2,1 millions d'euros ;

- économie de fonctionnement : - 350 000 euros ;

- accompagnement des restructurations : + 300 000 euros.

La budgétisation de la subvention pour charges de service public impliquait ainsi un taux de couverture des dépenses salariales et de fonctionnement par cette subvention particulièrement dégradé.

La dotation prévue pour 2021 ne fait que suspendre partiellement les effets délétères d'un exercice budgétaire 2020 insoutenable.

Évolution du taux de couverture des dépenses courantes de l'ONAC VG par la subvention pour charges de service public

EMPLOIS SOUS PLAFOND LFI

Fonctionnement courant

(en millions d'euros)

SCSP

(en millions d'euros)

Taux de couverture par la SCSP

Plafond autorisé

ETPT réalisés

Masse salariale (millions d'euros)

PLF 2021*

801

-

49

9,5

55,92 24 ( * )

95,6 %

Budget initial 2020

845 25 ( * )

-

49,73

7,19

44,84

78,8 %

Exécuté 2019

878

853,10

51,22

6,44

51,38

89,1%

Exécuté 2018

883

872,77

52,32

6,19

57,42

98,1%

Exécuté 2017

865

848,04

53,58

6,3

55,94

93,4%

Source : réponse au questionnaire du rapporteur spécial

Si l'augmentation de la subvention pour charges de service public comble une partie du déficit de financement spectaculairement creusé en 2020, elle n'équivaut pas à un rattrapage complet. La ponction exercée en 2020 sur le fonds de roulement de l'ONAC VG ne serait pas comblée, le déficit de la subvention pour 2021 par rapport aux charges courantes anticipées rajoutant la perspective d'une nouvelle ponction, il est vrai plus limitée (2,6 millions d'euros).

Ces montages financiers s'inscrivent dans une forme de continuité puisque le fonds de roulement de l'ONAC-VG a été considérablement ponctionné ces dernières années.

Évolution du fonds de roulement de l'ONAC-VG en exécution

(en euros)

Exécuté

Exécuté

Exécuté

Exécuté

Budget

2015

2016

2017

2018

2019 *

45 151 213

34 483 177

35 271 962

41 263 061

28 260 508

* Estimation budgétaire

Source : réponse au questionnaire du rapporteur spécial

Entre 2015 et 2016, la baisse du fonds de roulement de l'ONAC-VG a été suscitée par les frais liés au transfert des établissements médico-sociaux, transfert dont les conditions ont été largement exposées dans les rapports budgétaires des années précédentes, et qui étaient principalement liés à la remise à niveau du bâti et à l'ajustement de leur trésorerie.

Les évolutions à la hausse du fonds de roulement observées les années suivantes ont tenu davantage à des inscriptions comptables liées notamment à des reprises qu'à des flux réels. Depuis l'exercice 2019 la trésorerie de l'ONAC VG est constamment (même si c'est plus ou moins) sollicitée pour combler des impasses de financement budgétaire.

Cette situation est d'autant moins acceptable que la restructuration en cours crée des besoins, qui, en l'état, ne semblent pas financés.

En toute hypothèse, la contrainte financière exercée sur l'établissement force à une restructuration à marche forcée qui tend à réduire les capacités de l'ONAC-VG à poursuivre ses missions.

Les effectifs de l'ONAC-VG devraient être considérablement réduits à l'avenir.

Ces orientations sont franchement problématiques alors même que les missions attribuées à l'établissement ont été constamment diversifiées et sont accomplies avec quelques difficultés.

Il est également question de recours à l'e-administration. Mais, là encore les potentialités de cette dernière semblent plus vagues que concrètement étayées.

La restructuration de l'ONAC-VG ainsi entamée doit susciter l'inquiétude d'autant que les plans de charge de l'ONAC-VG sont souvent mal anticipés par le ministère.

L'on a mentionné plus haut l'augmentation des charges liées au fond consacré aux soutiens aux enfants de harkis, qui paraît ne pas avoir été anticipée et a encore accru un prélèvement déjà contestable exercé sur les réserves de l'ONAC VG du fait de cette action sociale, par ailleurs si absolument nécessaire qu'on aurait dû la financer sur des ressources nouvelles.

Il faut également renvoyer aux données fournies dans le cadre de la maquette de performance du programme 169, qui ne manquent pas de susciter une certaine perplexité.

Il s'agit du domaine particulièrement important de la gestion des cartes et titres ; l'ONAC-VG assure la chaîne complète de l'instruction des demandes relatives à la reconnaissance, que constituent les demandes de carte du combattant et de titre de reconnaissance de la Nation ainsi que l'ensemble des demandes de statuts. Il est également chargé de la certification, de l'instruction et, in fine de la liquidation de la retraite du combattant et exerce un rôle majeur, par ses unités départementales de guichet unique en matière de pensions militaires d'invalidité (PMI), les demandes en la matière devant leur être adressées. Par-là, les services de l'ONAC sont le contact des ressortissants afin de les renseigner sur l'état d'avancement de leur dossier.

Sur ce point, le rapporteur spécial s'interroge régulièrement sur les sous-performances des indicateurs de gestion mesurant l'efficacité des services de l'ONAC.

Un premier indicateur mesure le nombre de cartes et titres traités par agent. À cet égard, les objectifs peuvent se résumer comme suit : amplifier les économies de moyens provenant de la baisse du nombre des demandes par une augmentation de la charge individuelle de travail. C'est ainsi que les cibles sont constamment revues à la hausse. Pour autant, c'est structurellement qu'elles ne sont pas atteintes. Ainsi, en 2020, l'objectif initial a été revu à la baisse (de 1340 cartes et titres par agent à 1 220).

Il n'est pas certain qu'une nouvelle révision doive intervenir dans le contexte sanitaire actuel.

Face à des déconvenues à peu près structurelles, deux analyses peuvent être avancées, l'une suggérant en même temps qu'un déficit de productivité des agents, une certaine rigidité dans la gestion des ressources humaines ; l'autre faisant valoir une limite « quasi-naturelle » aux progrès de productivité exigés des agents et mal identifiée par les gestionnaires.

Il est évidemment hors de portée du rapporteur spécial de trancher. En revanche, certains aspects qualitatifs méritent considération.

Parmi les voies envisagées pour améliorer la production des services chargés de la délivrance des cartes du combattant figurent, outre un recours accru aux procédures numériques, une centralisation des centres de délivrance des cartes et titres. Il s'agit en particulier de transférer un tiers de l'activité des services départementaux de l'ONAC VG au niveau central, avec la perspective d'une nette réduction des effectifs.

Ce type de restructuration a été conduit à grande échelle par le ministère de l'intérieur, dans le cadre du plan « préfectures nouvelle génération » (PPNG), avec un succès inégal. On a pu constater que les redéploiements d'effectifs n'atteignaient pas le niveau anticipé et que la qualité du service rendu aux usagers en sortait, parfois très gravement, détériorée. Un allongement des délais de délivrance des titres sécurisés, des coûts d'administration transférés aux usagers, des difficultés d'accès aux services ont figuré parmi les problèmes rencontrés.

Le rapporteur spécial appelle à ce que ces écueils soient évités.

Le projet annuel de performances pour 2021 n'apporte à cet égard pas de quoi rassurer.

Le second indicateur du dispositif de performance (le délai moyen de traitement des demandes d'obtention de titres et de cartes de combattant) montre qu'en dépit d'une baisse du nombre des cartes et titres traités et alors même que l'indicateur n'inclut pas les dossiers donnant lieu à contentieux, le délai moyen de traitement (140 jours en prévision révisée pour 2020) demeure très long et doit être presque systématiquement revu à la hausse.

Encore ne s'agit-il ici que d'un indicateur moyen, qui doit admettre une dispersion certaine, de sorte que certaines demandes doivent être traitées dans des délais inacceptables.

Le rapporteur spécial a indiqué plus haut que, par certains aspects, la procédure de délivrance des titres mériterait d'être simplifiée. Il n'en reste pas moins nécessaire d'ajouter une certaine perplexité face à la combinaison d'objectifs, qui peuvent être contradictoires, de réduction des effectifs et d'amélioration des services rendus aux anciens combattants.

Le rapporteur spécial exhorte le ministère à mettre tout en oeuvre pour que les délais d'instruction des dossiers soient réduits (un délai de 140 jours étant inacceptable) et que l'accès aux services (les difficultés d'accès avec les délais supplémentaires qu'elles supposent ne sont pas décomptées dans l'indicateur) soit rendu plus fluide. Il convient, en particulier, que les services départementaux, mais également les antennes au maillage territorial plus serré soient suffisamment armés pour, à tout le moins, servir de relais efficaces entre les usagers et les instances de décision.

Aux impératifs que doit respecter l'importante mission de délivrance des titres et cartes, doit être ajoutée, notamment, la considération du rôle de l'établissement dans la gestion de la solidarité plus ponctuelle au bénéfice des anciens combattants, en sus de l'activité sociale conduite par le ministère des Armées lui-même.

La subvention versée par l'État pour couvrir les besoins serait réduite de 3,8 % (de 26 millions d'euros à 25 millions d'euros) dans un contexte de baisse des personnes éligibles.

Cependant, des besoins nouveaux interviennent du faits des suites des engagements de la France, et, en particulier, de la hausse tragique du nombre des pupilles de la Nation, et des actes de terrorisme.

ONAC-VG, OPEX et terrorisme

L'accompagnement des militaires engagés dans les OPEX et des victimes d'actes de terrorisme mérite une attention sans failles.

Les militaires et les civils qui, en exécution des décisions des autorités françaises, ont participé, au sein d'unités françaises, ou alliées, ou de forces internationales, soit à des conflits armés, soit à des opérations ou missions menées conformément aux obligations et engagements internationaux de la France (OPEX), peuvent :

- obtenir la carte du combattant s'ils justifient une durée de quatre mois de services sur l'un ou des théâtre(s) pris en compte par arrêté,

- ou prétendre au titre de reconnaissance de la nation (TRN) s'ils justifient une durée de trois mois de services sur ces mêmes théâtres.

La détention de la carte du combattant ou du titre de reconnaissance de la Nation rend éligibles ces « jeunes anciens combattants » aux dispositifs mis en place par l'Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONAC-VG) pour les aider, en cas de difficultés, à se réinsérer dans la vie civile.

En 2019, plus de 421 dossiers (contre 330 dossiers en 2017) d'aide à la reconversion ont été traités, pour un montant d'aides de 526 000 euros, correspondant à une aide unitaire moyenne de 1 249 euros ( 1 666 euros en 2017), qui, de prime abord, se caractérise par sa modicité.

Sur cet aspect de la reconversion, l'ONAC indique avoir lancé un marché public pour la mise en oeuvre d'un accompagnement complémentaire en amont (bilan de compétences, bilan d'orientation) et en aval (proposition d'emploi) permettant aux ressortissants qui n'ont pas pu bénéficier du soutien de l'Agence de reconversion de la défense d'aller jusqu'au terme de la démarche d'accès à l'emploi.

En somme, l'ONAC-VG est appelé à se substituer aux efforts normalement assignés à l'agence de reconversion de la défense et à Pôle Emploi, dont les guichets pourraient être mieux accueillants aux personnes concernées. Ce dispositif reste ainsi à évaluer.

Au-delà du dispositif de reconversion, l'Office propose aux ressortissants de la 4 ème génération du feu des aides pouvant contribuer à couvrir les dépenses liées à l'état de santé et au handicap : subventions pour des frais médicaux, pour l'adaptation du logement, pour l'aménagement du véhicule...

Le nombre et le montant des aides financières ont progressé de près de 45 % au cours de la période 2016-2017, pour atteindre une dépense de 1,3 million d'euros au 31 décembre 2017. Depuis, une nouvelle progression se constate : le nombre et le montant des aides financières ont progressé de plus de 32 % entre 2017 et 2019, pour atteindre une dépense de 1,76 million d'euros au 31 décembre 2019.

Au 31 décembre 2019, le suivi de 274 blessés a été confié à l'Office par les cellules d'aide aux blessés (222 en 2017).

Les services de proximité de l'ONAC-VG accompagnent également de nombreux blessés ressortissants de l'Office, qui ne sont pas nécessairement suivis par les cellules d'aide.

Ils sont aujourd'hui plus de 1 000 à bénéficier ainsi d'un soutien administratif et social (1 151) .

Quant aux victimes d'actes de terrorisme , la loi n° 90-86 du 23 janvier 1990 leur a étendu le bénéfice des dispositions du code des pensions militaires d'invalidité et victimes de guerre applicables aux victimes civiles de guerre. Elles ont donc théoriquement la qualité de ressortissants de l'ONAC-VG. Cette qualité leur permet de bénéficier de l'action sociale et de l'assistance administrative mises en oeuvre par les services de proximité de l'Office.

Sont concernées les personnes victimes d'un acte de terrorisme sur le territoire français, quelle que soit leur nationalité, ainsi que les victimes de nationalité française lorsque l'acte de terrorisme intervient à l'étranger.

À ce jour, 4 082 victimes directes d'actes de terrorisme, familles des victimes décédées, victimes blessées et victimes de traumatismes sont prises en charge par l'Office au titre des actes perpétrés de 2015 à 2019 (contre 3600 en 2017 pour la période de 2015 à 2017).

Au coeur de cet accompagnement, se trouve notamment la procédure d'adoption par la Nation des enfants des victimes d'actes de terrorisme tuées ou gravement blessées, ou des enfants victimes directes de ces attentats. Le budget consacré aux pupilles de la Nation a ainsi augmenté de 55% entre 2017 et 2019.

Par ailleurs, un nouvel accompagnement est désormais proposé aux victimes du terrorisme qui souhaiteraient être assistées dans leur démarche de réinsertion professionnelle. Elles peuvent être suivies par des spécialistes qui les conseillent et les orientent vers les secteurs les plus adaptés à leurs compétences.

La présence des services de proximité de l'ONAC-VG au sein des comités locaux d'aide aux victimes d'actes de terrorisme présidés par les préfets est une source d'amélioration de leur accompagnement.

Il importe tout particulièrement de soutenir les efforts fait par l'ONAC-VG pour apporter des réponses à des situations qu'un filet de sécurité consistant en des prestations monétaires ne saurait toutes contenir.

b) L'Institution nationale des Invalides

Le projet de budget témoigne d'une quasi- stabilité de la subvention de fonctionnement versée par la mission à l'Institution nationale des Invalides (INI).

Celle-ci est portée de 12,09 millions d'euros, niveau auquel elle était accrochée depuis 2015 à 12,312 millions d'euros, soit un supplément assez modeste de 223 000 euros.

En revanche, les crédits de paiement pour dépenses d'opérations financières, ouverts à hauteur de 13,7 millions d'euros en 2020, reculent à 3,7 millions d'euros en 2021 (soit un repli très significatif de 10 millions d'euros). Une dotation en fonds propres de 35 millions d'euros en autorisations d'engagement avait été inscrite en 2019 26 ( * ) , accompagnée de 2,7 millions d'euros de crédits de paiement.

Il s'agissait d'accompagner le projet de rénovation de l'établissement.

Au total, sur les 35 millions d'euros ouverts au titre des autorisations d'engagement dans ce cadre, en 2019, seuls 20,1 millions d'euros de crédits de paiement auront été dégagés au cours des années 2019, 2020 et 2021.

La mise en oeuvre du projet médical est dépendante du projet d'infrastructure qui, en raison d'une exécution en site occupé, avec maintien de l'activité hospitalière, prévoit une phase d'exécution des travaux sur une durée de 7 ans.

La consommation des autorisations d'engagement est susceptible de prendre un certain retard comme c'est également le cas pour les paiements correspondants, d'autant plus que le contexte sanitaire est plus que tendu.

Par ailleurs, comme c'est trop souvent le cas, l'estimation initiale du coût du projet immobilier a dû être revue.

Estimé initialement à 51,5 millions d'euros avec pour clef de financement 11,5 millions d'euros financés sur le fonds de roulement de l'INI et 40 millions d'euros 27 ( * ) financés par l'Etat (versés en totalité entre 2017 et 2019) le coût prévisionnel de l'opération de restructuration et de rénovation immobilière a été réévalué dernièrement à 56,2 millions d'euros soit un surcoût de 4,7 millions d'euros. Les modalités de financement de ce surcoût, dont l'impact budgétaire en crédits de paiement se manifestera à compter de 2024, sont actuellement à l'étude.

Compte tenu de la pression programmée sur le fonds de roulement de l'INI, il paraît exclu que ce dernier soit à nouveau sollicité.

Si le fonds de roulement de l'INI ressort comme ayant été relativement préservé ces dernières années, cette situation provient principalement d'un étalement des opérations immobilières et de leur paiement.

Évolution du fonds de roulement de l'INI (2015-2020)

(en millions d'euros)

M€

COFI 2015

COFI 2016

COFI 2017

COFI 2018

COFI 2019

BR1 2020

FDR

21,40

21,27

19,94

20,28

24,08

25,73

Variation N/N-1

ND

-0,13

-1,33

+0,34

+3,80

+1,65

Source : réponse au questionnaire du rapporteur spécial

Par ailleurs, la perspective d'une réduction des ressources propres ne contribue pas à imaginer la reconstitution d'une capacité de financement qui pourrait résoudre l'équation financière résultant de la révision des enjeux du projet immobilier de l'INI.

La subvention pour charges de service public versée par le ministère des Armées représente un peu plus d'un tiers des ressources de l'INI qui est par ailleurs attributaire d'une dotation annuelle de financement versée par le ministère de la santé (11,8 millions d'euros) et s'efforce de développer des ressources propres.

La pandémie en cours a, d'un point de vue financier 28 ( * ) , entamé les recettes propres de l'établissement et alourdi ses charges de fonctionnement, dans des proportions qui, pour être à préciser, ne sont sans doute pas financées par la subvention pour charges de service public telle qu'elle est budgétée.

La pandémie a suscité une perte de recettes d'ores-et-déjà estimée à hauteur de 1,3 million d'euros au regard du nombre de lits fermés, l'impact final étant tributaire de prévisions, incertaines, sur la reprise d'activité complète des services cliniques début septembre 2020. Si le cadencement des dépenses de fonctionnement a pu être flexibilisé, pour certaines dépenses, toutes ne peuvent être sollicitées en ce sens.

Au contraire, la masse salariale ressort augmentée de 0,39 million d'euros. En effet, conformément aux dispositions du décret du 14 mai 2020 29 ( * ) , les personnels concernés ont perçu, en juillet 2020, la prime exceptionnelle dite « COVID ». Si, pour 2021, l'augmentation de la subvention pour charges de service public répond aux besoins, tels qu'estimés à ce jour, de la prime d'attractivité territoriale pour les personnels soignants de la fonction publique hospitalière en Ile-de-France, une éventuelle réitération de la prime dite « COVID » n'est pas financée. Par ailleurs, les suites du Ségur de la santé ne paraissent pas provisionnées. Nul doute qu'il en résultera une difficulté entre le ministère des Armées et le ministère des Affaires sociales.

Ce dernier qui verse une dotation gelée à l'INI devrait être sollicité pour financer des avantages consentis par lui.

Par ailleurs, l'INI a bénéficié, durant la crise sanitaire, du soutien de ses prestataires et fournisseurs et a pris en compte toutes les difficultés réciproques rencontrées ce qui a permis qu'aucune pénalité financière, pour retard de livraison, n'ait été appliquée. La question du maintien de cette orientation peut se poser, ainsi que celle de la responsabilité éventuelle de l'établissement dans l'accomplissement du plan de charges de ses fournisseurs, prestataires et maîtres d'ouvrage.

En bref, la programmation 2021, comme celles des années précédentes, paraît témoigner d'une dynamique de financement courant de l'INI qui, dans le passé, s'est révélée insoutenable comme l'a exposé le rapporteur spécial dans son rapport de contrôle sur l'établissement 31 ( * ) et semble promis à un constat analogue pour l'avenir.

Le rapporteur spécial veut rappeler quelques-unes des observations formulées par lui l'an dernier relativement à la gestion des ressources humaines de l'INI.

Les évolutions en matière de ressources humaines liées au nouveau projet d'établissement 2016-2020 de l'INI décrites dans le contrat d'objectifs et de performance (COP 2017-2021), signé le 27 avril 2017 prévoient que « l'adaptation de ses effectifs à ses missions implique une diminution de 10 % des postes en organisation sur la période du COP, soit un objectif cible à 400 équivalents temps plein (ETP) fin 2021 » .

Le rapporteur spécial s'interroge, à nouveau, sur ces orientations alors même que les patients et pensionnaires accueillis par l'établissement supposent souvent d'être très entourés. L'an dernier, il avait souligné combien, si les taux d'encadrement par les personnels soignants paraissent supérieurs à l'INI à ce qu'ils sont dans des établissements comparables, ces derniers qui assument de plus en plus difficilement leurs missions ne devaient pas être considérés comme susceptibles de servir de référence indépassable.

C'est peu dire que les événements survenus depuis n'ont fait que renforcer la justification que le rapporteur spécial trouvait déjà à son propos dans les faits.

De surcroît, la cible du COP devrait faire l'objet d'une révision afin d'assurer un effectif médical et paramédical suffisant lors de l'ouverture du nouveau service de réhabilitation psychiatrique dont l'ouverture a, hélas, été reportée à l'automne 2022.

Le rapporteur spécial, qui s'interroge sur le principe apparemment adopté d'une exclusivité de la participation des budgets militaires au financement du projet, dès lors que la patientèle de l'INI est principalement civile, restera attentif aux prolongements des impulsions données pour rénover l'INI.

6. De quelques situations à mieux prendre en considération

Les interventions de l'ONAC-VG et de l'INI sont d'autant plus stratégiques que, sans elles, certaines situations ne seraient que peu, voire nullement, prises en compte au titre de l'effort en faveur des anciens combattants.

Il convient notamment de rappeler que les conditions d'âge exigées pour disposer de la retraite du combattant (65 ans ou 62 ans mais sous certaines conditions) peuvent éloigner considérablement l'apparition des besoins de reconnaissance de la reconnaissance effective. Dans ces conditions, l'attribution d'une carte du combattant permet d'accéder à un certain nombre de processus d'accompagnement des anciens combattants, en particulier aux soutiens procurés par l'ONAC-VG.

Celui-ci fait alors office de filet de sécurité, ce qui, à défaut d'être optimal, doit être considéré comme précieux.

Les perspectives ouvertes par la réforme des retraites en cours de définition, qui appellent des clarifications, pourraient être de nature à aviver cette problématique. Les conditions dans lesquelles le bénéfice d'une retraite à jouissance immédiate pourra être maintenu doivent être au plus vite éclaircies.

En outre, il faut rappeler que le ministère a mis en oeuvre en 2018 une revue de certaines de ses interventions et des sollicitations qui lui sont adressées par le monde « anciens combattants ». Il convient de saluer cette initiative. Toutefois, sur les vingt-six sujets abordés, seul un petit nombre d'entre eux a fait l'objet d'une suite favorable.

Le rapporteur spécial insiste pour que des situations mal couvertes, comme celle des forces participant aux opérations de sécurité conduites dans le cadre de la protection des Français contre les actions terroristes (les opérations intérieures- OPINT) ou celle des personnes en charge, ou l'ayant été, de grands invalides de guerre soient mieux prises en compte. Sur ce dernier point, la mesure annoncée (voir supra) pour constituer une avancée, demeure trop partielle.

Le rapporteur spécial s'en est expliqué.

Quant à la situation des rapatriés , s'il faut certes signaler la revalorisation substantielle de l'allocation de reconnaissance versée aux supplétifs de l'armée française en Algérie - une nouvelle revalorisation de 400 euros étant intervenue l'an dernier - il convient d'en souligner l'impact limité sur la situation des bénéficiaires malgré la création d'un dispositif de solidarité pour les enfants de harkis. Au demeurant, ces limites se retrouvent dans la charge budgétaire correspondante.

Les dispositifs actuels en faveur des harkis

Les dispositifs au bénéfice des rapatriés sont les suivants :

- l'allocation de reconnaissance, instituée en 2002, versée aux harkis rapatriés âgés d'au moins soixante ans et qui ont déposé leur dossier avant le 19 décembre 2014, ce dispositif étant à ce jour forclos ; 4 787 harkis et veuves en bénéficiaient en juillet 2020 ;

- l'allocation viagère, créée par l'article 133 de la loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016 au profit des conjoints et ex-conjoints mariés survivants de harkis qui ont fixé leur domicile en France ; 1117 veuves d'anciens supplétifs en bénéficiaient en juillet 2020 ;

- les compléments de bourses pour les enfants scolarisés et les étudiants éligibles aux bourses de l'Éducation nationale ; 99 enfants de harkis en ont bénéficié pour l'année scolaire 2019-2020 (121 en 2018-2019) avec un accroissement des boursiers de l'enseignement supérieur ;

- l'aide spécifique aux conjoints survivants, instituée en 1994, destinée aux veuves de plus de 60 ans dont le revenu n'excède pas l'allocation aux vieux travailleurs salariés ; cette aide a bénéficié en 2019 à 35 personnes ;

- l'aide au rachat de trimestres de cotisation retraite pour des enfants de harkis ; aucun bénéficiaire à ce jour, en raison d'une condition d'âge restrictive 32 ( * ) ;

- le dispositif de solidarité 33 ( * ) qui prévoit jusqu'au 31 décembre 2022 (soit 3 ans) un dispositif d'aide en faveur des enfants d'anciens supplétifs ayant séjourné dans les camps et les hameaux de forestage. Le budget prévisionnel annuel de ce dispositif (7,35 millions d'euros en LFI 2019) a été reconduit en 2020 34 ( * ) . Au 31 décembre 2019, 466 dossiers approuvés (contre 161 rejetés) ont généré une dépense de 2 475 701euros ; à la suite de l'élargissement des conditions d'octroi en mai 2020, une tendance à la hausse se dessine : ainsi au 1 er août 2020, ce sont 429 dossiers (contre seulement 52 rejets) qui ont été approuvés pour un montant total de 3 113 691 euros. En 2021 il est prévu une dépense de 7 millions d'euros financée par des crédits budgétaires à hauteur de 4,9 M et un recours à la trésorerie de l'établissement pour 2,1 M.

D'autres dispositifs visent plus particulièrement les rapatriés :

- la sauvegarde du toit familial : le décret du 23 mars 2007 offre aux préfets la possibilité d'accorder des secours exceptionnels aux rapatriés qui n'ont pu bénéficier des précédentes mesures de désendettement et dont la propriété de leur toit familial se trouve menacée par les poursuites de créanciers ;

- le désendettement : le décret n° 99-469 du 4 juin 1999 a mis en place « un dispositif de désendettement au bénéfice des rapatriés qui exerçant une profession non salariée ou ayant cessé leur activité professionnelle ou cédé leur entreprise, rencontrent de graves difficultés financières les rendant incapables de faire face à leur passif » ; ce dispositif est forclos depuis le 31 janvier 2002 ;

- les secours exceptionnels : la loi du 26 décembre 1961 et les articles 41 et 41-1 du décret n° 62-261 du 10 mars 1962 prévoient la mise en oeuvre de secours exceptionnels ; en 2019, 75 personnes en ont bénéficié pour un montant total de 48 138 euros ;

- les cotisations retraites : cette dernière mesure concerne le paiement des retraites complémentaires dues aux anciens salariés du service des eaux d'Oran et des manufactures de tabac en Algérie.

En 2019, 42 associations de rapatriés et de harkis (38 en 2018) ont bénéficié, pour leurs actions sociales et mémorielles, d'une subvention (soit un montant cumulé de 136 970 euros contre 123 780 euros en 2018).

En 2020, les crédits prévus étaient en repli de 4,7 millions d'euros, le ministère recourant une fois de plus à la débudgétisation par prélèvement de la trésorerie de l'ONAC-VG d'une partie du coût des dispositifs correspondants.

En 2021, malgré un accroissement des crédits budgétaires consacrés aux rapatriés de 6,2 millions d'euros résultant d'une débudgétisation partielle des aides en faveur des rapatriés les poids des allocations de reconnaissance demeurant stable, la trésorerie de l'ONAC VG devra à nouveau contribuer à hauteur de 2,1 millions d'euros.

Tant le traitement budgétaire de ces allocations que leur niveau beaucoup trop éloigné de la logique de réparation qui devrait les inspirer ne peuvent être vus avec faveur par le rapporteur spécial.


* 10 Dont 35 108 au titre de la carte 1962-1964

* 11 Le montant de la retraite du combattant était prévu par la loi jusqu'au 1 er janvier 2017.

* 12 Voir infra pour de plus amples développements sur les conditions d'indexation.

* 13 L'article L. 16 accorde des majorations de pensions aux victimes de motifs multiples d'invalidité.

* 14 Évidemment, les économies cumulées sont sensiblement supérieures.

* 15 Valeur du point d'indice telle qu'elle aurait évoluée au regard de l'inflation constatée depuis 2011.

* 16 Loi n° 2005-158 du 23 février 2005, article 6 modifié.

* 17 Loi n°2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016, article 133 modifié.

* 18 Évaluations préalables des articles du PLF 2019, page 483.

* 19 Données pour 2020 hors rentes en cours de constitution (57 000).

* 20 R. 311-27 et suivant du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre (CPMIVG).

* 21 Titulaires de la carte du combattant (CC) et/ou du titre de reconnaissance de la Nation (TRN). Ce chiffre, pour 2018, tient compte des nouvelles attributions de cartes et titres ainsi que des décès survenus en 2017.

* 22 Il s'agit des titulaires de pensions militaires d'invalidité (PMI) et de pensions de victimes civiles (PVC), hors détention de CC ou TRN, et des autres victimes de guerre non pensionnées.

* 23 Conjoints survivants, ascendants et orphelins de titulaires d'une PMI et PVC.

* 24 Dont 0,08 M€ correspondant au solde positif des transferts en construction du PLF 2021.

* 25 Source : lettre plafond 2020.

* 26 En complément d'une dotation de 5 millions d'euros mise en place en 2017.

* 27 35 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) ont été alloués par l'État en 2019, en complément de 5 millions d'euros mis en place en 2017, portant ainsi le financement déjà accordé par l'État pour cette opération à 40 millions d'euros (dotation en fonds propres, crédits de titre 7).

* 28 Voir l'annexe n° X pour les autres adaptations mises en oeuvre.

* 29 Décret n° 2020-568 du 14 mai 2020 30 relatif au versement d'une prime exceptionnelle aux agents des établissements publics de santé et à certains agents civils et militaires du ministère des armées et de l'Institution nationale des invalides

* 31 Rapport d'information de Marc Laménie, fait au nom de la commission des finances, n° 72 (2016-2017)-25 octobre 2016.

* 32 Avoir entre 16 et 21 ans au moment du séjour dans les camps.

* 33 Décret n° 2018-1320 du 28 décembre 2018 modifié par décret n°2020-513 du 4 mai 2020.

* 34 En 2020 il est prévu de financer le dispositif en recourant intégralement à la trésorerie de l'ONAC.

Page mise à jour le

Partager cette page