EXAMEN EN COMMISSION

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MERCREDI 12 MAI 2021

M. François-Noël Buffet , président . - Nous allons maintenant examiner, en deuxième lecture, la proposition de loi visant à améliorer la trésorerie des associations  selon la procédure de la législation en commission (LEC), conformément aux articles 47 ter à 47 quinquies du Règlement du Sénat - vous l'aviez déposée lorsque vous étiez parlementaire, madame la secrétaire d'État.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio , rapporteure . - Le texte que nous examinons aujourd'hui en deuxième lecture a une histoire assez longue, puisqu'il a effectivement été déposé par vous-même, madame la secrétaire d'État, et par plusieurs de vos collègues, lorsque vous étiez députée, en octobre 2018 ; le Sénat l'a adopté en première lecture en juillet 2019.

J'indique d'emblée que le texte adopté par l'Assemblée nationale en deuxième lecture répond au souhait qu'avait émis le Sénat de préserver l'équilibre entre collectivités territoriales et associations. J'aurais souhaité pouvoir vous proposer d'adopter ce texte sans modification, et donc définitivement, mais des considérations de pure cohérence législative, que je regrette, nous interdisent de le faire, alors même que nous sommes parvenus à un accord. En effet, la longueur du processus législatif nous contraint à rappeler en discussion un article adopté conforme afin de le supprimer, car il a été adopté dans un autre texte.

Je rappelle rapidement la position du Sénat en première lecture. Nous partagions la volonté d'accompagner les associations, dont le financement a tendanciellement baissé en quinze ans et qui agissent au quotidien dans les communes. Nous avions adopté quatre articles conformes et les autres dispositions avaient fait l'objet de modifications surtout techniques.

À l'initiative de la commission des lois, le Sénat avait toutefois refusé d'inscrire dans la loi la possibilité, pour les associations, de conserver un « excédent raisonnable » correspondant à tout ou partie d'une subvention non utilisée. Il avait jugé cette notion trop imprécise et avait estimé que les obligations créées à l'article 1 er pour déterminer le montant de cet « excédent » étaient de nature à alourdir inutilement le travail des collectivités. Dans la même logique, le Sénat avait supprimé l'article 1 er bis , qui prévoyait une obligation de versement des subventions accordées en soixante jours, à partir de la notification de l'accord. Enfin, le Sénat avait refusé d'exclure du droit de préemption les aliénations à titre gratuit au profit des organisations non lucratives et avait donc supprimé l'article 4 bis .

Par ailleurs, nous avions enrichi le texte de plusieurs articles additionnels à l'initiative de nos collègues Henri Leroy, Maryse Carrère, Michel Canevet et Nathalie Goulet Il s'agissait d'élargir la liste des associations pouvant bénéficier de l'excédent du compte de campagne, de clarifier les règles de publication des comptes des associations, de garantir le maintien de l'agrément des associations qui proposent l'enseignement de la conduite des véhicules dans le cadre de leur activité dans le domaine de l'insertion ou de la réinsertion sociale et professionnelle, lorsqu'elles deviennent des fondations, et d'aligner les obligations financières des associations ayant un objet cultuel et relevant de la loi de 1901 sur celles des associations relevant de la loi de 1905.

L'Assemblée nationale a conservé la plupart des apports du Sénat et a pris en compte nos réserves sur plusieurs articles. Elle a ainsi maintenu la suppression de l'article 4 bis empêchant les communes de faire usage du droit de préemption sur les biens cédés à titre gratuit aux associations ayant la capacité de recevoir des libéralités.

Elle a adopté une nouvelle rédaction de l'article 1 er prévoyant non plus la possibilité, pour les associations, de conserver un « excédent raisonnable », mais la définition, dans le cadre des conventions signées entre une collectivité et une association, des conditions dans lesquelles celle-ci peut conserver « tout ou partie d'une subvention n'ayant pas été intégralement consommée ».

L'article 1 er bis a également fait l'objet d'une nouvelle rédaction, prévoyant que le délai de versement d'une subvention à une association « est fixé à soixante jours à compter de la date de la notification de la décision portant attribution de la subvention à moins que l'autorité administrative, le cas échéant sous forme de convention, n'ait arrêté d'autres dates de versement ou n'ait subordonné le versement à la survenance d'un évènement déterminé ».

Tout en maintenant le souhait de permettre aux associations de bénéficier de facilités de trésorerie et d'une plus grande prévisibilité sur le versement des subventions qui leur ont été allouées, ces nouvelles rédactions préservent les compétences des collectivités territoriales et ne créent ni un droit à la conservation d'une subvention non consommée ni de nouvelles obligations disproportionnées ou de nature à bouleverser les liens établis entre les communes et le monde associatif.

Plus directement incompatible avec le texte soumis à l'examen du Sénat, le contenu de l'article 4, relatif à la mise à disposition de biens immobiliers saisis lors de procédures pénales à des associations, des fondations ou des organismes concourant aux objectifs de la politique d'aide au logement, figure désormais à l'article 4 de la loi du 8 avril 2021 améliorant l'efficacité de la justice de proximité et de la réponse pénale. Il y avait été introduit par la commission des lois du Sénat, en raison de l'incertitude entourant l'avenir la présente proposition de loi.

Par conséquent, bien que l'article 4 de la proposition ait été adopté conforme par les deux chambres, il a été nécessaire de le rappeler en discussion, conformément aux dispositions de l'article 44 bis du Règlement du Sénat, afin d'assurer la coordination avec la loi précitée, déjà en vigueur. Je vous en proposerai donc la suppression.

Puisque nous n'adoptons pas conforme le présent texte, je proposerai aussi deux amendements de coordination. En outre, un amendement de notre collègue Cécile Cukierman, qui tend à ajuster la période sur laquelle doit porter le rapport demandé à l'article 5 pour tenir compte du temps « perdu » depuis la première lecture me paraît opportun ; j'y serai favorable. Vu le nombre très faible d'articles restant en discussion, la fin de la navette devrait s'en trouver facilitée.

Le contexte de 2021 n'est plus celui de 2019 et le projet de loi confortant le respect des principes de la République et de lutte contre le séparatisme aura un impact important pour les associations. Ce texte, qui donne satisfaction à notre collègue Nathalie Goulet sur l'alignement des obligations de transparence financière pour toutes les associations qui gèrent une activité cultuelle, impose en outre le contrat d'engagement républicain aux associations qui sollicitent des subventions publiques. Cette réforme, que nous avons approuvée, permettra de lutter contre les dérives que l'on a pu constater dans une toute petite, mais malheureusement très active, partie du monde associatif.

Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports, chargée de la jeunesse et de l'engagement. - Je partage en effet la maternité de ce texte. Lorsqu'Édouard Philippe était Premier ministre, des travaux avaient été engagés avec le monde associatif pour formuler des propositions d'amélioration de la vie associative, en particulier sur la trésorerie. Les 59 propositions issues de cette concertation ont débouché sur la rédaction de ce texte, qui reprenait aussi des cavaliers législatifs censurés par le Conseil constitutionnel, dans le cadre de la loi du 27 janvier 2017 relative à l'égalité et à la citoyenneté.

Il s'agissait de trouver de nouveaux moyens pour hybrider les ressources des associations et pour asseoir leur stabilité dans le temps. C'est donc avec une certaine fierté et une certaine émotion que, trois ans plus tard, j'examine ce texte en tant que membre du Gouvernement en vue de son adoption prochaine. Je tiens à souligner la qualité des travaux et des échanges avec Mme la rapporteure autour de ce texte, qui a été enrichi pour tenir notamment compte des contraintes des collectivités. Celui-ci a donc vocation à améliorer la vie du monde associatif, qui trouvera de nouvelles ressources. Il a été adopté de manière transpartisane dans les deux chambres, car, s'il est un sujet qui peut nous unir, c'est la recherche de l'intérêt général et la préservation du monde associatif, ce trésor qui permet de faire vivre la culture et le lien social dans les territoires. On sait à quel point c'est essentiel dans la situation actuelle.

Ce texte est d'autant plus d'actualité que le monde associatif, qui a été d'une grande solidarité pendant la crise sanitaire, souffre d'une chute libre des créations d'association, en baisse de 40 %, et des adhésions, en baisse de 25 % à 50 %. Ce texte est donc un signal. Il faut apporter des réponses pertinentes sur la trésorerie et sur l'engagement, objet du texte sur l'accompagnement des dirigeants associatifs, qui vient d'être examiné ce matin juste avant notre réunion.

L'article 1 er permet de conserver l'excédent budgétaire. L'article 1 er bis , relatif au calendrier, est issu d'une concertation avec les élus locaux. L'article 2 permet aux associations de s'accorder des prêts entre elles. L'article 3 est relatif au Fonds de développement de la vie associative (FDVA). La proposition de loi permet en outre de mettre à la disposition des associations les biens mal acquis. Enfin, l'article 5 oblige le Gouvernement à remettre au Parlement un état des lieux de la fiscalité du monde associatif.

Vous l'aurez compris, ce texte, s'il est adopté, a vocation à entrer en vigueur très rapidement, c'est-à-dire, si possible, avant le cent-vingtième anniversaire de la loi de 1901.

M. François-Noël Buffet , président . - Nous allons nous y employer !

M. Patrick Kanner . - Nous allons dans le bon sens sur ce dossier complexe. Les allers-retours ont pris du temps, mais ils permettront d'aboutir à un accord en commission mixte paritaire. J'ai apprécié le propos de Mme la secrétaire d'État sur la loi Égalité et citoyenneté ; les cavaliers législatifs inclus dans ce texte, issus de recommandations du monde associatif, sont intégrés dans la présente proposition de loi. On termine donc mieux le quinquennat qu'on ne l'a commencé, car le monde associatif avait beaucoup souffert de la disparition des contrats aidés et de la réserve parlementaire.

Le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain est en revanche très défavorable au contrat d'engagement républicain. On se fait plaisir en pensant que, par une simple signature, une association respectera les principes de la République. L'engagement républicain des associations passe par autre chose qu'une signature purement symbolique...

Toutefois, vous aurez compris l'orientation de mon groupe à l'égard de ce texte.

M. Thani Mohamed Soilihi . - Le groupe Rassemblement des démocrates progressistes et indépendants (RDPI) soutient ce texte. J'en profite pour saluer le travail de coconstruction exemplaire, à l'occasion duquel l'Assemblée nationale a tenu compte des enrichissements du Sénat et vice-versa. Ce travail a été facilité par l'abnégation de Mme la secrétaire d'État, auteure de cette proposition de loi, et de notre rapporteure. Le groupe RDPI votera cette proposition de loi.

EXAMEN DES ARTICLES SELON LA PROCÉDURE DE LÉGISLATION EN COMMISSION

Article 1 er

L'article 1 er est adopté sans modification.

Article 1 er bis

L'article 1 er bis est adopté sans modification.

Article 1 er ter (supprimé)

L'article 1 er ter demeure supprimé.

Article 1 er quater (supprimé)

L'article 1 er quater demeure supprimé.

Article 3

L'article 3 est adopté sans modification.

Article 3 bis A

L'amendement rédactionnel COM-4 , accepté par le Gouvernement, est adopté.

L'article 3 bis A est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 3 bis B

L'amendement rédactionnel COM-5 , accepté par le Gouvernement, est adopté.

L'article 3 bis B est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 3 bis

Mme Jacqueline Eustache-Brinio , rapporteure . - L'amendement COM-2 vise à accroître le nombre de parlementaires au sein du comité consultatif départemental du FDVA. Nous souhaitons garder la proportion prévue entre les parlementaires et les autres membres. En outre, l'Assemblée nationale a prévu la désignation de parlementaires suppléants et a défini les modalités d'information de l'ensemble des parlementaires.

Demande de retrait ou avis défavorable.

Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État . - Les ajouts de l'Assemblée nationale me paraissent suffire et cet amendement me semble satisfait. Le Gouvernement émet donc le même avis : demande le retrait et, à défaut, avis défavorable.

L'amendement COM-2 n'est pas adopté.

L'article 3 bis est adopté sans modification.

Article 4

Mme Jacqueline Eustache-Brinio , rapporteure . - L'amendement COM-6 rectifié vise à supprimer l'article, dont le contenu a entre-temps été intégré dans une autre loi.

L'amendement COM-6 rectifié, accepté par le Gouvernement, est adopté et l'article 4 est supprimé.

Article 4 bis (supprimé)

L'article 4 bis demeure supprimé.

Article 5

L'amendement COM-3 , accepté par la rapporteure, est adopté, le Gouvernement s'en remettant à la sagesse du Sénat.

L'article 5 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 5 bis

M. Patrick Kanner . - Vous l'aurez remarqué, je n'ai pas redéposé, sur cet article, d'amendement visant à faciliter le fonctionnement du secteur associatif, afin de ne pas bloquer la procédure et de permettre une adoption définitive rapide.

L'article 5 bis est adopté sans modification.

Article 5 ter A (supprimé)

L'article 5 ter A demeure supprimé.

Article 5 ter B

L'article 5 ter B est adopté sans modification.

Article 5 ter C (supprimé)

L'article 5 ter C demeure supprimé.

Article 5 quater

L'article 5 quater est adopté sans modification.

Intitulé de la proposition de loi

L'intitulé de la proposition de loi est adopté sans modification.

La proposition de loi est adoptée, à l'unanimité, dans la rédaction issue des travaux de la commission.

M. François-Noël Buffet , président . - Félicitations, madame la secrétaire d'État, pour ce parcours législatif complet sur votre propre texte. Vous êtes peut-être la seule dans cette situation, sous la V e République...

Le sort des amendements examinés par la commission est retracé dans le tableau suivant :

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

Article 3 bis A
Dévolution du solde du compte de campagne lorsque le candidat a eu recours
à une association de financement électoral

Mme EUSTACHE-BRINIO, rapporteure

4

Rédactionnel

Adopté

Article 3 bis B
Dévolution du solde du compte de campagne lorsque le candidat a eu recours
à un mandataire personne physique

Mme EUSTACHE-BRINIO, rapporteure

5

Rédactionnel

Adopté

Article 3 bis
Présence de parlementaires dans les collèges départementaux du Fonds
pour le développement de la vie associative (FDVA)

Mme CUKIERMAN

2

Augmentation du nombre de parlementaires présent au sein du comité consultatif départemental du fonds pour le développement de la vie associative et précision des équilibres politiques à respecter dans leur nomination

Rejeté

Article 4
Mise à disposition de biens immobiliers saisis lors de procédures pénales à des associations,
des fondations ou des organismes concourant aux objectifs de la politique d'aide au logement

Mme EUSTACHE-BRINIO, rapporteure

6 rect.

Suppression par coordination avec un texte déjà entré en vigueur

Adopté

Article 5
Rapport du Gouvernement sur l'état des lieux de la fiscalité liée aux dons

Mme CUKIERMAN

3

Allongement de la période sur laquelle porte le rapport sur l'impact de la fiscalité sur les dons aux associations

Adopté

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