III. LES PRINCIPALES DISPOSITIONS ADOPTÉES PAR LE SÉNAT NON REPRISES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

Néanmoins, la plupart des initiatives du Sénat ont été rejetées par l'Assemblée nationale à l'occasion de la nouvelle lecture.

Le désaccord entre les deux assemblées concerne, en particulier, des mesures dont dépend l'équilibre financier futur de la sécurité sociale et résumées ci-après.

A. LE REJET DE LA TRAJECTOIRE FINANCIÈRE QUADRIENNALE PRÉSENTÉE PAR LE GOUVERNEMENT

Comme indiqué au B du I du présent rapport, l'Assemblée nationale a rétabli l'article 23 de ce PLFSS en modifiant l'annexe B afin de tenir compte de l'amélioration des prévisions économiques.

Néanmoins, cette trajectoire, quoique légèrement moins mauvaise que celle présentée en première lecture, reste fondamentalement incompatible avec le remboursement de la dette sociale au terme prévu du 31 décembre 2033. En effet, comme le montre le graphique suivant, le cumul des déficits prévus entre 2020 et 2025 dépasse de 43,6 milliards d'euros le plafond de 92 milliards d'euros voté l'année dernière au titre des années 2020 et suivantes 2 ( * ) .

Déficits cumulés 2020-2025 comparés au plafond de transfert à la Cades

(en milliards d'euros)

Source : Commission des affaires sociales du Sénat, d'après LFSS et PLFSS 2022 nouvelle lecture

Un tel niveau de déficits sans stratégie de retour à l'équilibre des comptes sociaux, pose un double problème :

- un problème de responsabilité vis-à-vis des générations futures que l'on va condamner à payer le prix de notre propre protection sociale ;

- et un problème de constitutionnalité , la date du 31 décembre 2033 pour l'apurement total de la dette sociale revêtant un caractère organique dont la loi de financement de la sécurité sociale doit assurer le respect chaque année 3 ( * ) , ce que méconnaît manifestement l'article 23 du présent texte.

Au bout du compte, cette nouvelle trajectoire financière, même légèrement améliorée, reste donc inacceptable pour la commission des affaires sociales.

B. LE REFUS PAR LE SÉNAT DU FINANCEMENT PAR LA CADES D'UNE PARTIE DE LA DETTE HOSPITALIÈRE

L'article 5 du PLFSS pour 2022 prévoit de modifier les conditions de signature des contrats de « reprise de dette » des établissements de santé en permettant une signature avec les agences régionales de santé jusqu'en 2028, dans la ligne des dispositions de la loi relative à la dette sociale et à l'autonomie .

Pour mémoire, à travers des dotations de la Caisse nationale d'assurance maladie (Cnam) qui sert en l'espèce de courroie de transmission, la Caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades) doit reprendre l'équivalent de 13 milliards d'euros correspondant aux encours de dettes et aux frais financiers de ceux-ci, les dotations concernant principalement les hôpitaux.

La commission des affaires sociales avait interpellé le Gouvernement et l'Assemblée nationale lors de l'examen de la loi relative à la dette sociale et à l'autonomie sur ce dispositif de reprise. La commission estimait qu'il n'appartenait à la Cades d'assumer la reprise d'une dette liée non pas à des déficits sociaux mais le fait d'investissements essentiellement immobiliers issus de plans d'initiative gouvernementale . La commission avait été suivie par le Sénat sur cette position.

Elle avait réitéré son opposition lors de l'examen de l'article 50 de la LFSS pour 2021, qui a sensiblement distendu le lien établi entre les dotations de la Cnam et la couverture des dettes passées des établissements de santé afin de permettre le financement de nouveaux investissements par les établissements de santé .

En cohérence avec sa position constante sur ces dispositions, la commission des affaires sociales a donc adopté un amendement de suppression de cet article 5.

Si la commission partage bien évidemment le souci de rétablissement des capacités d'autofinancement des établissements de santé du service public hospitalier , afin de permettre notamment à ceux-ci de réaliser des investissements courants, elle ne peut adopter un tel dispositif qui dévoie la raison d'être de la Cades et la possibilité même d'éteindre une dette sociale qui deviendrait un « fourre-tout ».

La commission renouvelle enfin ses réserves importantes quant à la conformité de cet article et des dispositions de l'article 50 de la LFSS pour 2021 et de la loi du 7 août 2020 à la Constitution . En effet, d'une part, il contrevient à l'article 4 bis de l'ordonnance n° 95-50 du 24 janvier 1996 relative à la dette sociale, de valeur organique en mêlant à la dette sociale des charges qui lui sont étrangères et, d'autre part, il ne se rattache pas au domaine des lois de financement de la sécurité sociale.

Elle ne peut donc accepter le rétablissement de l'article 5 par l'Assemblée nationale en nouvelle lecture.


* 2 Article 1 er de la loi n° 2020-992 du 7 août 2020 relative à la dette sociale et à l'autonomie.

* 3 Cf. premier et troisième alinéas de l'article 4 bis de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996.

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